Rapport de stage Contrôle cohérent des excitations électroniques dans une boîte quantique unique Directeurs de stage : Valia VOLIOTIS Roger GROUSSON Alexandre ENDERLIN M2 Physique théorique 5 Septembre 2007 Table des matières Introduction 3 1 Présentation des boîtes quantiques 1.1 Motivation : information quantique . . . . . . . 1.2 Genèse des boîtes quantiques . . . . . . . . . . . 1.2.1 Croissance de fils quantiques gravés en V 1.2.2 Confinement des porteurs dans une boîte 1.3 L’exciton . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1.3.1 Description des états excitoniques . . . . 1.3.2 Interaction exciton-lumière . . . . . . . . . . . . . . . 4 4 5 5 7 8 8 9 . . . . . . . . . . . . . . . de Rabi . . . . . . . . . . 10 10 10 11 12 12 13 . . . . 16 16 17 18 20 . . . . . . . . . . . . . . . . . . quantique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2 Oscillations de Rabi 2.1 Un dispositif expérimental d’optique guidée . . . . . . . . . 2.1.1 Principe de l’expérience . . . . . . . . . . . . . . . . 2.1.2 Description du dispositif . . . . . . . . . . . . . . . . 2.2 Préparation d’une superposition cohérente via les oscillations 2.2.1 Régime continu . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.2.2 Régime impulsionnel . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3 Micro-photoluminescence 3.1 Principe de la micro-luminescence . . . . . 3.2 Micro-luminescence résolue spatialement . 3.3 Micro-luminescence résolue temporellement 3.4 Contrôle cohérent . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Conclusion 24 Bibliographie 25 A Fonctionnement du cryostat 26 B Ralentissement de la lumière 28 2 Introduction L’apparition des premières hétérostructures de semiconducteurs au début des années 1970 a ouvert un vaste champ de recherche sur les propriétés des systèmes de basse dimensionnalité. Les puits quantiques ont été les premières structures réalisées. Il se distinguent du matériau massif par la quantification partielle des états électroniques induite par le confinement dans une direction spatiale. Depuis une décennie, d’importants efforts ont été réalisés en vue d’améliorer les techniques de croissance des structures de plus basse dimension à l’instar des fils quantiques, qui constituent des systèmes 1D, et des boîtes quantiques (BQ), qui sont des systèmes 0D. La focalisation des recherches fondamentales sur l’étude des propriétés des BQ est motivée par le fait qu’elles constituent potentiellement les briques élémentaires du traitement quantique de l’information, appelées bits quantiques ou qubits. Les BQ semiconductrices offrent des perspectives très prometteuses dans ce domaine parce qu’elles allient les avantages des systèmes atomiques —discrétisation des états propres électroniques— et des systèmes condensés —réalisation technologique et miniaturisation facilitées—. Nous commençons ce rapport en expliquant brièvement les motivations de l’étude des BQ et nous présentons leurs propriétés originales au sein du premier chapitre. Ensuite, le deuxième chapitre est consacré à l’excitation des BQ par la lumière. On y décrit en particulier comment préparer une BQ unique dans un état quantique déterminé en exploitant le phénomène physique des oscillations de Rabi. Enfin, dans le troisième chapitre, nous nous intéressons à la relaxation radiative d’une BQ unique par des techniques de micro-photoluminescence résolue spatialement et temporellement. 3 Chapitre 1 Présentation des boîtes quantiques Les propriètés physiques originales des boîtes quantiques semiconductrices découlent principalement de leur basse dimensionnalité. Elles constituent des systèmes 0D qui confinent les porteurs de charges (électrons et trous) dans les trois dimensions de l’espace, ce qui conduit à une quantification de l’énergie des électrons et des trous. De plus, les BQ étudiées peuvent être considérées comme de bons systèmes à deux niveaux. Cette proprièté implique la possibilité prometteuse d’utiliser les BQ en tant qu’unité fondamentale pour coder l’information quantique que nous définissons dans la première section. La deuxième section est consacrée à la méthode de croissance des BQ sur lesquelles nous avons travaillé. Enfin, les propriètés des BQ lièes au confinement sont décrites dans la troisième section. 1.1 Motivation : information quantique Une perspective à long terme d’utilisation des boîtes quantiques est la suivante : utiliser les propriètés quantiques de ces objets nanométriques pour coder et traiter l’information de manière infiniment plus rapide. Rappelons que l’unité fondamentale de l’informatique classique est le bit. Il suit une logique binaire classique et ne peut, par conséquent, prendre que deux valeurs notées 0 ou 1. Un bit quantique ou ‘qubit’ est matérialisé par l’état quantique |ψi d’une BQ considérée idéalement comme un système à deux niveaux. |ψi peut prendre, contrairement au bit classique, non seulement les valeurs discrètes |0i ou |1i mais également toutes les superpositions quantiques cohérentes du type α |0i + β |1i telles que |α|2 + |β|2 = 1. La rapidité d’un ordinateur quantique par rapport à un ordinateur classique provient de l’existence de telles superpositions cohérentes qui permettent d’effectuer 2n calculs en parallèle où n est le nombre de qubits, pendant qu’un ordinateur classique ne réalise qu’un seul calcul [1]. 