Atelier « Anthropologie du numérique »
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vision mercantile. Ceci a permis d’aboutir à la mention du récent
(puisque promulgué en mai 2010 à Paris) « Manifeste des
Humanités digitales ». Ensuite, Nadine Wanono a expliqué en quoi
le numérique modifie la relation à l’environnement, permet de
repenser les systèmes techniques et sociaux et a introduit la
distinction entre la part irréductible et la part contingente de ses
usages. En insistant, elle aussi, sur la lignée dans laquelle s’inscrit
Bernard Stiegler quand il indique que l’intérêt pour le numérique se
trouve dans la prise en compte des traces et des outils dans la
production du savoir, en l’occurrence celle d’André-Georges
Haudricourt, André Leroi-Gourhan, Georges Simondon, Bruno
Latour, elle n’a que mieux mis en avant l’impasse, la dénégation du
rôle des techniques dans le milieu universitaire. L’usage de ces
dernières, dans une perspective stieglerienne donc, a été envisagé à
un croisement entre dynamiques vitales et aspects sociaux, ceci
aboutissant à une coconstruction entre humains et techniques, dans
un processus d’extériorisation, un processus de mémoire (désigné
comme épiphylogénétique). Ces réflexions ont débouché sur des
considérations politiques à propos de l’idée de baisse de la « valeur
esprit », décelée par Paul Valéry dans les années 1930, reprise par
Ars Industrialis et visant à mettre l’accent sur le danger du
capitalisme pulsionnel en tant qu’il cherche à capitaliser sur l’esprit
(ce qui a permis de renvoyer à la distinction entre information et
connaissance).
Durant la première intervention de la journée, intitulée
« L’éclatement de l’article. À nouveaux formats d’écriture,
nouveaux usages de la recherche », Sophie Pène, directrice de la
recherche à l’École nationale supérieure de création industrielle, a
tracé, par le biais d’une histoire des technologies industrielles au
XX
e
siècle, une histoire des formes de présentation de l’œuvre, de la
recherche à travers l’analyse du travail sur l’exposition, le curating,
utilisant les technologies informatiques notamment. Il s’agit donc
d’une réflexion sur la manière dont l’intangible du matériau de la
création est pensé et recomposé comme une scénographie. Est
posée ainsi la question de l’intention, de l’agencement des données
du travail, du rapport entre désir du travail et processus