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Analyse thématique l Février 2016
Le deuxième élément qui explique pourquoi l’inflation
détermine le niveau des taux est la politique monétaire.
Depuis les années 80, les banques centrales américaine
et européenne mènent une lutte contre l’inflation.
En effet, une inflation élevée entrave la croissance
économique, car elle va de pair avec une incertitude
et une volatilité élevées. Cette situation complique une
bonne estimation de la rentabilité des projets futurs,
ce qui finit par freiner les investissements et, ensuite
aussi, la croissance et l’emploi. En réduisant la quantité
monétaire et en majorant ainsi les taux à court terme,
l’inflation a finalement été jugulée dans les années
90. Le graphique 2 présente la baisse tendancielle
de l’inflation au cours des années 90, qui se stabilise
ensuite aux environs de 2 %. La crise bancaire a fait
apparaître de la volatilité mais, au cours de la période
2010-2012, l’inflation s’est de nouveau stabilisée à
son niveau cible. Depuis 2014, elle est en recul et l’on
a même enregistré un bref épisode de déflation. La
baisse du prix du pétrole et les séquelles de la crise de
l’euro en sont une explication.
Cette période récente de diminution de l’inflation et
de déflation a également suscité une forte réaction de
la BCE. De la même manière qu’elle ne désire pas une
inflation supérieure à 2 ou 3 %, elle ne veut pas non plus
une inflation nettement inférieure à 2 %. Cela indique
une fois de plus une demande domestique trop faible,
ce qui ralentit l’économie. En outre, des baisses de prix
peuvent induire un report des achats, ce qui ralentit
encore plus la croissance économique. En réaction à
cette inflation trop basse, la BCE a adapté sa politique
en matière de marché monétaire : elle a abaissé son
taux et a créé de l’argent. L’objectif de cette politique
monétaire est, d’une part, de faire consommer le
consommateur (rendre l’épargne inintéressante) et,
d’autre part, de pousser les institutions financières à
octroyer plus de crédits aux entreprises. Concrètement,
elle mène cette politique, appelée Quantitative Easing
(QE), via différents canaux :
• l’abaissement du taux directeur, d’abord à -0,2 %
et, depuis décembre 2015, à -0,3 % (taux négatif) ;
• la mise en place d’un programme d’achat,
substantiel et long, d’obligations à long terme.
En décembre 2015, ce programme d’achat a été
prolongé jusqu’en 2017.
En abaissant le taux de dépôt directeur à des niveaux
négatifs, la BCE fait baisser tous les taux d’intérêt et
la plupart des taux d’intérêt à court terme deviennent
aussi négatifs. Les taux d’intérêt à long terme sont de
nouveau amenés à diminuer par ce programme d’achat
d’envergure. En effet, la BCE achète chaque mois pour
plus de 45 milliards d’euros d’obligations d’État et crée
ainsi une grande demande exceptionnelle d’obligations
d’État. Dans une telle situation, le prix des obligations
ne peut qu’augmenter, mais si le prix augmente, le taux
baisse. Comme le programme d’achat durera jusqu’en
2017, il subsiste une pression constante à la baisse
sur le taux à long terme des obligations d’État et les
taux d’intérêt à court terme restent négatifs sur les
marchés.
En réaction à cette inflation trop
basse, la BCE a adapté sa politique
en matière de marché monétaire :
elle a abaissé son taux et a créé de
l’argent.
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