4 CHAPITRE 1. PRÉSENTATION DES BOÎTES QUANTIQUES 5 Fig. 1.1 – a) Image par microscope électronique en transmission d’une coupe transversale d’un fil quantique. b) Zoom sur le fil de GaAs. 1.2 Genèse des boîtes quantiques Les BQ que nous avons étudiées sont générées par des défauts d’interfaces de fils quantiques. Nous commençons donc par présenter la méthode de croissance des fils quantiques, puis nous montrerons l’origine du confinement dans une BQ. 1.2.1 Croissance de fils quantiques gravés en V Les fils quantiques sont des systèmes unidimensionnels ; c’est-à-dire que les porteurs sont confinés dans deux directions de l’espace et libres de se propager dans la troisième. Les fils étudiés sont des hétérostructures d’arseniure de gallium —GaAs—, qui fait office de puits quantique, et d’alliage d’arseniure de gallium et d’aluminium —GaAlAs—, qui constitue une barrière de potentiel. Ces matériaux semiconducteurs sont déposés par épitaxie en phase vapeur sur un substrat de GaAs. Sur ce substrat, ont été préalablement gravés des sillons en forme de V par photo-lithographie, espacés de 4 µm et profonds de 1 µm. La croissance est réalisée dans l’ordre suivant : premièrement, une couche de GaAs sert de tampon ; ensuite une couche de matériau barrière GaAl0.6 As puis GaAl0.3 As ; une couche de 5 nm du matériau puits GaAs ; enfin, une autre barrière de GaAl0.6 As puis GaAl0.3 As [2]. La figure 1.1 montre cet empilement sur une image par microscopie électronique. Les dimensions de la surface de l’échantillon étudié sont 2mm × 2mm, ce qui représente 500 fils. Remarquons que l’origine du confinement est différent dans les deux directions y et z perpendiculaires au fil. Dans la direction de croissance, c’est la différence de gap entre les deux matériaux —600 meV— qui permet de confiner les porteurs dans le matériau de plus faible gap, le GaAs. La figure 1.2 a) représente les niveaux d’énergie discrets dans le puits quantique de GaAs. CHAPITRE 1. PRÉSENTATION DES BOÎTES QUANTIQUES 6 Fig. 1.2 – a) Confinement dans la direction perpendiculaire au fil dû à la différence entre les énergies de gap du matériau puits —GaAs— et du matériau barrière — GaAlAs—. Bille verte : trou. Bille rouge : électron. b) Structure de bandes des électrons et des trous dans un fil quantique de GaAs au voisinage de kx = 0 dans la direction libre. Le confinement dans la direction z est lié au fait que l’épaisseur du film de GaAs est plus grande au fond du V. L’énergie des porteurs étant plus faible dans la région où le puits est plus grand, ceux-ci restent localisés au fond du V sur une distance d’environ 15 nm. La longueur d’onde de de Broglie λth valant 50 nm à 10 K dans cette structure, le mouvement des porteurs est donc bien discretisé selon les axes y et z. λth = v u u 2πh̄2 t mkB T = 50nm En résumé, l’énergie d’un électron (resp. d’un trou), calculée à partir du bas de bande, dans la bande de conduction (resp. bande de valence) est donnée par la somme d’une énergie de confinement E conf et d’une énergie de bande E libre . m∗e (resp. m∗h ) représente la masse effective de la bande de conduction (resp. valence) ; Ly et Lz les dimensions transversales de confinement. Ee(h) = conf Ee(h) + libre Ee(h) h̄2 π 2 = 2m∗e(h) n2y n2z + L2y L2z ! + h̄2 kx2 2m∗e(h) Dans cette expression, nous remarquons que l’énergie n’est que partiellement quantifiée dans un fil quantique. En effet, dans la direction libre x du fil, les électrons de conductions peuvent se mouvoir librement, ce qui donne lieu à une structure de bandes typique en physique du solide. La figure 1.2 b) représente la structure de bandes du fil au voisinage de kx = 0. Les électrons de conduction forment une bande s antiliante. De plus, il y a trois bandes de valence pour les trous. La bande s, appelée spin-orbite car la levée de dégénérescence est due au couplage spin-orbite, est trop basse en énergie pour être couplée à la lumière. Enfin, les bandes liantes p ne sont plus dégénérées à cause du confinement ; les seuls trous couplés à la lumière étant les trous lourds —en rouge sur la figure 1.2 b)—, les trous légers étant trop bas en énergie. CHAPITRE 1. PRÉSENTATION DES BOÎTES QUANTIQUES 7 Fig. 1.3 – Représentation des fluctuations d’interfaces le long d’un fil quantique 1.2.2 Confinement des porteurs dans une boîte quantique Pour obtenir une BQ, il est nécessaire de confiner les porteurs dans la troisième direction de l’espace : l’axe libre du fil. Ce confinement apparaît naturellement lorsque les fils quantiques sont maintenus à une température inférieure à 10 K. En effet, les structures réelles ne sont pas parfaites et présentent différents défauts et inhomogénéités. Dans les fils quantiques GaAs/GaAlAs étudiés dans ce stage, les impuretés sont en quantité infime et leur contribution est négligeable. Par contre, il existe des fluctuations d’épaisseur aux interfaces entre les différents matériaux qui ont une influence très importante sur les propriétés optiques des hétérostructures. Ces fluctuations de géométrie du fil induisent des variations d’énergie de confinement de l’ordre de 10 meV. Des régions de plus faible potentiel sont ainsi créées ; elles piègent les excitons et forment un ou deux états localisés [3]. Les excitons sont alors confinés dans deux directions par le potentiel du fil quantique et dans la direction "libre" du fil par un potentiel plus faible dû aux variations de la géométrie du fil. Les excitons localisés peuvent être traités comme un système 0D de type boîte quantique. L’énergie d’agitation thermique étant inférieure à la hauteur du puits —kb T = 1 meV à 10 K—, les porteurs sont bien localisés à l’intérieur d’une BQ de dimensions 5nm × 15nm × 50nm. la figure 1.3 montre un schéma d’une BQ orange dans l’axe du fil, créée par une fluctuation d’une monocouche atomique. Signalons d’ores et déjà que l’echantillon est inséré dans un cryostat1 qui permet de travailler à 10 K. L’énergie d’un électron (resp. d’un trou) dans