3
standards de comptabilité nationale ne tiennent pas compte. Ce problème est
particulièrement important dans les pays en développement, qui dépendent fortement
des ressources naturelles. Si un pays réduit ses forêts, épuise sa terre agricole et
pollue ses réserves d’eau, cela aura des conséquences en termes réels de pertes de
ressources et d’appauvrissement du pays. Mais les comptes nationaux n’enregistreront
que la valeur en marché du bois produit à partir de ces forêts, et des produits agricoles
et de la production industrielle ayant causé des dégradations écologiques. Tous ces
produits seront comptés comme contributions positives au PIB, alors qu’aucun des
dommages environnementaux dont ils sont responsables ne sera comptabilisé. Cette
distorsion entre indicateur et réalité peut conduire les économistes et les décideurs
politiques à ne voir le développement de leur pays que sous un jour exagérément positif
– jusqu'à ce que les effets de la dégradation de l’environnement se manifestent, ce qui
dans certains cas peut prendre des décennies.
Si l’on mesure le bien-être social avec un instrument défaillant, on obtient des
prescriptions de politiques qui peuvent faire plus de mal que de bien. La croissance
économique à elle seule ne représente pas toujours un véritable développement
économique, et peut même recéler une perte de bien-être humain si elle est
accompagnée par une inégalité croissante et une dégradation environnementale. Il
existe de nombreuses tentatives visant à adapter ou même à remplacer les mesures
traditionnelles de comptabilité nationale afin de prendre en compte des facteurs
environnementaux et des ressources naturelles. Nous allons en présenter plusieurs et
examiner comment les appliquer.
Les efforts pour développer ces indicateurs de comptabilités plus « vertes » sont
relativement nouveaux. L’intérêt pour l’inclusion de l’environnement dans la
comptabilité nationale a commencé dans les années 1970 and 1980, quand plusieurs
pays européens ont fait des estimations des comptes en termes physiques de leurs
ressources naturelles telles que les forêts, l’eau et les ressources en sols.3 En 1993,
les Nations Unies ont publié un manuel complet sur la comptabilité environnementale,
qui a été revu en 2003 et révisé à nouveau en 2012.4 Le Système des Comptes
Environnementaux et Economiques de 2003 (System of Environmental and
Economic Accounts – SEEA) considère quatre approches de base pour la comptabilité
environnementale:5
1. Mesurer les relations entre l’environnement et l’économie dans les deux
sens.6 Cette approche cherche à quantifier les moyens au travers desquels
les différents secteurs économiques sont tributaires des ressources naturels,
ainsi que la manière dont l’environnement est impacté par différentes activités
économiques. Par exemple, on cherche à estimer la quantité de pollution
d’air produit quand des secteurs industriels différents augmentent leurs
niveaux de production. Ces comptes combinent des données monétaires
!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
3 Voir Hecht, 2007, pour une histoire de la comptabilité environnementale
4 Nations Unies, et al., 2003; Commission Européenne, et al., 2012.
5 Smith, 2007.
6 Cette approche s’appelle “comptes de flux physiques” ou “comptes hybrides”.