
4 IGAS, RAPPORT N°2016-075R
Les données de la CNAMTS font état de 6 674 patients passés par Dentexia entre janvier
2015 et mars 2016, avec 4 562 patients pour la région Auvergne Rhône Alpes, soit près de 70 %
des patients. Par ailleurs, seuls 5 % des 6 700 patients relevaient du panier soins CMUC. Les
statistiques de la CNAMTS ne permettent guère d’aller plus loin pour deux raisons : les soins
dentaires remboursés par l’assurance-maladie ont été limités et les données sanitaires extraites des
bases mériteraient d’être précisées, notamment sur le type de dents extraites : si les extractions
concernent 4 incisives pour un même patient, l’impact social et professionnel et bien sûr esthétique
et psychologique sera différent d’une extraction de 4 prémolaires ou molaires où les répercussions
pourront alors être plutôt alimentaires ou sur la vie quotidienne
Le ministère chargé de la santé a été alerté sur les dysfonctionnements sanitaires des centres
de santé dentaires Dentexia suite aux inspections de deux Agences Régionales de Santé sur les
centres de Chalon-sur-Saône et de la Tête d’Or à Lyon. Deux mesures principales ont été prises
pour répondre aux effets de la liquidation qui a suivi :
le numéro vert mis en place par les ARS, à l’initiative de l’administration centrale, a
permis de recevoir 940 appels, dont plus de la moitié sur la région Auvergne-Rhône-Alpes
(données recueillies entre le 3 mai 2016 et le 20 juin 2016). Les appels sont en forte
diminution sur la seconde moitié du mois de juin. La durée des appels (environ 20 à 30 mn)
montre que ce numéro vert a permis aux patients d’exprimer leurs situations et leurs
souffrances mais les réponses apportées restaient généralistes, avec une difficulté des
écoutants à proposer des solutions individualisées ;
les bons de prises en charge par la CNAMTS, permettant la réalisation d’un bilan bucco-
dentaire, n’ont été accessibles pour les patients que tardivement et très partiellement. D’après
les sources du Collectif contre Dentexia, un seul bon avait été récupéré le 17 juin 2016. Les
données font état de 49 bons reçus au 29 juin 2016, et 10 patients l’ayant utilisé. Au 7 juillet
dernier, les dernières remontées d’information de la CNAMTS via la DSS, font état de 270
courriers accompagnés de bons pour réaliser l’examen bucco-dentaire préalable à la reprise
des soins adressés par les CPAM aux patients qui se sont manifestés. Il n’y a pas encore de
données sur le nombre de bilans effectivement réalisés. Deux difficultés apparaissant, pour
les patients habitant hors du département et pour ceux dépendant de régimes particuliers (ex:
MGEN, ou RSI). La mission a également constaté que près de 200 patients, réclamant un
bon de prise en charge, n’apparaissaient sur aucune des requêtes de l’assurance-maladie
(patients n’ayant pas eu d’actes remboursés après le 1er janvier 2015, ou absence de feuille
de soins transmise par ces centres de santé).
Une enquête déclarative a été réalisée par le collectif contre Dentexia, qui rassemble
2400 patients. Celle-ci, analysée à partir des réponses de 558 patients, donne des précisions sur
l’état sanitaire réel (avec radiographies et prise d’antibiotiques pour infection) et leurs ressentis. A
titre d’exemple, plus de 21 % des patients concernés déclarent entre 5 et 10 dents extraites, 28 %
précisent qu’ils portent toujours un appareil provisoire parfois depuis plus d’un an, un tiers est en
attente d’une ou plusieurs couronnes pour recouvrir leur(s) implant(s). Certains (plus d’un tiers)
déclarent qu’ils ont du être admis aux urgences pour soins, après la fermeture de leur centre
dentaire. La mission précise qu’il s’agit d’un état des lieux réalisé par les patients eux-mêmes
relatant les soins qu’ils avaient déjà réalisés au moment de la liquidation (ex : extraction/ pose
d’implant / appareils dentaires provisoires…) et d’un constat exprimé par les patients sur les soins
restant à faire au regard des plans de traitement et/ou devis qu’ils avaient acceptés et des sommes
déjà versées.
Plus de 350 plaintes déposées aux instances ordinales portent sur des motifs sanitaires.
Le médecin de la mission a constaté que plusieurs dentistes ont pu intervenir sur un même patient
et que certains dentistes ont pu exercer successivement dans plusieurs centres. L’analyse de ces
plaintes a été réalisée par le conseil national de l’ordre des chirurgiens dentistes, qui identifie (à
travers les courriers des patients) cinq principaux motifs, parfois cumulatifs : atteinte à la santé
(douleurs et/ou infections), soins non conformes, soins non terminés, violences volontaires
entrainant mutilation, sur-traitement.