une boîte quantique est donc uniquement une énergie de confinement : elle est quantifiée. conf Ee(h) h̄2 π 2 = 2m∗e(h) n2y n2z n2x + + L2y L2z L2x ! avec ny , nz , nx ≥ 1 ; Ly = 5nm, Lz = 15nm, Lx = 50nm. L’énergie de confinement la plus faible est donnée pour le triplet suivant : (ny , nz , nx ) = (1, 1, 1). Cependant, l’énergie des excitations de la BQ n’est pas égale à la somme d’une énergie de confinement d’un électron et d’une énergie de confinement d’un trou, Eeconf + Ehconf . Il existe une interaction entre ces deux particules abaissant l’énergie des excitations de la BQ. 1 Cf Annexe A : Fonctionnement du cryostat. CHAPITRE 1. PRÉSENTATION DES BOÎTES QUANTIQUES 8 Fig. 1.4 – a) Confinement dans la direction de croissance. b) Confinement dans les boîtes quantiques dû à la rugosité des interfaces séparant le matériau puits —GaAs— et le matériau barrière —GaAlAs—. mc = monocouche 1.3 1.3.1 L’exciton Description des états excitoniques Dans les systèmes confinants de dimensions N ≤ 2 — à fortiori dans les BQ —, les excitations élementaires de plus basse énergie ne peuvent plus être considérées comme de simples paires électron-trou comme dans les semiconducteurs massifs. En effet, l’interaction coulombienne attractive entre un électron chargé négativement et un trou chargé positivement n’est plus négligeable et forme un état lié de type hydrogénoïde. La figure 1.4 b) schématise le lien entre l’électron et le trou d’une paire, formant ainsi une quasi-particule appelée exciton. Nous avons montré que les énergies des électrons et des trous étaient discrètes dans une BQ, l’interaction coulombienne se contente donc de modifier l’énergie des états confinés. L’énergie du niveau fondamental de l’exciton EX1 est donnée par la relation suivante où Ee1−h1 est l’énergie du niveau fondamental —(ny , nz , nx ) = (1, 1, 1)— de la paire électron-trou non-liée, El l’énergie de liaison et Eg l’énergie de gap. EX1 = Ee1−h1 − El conf conf Ee1−h1 = Eg + Ee1 + Eh1 De plus, on montre [4] que l’énergie de liaison s’écrit El = R/n2X 2 h̄ où R = 2µa 2 et nX ≥ 1. µ étant la masse réduite de l’exciton et aB le rayon de Bohr B de l’exciton. Dans une BQ de GaAs, on a aB = 16 nm. Le niveau fondamental de l’exciton est donc obtenu avec les quatres nombres quantiques suivants (ny , nz , nx ) = (1, 1, 1) et nX = 1. Le premier niveau excité de l’exciton s’obtient en prenant nX = 2. CHAPITRE 1. PRÉSENTATION DES BOÎTES QUANTIQUES 1.3.2 9 Interaction exciton-lumière La lumière induit dans les matériaux semiconducteur à gap direct, comme le GaAs, des transitions inter-bandes au cours desquelles les électrons de la bande de valence peuvent être transférés dans la bande de conduction, laissant un trou dans la bande de valence. Nous nous intéressons particulièrement à la transition fondamentale d’une seule BQ, c’est-à-dire la transition entre l’état sans exciton dit "état vide" et l’état fondamental de l’exciton. Il y a deux avantages à travailler sur cette transition. Premièrement, en accordant la source lumineuse excitatrice — un laser TiSa à impulsions picosecondes — avec l’énergie de la transition, il est possible de négliger l’influence des niveaux excités tant que la température est suffisamment faible pour éviter le peuplement thermique de ces niveaux. Cette approximation revient à considérer la BQ excitée à la résonance comme un système à deux niveaux. Nous pouvons donc utiliser la théorie générale des systèmes à deux niveaux et en paticulier les oscillations de Rabi pour les BQ. Deuxièmement, nous verrons dans le chapitre 3 que l’environnement de la BQ a pour effet de rendre l’état de la BQ incohérent au bout d’un temps de décohérence T2 . L’état fondamental possède le plus long temps de cohérence parce qu’il interagit le moins avec l’environnement de la BQ, il est donc le plus favorable pour manipuler les BQ optiquement. Dans le chapitre suivant, nous verrons comment procéder pour préparer une BQ dans un état quantique contrôlé par l’expérimentateur. Chapitre 2 Oscillations de Rabi Dans ce chapitre, nous expliquons comment utiliser les oscillations de Rabi pour préparer optiquement une BQ dans une superposition cohérente connue. 2.1 2.1.1 Un dispositif expérimental d’optique guidée Principe de l’expérience Une importante manifestation de l’interaction non-linéaire entre un système à deux niveaux et un champ électromagnétique résonnant sont les oscillations de Rabi [5]. En régime de couplage fort, l’intensité du champ excitateur détermine le nombre d’électrons dans l’état excité qui évolue sinusoïdalement dans le temps. Le montage expérimental est conçu pour réaliser des oscillations de Rabi sur une BQ unique excitée par une impulsion laser accordée à la fréquence de la transition fondamentale de l’exciton. La spécificité de ce montage est de permettre, à la fois, d’exciter optiquement le niveau fondamental de la BQ et d’observer l’émission résonnante de la même BQ. Exciter et détecter à la même longueur d’onde est expérimentalement difficile étant donné la forte intensité du laser qui, par réflexion et diffusion sur les interfaces, provoque la saturation des appareils d’observation —spectromètre et caméra rapide à balayage—. On contourne cette difficulté en insérant les fils quantiques dans un guide d’onde dans lequel la lumière se propage et interagit avec les BQ. La figure 2.1 représente un schéma d’un guide d’onde excité. De plus, sur la figure 2.2, on peut voir une image de la surface de l’échantillon a) sans fil excité ; b) avec un fil excité. Les fils quantiques correspondent aux lignes droites sombres de l’image parce qu’ils ne réfléchissent pas beaucoup la lumière à cause