LES POLITIQUES ECONOMIQUES COMMUNAUTAIRES DANS
L’UEMOA : L’APPROFONDISSEMENT DE L’INTEGRATION PAR LA
COORDINATION DES POLITIQUES MONETAIRE ET BUDGETAIRE
M. Ba
Doctorant, CED
Université Montesquieu-Bordeaux IV
La réussite d’une union monétaire est fondamentalement liée à la cohérence des
politiques communes des Etats partenaires. L’impossibilité des partenaires de frapper monnaie
oblige ces derniers à assurer des politiques budgétaires prudentes et rigoureuses pour le bon
fonctionnement de l’union. Cette coordination vise au maintien de niveaux d’inflation bas et
s’opère à travers une convergence macro-économique sur la base d’une série de critères à
respecter dans la perspective d’une consolidation de la communauté économique.
Le but recherché par le canal de la coordination vise à annihiler les effets d’éventuelles
distorsions dans la mesure où une orientation des politiques mal menée combinée à une non
concordance des fondamentaux des Etats partenaires peuvent perturber les objectifs monétaires
fixés par la banque centrale commune.
Dans cette optique, l’UEMOA à l’instar de l’UE est articulée autour d’une monnaie
unique (le FCFA), d’une politique monétaire unique et indépendante assurée par une banque
centrale commune (la BCEAO) et a adopté des critères de convergence des économies de
l’union dont le but est le respect des limites fixées de certaines grandeurs macro-économiques.
Ces critères ont été divisés en deux catégories : 1- les critères de premier rang et 2- les
critères de second rang. Ils visent à maintenir l’inflation vers le bas par l’incitation des Etats
membres à mener des politiques anti-inflationnistes soutenues. Puis, au plan de la dette et du
budget, les gouvernements sont incités à ajuster leurs politiques budgétaires dans le but de
garantir un équilibre d’ensemble entre les dépenses et les recettes publiques. Le caractère
contraignant intrinsèque au respect des critères de convergence est une preuve d’une volonté
commune des Etats membres d’assurer une gestion budgétaire rationnelle et par extension la
pérennité de l’union.
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En effet, les ajustements au plan collectif peuvent induire des coûts politiques (une
réduction des dépenses et une augmentation des impôts, souvent socialement mal acceptées).
Traditionnellement au plan théorique, une union monétaire optimale s’articule autour des deux
éléments : un degré élevé d’intégration commerciale et une corrélation positive des chocs se
propageant d’un pays à un autre. Face à ces impératifs, les unions africaines ne semblent pas
conformes aux précisions théoriques. Les Etats africains échangent très peu entre eux et les
mesures de la corrélation des chocs survenant dans différents pays restent difficiles à évaluer.
Face à la particularité des cadres intégrateurs particuliers dans l’espace africain, l’on
pourrait se demander quel est l’intérêt pour la Mauritanie d’adhérer dans l’UEMOA ? Une
telle question invite des réponses multiples et incite à choisir un élément pertinent militant en
faveur de l’adhésion. Pour notre part, il apparaît que le principal bénéfice immédiat pour la
Mauritanie comme nouveau membre de l’union est l’adoption des FCFA de la zone UEMOA.
En effet, le pays fait face depuis quelques années à des problèmes d’ordre monétaire
induits par un laxisme patent dans la gestion de la monnaie mauritanienne (Ouguiya) Par
ailleurs, la Mauritanie adoptant le FCFA, c’est la disparition immédiate de l’incertitude entre
l’Ouguiya et le FCFA et c’est la question de la politique monétaire qui se pose (Section 2) Et
enfin, au de-là, c’est une coopération élargie permettant le renforcement des échanges entre la
Mauritanie et les pays de l’UEMOA qui prendra place et où désormais, les opérateurs
économiques, de part et d’autre, verraient les opportunités d’affaires retrouver la confiance
qu’une différence de parité entre monnaie pourrait annihiler.
