2 Commanditaire : Commission de l’océan Indien Financement : Union européenne Prestation : élaboration d’une note conceptuelle en vue de l’organisation d’une conférence régionale sur l’économie bleue © Commission de l’océan Indien, avril 2015 3 Conférence régionale sur l’économie bleue Levier d’une croissance durable et innovante pour l’Indianocéanie Note conceptuelle Commission de l’océan Indien 4 5 Table des matières Contexte .................................................................................................................................................. 6 Un plaidoyer constant en faveur de l’économie bleue ....................................................................... 6 Une expertise développée au fil des projets ....................................................................................... 7 La planète bleue en chiffres .................................................................................................................... 9 De l’économie verte à l’économie bleue............................................................................................... 10 L’économie verte au cœur de l’agenda mondial post-Rio+20 .......................................................... 10 L’économie bleue, réponse aux limites de l’économie verte ? ......................................................... 10 L’économie bleue de Günter Pauli .................................................................................................... 11 Les PEID pour une croissance verte fondée sur le potentiel des océans .......................................... 11 La COI engagée en faveur de l’économie bleue .................................................................................... 13 La position des instances décisionnelles de la COI............................................................................ 13 L’économie bleue au cœur des interventions de la COI ................................................................... 15 L’ambition affichée des pays membres de la COI ................................................................................. 17 La Réunion : le Livre Bleu balise les ambitions maritimes................................................................. 17 Maurice : l’économie océanique au cœur d’une stratégie de développement nationale................ 18 Les Seychelles : vers un Horizon bleu ................................................................................................ 19 Madagascar et les Comores, une ambition qui se crée .................................................................... 21 Madagascar : un potentiel à encadrer .......................................................................................... 21 Comores : des opportunités de développement qui s’affirment .................................................. 22 La conférence régionale de la COI sur l’économie bleue ...................................................................... 23 Intitulé proposé ................................................................................................................................. 23 Les secteurs couverts ........................................................................................................................ 23 Objectifs ............................................................................................................................................ 23 Les acteurs à mobiliser ...................................................................................................................... 23 Aspects logistiques et organisationnels ............................................................................................ 24 Date et lieu .................................................................................................................................... 24 Séquençage de la conférence........................................................................................................ 24 Logistique ...................................................................................................................................... 26 Budget ........................................................................................................................................... 