Shanghai, naissance d'une association
Shanghai, gigantesque ville ouverte sur le monde, vient d'être le lieu (du 1er au 3 avril 2006),
sur l'initiative de l'Institut de recherche sur le marxisme et du professeur Cheng Enfu, son
directeur, ainsi que de l'Académie chinoise des sciences sociales, du congrès fondateur de
l'Association mondiale d'économie politique (World Political Economy Society).
Je remercie la Fondation Gabriel Péri, qui n'a pas financé ma participation à ce congrès (ce financement fut
personnel) et qui ne m'a pas davantage mandaté pour la représenter, de m'ouvrir les colonnes de son bulletin à ce
propos.
L'approche parisienne de ce petit événement a reflété les interrogations et les doutes d'une intelligentsia dont on
comprend qu'elle puisse s'estimer échaudée par l'expérience du socialisme, mais que l'on estime aujourd'hui timorée
et d'abord soucieuse de son confort moral devant l'Histoire. On trouvera cette position évidemment exprimée dans ce
journal (15 mars 2006) que le général de Gaulle appelait Li Monde. Il est d'ailleurs de ces pays et de ces
organisations qui, quoi qu'ils disent et fassent, ont tort. La Chine en fait partie. Reconnaît-elle l'existence des
contradictions de son développement que c'est, cela va de soi, pour tromper le monde. Chacun sait combien les
Chinois sont perfides, surtout quand ils reconnaissent leurs difficultés. Se proposent-ils d'engager une réflexion
théorique approfondie de références marxistes que c'est uniquement, on l'aura compris, pour que le Parti
communiste chinois retrouve sa légitimité. Pascal, dans Les Provinciales, énonçait avoir toujours cru que l'on péchait
d'autant plus que l'on croyait le moins en Dieu, et s'étonnait que cette conviction, simple dans son principe, ne fût
pas partagée par l'opinion croyante de son époque.Toute proportion gardée, on est dans une situation comparable
avec la Chine. Ce pays semble pécher d'autant plus, aux yeux de celles et de ceux qui disent leur accord avec ses
principes fondateurs, qu'il chercherait à mieux les appliquer. Où est l'erreur ?
L'objet du congrès de Shanghai fut de jeter les bases d'une association mondiale d'économie politique (d'une autre
économie politique) et non d'intervenir dans les problèmes chinois. Ce qui revient à dire notamment que ces
problèmes, dans la mesure où ils seront abordés par les membres de cette association, le seront en étant replacés
dans le cadre d'une réflexion beaucoup plus générale que la Chine.
La démarche à l'origine de cette association a été nourrie, en effet, par l'idée que la représentation économique
dominante du monde, celle du business capitaliste, reposait, au-delà de sa légitimité savante apparente, sur un sol
fragile, celui des énormes limites induites par la bêtise aveugle de l'argent. Il est donc opportun aujourd'hui, de
rassembler les énergies radicales et critiques du monde entier parce que les classes capitalistes du monde entier
entrent dans l'impasse de leur théorisation. Elles prétendent être à l'avant-garde de la réforme économique alors que
ce sont des forces sociales désormais dangereuses, même si le capitalisme a représenté et représente encore pour
certains pays, une étape de leur développement.
Il convient donc, pour celles et ceux qui en contestent les représentations, d'affirmer la supériorité d'un autre
paradigme social (concepts, valeurs et conception du monde), alimenté par la référence marxiste. Il est clair qu'un tel
objectif ne pourra être atteint sans que la connaissance marxiste classique - et son élaboration chinoise notamment -
soient approfondie et, s'il y a lieu, revisitée. L'Association mondiale d'économie politique est un pari sur l'audace
théorique.
Trois points me semblent devoir être mentionnés pour conclure ce bref compte rendu.
Le premier a trait au qualificatif de « marxiste », absent du titre de cette association. Le point a été discuté et voté.
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