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Conférence de Barcelone :
des modèles publicitaires pour le web
Le 25 février dernier, à Barcelone, l’Association Mondiale
des Journaux (AMJ) et l’IFRA ont proposé une conférence sur
le thème « Stratégies publicitaires : comment obtenir des
revenus sur le Web ? ». Cette manifestation a permis d’assis-
ter aux comptes rendus d’expériences de journaux électroni-
ques européens et d’avoir un aperçu des tout derniers déve-
loppements américains en la matière. Voici un résumé des
exposés donnés par des experts de l’édition électronique lors
de cet événement présidé par Constantine Kamaras, directeur
du Newspaper Management and Marketing Bureau (AMJ) et
par Livia Burkhardt, responsable de projet « édition électroni-
que » au sein de l’IFRA.
Selon les conférenciers s’exprimant à cette conférence,
l’année 1998 verra les revenus sur le Web exploser. Que ce
soit aux Etats-Unis ou en Europe, les éditeurs et responsa-
bles marketing sont optimistes.
Pour David Morgan (directeur de Real Media, aux
Etats-Unis), étant donné la croissance exponentielle prévue
aux Etats-Unis d’ici la fin de l’année pour les revenus de la
publicité électronique, prendre exemple sur l’expérience
américaine pourrait constituer une bonne stratégie. Cepen-
dant, parmi les quarante premiers sites Web en termes de
chiffre d’affaires publicitaires, seuls trois sont des jour-
naux et ceux-ci ne figurent même pas dans les dix premiers.
Les journaux feraient donc bien de tirer les leçons de
l’expérience de ces autres sociétés. Bien sûr, le marché
n’est pas le même et il est probablement inutile d’espérer
gagner des millions si vous ne vous appelez pas Dell ou
Amazon.com. Les journaux pourraient, dans une première
étape, mieux tirer parti de leur métier principal et, par
exemple, mieux exploiter l’information qu’ils produisent.
Bâtir un contenu rédactionnel
sans perdre de vue les annonceurs
Les cas présentés un à un ont montré que le seul moyen
de capter l’attention des annonceurs était de proposer des
contextes intéressants pour leurs annonces. David Morgan
a cité un exemple de la façon dont le site d’informations
technologiques « Good Morning, Silicon Valley » de San
Jose Mercury News avait suivi ce principe, en changeant de
contenu plusieurs fois par jour pour attirer plus d’annon-
ceurs. Aftonbladet (Suède), rp-online (Rheinische Post en
Allemagne), The Irish Times et Grupo Recoletos (Espagne)
ont tous des contenus spécifiques couvrant toute une
panoplie de sujets du sport, en passant par les voyages, la
santé et la finance. Des domaines qui intéressent aussi bien
les lecteurs que les annonceurs.
Les sites s’appuyant sur des événements particuliers ont
prouvé être plus lucratifs que les journaux en ligne classi-
ques. Le site World Series, par exemple, a attiré sept
millions d’adeptes du baseball en deux heures seulement.
Le « Washington Post » a sauté sur l’affaire Monica
Lewinsky pour faire grimper son lectorat en ligne et le
nombre correspondant d’impressions de pages de son site
Web. Et, lorsqu’il a acheté des bannières publicitaires sur
le site du « New York Times » faisant référence à son
propre site, le trafic a atteint un rythme de croisière de 8
millions de lecteurs en ligne par jour. C’était un pari
gagnant pour les deux parties : le « New York Times » a
gagné de l’argent et le « Washington Post » des visites sur
son site.
Le trafic impose sa loi
Le trafic va de pair avec le contenu. Aftonbladet n’a pas
encore complètement abandonné la devise « le contenu est
roi », mais y a ajouté « le trafic est roi ». Et si une chose
intéresse les annonceurs, c’est bien la taille du public qu’ils
atteignent.
