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MISE AU POINT SUR LA RYTHMOLOGIE
INTERVENTIONNELLE
La fibrillation Atriale
12:00 Dr F. Halimi (Hôpital Privé Parly II - 21, rue Moxouris, Le Chesnay)
Introduction
Plus de 6 millions d’Européens souffrent de fibrillation atriale (FA), avec une prévalence qui devrait plus que
doubler dans les 50 prochaines années du fait de l’augmentation de l’espérance de vie (1-2 % de la population
générale, < 0,5 % entre 40-50 ans et jusqu’à 15 % à 80 ans). Un accident vasculaire cérébral sur 5 est la
conséquence d’une FA et celle-ci est associée à un doublement du risque de mortalité. Elle est à l’origine d’un
tiers des hospitalisations pour arythmie cardiaque, affecte la qualité de vie et la capacité d’effort, altère la
fonction ventriculaire gauche et pourrait être responsable d’un déclin progressif des fonctions cognitives jusqu’à
la démence vasculaire. Si la controverse a été vive entre contrôle de la fréquence et contrôle du rythme, il
semble intuitivement évident que la seconde option est plus physiologique. Face à l’efficacité décevante des
traitements antiarythmiques préventifs, l’ablation de la FA occupe désormais une place incontournable.
Qui sont les bons candidats à l’ablation de la FA ?
Les nouvelles « Guidelines for the management of atrial fibrillation » ont été publiées en 2010 par un collectif
d’experts de l’European Society of Cardiology. Basée sur une revue systématique de la littérature et dans le
but de préciser les « bonnes pratiques », ce document permet de mieux positionner la place de l’ablation
de la FA en Europe. Quatre classes symptomatiques et 4 formes évolutives ont été distinguées. On a défini
d’une part, le «EHRA score» qui permet une quantification des symptômes dus à la FA, d’autre part 4 types
de fibrillations (et non plus 3) avec l’introduction de la forme dite « long-standing persistent », d’une durée
de plus d’un an mais restant accessible à l’ablation. L’ablation de la FA n’est à proposer qu’aux patients
symptomatiques, c’est-à-dire en classe EHRA ≥ II. Les recommandations confirment la place de l’ablation dans
la forme paroxystique en seconde intention, qu’il y ait ou non une cardiopathie sous-jacente et après échec
d’un traitement antiarythmique. La nouveauté c’est qu’on peut désormais la proposer en première intention chez
les sujets jeunes à cœur sain, s’ils ne souhaitent pas prendre de traitement au long cours. L’ablation est aussi
confirmée en seconde intention pour les FA persistantes et désormais les « long-standing persistent », même si
l’on sait que les résultats sont moins bons et peuvent conduire à des procédures multiples. La place de l’ablation
de la FA dans l’insuffisance cardiaque est théoriquement bénéfique puisque la restauration du rythme sinusal
améliore les conditions hémodynamiques, mais elle reste un véritable défi. Plusieurs travaux, comme l’étude A4
ont clairement démontrés la supériorité de l’ablation de la FA comparée aux traitements antiarythmiques, que ce
soit en terme de maintien du rythme sinusal, ou encore de qualité de vie. Il faut pourtant nuancer ces résultats du
fait des complications potentielles liées à ces techniques ablatives. On insiste avant tout sur le risque significatif
d’hémopéricarde, d’accident vasculaire cérébral embolique, sur la redoutable fistule atrio-oesophagienne et
même quelques cas rapportés de décès péri-opératoires. Ces accidents apparaissent en partie opérateurs
et centre-dépendants mais s’élèvent tout de même à 4.5 % d’après le « Worldwide Survey » publié par
R. Cappato en 2010, portant sur l’expérience de 2003 à 2006.
Les différentes techniques concurrentes ou complémentaires
L’ablation par courant de radiofréquence est la technique de référence qui a permis l’essor de la rythmologie
interventionnelle moderne. A gauche, il est admis que l’utilisation de cathéters irrigués réduit le risque de
coagulation et de carbonisation, limitant ainsi les complications emboliques. On peut utiliser une approche
radiologique bidimensionnelle classique pour l’isolation simple des veines pulmonaires, mais les systèmes
de cartographie tridimensionnelle se sont imposés rapidement. Une segmentation de l’oreillette gauche est
généralement réalisée avant l’ablation grâce aux données numériques provenant d’un scanner ou d’une IRM
cardiaque. Cette géométrie de référence est comparée voire fusionnée avec celle qui est faite en cours de
procédure par les cathéters positionnés dans l’oreillette gauche préalablement introduits par voie transseptale.