de la forme en V de l’interface à cet endroit. La lumière fuyant du guide est la somme de la luminescence des BQ et de la diffusion du laser sur les parties rugueuses du guide. L’émission d’une boîte est récupérée dans une direction perpendiculaire au guide d’onde de telle sorte que l’intensité du rayonnement laser diffusé est faible devant la luminescence de la BQ. La structure guidante est formée par les couches de GaAlAs de concentrations en aluminium différentes. Les deux couches de GaAl0.6 As d’indice optique n = 3.3 constituent la gaine du guide ; le cœur du guide est formé par la couche de GaAl0.3 As d’indice plus grand n = 3.5, au sein de laquelle est incrusté le fil quantique de GaAs. 10 CHAPITRE 2. OSCILLATIONS DE RABI 11 Fig. 2.1 – Schéma représentant la configuration d’excitation d’un fil et de détection de la µ-lum dans la direction perpenduculaire. En gris, le guide d’onde. Fig. 2.2 – a) Image de la surface d’un échantillon de fils en V. b) Image de la surface quand on excite un guide d’onde. Dans cette géométrie particulière, les modes optiques épousent la forme en V du guide. Au centre du guide d’onde, c’est-à-dire au niveau du fil, la polarisation se décompose sur les deux modes propres linéaires y et z [6]. L’excitation lumineuse se propage selon l’axe libre du fil et elle est polarisée selon l’axe y. Après la présentation des enjeux de ce dispositif expérimental, nous proposons une description détaillée du dispositif expérimental. 2.1.2 Description du dispositif La figure 2.3 représente le schéma du montage en configuration guidée. La partie centrale est le cryostat1 qui maintient l’échantillon à une température de 10K. Il possède trois accès optiques : le premier permettant d’exciter le guide d’onde ; 1 Pour une description complète du cryostat utilisé cf annexe A CHAPITRE 2. OSCILLATIONS DE RABI 12 le deuxième, de récupérer la luminescence perpendiculairement ; enfin le troisième, d’observer la transmission du fil. La source de lumière est un laser Titane-Saphir (TiSa) à verrouillage de modes, pompé par un laser N d : Y V O4 continu délivrant une puissance de 10 W. Le laser TiSa génère des impulsions lumineuses d’une picoseconde, de longueur d’onde accordable entre 700 nm et 1000 nm. Le taux de répétition des pulses est 82 MHz, soit une impulsion toutes les 12 ns. Le faisceau est focalisé par un objectif de microscope de grande ouverture numérique placé devant le cryostat, offrant une résolution spatiale limitée par la diffraction de l’ordre de 1 µm. Une fois focalisé sur le guide au bord de l’échantillon, le faisceau se propage en excitant les différentes BQ dans le fil. Dans cette configuration, la puissance maximale reçue par l’échantillon peut être de 500 mW. Une ligne à retard peut être utilisée pour obtenir deux impulsions séparées de quelques dizaines de picosecondes. Elle est réalisée à partir d’un interféromètre de Michelson dont la différence de marche est réglée par l’expérimentateur pour obtenir le délai voulu. Nous avons utilisé ce dispositif pour faire les expériences de contrôle cohérent présentées dans le chapitre 3. La luminescence est collectée sur la face de l’échantillon où sont gravés les fils par un objectif de microscope qui peut être déplacé le long de l’axe du guide d’onde. Une géométrie confocale permet d’observer localement une surface de 1 µm2 sur l’échantillon. La luminescence de la BQ est ensuite analysée par un spectromètre de résolution spectrale 40 µeV . Nous avons utilisé un réseau de 1200 traits/mm blasé dans le rouge. Le signal, à la sortie du spectromètre, peut être détecté, soit par une caméra CCD pour faire de la spectroscopie, soit par une caméra à balayage —streak camera— de résolution temporelle 2 ps pour les mesures résolues temporellement. Les spectres obtenus sont présentés dans le chapitre 3. La section suivante, après un bref rappel théorique, présente les résultats expérimentaux concernant les oscillations de Rabi en régime impulsionnel. 2.2 Préparation d’une superposition cohérente via les oscillations de Rabi Nous rappelons les résultats importants concernants l’interaction d’un système à deux niveaux avec une onde électromagnétique quasi-résonnante. Rappelons que le système à deux niveaux considéré ici oscille entre les deux états suivants : l’état vide d’exciton noté |0i et l’état fondamental de l’exciton noté |1i. 2.2.1 Régime continu Lorsque le champ résonnant est stationnnaire de la forme E0 cos ωt, l’équation de Schrödinger appliquée au système {onde + système à deux niveaux} conduit à une solution oscillante pour la probabilité de présence d’un exciton dans l’état fondamental à l’intérieur de la BQ, la condition initiale étant l’absence d’exciton dans CHAPITRE 2. OSCILLATIONS DE RABI 13 Fig. 2.3 – Schéma du dispositif expérimental. la BQ. Cette probabilité PX s’écrit en fonction de la pulsation de Rabi Ω = E0 µ/h̄, µ étant le moment dipolaire de la transition [7] : PX = sin2 Ω t 2 L’interprétation physique de cette oscillation est assez intuitive : lorsqu’on branche le champ, la probabilité d’absorber un photon dans la BQ augmente jusqu’à prendre la valeur un ; ensuite, le champ induit de l’émission stimulée et la BQ retombe dans l’état vide après emission d’un photon. Ce processus se répéte tant que la perturbation est présente. Le champ électromagnétique créé par le laser TiSa n’est pas stationnaire. Nous allons voir comment généraliser la description des oscillations de Rabi au cas d’impulsions lumineuses. 