J U I N
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Comment hiérarchiser
les notions
N'enseigner que des notions à rentabilité
immédiate ?
Si nous reprenons l'exemple du COI et
du sujet, il apparait que le travail de
ces deux faits de langue nous place sur
deux plans différents : au sujet revient
la rentabilité orthographique ; au COI
la réflexion descriptive et scientifique
sur la langue sans rentabilité en lectu-
re/écriture.
De nombreuses notions sont à la char-
nière entre les deux, et cela permet la
hiérarchisation du travail à l'école : les
notions à forte rentabilité en lecture-
écriture (y compris en orthographe)
sont travaillées pour cette utilité im-
médiate et donnent aussi lieu, dès le
cycle 2, aux premières observations
scientifiques et descriptives de la lan-
gue. Au fur et à mesure de la scolarité,
pendant que ces notions fondamenta-
les sont confortées, sont abordées des
notions sans utilité en lecture-écriture
mais qui permettent la compréhension
de la langue. […] Il revient à l'ensei-
gnant de hiérarchiser les notions de
grammaire. Pour cela, quelques prin-
cipes peuvent aider à cette hiérarchisa-
tion.
Cette question est intéressante car elle
est au cœur des réflexions autour de la
langue sans jamais être exprimée. Les
manuels de cycle 3, par exemple, ne la
traitent pas et proposent, dans leur
sommaire, une succession de leçons.
Parfois, ces leçons sont ordonnées,
c'est-à-dire rangées selon l'ordre chro-
nologique de l'année mais non hiérar-
chisées : leur importance relative n'est
pas indiquée. Les faits de langue sont
travaillés sans qu'on s'interroge sur
leur rentabilité immédiate, sans qu'on
indique aux élèves leur utilité.
Par exemple, lorsqu'on travaille le
sujet, on explique qu'il est essentiel de
le repérer à cause de sa relation avec
le verbe, mais lorsqu'on travaille le
COI, il n'est pas dit que son utilité
immédiate est nulle et que son intérêt
est peut-être ailleurs.
Ceci doit être expliqué et l'enseignant
doit le garder à l'esprit : c'est pour lui
une aide pour doser le travail et cons-
truire les activités. Faut-il prévoir
beaucoup d'exercices d'application et
d'entrainement si on n'entraine à rien
parce que la notion qu'on a décidé de
travailler n'a pas d'utilité directe ?
1. Tenir compte de tous les critères pour
ordonner les notions dans l’année selon:
- l’ordre dans lequel on les travaille : on
ne peut pas travailler le COD avant le
verbe ni les types de pronoms avant d’a-
voir défini la classe pronom : c’est un
ordre de priorité ;
- les élèves : pour ceux qui ne reconnais-
sent pas le verbe, impossible de travailler
les compléments essentiels ;
- leur appartenance au socle commun et
aux programmes ;
- le métalangage qu’elles nécessitent ;
- qu’elles sont destinées à être repérées
dans un texte, employées, manipulées ou
identifiées (c'est-à-dire nommées).
2. Repérer la rentabilité de la notion
travaillée :
- rentabilité orthographique : elle sert à
écrire correctement ; par ex. identifier le
sujet permet d’écrire la fin du verbe ;
- rentabilité sémantique : elle sert à com-
prendre une phrase, un texte ; par ex.
connaitre les signes de ponctuation forte
permet de comprendre l’intonation des
paroles rapportées ;
- rentabilité d’écriture : elle sert à mieux
écrire ; par ex. la place des adjectifs est
importante dans les GN dans un portrait.
3. Décider si elles sont seulement mani-
pulées ou identifiées en classe.
4. Décider si elles sont nommées ou non
après entente avec les collègues du cycle
et du collègue.
5. Informer les élèves des raisons de la
travailler ou non.
« Quand sait-on la grammaire ? A quel âge sait-on la grammaire ? Combien
d’années faut-il pour savoir la grammaire ? On ne saura jamais la grammai-
re. » Alexandre Vialatte, Chroniques de la montagne, Robert Laffont, 2000 (Bouquins).
D’après Etudier la langue au cycle 3,
Jean-Paul Vaubourg, Scérèn – CRDP,
Académie d’Amiens, 2010, pp. 86-87.
Pour être efficace, l'étude de la langue selon les notions doit :
- s'appuyer sur trois types de supports de travail : la littérature de jeunesse, des textes dans d'autres disciplines que le français
et des exemples créés par l'enseignant ou tirés de livres d'exercices ;
- conduire à deux types de formalisation (des outils utilisables en situation de rédaction de textes et des règles à apprendre et à
maitriser) ;
- provoquer deux types de mise en œuvre des notions travaillées : le réinvestissement dans des activités de lecture et d'écriture
en français et dans d'autres disciplines, et l'application dans des exercices d'entrainement.
Avec un appui sur la littérature et les rédactions :
- utilisation des adjectifs qualificatifs et des adverbes ;
- identification de l'attribut du sujet ;
- connaissance et utilisation des circonstanciels ;
- repérage de l'antériorité d'un fait par rapport à un autre.
En lien avec les autres disciplines que le français :
- nominalisation pour écrire un titre, un sous-titre, une
légende, une tête de colonne dans un tableau.
Dans des activités spécifiques :
- sans utilité lecture/écriture et donc dans le but d'une
connaissance scientifique et descriptive de la langue :
identification du COD et du COI ;
- pour un entrainement avec un transfert en lectu-
re/écriture :
identification du verbe et du sujet et choix de la
terminaison du verbe ;
accords dans le groupe nominal ;
identification des classes grammaticales de base.
Exemples de notions réparties
selon leur utilité grammaticale
D’après Etudier la langue au cycle 3, Jean-Paul Vaubourg,
Scérèn - CRDP, Académie d’Amiens, 2010, p. 91.
Organiser le travail
Etudier la langue au cycle 3, Jean-Paul Vaubourg, Scérèn - CRDP, Académie d’Amiens, 2010, p. 88.
Le sommaire d’un manuel récent consacré à l’étude de la lan-
gue peut aider à construire une programmation, mais à condi-
tion de respecter quelques principes :
- repérer le cas échéant les notions hors programmes ;
- repérer les faits de langue en lien réel avec la littérature et les
faits de langue transversaux ;
- travailler prioritairement les classes grammaticales de base
(déterminant, nom, adjectif) et fonctions de base (sujet, verbe,
complément) quel que soit la place que le manuel leur réserve ;
- estimer le degré d’approfondissement nécessaire des notions
travaillées : par exemple, lorsqu’on travaille la ponctuation,
quels signes de ponctuation forte traite-t-on ? Quelle exigence
formule-t-on pour l’emploi de la virgule ?
En résumé, les faits de langue transversaux sont ceux qui ne
nécessitent pas un lien particulier avec la littérature parce qu’ils
sont présents dans toute situation d’écriture.
Programmer des activités
avec le sommaire du manuel
Etudier la langue au cycle 3, Jean Paul Vaubourg,
Scérèn - CRDP, Académie d’Amiens, 2010, p. 126.