En outre, une majorité de pays africains souffre de déficits graves dans la gestion dite
souveraine de la chose publique. En effet, nombre de gouvernants prennent des libertés dans la
conduite de l’Etat et souvent leurs décisions sont en général motivées par des objectifs hors du
champ des intérêts de l’Etat et des peuples et en parlant plus simplement, ils restent mus par
des intérêts privés, voire électoralistes pour les Etats qui s’essayent à la démocratie depuis
bientôt une quinzaine d’années. Face au laxisme dirigiste et étatique, participer à une union où
existe quelques gardes fous au plan réglementaire notamment, pourrait « lier les mains » des
gouvernants tentés par certaines libertés décisionnelles.
C’est pourquoi, un des éléments intéressants dans le cadre d’une union économique et de
surcroît monétaire, reste l’obligation de respecter la convergence des économies par le respect
d’une série de critères préétablis acceptés par tous et la nécessité de la coordination des
politiques économiques. Pour l’UEMOA, le volet monétaire sert de catalyseur de la
coopération au sein de l’union et impose un respect rigoureux de normes dans la gestion
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économique des Etats, et en particulier, le contrôle des niveaux d’inflation qui doivent restés
faibles.
Par ailleurs, nous analyserons les politiques budgétaires des pays de l’union et de la
Mauritanie (section 3). Et en fin de chapitre, nous aborderons la question du policy mix en
union économique et monétaire, afin d’en déceler l’intérêt pour la Mauritanie et l’UEMOA
d’inscrire davantage leurs souverainetés, en matière budgétaire et monétaire (commune pour
l’union ouest africaine), dans un cadre supranational (Section 4).
SECTION 1 : L’ADOPTION DU FRANC CFA PAR LA MAURITANIE : LES EFFETS
IMMEDIATS INDUITS PAR LE CHANGEMENT DE REGIME
Les conséquences immédiates de l’adoption du FCFA par la Mauritanie, comme pour
tout adhérent à l’UEMOA, sont cristallisées dans le fondement même de la zone CFA,
historiquement liée au Franc français et aujourd’hui à l’euro. En effet, le FCFA est régi par une
série d’accords monétaires, anciennement signés entre la France et les pays africains
francophones, et fondés sur trois traités internationaux d’avec les pays de l’UMOA, les pays de
la CEMAC et les Comores.
La pérennité de cette coopération monétaire est désormais renforcée par une décision du
conseil européen du 23 novembre 1998 N° 98/683/CE, où les questions relatives au change
euro – FCFA et euro – Franc comorien sont précisées.
En effet, quelques principes régissent cette décision : a- sur le fonctionnement de la zone
CFA : sa survie est garantie tant que les accords qui lui servent de fondement sont dans leur
état actuel et la France et les partenaires européens sont tenus au courant de la mise en œuvre
de ces accords ; b- sur le changement des accords à la base de la zone franc : la décision du
conseil de l’union est toujours requise en cas d’admission d’un nouvel adhérent ou en cas de la
modification du fondement même de l’accord, en particulier le principe de garantie de
convertibilité des FCFA à taux fixe accordé par le trésor français.
Ces accords, comme nous l’avons soulignés précédemment, sont articulés autour du
système du compte d’opérations. L’adhésion de la Mauritanie conduira immédiatement pour ce
pays de profiter de l’élargissement des mécanismes de coopération monétaire, qui au
demeurant, offrent une série d’avantages parmi les quels :
1- la fixité des parités entre l’euro et le FCFA dont la consolidation reste fondamentalement
liée à la stabilité de la zone euro (parité fixe 1 euro = 655,957 FCFA.) ;
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2- la garantie illimitée de la libre convertibilité des FCFA (les comptes d’opération empêchent
toute défaillance dans la réalisation d’opérations commerciales courantes.) Par cette garantie, le
trésor français accorde un tirage illimité aux pays de la zone en cas d’épuisement de leurs
réserves en devises. Les pays sont simplement assujettis à l’obligation de déposer sur le
compte d’opération au moins 65% de leurs avoirs extérieurs nets1.
Toute fois, il faut rappeler que la solidarité monétaire est d’abord interafricaine dans un
premier temps. En effet, en cas de déficits d’un pays, ce sont les excédents d’un autre qui les
compensent. La France n’intervient en fait, par les interventions du trésor public, qu’en cas de
déficit généralisé de l’ensemble d’une union considéré.