2.2.2 Régime impulsionnel Lorsque l’excitation lumineuse est une impulsion laser de largeur temporelle fixée à 1 ps, on observe des oscillations de Rabi, non plus Ren fonction du temps, mais en +∞ µ R +∞ ′ ′ fonction de l’aire de l’impulsion vue par la BQ Θ = −∞ Ω(t )dt = h̄ −∞ E0 (t′ )dt′ , E0 (t) étant l’enveloppe du champ électrique. Ainsi, une oscillation complète entre l’état vide d’exciton et le niveau fondamental a lieu lorsque l’aire du pulse vaut 2π [8]. Sur la figure 2.4, nous présentons une courbe expérimentale d’une oscillation de Rabi contenant trois périodes en fonction de l’aire de l’impulsion ou, de manière équivalente, de la racine carrée de l’intensité de l’onde électromagnétique incidente. Le protocole expérimental à suivre pour obtenir cette oscillation est détaillé dans le chapitre 3. CHAPITRE 2. OSCILLATIONS DE RABI 14 La figure 2.5 représente l’inversion de population —la probabilité d’avoir un exciton moins celle de ne pas en avoir : PX − Pvide — dans trois cas remarquables : a) une impulsion π créant un exciton ; b) une impulsion π/2 créant la superposition cohérente suvante |ψi = √12 (|0i + |1i) ; c) une impulsion 2π correspond à une période entière et donc ne créant pas d’exciton dans la BQ. Sur cette figure, l’impulsion laser est normalisée à l’unité. Physiquement, des oscillations de Rabi ont lieu au cours du temps uniquement pendant la durée de l’impulsion τ , qui est constante. Le paramètre qui change sur chacune de ces trois courbes est l’amplitude du champ électrique. Par conséquent, les oscillations de Rabi ont toujours lieu pendant le même intervalle temporel τ , mais leurs fréquences moyennes augmentent si l’amplitude du champ augmente. La courbe expérimentale présente deux caractéristiques importantes à discuter. Premièrement, l’amplitude des oscillations décroît quand la puissance augmente mettant en défaut la formule donnée ci-dessus pour PX . La théorie présentée suppose la BQ à l’abri de toute perturbation extérieure autre que la lumière provenant du laser. Or cette hypothèse n’est évidemment pas tenable pour un système de matière condensée tel qu’une BQ. Celle-ci subit des perturbations causées par les phonons acoustiques et par l’émission spontanée. Ces processus ont pour principal effet la perte de cohérence de phase de l’état quantique créé par l’impulsion laser au bout d’un temps caractéristique T2 appelé temps de cohérence. Le formalisme qui prend en compte ces effets de décohérence est celui de la matrice densité dont la dynamique est décrite par un système de quatre équations différentielles couplées appelées équations de Bloch optique [9]. L’ajustement numérique de la figure 2.4 est réalisé à partir de la solution de ces équations. Deuxièmement, seulement trois périodes sont observables —maximum obtenu pendant le stage— sur cette BQ. Une impulsion laser 5π correspond à une puissance mesurée de 3.6 mW. Au dessus de cette puissance, cela commence à être très difficile de distinguer la luminescence du laser diffusé. Cet inconvénient constitue la principale limite de la manipulation d’état quantique pendant le temps de cohérence. En résumé, il est donc possible de préparer une BQ dans un état voulu par l’expérimentateur en jouant sur la puissance du laser TiSa pourvu que l’on connaisse la courbe expérimentale des oscillations de Rabi de cette BQ. Il nous reste à présenter le principe de la micro-photoluminescence (µlum) d’une BQ et son exploitation pour obtenir, entre autres, une courbe expérimentale des oscillations de Rabi. CHAPITRE 2. OSCILLATIONS DE RABI 15 Fig. 2.4 – Oscillations de Rabi. Points noirs : points expérimentaux. Ligne bleue : solution des équations de Bloch optique. Fig. 2.5 – Inversion de population pour trois puissances du laser particulières : a) impulsion π, b) impulsion π/2, c) impulsion 2π. En rouge : enveloppe de l’impulsion laser. En bleu : inversion de population au cours du temps. Chapitre 3 Micro-photoluminescence 3.1 Principe de la micro-luminescence Les expériences de photoluminescence consistent à étudier la lumière émise par émission spontanée après excitation d’une BQ par des photons d’énergie supérieure ou égale au niveau fondamental de l’exciton [3]. Ce dernier, alors créé par l’absorption de ces photons, se désexcite par recombinaison du trou et de l’électron qui le constituent en émettant un photon, s’il s’agit d’une recombinaison radiative. L’enregistrement de l’intensité de l’émission en fonction de la longueur d’onde constitue un spectre de luminescence. Cependant, les méthodes de luminescence classique sont, du fait de l’élargissement inhomogène de la luminescence, des moyennes sur les différents sites optiquement actifs. La micro-luminescence permet d’aller au-delà de cette limitation. Les expériences de µlum en configuration guidée consistent à exciter un guide d’onde unique et à détecter l’émission spontanée avec une grande résolution spatiale. On peut ainsi observer suffisamment peu de BQ pour séparer la raie inhomogène en une somme de pics homogènes provenant chacun d’une BQ différente. La figure 3.1 montre une superposition d’un spectre de macro-luminescence et d’un spectre de micro-luminescence. On voit clairement l’intérêt de la micro-luminescence pour l’étude des propriétés optiques d’un objet unique. Il est possible de pousser plus loin l’étude de la µlum en mesurant son évolution temporelle. La dynamique de la µlum fournit, en effet, des informations sur les temps de vie, notés T1 , des niveaux dont l’émission crée la luminescence. Pour cela, on enregistre l’intensité de la luminescence en fonction du temps pour une énergie de détection donnée. La courbe temporelle est caractéristique de tous les sites optiquement actifs qui émettent dans la fenêtre spectrale de détection. Il suffit de sélectionner un pic de luminescence isolé spectralement pour que la courbe temporelle obtenue soit caractéristique de la BQ unique qui a engendré ce pic. Enfin, nous verrons que le temps de cohérence T2 est également mesurable en utilisant deux impulsions laser séparées de quelques picosecondes dans une expérience dite de contrôle cohérent. 