Ces données doivent être analysées. L’époque du comp-
tage des « hits » (nombre de fois qu’une donnée est chargée
à partir d’une page Web) est révolue, a annoncé Thomas
Breyer (responsable de projet multimédia du BDZV en
Allemagne). Il existe aussi les visiteurs « anonymes ». Il
est fréquent d’utiliser des serveurs cache pour améliorer les
performances et réduire le trafic global du Web. Prenons un
exemple : le directeur de Mercedes à Stuttgart entre dans
son bureau tôt le matin pour lire la version en ligne d’un
journal de Hambourg. Si dans la journée, il est le premier
de sa société à lire ce journal, il génère un enregistrement
dans le serveur de l’entreprise. Lorsque les autres employés
arrivent, une copie du journal en ligne est déjà disponible
dans la mémoire cache du serveur de Mercedes. Ainsi,
comme le souligne Thomas Breyer, plusieurs centaines de
personnes lisent cette même copie sans laisser trace de leur
Pour le jour de la St. Patrick, The Irish Times a publié une
rubrique spéciale sur son site Web. On peut entre autres y
acheter des T-shirts, des posters et des épinglettes porte-bon-
heur. Le paiement s’effectue par carte de crédit.
passage sur le serveur du journal de Hambourg. L’associa-
tion allemande des éditeurs de journaux, le BDZV, s’est
penchée sur la recherche d’une solution de comptage des
lecteurs. Cette solution passerait par l’intégration d’un
élément dynamique dans chaque page html (par exemple
un pixel transparent) qui serait automatiquement transféré
au serveur du journal lors de la visite du site Web.
Que faire du lecteur « multiple » qui revient parfois
plusieurs fois par jour sur un site Web pour plus d’informa-
tions ? Pour résoudre ce problème, il faudrait pouvoir
compter le nombre de lecteurs « uniques », ce qui débou-
che au problème suivant : comment les repérer ? L’enregis-
trement de leurs coordonnées (nom, prénom, etc.) serait
une possibilité. Il s’agit d’une solution habituellement bien
acceptée aux Etats-Unis – car les lecteurs concernés ob-
tiennent quelque chose en retour – mais qui tombe sous le
coup des lois sur la vie privée dans les pays européens. Et
ce n’est pas seulement le côté légal qui doit être pris en
compte, mais également le problème des mots de passe que
les lecteurs détestent. Tout comme les numéros d’identifi-
cation et autres codes secrets (comme pour les cartes de
crédit par exemple), ces mots de passe sont faciles à
oublier. Alors que font les lecteurs ? Ils se ré-enregistrent
sous un nouveau mot de passe (aux Etats-Unis, on trouve
des quantités astronomiques de « Mickeys » et autres
« Goofys »). Là encore, les statistiques ne sont donc plus
valables.
Par conséquent, il faut absolument définir des paramè-
tres de mesure standardisés : en Allemagne et en Suède, le
comptage des visualisations et des visites de sites Web l’a
emporté sur d’autres méthodes de calcul (en Irlande, la
méthode des « hits » et des « clics de souris » est toujours
appliquée), mais la validation par un organisme d’audit
indépendant serait la garantie pour les annonceurs d’un
comptage correct.
Des politiques de prix différentes
Une fois que vous disposez des chiffres de fréquentation
de votre site Web, que facturez-vous aux annonceurs pour
l’accès à ce public ? Basez-vous votre tarif sur le coût au
mille ou sur le taux de navigation ? Real Media affirme que
vous ne pouvez pas entrer en concurrence avec les grands
sur les prix déterminés par les coûts au mille et si vous
pouviez le faire, le revenu correspondant serait dérisoire
par rapport au nombre de visiteurs qu’un site de journal
moyen touche. Le BDZV ne prend même pas en compte le
taux de navigation puisque l’éditeur ne peut pas obliger le
lecteur à regarder l’annonce.
Que faites-vous avec un annonceur qui insiste pour que
le prix de l’annonce soit basé sur un pourcentage des ventes
réalisées grâce à cette annonce ? Si vous refusez, il ira voir
ailleurs. Si vous disposez de données démographiques sur
votre lectorat, vous pouvez exiger des prix plus élevés pour
un service personnalisé. Aux Etats-Unis, beaucoup de
négociations s’effectuent en fonction du code postal.