3- la réduction des risques de change tant à l’intérieur de la zone qu’au niveau des échanges à
l’extérieur FCFA. Par ailleurs, la coopération monétaire zone euro – zone FCFA favorise une
insertion de ces pays dans les échanges internationaux.
Certains avantages ont été relevés de l’arrimage des FCFA à l’euro : élargissement potentiel à
la Mauritanie
Bon nombre d’avantages ont été relevés quant au couple EURO – FCFA. Pour notre part,
nous nous bornerons à en préciser certains, la question des avantages restant vaste dans ses
manifestations. La question des inconvénients de l’euro, aussi importants pour la zone franc, ne
sera pas abordée ici. Pour nous, c’est la question de l’intégration de la Mauritanie dans
l’UEMOA, donc dans la zone franc, qui se pose. Retenons les coûts liés à la perte du privilège
d’émettre monnaie nationale, comme instrument de politique économique.
- Du point de vue européen
Les opportunités nouvelles, souvent avancées en faveur des entreprises de l’euroland,
portent sur la liberté de transferts que ces entreprises ont désormais dans le cadre de la zone
euro-africaine. Leur implantation dans la zone africaine est facilitée par les débouchées et des
matières premières garanties, mais aussi par l’absence de risques quant au rapatriement de
1Toutefois, le recours illimité de la part des banques centrales de l’UEMOA et de la CEMAC aux avances du
trésor français, doit, sur la base des accords rester exceptionnel. Autrement, les découverts prolongés du compte
d’opération obligent les banques centrales à mettre sur pied des mesures de redressement, notamment le
relèvement des taux directeurs, la réduction des montants de refinancement, le plafonnement des crédits aux
Etats, le ratissage de devises, etc. Il faut, par ailleurs rappeler que ce compte a globalement bien fonctionné,
puisque entre 1973 et 1994 (date de naissance de l’UEMOA et de la CEMAC), il n’a été déficitaire que
temporairement et seulement cinq fois. Depuis 1994, ce compte est créditeur de façon ininterrompue.
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leurs avoirs. Le poids de l’Europe dans l’aide publique au développement (60%), dans les
investissements directs étrangers (70%) et dans le commerce extérieur de la zone FCFA (plus
de 50%) est écrasant.
- Du point de vue africain :
Les pays africains de la zone franc ont toujours fait le pari des systèmes des taux de
change fixes, afin d’éviter les risques liés à une très grande volatilité des changes. Par
conséquent, le rattachement des FCFA à l’euro est une source de stabilité et de crédibilité
comme monnaie pivot, mais aussi et surtout justifié dans la mesure où les deux zones (euro-
africaine) sont caractérisées par une grande fréquence et une intensité importante dans leurs
relations commerciales.
L’arrivée de l’euro semble apporter des changements de taille pour la zone CFA : un
changement qualitatif et une tendance positive vers des conditions plus optimales. Les
conditions de convergence pour participer à l’euro ont fait voler de fait, les turbulences liées à
l’instabilité des taux de changes des pays aujourd’hui membre de l’UE et partenaires des pays
de la zone franc.
Donc, le rattachement à l’euro est pour l’UEMOA une opportunité monétaire élargie.
Nous relevons donc, que la stabilité et la convertibilité nécessaires aux pays de l’UEMOA sont
renforcées par la nouvelle dynamique que l’euro, monnaie de la première puissance
commerciale mondiale, joue désormais à côté du dollar américain.
- les opportunités ouvertes à terme, à la Mauritanie dans le cadre de l’UEMOA :
La Mauritanie, considérée dans l’espace UEMOA, peut tirer certains avantages liés à
l’arrimage du FCFA à l’euro :
a- les pays européens deviendraient plus ouverts aux exportations mauritaniennes, par
l’accroissement de ses débouchés commerciaux et de la rationalisation des prix de ses
importations (disparition du risque de change.) ;
b- les opérateurs mauritaniens ne seront plus soumis au risque de change en commerçant avec
les pays de l’euroland et donc verront leurs charges commerciales et leurs coûts de transactions
réduits.
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