16 CHAPITRE 3. MICRO-PHOTOLUMINESCENCE 17 Fig. 3.1 – Spectre de macro-luminescence (en rouge). Spectre de microphotoluminescence (en bleu). 3.2 Micro-luminescence résolue spatialement La figure 3.2 montre un spectre de µlum non-résonnante d’un fil quantique faiblement excité avec une intensité de quelques centaines de microwatts. On observe, d’une part, un pic assez large isolé à 1.66 eV qui correspond à la diffusion du laser TiSa et d’autre part, une dizaine de pics fins de largeur typique 100 µeV à plus basse énergie correspondant aux BQ excitées. La structure fine de cette forêt de pics est caractéristique de la portion de fil observé. Les spectres non-résonnants permettent de trouver une BQ dont la luminescence est intense relativement au laser, bien isolée spectralement, et à basse énergie afin de n’exciter qu’une seule BQ dans la région observée. Sur le spectre, le pic intense de µlum à basse énergie est un bon exemple de BQ isolée qu’on peut exciter à la résonance. Ensuite, la longueur d’onde de l’excitation est accordée à l’énergie de la transition repérée précédemment. Un exemple typique de spectre d’émission résonnante de l’état fondamental de l’exciton est présenté sur la figure 3.3 pour une puissance d’excitation de 370 µW . Les points expérimentaux sont ajustés numériquement par la somme d’une lorentzienne d’une largeur à mi-hauteur de 100 µeV et d’un fond gaussien dû essentiellement à la diffusion du laser de largeur à mi-hauteur de 500 µeV . Il faut enregistrer des spectres pour une vingtaine de puissances d’excitation différentes s’étalant de 5 µW à 5 mW et extraire à chaque fois le fond gaussien pour tracer l’intensité de la µlum en fonction de la racine carrée de la puissance d’excitation. On obtient alors, pour cette boîte particulière, la courbe expérimentale des oscillations de Rabi présentée sur la figure 2.4. Nous avons ajusté les oscillations de Rabi en utilisant les équations de Bloch optique et une impulsion laser de forme temporelle secante hyperbolique. Les paramètres ajustés sont les suivants : les constantes de temps T1 et T2 et le moment dipolaire µ de la transition. La valeur du temps de vie trouvée est 250 ps et on trouve une borne inférieure de 20 ps au temps de cohérence. Nous verrons dans les sections suivantes deux autres méthodes pour mesurer ces deux temps caractéristiques, donnant des résultats en accord avec les valeurs trouvées. Par contre la valeur CHAPITRE 3. MICRO-PHOTOLUMINESCENCE 18 Fig. 3.2 – Spectre non-résonnant de luminescence. trouvée pour le moment dipolaire est très surprenante. Théoriquement [10], on prédit µ = 50 Debye pour des BQ de GaAs engendrées par des fluctuations d’interfaces. La valeur permettant le meilleur ajustement est plus grande de trois ordre de grandeur. L’hypothèse la plus probable pour expliquer cet écart avec la valeur attendue est la suivante : le couplage lumière-matière est plus fort que celui envisagé à priori à cause d’un ralentissement de la lumière au niveau de la BQ. Il est connu qu’une impulsion intense, se propageant dans un milieu à la résonance, subit des effets non-linéaires qu’on ne peut pas négliger, même au permier ordre. En particulier, à la résonance, l’indice de réfraction varie beaucoup et rapidement, conduisant à une modification de la vitesse de groupe du pulse laser. Dans le cas d’une dispersion abrupte positive, la vitesse de groupe devient beaucoup plus petite que la vitesse de la lumière dans le milieu. Tous ces effets sont détaillés dans l’annexe B intitulée ralentissement de la lumière. Dans la section suivante, nous présentons l’expérence de µlum résolue en temps. 3.3 Micro-luminescence résolue temporellement Il est possible de mesurer la dynamique temporelle du signal de µlum avec la caméra à balayage et d’en déduire le temps de vie radiatif du niveau fondamental de l’exciton. Le principe de fonctionnement d’une camera à balayage est de transformer le profil temporel d’un signal lumineux en un profil spatial sur un détecteur. Cela est réalisé à l’aide d’un photomultiplicateur, qui convertit le signal lumineux en un signal électrique. Ensuite, les électrons sont accélérés dans un tube cathodique et passent dans un champ électrique variable produit par deux déflecteurs parallèles, ce qui a pour effet de dévier les électrons. Un détecteur CCD repère finalement la position des électrons sur l’écran. CHAPITRE 3. MICRO-PHOTOLUMINESCENCE Intensité du signal (Unités arb.) 19 1.6330 1.6335 1.6340 1.6345 1.6350 1.6355 1.6360 Energie (eV) Fig. 3.3 – Spectre de micro-photoluminescence. En noir : points expérimentaux. En rouge : modélisation de la diffusion du laser. En orange : modélisation de la raie d’émission. En bleu : ajustement des points expérimentaux (somme des courbes rouge et orange). CHAPITRE 3. MICRO-PHOTOLUMINESCENCE 20 Fig. 3.4 – A gauche : image de µlum d’une boîte unique fournie par la streak camera. A droite : coupe à l’énergie de transition de la boîte représentant le déclin temporel de la µlum (échelle semi-logarithmique). La figure 3.4 représente une image issue de la streak camera. L’intensité des points jaunes est proportionnelle au nombre de photons reçus par la camera. Une coupe verticale de cette courbe nous donne accès à l’intensité de la µlum en fonction du temps. On observe aux temps courts un pic intense d’une largeur de quelques picosecondes qui mesure la diffusion du laser. Après le pic de diffusion du laser, le déclin de la µlum est mono-exponentiel —une droite en échelle semi-logarithmique— dont on tire une durée de vie de 240 ps. Sur la figure 3.4, on voit l’intérêt d’utiliser des impulsions laser plutôt qu’un champ continu qui masquerait l’ensemble du déclin de la µlum. Par ailleurs, l’expérience de contrôle cohérent décrite ci-dessous permet de mesurer le temps de cohérence T2 du niveau fondamental de l’exciton. 