Dossier pédagogique

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L’effet Leidenfrost
ULB – Faculté des Sciences – Département de Physique
Lancelot Semal (avec la participation de Caroline Jonas et Colin Stercks)
Tout le monde sait que l’eau bout à 100°C, mais savez-vous ce qui se passe à des températures plus élevées? Des gouttes
d’eau déposées sur des plaques à 200 présentent une propriété étonnante et souvent méconnue du grand public dont nous
allons vous parler : l’effet Leidenfrost.
De quoi s’agit-il ?
Aussi appelé caléfaction, l’effet Leidenfrost décrit notamment le comportement de gouttes d’eau déposées sur une surface
chauffée à haute température. Au-dessus d’une certaine température critique située aux alentours de 200°C, au lieu de
s’évaporer instantanément comme à 120°C, les gouttelettes
d’eau lévitent et restent en suspension au-
dessus de la
surface chaude parfois pendant plusieurs minutes ! Le comportement des gouttes démontre alors cette suspension : elles
glissent sans frottement sur la poêle et ne s’évaporent plus aussi rapidement qu’avant. Notre atelier vous montrera ce
phénomène étonnant que partage en réalité tous les liquides et vous expliquera comment il est possible.
Un peu d’histoire
Le phénomène a été découvert en 1756 par Johann Gottlob Leidenfrost, un Docteur allemand qui lui a également légué son
nom. Il le décrit pour la première fois dans son livre : Traité au sujet de certaines qualités de l’eau. Mais le sujet de recherche
tombe vite dans l’oubli et il faudra attendre 1950 pour que l’on recommence à s’intéresser à cet effet en raison de ses
implications industrielles.
Comment cela marche-t-il ?
Quand on dépose une goutte d’eau sur une plaque chauffée à 100°C, la chaleur de la poêle est transférée à la goutte par
contact. Comme vous le savez, à 100°C, l’eau se transforme en vapeur. Ainsi, la goutte d’eau s’évapore. Plus on augmente
la température, plus le phénomène d’évaporation s’accélère car la poêle, plus chaude, peut transférer plus de chaleur par
unité de temps, l’évaporation des gouttes est alors presque instantanée. Etonnamment, ce phénomène a ses limites et c’est
l`a que cela devient intéressant. Au-delà d’une certaine température, le temps de vie des gouttes augmente. En fait, l’eau
en surface de la goutte s’évapore tellement vite qu’un film de vapeur se cr ée entre la plaque chauffante et la goutte. Il n’y
a donc plus de contact entre la goutte et la source de chaleur : elle est en suspension. Nos expériences nous ont permis de
mettre en évidence ce phénomène en mesurant le temps de vie de gouttes sur une poêle en fonction de la température.
Voici les résultats que nous avons obtenus (le point critique étant ici à 200°C ) :
Printemps des Sciences 2016 – Bruxelles
Ce phénomène dépend toutefois d’un très grand nombre de facteurs comme la nature du liquide, la pression ambiante, le
volume du liquide déposé, la méthode de déposition des gouttes, le matériau constituant la plaque et de ses propriétés
thermiques. De ce fait il n’existe pour l’instant aucun modèle théorique absolu donnant, par exemple, une formule pour la
température exacte de Leidenfrost, ou pour le temps de vie des gouttes en fonction des conditions expérimentales. Cet effet
constitue donc un sujet de recherche d’actualité.
L’expérience à faire chez soi
Attention : Pour éviter tout danger ne réaliser l’expérience qu’en présence d’un adulte.
Faîtes chauffer une poêle et puis
posez une goutte d’eau dessus. Si la poêle est assez chaude, vous pourrez observer la goutte léviter, calmement, à la
surface de la poêle.
Applications
Cet effet possède beaucoup d’applications pratiques. Premièrement, en cuisine ! De grands cuisiniers professionnels se
servent de l’effet Leidenfrost pour déterminer facilement la température de leur poêle. Dans l’industrie, on cherche à
supprimer l’effet Leidenfrost car il
empêche le refroidissement efficace de surfaces très chaudes, ce qui est nécessaire
dans les centrales nucléaires et les usines métallurgiques. Cet effet est donc actuellement étudié dans le but de trouver des
méthodes pour l’amenuiser (application d’un champ électrique entre la
goutte d’eau et la surface, utilisation de
nanostructures sur la surface, etc.). Par ailleurs, cet effet permet de mettre en place plusieurs expériences amusantes
notamment le fait de pouvoir marcher sur des braises ou de plonger sa main dans de l’azote liquide `a une température
d’environ -200°C (et la retirer en bon état, surtout).
Printemps des Sciences 2016 – Bruxelles
UNIVERSITÉ LIBRE DE BRUXELLES - FACULTÉ DES SCIENCES
L’Effet Leidenfrost
DÉPARTEMENT DE PHYSIQUE
Semal Lancelot
Une dynamique de lévitation en deux étapes
Une propriété étonnante des liquides :
Comment déterminer si une poêle est suffisamment chaude
pour saisir de la viande sans recourir à un thermomètre
infrarouge ? Il suffit d’utiliser une propriété des liquides :
l'effet Leidenfrost ou phénomène de caléfaction.
Goutte d'eau
Vapeur d'eau
1) Le rayon de la goutte > la longueur capilaire a. La goutte
est alors aplatie et ne s'évapore que par sa surface
inférieure. L'effet de lévitation est maximal.
2) Le rayon de la goutte < la longueur capilaire a. La goutte
est quasi sphérique et s'évapore sur la totalité de sa surface.
Le modèle théorique atteint ses limites et ne peut expliquer
avec précision les phénomènes observés.
1)
2)
0.2 mm
> 200 °C
La goutte d'eau lévitera sur une couche de vapeur si la
température de la poêle dépasse environ 200 °C.
Comment cela fonctionne-t-il ?
Lorsque le liquide est chauffé, il passe par une série d'étapes
successives. Si la température du support est suffisamment
élevée, la partie inférieure de la goutte se vaporise de
manière quasi instantannée en un film de vapeur qui l’isole
thermiquement du support. Il se crée un équilibre
dynamique qui pose la goutte en lévitation. Elle ne s’évapore
plus aussi vite qu’avant car le transfert de chaleur n'est plus
direct comme pour le phénomène isolant du double vitrage.
Dupeux, 2013
Des implications critiques:
Dans la métallurgie ou dans les centrales nucléaires, le
phénomène de caléfaction doit être absolument maîtrisé
afin d'éviter l'isolement thermique de la source de chaleur
et permettre un refroidissement optimal.
C’est aussi cet effet qui protège une main plongée dans de
l’azote liquide entre -210 °C et -195 °C ! Ici, c’est la main qui
agit comme source de chaleur car sa température (37°C) est
largement supérieure à la température de Leidenfrost de
l’azote liquide. En se vaporisant, l'azote forme une couche
de gaz isolante autour de la main qui la protège brièvement
d'une congélation instantannée.
Bernardin & Mudawar, 1999
Un phénomène multifactoriel :
Aucun modèle actuel n'explique totalement l'effet car un
grand nombre de facteurs intervient :

La nature du fluide

La pression ambiante

Le volume du liquide

La méthode de déposition

L'état de surface du solide sous-jacent

Les propriétés thermiques du solide sous-jacent
Projet réalisé avec la collaboration de Caroline Jonas et Colin Stercks.
Question :
Que se passerait-il si la
main portait une bague ?
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