Si vous voulez obtenir le contrat, soyez flexibles.
Abandonnez ce modèle « prix fixe, espace fixe » avec
lequel vous avez peut-être commencé s’il ne fonctionne
pas. Peut-être devriez-vous proposer une politique de prix
mixte, associant un tarif de base à une commission par
transaction.
Autres sources de revenus
Les journaux qui parviennent à convaincre leurs lec-
teurs de s’abonner à leur site Web sont rares. En plus
des modèles publicitaires détaillés dans cet article, que
peuvent faire les éditeurs pour encaisser d’autres reve-
nus ? Voici certains conseils du « Rheinische Post » :
Soyez un fournisseur d’accès à la fois pour les
clients privés et les clients commerciaux.
Agissez comme une agence qui conçoit et héberge
des pages d’accueil pour d’autres sociétés et qui
développe des supports publicitaires.
Prenez des commissions sur les transactions (vente
de tickets et de voyages)
Vendez un contenu rédactionnel ciblé (tel que des
informations en japonais pour la communauté japo-
naise de Düsseldorf).
Vendez des informations à d’autres fournisseurs de
contenu en ligne.
La publicité sur le Web peut être extrêmement variée : sur la
page d’accueil du site Internet du Rheinische Post, rp-online,
des annonces sous forme de cartes à gratter virtuelles sont
actuellement testées. Tout en haut, apparaît une publicité pour
une carte de téléphone ; les slogans publicitaire défilent au-des-
sus des bannières.
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D’où vient l’argent ?
Aujourd’hui, les éditeurs ne sont pas seulement
confrontés au problème de savoir comment générer plus de
revenus. Ils font aussi face à un nombre croissant de sites
qui font concurrence au leur, faisant s’effondrer les coûts
au mille.
Ils doivent déjouer ceux qui font chuter les prix. Mais
comment ? « En sponsorisant l’offre », affirme rp-online.
« Sponsoriser des rubriques entières en même temps.
Développer les sites « flash », ces sites diffusés à l’occa-
sion d’événements particuliers comme ceux dédiés au
CEBIT ou à la Coupe du Monde de Football par exemple ».
The Irish Times a aussi profité des avantages du sponsoring
de grosses sociétés irlandaises telles que Aer Lingus et
Guinness. Le supplément du jour de la St. Patrick s’est
avéré être si populaire l’année dernière qu’ils ont dû
installer un serveur simplement pour gérer le trafic attendu
en 1998.
Le sponsoring est un modèle qu’utilise également Afton-
bladet avec succès, bien que ce jounal travaille aussi avec
des présentations (pour la météo et la « question du jour »)
et des interstices (fenêtres qui s’affichent à l’écran pendant
le téléchargement d’une page Web). Près de 65 % de ses
revenus sont issus des bannières publicitaires.
Démarchez vos annonceurs
Très peu de sociétés disposent d’un budget publicitaire
Internet et les annonceurs manquent souvent de connais-
sances sur les possibilités de publicité sur le Web. Il faut
évangéliser, a déclaré Eduardo Bendala (responsable des
médias électroniques chez Grupo Recoletos), qui incite les
publicitaires à tenter leur chance dans le cyberespace pour
voir ce qui arrive.
Voici quelques moyens de gagner des clients plus
facilement : Respectez les standards, ces formats d’annon-
ces (en pixels) acceptés à échelle nationale et internatio-
nale. Jusqu’à présent, la taille de bannière la plus utilisée
était de 468 x 60 pixels. Melinda Gipson, de l’Association
Américaine des Journaux (NAA), a déclaré qu’aux Etats-
Unis, le format des annonces est en train de diminuer et la
tendance est aux annonces de forme carrée situées sur le
côté droit de la page. D’après rp-online, les annonceurs
sont bien plus susceptibles de passer commande s’ils
peuvent utiliser leurs annonces paraissant sous forme
imprimée dans le journal.