3.4 Contrôle cohérent L’objectif du contrôle cohérent est le suivant : premièrement, avec une impulsion pompe, préparer une BQ dans un état dont la phase est identique à la phase de l’onde électromagnétique excitatrice ; deuxièmement, sonder la cohérence de l’état créé par la pompe avec une impulsion sonde retardée de quelques picosecondes de la pompe. La distance temporelle entre les deux impulsions est appelée délai. Nous allons voir comment mesurer le temps de cohérence T2 en modifiant le delai. Expérimentalement, le délai est obtenu à l’aide d’un interféromètre de Michelson dont on peut régler finement la différence de marche entre les deux bras. Un des miroirs est monté sur un moteur piézo-électrique asservi en position afin de contrôler la différence de marche à l’échelle d’un cycle optique. Le principe physique est schématisé sur la figure 3.5. Le raisonnement comprend trois étapes. En premier lieu, l’impulsion pompe —en rouge— prépare la BQ dans un état cohérent —en bleu— dont la phase est la même que la phase de la pompe. On voit, en effet, que la sinusoïde bleue se superpose, à l’origine, à l’impulsion rouge. CHAPITRE 3. MICRO-PHOTOLUMINESCENCE 21 Fig. 3.5 – Les différentes étapes d’une expérience de contrôle cohérent. Ensuite, une seconde impulsion —en orange— arrive sur la BQ. Deux cas limites sont envisagés : ou bien elle est en phase avec la pompe, ou bien elle est en opposition de phase avec la pompe. Dans le premier cas, l’état quantique créé par la sonde — en bleu— interfère constructivement avec l’état quantique créé par la pompe parce qu’ils ont exactement la même phase. Dans le second cas, l’état quantique créé par la sonde —en vert— interfère destructivement avec l’état quantique créé par la pompe parce qu’ils sont déphasés de π. Cependant, cette description n’est rigoureusement correcte que si l’état quantique créé par la pompe n’a pas perdu sa cohérence de phase pendant le délai. Si tel est le cas, alors le terme d’interférence est moyenné à zéro. On en déduit qu’en mesurant le contraste des interférences en fonction du délai, il est possible de mesurer le temps de cohérence de l’état créé par l’impulsion pompe. La figure 3.6 montre —à gauche— la différence de µlum obtenue entre une impulsion sonde en phase avec l’impulsion pompe —en noir sur la figure— et une impulsion en opposition de phase —en rouge sur la figure—. A droite, est représenté la décroissance du contraste en fonction du délai. Pour cette BQ, le temps de cohérence trouvé T2 est de 36 ps. Cette valeur est en accord avec celle obtenue par ajustement numérique des oscillations de Rabi présentées dans le deuxième chapitre. Enfin, signalons que les ordres de grandeurs trouvés pour cette boîte particulière sont caractéristiques des temps de vie et des temps de cohérence des autres BQ de l’échantillon. CHAPITRE 3. MICRO-PHOTOLUMINESCENCE 22 Fig. 3.6 – A gauche : intensité de la µlum obtenue avec deux pulses en phase (en noir) et en opposition de phase (en rouge). A droite : contraste des interférences en fonction du délai entre les deux pulses. Conclusion Les résultats obtenus lors de ce stage démontrent la possibilité de préparer une BQ unique dans n’importe quelle superposition cohérente en choisissant judicieusement la puissance d’excitation pourvu qu’on connaisse la courbe expérimentale représentant les oscillations de Rabi en fonction de l’aire de l’impulsion lumineuse. Cependant, nous avons montré que le principal écart au modèle du système à deux niveaux est le temps de cohérence très court du niveau excitonique fondamental —T2 = 36 ps—. Le calcul quantique tire son avantage de la cohérence de l’état créé : il faut donc être capable d’effectuer des opérations à plusieurs bits quantiques pendant le temps de cohérence et d’allonger ce temps. Un important travail à effectuer est la démonstration expérimentale directe du ralentissement de la lumière à la résonance d’une BQ. Cela est difficile à observer directement étant donné la faible extinction du faisceau lumineux résonnant sur la transition fondamentale d’une BQ unique. Enfin, une perspective de développement de l’expérience est l’intrication de deux BQ. La figure 3.7 schématise deux BQ intriquées dont l’état quantique se met, par exemple, sous la forme non séparable suivante : |ψi = |0A , 0B i+|1A , 1B i. Cette étape est en effet cruciale pour le traitement quantique de l’information qui nécessite des portes quantiques non seulement à un qubit, mais aussi à deux qubits. Ceci pourrait être réalisé en couplant par interaction coulombienne deux états de spins différents dans une même BQ, ou bien tout simplement deux BQ voisines. Fig. 3.7 – Schéma de deux boîtes quantiques intriquées. 