26 6 Contexte Un plaidoyer constant en faveur de l’économie bleue A l’occasion de la Conférence des Nations unies sur le développement durable Rio+20 qui s’est tenue au Brésil en juin 2012, les Petits Etats insulaires en développement (PEID) ont plaidé pour que la gestion durable des océans soit intégrée au concept d’économie verte. A cette occasion, la Commission de l’océan Indien (COI) a souligné l’importance des océans pour l’avenir économique de ses pays membres – Union des Comores, France/Réunion, Madagascar, Maurice et Seychelles. L’économie bleue, en complément des principes de l’économie verte, a été présentée comme « un nouveau pilier du développement » de l’Indianocéanie. « La Voie à suivre », déclaration finale de la IIIème Conférence internationale des Nations unies sur les PEID de Samoa, du 1er au 4septembre 2014, a rappelé que « les mers et les océans, ainsi que les zones côtières, forment une composante essentielle de l’écosystème de la Terre et sont intrinsèquement liés au développement durable ». Outre le rôle des mers et océans dans la séquestration du carbone, la sécurité alimentaire ou encore l’identité et la culture des populations des PEID, la déclaration de Samoa insiste sur leur valeur économique : « la viabilité des pêches et de l’aquaculture, le tourisme côtier, l’utilisation possible des ressources des fonds marins et les sources potentielles d’énergie renouvelable constituent les éléments de base d’une économie océanique durable pour les PEID ». La déclaration de Samoa s’inscrit dans la dynamique internationale réaffirmée en janvier 2014, à Abu Dhabi, à l’occasion du Sommet mondial sur l’économie bleue, co-organisé par les gouvernements émiratis et seychellois. Cet événement a permis aux PEID d’insister sur le rôle moteur que doivent jouer les océans dans une dynamique mondiale en faveur du développement durable. Les PEID, et notamment la COI, sont résolument engagées dans une campagne de sensibilisation de la communauté internationale sur les opportunités de croissance durable qu’ouvrent l’économie bleue. A l’occasion du IVème Sommet de la COI du 23 août 2014 à Moroni, les chefs d’Etat et de gouvernement des pays membres ont rappelé leur volonté commune de tirer profit du potentiel de l’océan Indien dans une démarche raisonnée de long terme. Ils ont notamment souligné l’interdépendance des défis économique, écologique, climatique et énergétique qui obligent à une approche régionale coordonnée en faveur de l’émergence d’une croissance bleue authentiquement durable. C’est dans ce sens que la COI est appelée à poursuivre et renforcer son action en matière de gestion durable des ressources marines et côtières, de sécurité maritime, de promotion des énergies renouvelables et de l’innovation technologique. Dans la foulée du Sommet de la COI, les pays membres ont également plaidé pour la promotion d’une économie océanique à l’occasion de la 3ème Conférence des Nations unies sur les PEID de Samoa en septembre 2014. La COI a fait valoir la plus-value pour les pays insulaires d’une économie bleue reposant sur l’exploitation responsable des ressources marines et côtières autant que sur la préservation des écosystèmes et le développement de technologies et filières d’activités innovantes. 7 Ce plaidoyer constant de la COI, nourrie de son expertise en matière de gestion des ressources maritimes et des espaces côtiers et marins, est en phase avec les ambitions affichées au niveau continental. L’Union africaine voit dans l’économie bleue « la nouvelle frontière de la renaissance africaine » (22ème session ordinaire de l’Assemblée de l’UA, 30-31 janvier 2014). Elle est ainsi au cœur de la Stratégie intégrée pour les mers et les océans à l’horizon 2050 et constitue l’un des enjeux d’avenir énoncés dans l’Agenda 2063 de l’organisation continentale d’août 2014. C’est dans cet esprit que le Bureau régional pour l’Afrique orientale de la Commission économique des Nations unies pour l’Afrique (UNECA) a axé les travaux annuels de son Groupe intergouvernemental d’experts sur l’économie bleue. La COI a activement participé à cette conférence qui s’est tenue à Madagascar du 2 au 5 mars 2015 faisant valoir l’importance d’une gouvernance durable des océans au bénéfice du développement. Preuve de l’importance de la thématique dans la perspective du nouvel agenda mondial pour le développement, le Secrétariat de la Convention de Nairobi, dont la COI est partenaire, et l’Indian Ocean Rim Association (IORA), qui compte une vingtaine de pays membres du pourtour de l’océan Indien dont les quatre pays ACP de la COI ainsi que la France en tant que partenaire de dialogue, organiseront en juin et septembre respectivement des conférences sur l’économie bleue comme levier de développement durable. Une expertise développée au fil des projets Cette approche spécifique de l’économie verte fondée sur le potentiel des océans est au cœur des actions de la COI. Les pays membres de la COI étendent leur juridiction