Des efforts sur la fidélisation
Christel Hébert (directrice marketing de rp-online,
Rheinische Post en Allemagne) conseille de faire plus que
les autres. Si les journaux concurrents donnent à leurs
clients leur taux de navigation à la fin du mois ou de la
semaine, fournissez le vôtre en temps réel. Laissez les
annonceurs constater la baisse de rentabilité de leurs
bannières pour leur permettre d’optimiser leur campagne et
de changer ces bannières autant de fois qu’il le faut pour
satisfaire aux attentes des lecteurs.
Il convient également de donner la possibilité aux
annonceurs de cibler leur public selon un créneau horaire
spécifique s’ils le souhaitent. Grupo Recoletos a observé
que les annonceurs aimaient particulièrement les informa-
tions économiques de 8 à 9 heures et celles après 23 heures
pour toucher les surfeurs du Net.
Les annonceurs ont soif de publics correspondant à des
« niches » du marché. L’expérience de The Irish Times
avec le promoteur du film « Some Mother’s Son » a eu un
Page d’accueil d’Aftonbladet : les différents « boutons » per-
mettent d’accéder directement à des informations sur des sujets
particuliers.
Glossaire de la publicité en ligne
Thomas Breyer de
BDZV
en Allemagne et Melinda
Gipson de
l’Association Américaine des Journaux
(NAA)
proposent des termes :
Taux de navigation (défini par le nombre de clics) :
nous indique combien de personnes sont attirées par
une bannière au point de cliquer dessus.
Interstice : fenêtre qui s’affiche automatiquement à
l’écran lors du téléchargement d’une page Web.
Impression de pages : indique le nombre de pages
consultées sur votre site Web. C’est la même chose que
la « Page Request » de
l’Internet Advertising Bureau
.
Visite : définit l’utilisateur extérieur au site Web
mesuré.
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double effet. Le producteur du film Castle Rock Films a été
stupéfié par la réaction du public visé, c’est-à-dire les gens
qui s’intéressent à la question irlandaise aux Etats-Unis. Le
site a enregistré un taux de navigation de 15 %. D’après
Seamus Conaty (directeur de la publication électronique
chez The Irish Times), le site a développé un environne-
ment original, accueillant à cette occasion plusieurs grou-
pes de discussion actifs qui souhaitaient débattre des
questions d’intérêt irlandais.
La créativité est la clé du succès comme l’absence
d’originalité une garantie d’échec
Les technologies disponibles permettent de multiplier
les propositions faites aux internautes. Pourquoi ne pas
utiliser par exemple des bannières sonores au lieu du vieux
standard ou penser, autre exemple, à une bannière conçue
sous la forme de carte à gratter ? rp-online teste ce mois-ci
quelque chose d’inconnu sur le marché allemand.
Un autre projet créatif, même si un peu plus difficile à
mettre en œuvre, le « Live View of Dublin ». Cette
réalisation propose une vidéo du Pont O’Connell qui est
actualisée toutes les 30 secondes. Le site est sponsorisé par
Telecom. Seamus Conaty raconte que The Irish Times a
reçu de nombreuses réactions de visiteurs du site dans le
monde entier. A l’exemple de ce courrier électronique d’un
expatrié basé en Californie qui racontait avoir passé la
soirée précédente à observer (via Internet) la circulation sur
le Pont O’Connell, depuis l’autre côté du Pacifique.
Contrairement à toute attente, son commentaire a été :
« Quel gâchis de cyberespace ! ».
Une autre anecdote associée à ce site concerne un
employé du journal qui revenait de déjeuner lorsqu’il a vu
un homme sur le Pont avec un téléphone portable à l’oreille
et sautillant sur le siège de sa voiture en criant « Est-ce que
tu peux me voir ? ». L’employé a ensuite compris que
l’homme parlait à son frère basé à Sydney, en Australie.
Il existe des moyens de faire de l’argent sur Internet. Et,
bien que les possibilités dans ce domaine semblent limitées
en comparaison avec la publicité imprimée traditionnelle,
en particulier si plusieurs annonceurs réclament le même
type d’espace publicitaire, les sources de revenus en ligne
sont aussi infinies que l’est notre imagination.Jamie Davies
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