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La chimie moderne, à haute valeur ajoutée, débuta par la fabrication de colorants artificiels et la synthèse
rentable de colorants naturels; les goudrons, résidus de la cokéfaction de la houille destinée aux hauts
fourneaux, se révélèrent des éléments indispensables à la chimie des colorants. William Henry Perkin
découvrit le premier colorant synthétique, la mauvéine, en 1856 à Londres; Emmanuel Verguin développa en
1858 en France une synthèse de la fuchsine, un colorant rouge qui fut très bien accueilli par les teintureries
de drap. Le teinturier en soie Alexander Clavel se mit à la fabrication de colorants dérivés du goudron à Bâle
en 1859. Il vendit son entreprise à Bindschedler & Busch en 1873, qui en firent la Gesellschaft für chemische
Industrie Basel (Ciba) en 1884. Clavel fut imité par les maisons J.R. Geigy (Geigy) en 1859 déjà, J.G. Dollfuss
en 1862 (Durand & Huguenin dès 1872), Gerber & Uhlmann en 1864 (intégrée à Ciba en 1898), Kern &
Sandoz en 1886 (Sandoz). La place de Bâle offrait de gros avantages: la soierie locale et l'indiennerie
alsacienne constituaient un marché intéressant, le Rhin permettait l'élimination des déchets toxiques et de
bonnes relations ferroviaires assuraient l'approvisionnement en matières premières en provenance de France
et d'Allemagne. En outre, la Suisse n'ayant pas de législation sur les brevets relatifs aux procédés chimiques
(jusqu'en 1907), les Bâlois pouvaient copier librement les produits, contrairement à leurs concurrents
étrangers. On créa en 1882 à Zurich, pour la défense des intérêts d'une branche en plein essor, la Société
suisse des industries chimiques (SSIC).
Une avancée technique substantielle eut un fort impact sur la consolidation de la chimie en Suisse: la
production de courant électrique à bon marché au moyen de génératrices construites sur le principe de la
dynamo de Siemens (1866) fut en effet à l'origine du développement, vers la fin du XIXe s., de l'électrochimie,
dont la base avait été jetée au début du siècle avec la pile voltaïque. Des entreprises électrochimiques
s'établirent à proximité des nouvelles centrales. L'AIAG (Aluminium-Industrie AG, Alusuisse) s'installa à
Neuhausen am Rheinfall en 1888 et à Chippis en Valais, pour produire de l'aluminium par électrolyse du
minerai dans un bain de fusion. Une grande fabrique de Vallorbe (1890) et un établissement de moindre taille
sis à Turgi (1895) fournissaient du chlorure de potassium (deuxième produit par ordre d'importance de
l'électrochimie à ses débuts). Mettant en pratique la description faite par le chercheur français Ferdinand
Frédéric Henri Moissan en 1892, AIAG réalisa la production industrielle de carbure de calcium dans un four à
arc en 1894. D'autres entreprises suivirent, dont en premier lieu Lonza à Gampel à partir de 1898, qui réussit
à produire des engrais chimiques en quantité industrielle dès 1915. La Volta, à Vernier, ainsi que la Société
des usines de produits chimiques de Monthey (reprise par Ciba en 1904) fabriquaient du chlore et de la soude
caustique à partir de solutions d'eau salée.
La production de soie artificielle date aussi de la fin du XIXe s. Les fabriques de Spreitenbach et de Glattbrugg,
fondées vers 1890 et qui appliquaient le procédé Chardonnet, fermèrent leurs portes en 1905 et 1906. La
Société de la viscose (Viscosuisse) en revanche, créée en 1906 à Emmenbrücke, prospéra. D'autres
entreprises s'y ajoutèrent au milieu des années 1920, dont l'ancienne broderie Feldmühle de Rorschach.
Vers 1915, Lonza commença à utiliser l'acétylène comme élément de base pour la synthèse de substrats
chimiques, tels l'aldéhyde acétique, l'acide acétique, l'alcool éthylique, ainsi que d'autres produits
organiques. Dans les années 1960, l'obtention de l'acétylène à partir du carbure de calcium fit place à une
méthode fondée sur le craquage de l'essence, qui fournissait en outre de l'hydrogène et de l'éthylène. La
synthèse d'aldéhyde acétique à partir d'acétylène ou d'éthylène selon le procédé Wacker donna aussi accès
aux bases azotées, surtout aux corps pyridiniques. A la même époque, la synthèse à haute température de
l'acide cyanhydrique à partir d'ammoniac et de méthane permit d'obtenir d'autres composés azotés, lesquels
furent de première importance pour la chimie des colorants, mais surtout pour la chimie pharmaceutique
bâloise en plein essor. La chimie de l'acétylène établie en Valais ouvrit la voie aux techniques de synthèses
appliquées ultérieurement par Hoffmann-La Roche dans le domaine des vitamines et des caroténoïdes, ainsi
que par Givaudan-Roure pour certains parfums.
Auteur(e): Hans-Jürgen Hansen / AN