sur un espace maritime de plus de cinq millions de kilomètres carrés. L’océan et les milieux côtiers constituent le socle de la croissance durable de ces pays. Déjà, plusieurs secteurs moteurs de leurs économies sont directement liés aux océans et littoraux, notamment le tourisme et la pêche. D’autres secteurs innovants émergent ou font l’objet d’une réflexion des gouvernements et du secteur privé. Il s’agit, entre autres, de production d’énergie renouvelable, de systèmes de climatisation à l’eau naturellement froide, d’industrie pharmaceutique, d’aquaculture. En traitant notamment de l’aménagement des zones côtières, de la gestion durable des pêches, de la surveillance des zones maritimes, du transport, des infrastructures « flottantes » ou de l’adaptation au changement climatique, les projets de la COI fournissent une base solide à une dynamique de croissance bleue dans l’Indianocéanie. Pour certains d’entre eux, ils s’inscrivent également dans un cadre géographique étendu à l’Afrique orientale et australe. Les pays membres de la COI ont adopté des plans stratégiques ou, à tout le moins, ont conscience du potentiel de l’économie bleue/océanique. Il existe dans la région une expertise qu’il convient de mobiliser et de faire connaître. Il existe aussi des entrepreneurs ou des porteurs de projets qui doivent pouvoir partager leurs expériences, mutualiser les moyens, capitaliser sur les avancées de la région et du monde. Il existe un potentiel de coopération évident, un bassin de synergies, qui peut faire de la région un exemple en matière d’économie bleue. Il existe, enfin, une réelle volonté 8 politique qui a été clairement exprimée par les chefs d’Etat et de gouvernement des pays membres de la COI lors du Sommet de Moroni et réitérée à l’occasion de la Conférence de Samoa. La COI, en tant que levier de l’action collective de ses pays membres, contribue positivement à l’émergence d’une économie bleue / océanique dans l’Indianocéanie comme en appui à ses pays membres. A cet égard, la Conférence de Samoa « soutient énergiquement les mesures visant à promouvoir et appuyer les efforts déployés aux niveaux national, sous-régional et régional pour évaluer, conserver, protéger, gérer et exploiter de manière rationnelle les océans, les mers et leurs ressources, en encourageant la recherche et la mise en œuvre de stratégies sur la gestion des zones côtières et la gestion écosystémique, y compris pour la gestion des pêches, et en renforçant les cadres juridiques et institutionnels nationaux en vue de l’exploration et de l’exploitation durable des ressources biologiques et non biologiques ». C’est dans ce contexte et conformément au mandat qu’elle a reçu de ses instances que la COI organisera une conférence régionale sur l’économie bleue au cours du premier semestre 2015. 9 La planète bleue en chiffres 72% de la surface de la planète est couverte par les océans 60% des services écosystémiques qui permettent à l’humanité de vivre sont fournis par les océans 40% de la population mondiale vit à moins de 100 km des côtes 90% du commerce international transite par voie maritime 50% des émissions carbone mondiales sont absorbées par les océans 32% des stocks mondiaux de poissons sont surexploités, épuisés ou en phase de reconstitution 8% de la population mondiale (540 millions de personnes) vit de la pêche et de l’aquaculture Les produits de la pêche sont la principale source de protéine animale pour plus de 50% des populations des PEID, d’Afrique subsaharienne et d’Asie du Sud. 136 milliards de dollars, c’est la valeur du commerce mondial des produits de la pêche à l’export en 2013 Le coût de la pêche illégale et non-déclarée est estimé entre 10 et 23,5 milliards de dollars par an L’exploitation et le commerce des produits issus des pêcheries génèrent 3,5 millions d’emplois dans la région Durant les dernières décennies du XXe siècle, 30% des mangroves du monde ont disparu, 40% des récifs coralliens ont été détruits ou sérieusement endommagés sous la pression humaine L’Indianocéanie est l’un des 34 points chauds de la biodiversité mondiale L'institut britannique Carbon Trust a estimé que le marché mondial de l’énergie houlomotrice et marémotrice pourrait représenter jusqu’à 535 milliards d’euros entre 2010 et 2050 Le tourisme, dont la croissance est intimement liée à la bonne santé de l’environnement marin et côtier, représente 7% à 60% du Produit intérieur brut des pays membres de la COI (sources : Programme des Nations unies pour l’environnement ; Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture ; Commission de l’océan Indien ; Carbon Trust Institute ; Banque mondiale, Fonds