24 Bibliographie [1] Exploring the Quantum, S. Haroche, J. P. Raymond (Oxford University Press, 2006) [2] X. L. Wang et V. Voliotis, J. Appl. Phys. 99, 121301 (2006) [3] Etude de fils quantiques semiconducteurs par photoluminescence résolue spatialement et temporellement : du fil à la boîte, thèse de J. Bellessa (29 juin 1998) [4] Wave mechanics applied G.Bastard (EDP, 1988) to semiconductor heterostructures, [5] Mécanique quantique, C. Cohen Tannoudji, B. Diu, F. Laloë, (Enseignement des sciences, 1977) [6] D. Crisinel et al, Opt. and Quant. Elec.31, 797 (1999) [7] Introduction aux lasers et à l’optique quantique, G. Grynsberg, A. Aspect, C. Fabre (Ellipses, 1997) [8] Lasers, Interaction lumière-atomes, B. Cagnac, J. P. Faroux, (EDP/CNRS édition, 2002) [9] Atom-Photon Interactions : Basic Processes and Applications, C. Cohen Tannoudji, J. Dupont-Roc, G. Grynsberg, (Wiley, 1992) [10] L. C. Andreani et al, Phys. Rev. B 60, 13276 (1999) [11] S. L. McCall et al, Phys. Rev. 183, 457 (1969) [12] J. P. Marangos, J. Mod. Opt., 45 471 (1998) [13] R. W. Boyd et al, Phys. Rev. A 71, 023801 (2005) 25 Annexe A Fonctionnement du cryostat Le cryostat est au centre du dispositif expérimental. Toutes les expériences sont réalisées à basse température, l’échantillon étant fixé sur le doigt froid du cryostat. La grande difficulté technique est d’éliminer les vibrations engendrées par l’évaporation de l’azote et de l’hélium liquides et par les dilatations des matériaux qui constituent le cryostat. Un cryostat spécifique a donc été développé au sein du laboratoire garantissant la stabilité de l’échantillon à la fraction de micron près durant plusieurs heures. Le cryostat comprend un vase rempli d’azote liquide à 77 K entourant un vase à hélium liquide à 4.2 K, les deux vases étant séparés par une enceinte sous vide pour diminuer la diffusion thermique entre les deux vases. L’échantillon est fixé sur un porte-échantillon lui-même en contact avec le doigt froid contenant de l’hélium liquide. Par ce biais, l’échantillon est maintenu à une température de 10 K pendant la durée de l’expérience. Remarquons qu’une paroi cylindrique en cuivre, appelée cache à azote, qui est fixée sur le fond du vase à azote fait office d’écran thermique qui protège le porte-échantillon du rayonnement extérieur. Un orifice dans le cache à azote à la hauteur de l’échantillon permet d’avoir accès à trois de ses faces : les deux tranches —entrées et sorties des guides d’ondes— et la face où sont gravés les V et par laquelle est récupérée la micro-luminescence. Enfin, une cuve en verre isole l’échantillon de l’extérieur. Afin de garantir la plus grande autonomie possible au cryostat, il est nécéssaire de réduire au maximum l’évaporation d’hélium. Cela est réalisé en diminuant la diffusion thermique entre, d’une part, l’enceinte extérieure et le vase à azote et, d’autre part, entre le vase à azote et le vase à hélium. C’est pourquoi la qualité du vide à l’intérieur du cryostat est cruciale. Tout d’abord, avant même l’introduction des liquides cryogèniques, un vide secondaire —10−3 mbar— est maintenu par une pompe à vide. Ensuite, on procéde au transfert d’azote puis au transfert d’hélium qui, en refroidissant le cryostat, permettent d’améliorer le vide qui passe de 10−3 à 10−7 mbar ; on parle alors de vide cryogénique. Dans ces conditions, l’autonomie du cryostat est de six heures. La stabilité du cryostat est parfaitement adaptée aux études optiques que nous réalisons : le spectre de µ-lum d’un fil quantique, caractéristique de l’endroit étudié, est le même aprés six heures d’expériences, prouvant alors que les déplacements sont inférieurs au micron. 26 ANNEXE A. FONCTIONNEMENT DU CRYOSTAT Fig. A.1 – Schéma de principe du cryostat à doigt froid. 27 Annexe B Ralentissement de la lumière Les expériences de propagation d’impulsions lumineuses ultra-courtes à la résonance avec un système à deux niveaux peuvent mettre en évidence des processus physiques non-linéaires et cohérents. La vitesse de groupe du pulse qui se propage dans le milieu est modifiée par ces phénomènes, qui provoquent en même temps une déformation du pulse et de la transparence auto-induite —SIT— [11]. En physique atomique, deux processus sont connus pour ralentir la lumière : l’oscillation cohérente de population —CPO— [12] et la transparence induite électromagnétiquement —EIT— [12]. Dans ces effets, la vitesse de groupe vg = c/ng peut atteindre seulement quelques mètres par seconde, ng étant l’indice de groupe défini par la relation suivante [13] : dn dω Afin de fixer les idées, regardons l’effet produit qualitativement sur une impulsion π schématisée sur la figure B.1. Cette impulsion provoque avec certitude la formation d’un exciton dans son état fondamental, si bien que la BQ contenant l’exciton ne peut plus absorber de photon à cette énergie et devient donc transparente. Ainsi, après le passage du pulse π, le coefficient d’absorption de la BQ à la fréquence de résonance devient nul. Le coefficient d’absorption α est tracé en fonction de l’écart à la pulsation de résonance δω sur la figure B.2. On a pris l’expression analytique suivante pour α(ω), où ω est la pulsation optique, ω0 la pulsation de résonance et γ = 1/τ la largeur du trou de transparence qui est de l’ordre de l’inverse de la largeur à mi-hauteur de l’impulsion laser [13]. ng = n + ω0 α(ω) = α0 1 1− 1 + (ω − ω0 )2 /γ 2 ! L’indice de réfraction n(ω) associé à cette courbe d’absorption est obtenu par les relations de Kramers-Krönig : α0 λ n(ω) = n0 + 4π ! (ω − ω0 )τ 1 + (ω − ω0 )2 τ 2 En dérivant cette expression par rapport à ω, on obtient une courbe qui possède un maximum à la fréquence de résonance, pouvant atteindre 103 s−1 . Ce terme peut donc conduire à un indice de groupe très grand, de l’ordre de 1000. 28 ANNEXE B. RALENTISSEMENT DE LA LUMIÈRE 29 Fig. B.1 – En trait plein : forme temporelle d’une impulsion laser π. En tirets rouges : probabilité d’occupation du niveau excité. Fig. B.2 – Représentation schématique de la dépendance en fréquence de α : coefficient d’absoption, n : indice de réfraction et dn/dω.