La navigation 3-D permet d’accroitre la précision du geste mais aussi de limiter l’irradiation du patient et
de l’opérateur. Généralement, l’isolation d’une veine pulmonaire est guidée par l’introduction d’un cathéter
circulaire dans le premier centimètre de la veine. Celui-ci permet de confirmer la connexion électrique puis la
déconnexion progressive en s’orientant sur les zones de conduction résiduelle. Depuis quelques années sont
apparus de nouveaux outils, qu’il s’agisse de cathéters spécialement dessinés pour l’isolation des veines, ou
encore de l’utilisation de nouvelles sources d’énergie. On peut citer le ballon de cryo-ablation qui permet une
isolation par le froid, en respectant la matrice cellulaire après congélation des tissus. Le PVAC (Pulmonary
Vein Ablation Catheter) est un cathéter circulaire qui permet à la fois l’enregistrement des potentiels veineux et
l’ablation par courant de radiofréquence en combinant une énergie uni et bipolaire. On attend beaucoup de la
robotique qui permet en théorie d’améliorer la précision du geste. Le système Hansen est un robot « classique »
commandé par un « joy-stick », le Stereotaxis permet une véritable navigation magnétique des cathéters. Le
contrôle de la force d’appui exercée par l’extrémité distale du cathéter d’ablation au point de contact avec le
tissu sera disponible prochainement.
Quelles sont les résultats de l’ablation de la FA ?
Cette question reste délicate et il convient avant tout de définir la notion de succès. S’agit-il d’une éradication
complète et définitive de l’arythmie, d’une diminution significative du nombre des crises, parle-t-on de succès
sans ou avec maintien des antiarythmiques, ce succès est il obtenu en une séance d’ablation ou en plusieurs?
En fait la littérature est ambiguë et on n’a pas toujours comparé les mêmes patients, les mêmes techniques et
les mêmes types de suivis. La question centrale concerne la validation du succès. On sait depuis les travaux de
R.L. Page en 1994 qu’il y a une majorité d’épisodes de FA asymptomatiques et on a appris plus récemment
que la FA était beaucoup moins symptomatique au décours d’une ablation, comme si on avait « déner»
l’oreillette gauche; alors comment se fier à une simple disparition des palpitations. Il apparaît que plus on
améliore la qualité du suivi objectif (ECG, Holter-ECG discontinu, Holter-ECG longue durée, « loop-recorder »
externe ou implanté, mémoires d’un pacemaker…) plus on diminue le taux de « succès électrique » et cela chez
des patients qui se sentent parfois améliorés voire guéris, donc avec un « succès clinique » ! Or, la littérature
des années 2000 est basée en bonne partie sur l’évaluation des symptômes après l’ablation et sur des suivis
discontinus assez discutables. Pour les formes les plus focales, les résultats atteignent 80-90 % souvent en une
seule procédure, mais pour les autres il faut anticiper des résultats plus décevants et des procédures répétées.
Plusieurs études cliniques en cours permettront de mieux définir et valider le « succès » après ablation de la FA.
Vers une généralisation de la pratique, quel avenir ?
Les techniques ablatives ont pris aujourd’hui une place incontestable dans la prise en charge de la FA.
Elles doivent rester dans la majorité des cas un recours de deuxième intention et s’adresser à des candidats
symptomatiques, bien informés des bénéfices et des risques de la méthode. Les résultats sont encourageants
dans les formes les plus focales mais toujours insuffisants pour les arythmies plus évoluées. Une meilleure
compréhension du processus fibrillatoire est nécessaire et il faut encourager la recherche fondamentale. On
doit poursuivre le développement de nouveaux outils dédiés, qu’il s’agisse de nouveaux cathéters ou de
nouvelles sources d’énergie. On peut compter sur l’amélioration de l’imagerie, de la navigation 3-D, demain
sans doute sur la robotique. Tous nos efforts doivent tendre vers une plus grande sécurité des procédures et une
amélioration des résultats, avec une prise en charge « sur mesure » de l’arythmie pour chacun de nos patients.
Notes
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