des Nations unies pour la population) 10 De l’économie verte à l’économie bleue L’économie verte au cœur de l’agenda mondial post-Rio+20 La Conférence des Nations unies sur le développement durable, Rio+20, qui s’est tenue au Brésil du 20 au 22 juin 2012, a mis l’accent sur l’économie verte au service du développement durable. Ainsi, l’économie verte est considérée comme étant un moyen d’aboutir à l’objectif de réduction de la pauvreté et de croissance économique durable. L’économie verte met à l’honneur la volonté de concilier économie et écologie. Autrement dit, il s’agit d’atteindre des objectifs de croissance, de production, de création d’emplois et de richesse tout en conservant les écosystèmes et en limitant la pollution. « Nous considérons que la réalisation d’une économie verte dans le contexte du développement durable et de l’élimination de la pauvreté est un des moyens précieux dont nous disposons pour parvenir au développement durable qui peut offrir des solutions pour l’élaboration des politiques sans pour autant constituer une réglementation rigide. Nous soulignons que l’économie verte devrait contribuer à l’élimination de la pauvreté et à la croissance économique durable, améliorer l’intégration sociale et le bien-être de l’humanité, et créer des possibilités d’emploi et de travail décent pour tous, tout en préservant le bon fonctionnement des écosystèmes de la planète. » (L’avenir que nous voulons, §56, Conférence des Nations unies sur le développement durable, Rio, 2012) L’économie bleue, réponse aux limites de l’économie verte ? Bien que l’économie verte présente une nette avancée en matière de pensée environnementale appliquée à l’économie, de nombreuses voix, notamment au sein de la communauté des chercheurs, en soulignent les limites. Par exemple, la production des agro-carburants provoque une pression sur les terres agricoles destinées à la production alimentaire. De fait, la production des agro-carburants a conduit à une concurrence entre agriculture destinée à la production énergétique et agriculture destinée à la production alimentaire. Il en a résulté une volatilité des prix alimentaires mondiaux et une redistribution des zones agricoles ajoutant une pression supplémentaire sur des écosystèmes jusqu’alors faiblement exploités. La course aux agro-carburants est, aux côtés des mauvaises récoltes, de la spéculation sur les stocks de denrées alimentaires et de l’insuffisance du pouvoir d’achat pour garantir un accès à une alimentation variée, l’un des fondements de la crise alimentaire de 2008. Selon Olivier de Schutter, rapporteur spécial des Nations unies pour le droit à l’alimentation, la diminution de 13 % des stocks mondiaux de céréales entre 2009 et 2011 est imputable pour les deux tiers à la demande en agrocarburants dans les pays industrialisés du Nord (F. Misser, « Les agro-carburants sur la sellette », Défis sud n°106, avril-mai 2012). Les nouveaux modes de production, notamment énergétique et agricole, répondant aux exigences de l’économie verte dans une démarche de développement durable, montrent donc des limites. En effet, dans un contexte global de crise et de dégradation du pouvoir d’achat –qu’elle soit réelle ou ressentie- il est difficile de justifier auprès des populations l’augmentation des taxes pour financer les 11 énergies renouvelables ou de payer plus pour consommer des produits issus de l’agriculture biologique. Toutefois, au sein des Nations unies, notamment au Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE), il est reconnu que les écosystèmes marins et côtiers ainsi que les secteurs d’activité liés à l’océan contribuent directement à la mise en place une économie verte. Le PNUE parle ainsi de « l’économie verte dans une planète bleue ». L’économie bleue de Günter Pauli Pour l’entrepreneur belge Günter Pauli, directeur de la fondation Zero Emission Research and Initiatives (ZERI) et auteur de « L’économie bleue : 10 ans, 100 innovations, 100 millions d’emplois », le modèle de l’économie verte n’est donc pas viable à long terme puisqu’il repose sur des taxes, des quotas et conduit à des coûts et des prix plus élevés. L’économie verte demande, selon lui, des financements importants « pour faire le moindre mal ». L’économie bleue de Günter Pauli s’inspire du génie, de la résilience et des modèles de production des écosystèmes. Centré sur le local et l’entrepreneuriat, favorisant l’innovation et les modes de production à faible coût, limitant les émissions carbone et les pertes, l’économie bleue, qui fait référence à la couleur dominante de la Terre, introduit un changement de paradigme. Il s’agit donc de transposer à l’échelle industrielle les prouesses de la nature. La Fondation ZERI, que Günter Pauli a créé en 1994, a donc entrepris le recensement de 100 innovations présentées dans son livre. Ces innovations ont donné lieu à la création d’entreprises et systèmes de production innovants (sécurité alimentaire, BTP, énergie) qui génèrent des emplois et n’entament pas la capacité de régénération du milieu. Les innovations présentées sont libres de droit ce qui favorise l’appropriation des principes de l’économie bleue prônée par Günter Pauli et leur mise en pratique. Les PEID pour une croissance verte fondée sur le potentiel des océans La couleur associée à l’avenir économique des îles est celle des océans. Cette approche nuance la vision d’une économie verte davantage tournée « Nos espaces étant insulaires, nous demandons que l’économie bleue fasse partie intégrante des négociations à venir sur l’économie verte. Notre espace maritime vers les terres émergées, représente deux fois la superficie de la mer Méditerranée. La forte dépendance de les ressources qu’elles nos îles vis-à-vis de leurs ressources marines et côtières et des services renferment et les activités écosystémiques fait de la conservation de la biodiversité un enjeu critique pour le économiques qu’elles bien-être de nos populations. La COI contribue déjà à l’amélioration de la gouvernance des océans, à travers la abritent. C’est en cela que lutte contre la pollution marine, la gestion durable des ressources halieutiques, le concept d’économie notamment par la surveillance des pêches, et la gestion intégrée des zones marines bleue diffère de son et côtières. […] Elle entend soutenir les efforts de bonne gouvernance des océans acception première, celle déployés par ses Etats membres, pour faire de l’économie bleue, un nouveau pilier de leur développement. de Günter Pauli. On notera Mais il faut que cette stratégie soit aussi une priorité reconnue et soutenue par la toutefois que l’économie communauté internationale. Le cadre international actuel de la protection des bleue/océanique repose océans n’est pas en mesure aujourd’hui d’apporter, dans sa dimension politique et institutionnelle, toutes les réponses aux menaces pesant sur le milieu marin. » également sur la préservation et la Danny Faure, vice-président de la République des Seychelles, délivrant le message mobilisation des services de la COI à la Conférence Rio+20 12 des écosystèmes marins en faveur du bien-être des populations et de pans entiers des économies insulaires. Dans le processus de préparation de la Conférence Rio+20, les Petits Etats insulaires en développement (PIED) ont insisté pour que l’économie Le leadership des Seychelles bleue soit davantage prise en compte dans le cadre de Les Seychelles occupent une position de leadership l’économie verte. Pour les Etats insulaires et les pays dans l’espace COI et au sein du groupe AIMS sur les côtiers, les océans constituent le socle d’un avenir enjeux de l’économie bleue. Compte tenu de leur durable. volonté de faire de l’économie bleu un enjeu de Des efforts institutionnels ont contribué à faire émerger le concept de l’économie bleue dans les débats sur l’économie verte. Le rapport « Une économie verte dans un monde bleu »1 s’inscrit dans cette logique. Ce rapport met l’accent sur le potentiel des mers et océans dans une démarche de développement durable reposant sur les outils de l’économie verte. Il « analyse la façon dont les secteurs clés ayant un lien avec l’environnement marin et/ou côtier peuvent contribuer à la transition vers une économie verte », note dans son préambule Achim Steiner, directeur exécutif du Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE) Les PEID sont les premiers promoteurs de l’économie bleue. Ayant généralement peu de ressources naturelles terrestres pour soutenir leur développement et étant résolument engagés dans une démarche de développement compatible avec les exigences propres à la vulnérabilité de leurs milieux, les Etats insulaires parient sur le potentiel de croissance que représentent les zones océaniques sur lesquelles ils étendent leur juridiction. Le rapport de la réunion préparatoire régionale des Caraïbes à Rio+20 rappelle que l’économie bleue devrait « être traitée comme un élément essentiel dans la mise en œuvre d’une économie verte et, ce faisant, qu’elle devrait se refléter dans les politiques concernées »2. Le groupe Caraïbes estime qu’il n’est pas nécessaire d’arrêter une définition de l’économie bleue dans la mesure où il s’agit d’intégrer au concept d’économie verte les enjeux relatifs à la gestion des mers et océans. En outre, le rapport souligne que l’économie bleue doit mettre en évidence les défis au niveau national (pêches, 1 2 discussion mondiale entre les PEID d’une part, et, d’autre part, avec la communauté internationale, dont les partenaires de développement, les Seychelles ont co-organisé avec les autorités émiraties le premier Sommet mondial sur l’économie bleue dans le cadre de la semaine du développement durable d’Abu Dhabi du 18 au 24 janvier 2014. ème Dans la perspective de la 3 Conférence des Nations unies sur les PEID de Samoa en septembre 2014, le Sommet d’Abu Dhabi a permis de mobiliser les Etats insulaires et côtiers ainsi que la communauté internationale, dont les partenaires de développement, sur la pertinence d’une approche du développement durable sous l’angle de l’économie bleue. La COI et ses pays membres ont activement participé à ce Sommet d’Abu Dhabi. Parmi les points saillants de la déclaration finale du Sommet d’Abu Dhabi figurent : l’importance de la coopération (nationale, internationale et sud-sud), y compris de la société civile et des organisations régionales pertinentes, dans la gestion durable des mers et océans ; le lien fort entre économie bleue et recherche scientifique. L’économie bleue est, en effet, fondée sur la recherche et l’innovation, le partage des données, l’évaluation et la valorisation du capital « bleu » ce qui exige une expertise scientifique, technique et technologique variée et renforcée ; un appel aux institutions financières internationales, agences des Nations unies et partenaires de développement à identifier et bâtir des mécanismes d’appui et de facilitation pour la mise en œuvre des principes et outils de l’économie bleue dans les pays en développement, notamment les PIED. « Green Economy in a Blue World », PNUE, FAO, OIM, PNUD, IUCN, GID-Arendal, 2012. Report of the Caribbean regional preparatory meeting for Rio+20, 20 juin 2011, Georgetown, Guyana 13 gestion des côtes, accès aux marchés…). Dans la région Pacifique également l’économie bleue est mise à l’honneur. « Le développement durable de nos Etats insulaires repose sur la santé et la vitalité de notre environnement marin. Pour les PEID du Pacifique, l’économie « verte » est en fait une économie ‘‘bleue’’. »3. Dans l’Indianocéanie, la COI coordonne la voix des Etats membres ainsi que celle des autres membres du groupe Atlantique – océan Indien – Méditerranée – Mers du sud de la Chine (AIMS). Ce faisant, la COI a plaidé à Rio+20 pour une reconnaissance et un soutien de la communauté internationale en faveur de l’économie bleue considérée comme « un nouveau pilier pour le développement » des PIED. La COI engagée en faveur de l’économie bleue La position des instances décisionnelles de la COI Dans le cadre des réunions des instances décisionnelles de la COI, plusieurs personnalités politiques ont fait état du potentiel de l’économie bleue et de la nécessité pour l’Indianocéanie de tirer profit de l’océan dans leur démarche de développement durable. A l’occasion du 28ème Conseil des ministres de la COI qui s’est tenu en janvier 2013 aux Seychelles, le président de la République des Seychelles, James Alix Michel, et son ministre des Affaires étrangères, alors président du Conseil de la COI, ont rappelé combien l’océan constitue un levier de croissance durable, génératrice d’emplois et de revenus pour toute l’Indianocéanie. « Nous sentons au plus profond de nous-mêmes la nécessité d’un nouvel élan, d’une nouvelle impulsion, nous voulons que la COI soit à l’avant-garde sur certain nombre de dossiers. Je pense […] surtout à l’économie bleue [..]. L’océan que nous partageons est un nouvel eldorado énergétique. C’est un formidable gisement de matières premières pour les innovations de demain. Bâtir sur les immenses potentiels de la mer n’est pas une option mais un impératif. Un impératif qui nous invite à utiliser ce qui est localement disponible, qui ne produit pas d’effets secondaires et qui, au lieu de coûter plus cher, assura la compétitivité et l’augmentation de la productivité tout en créant des emplois et une meilleurs cohésion sociale. L’économie bleue, c’est par ailleurs une promesse de nouvelles opportunités d’insertion de la jeunesse au système productif de nos îles. C’est la création de nouveaux emplois et de nouvelles filières pour les jeunes, notamment pour nos jeunes entrepreneurs. » James Alix Michel, président de la République des Seychelles Les partenaires de développement ont aussi souligné l’opportunité de développement que représentent les océans pour les îles en développement. Gabriel Negatu, directeur régional du Centre de ressources de l’Afrique de l’Est de la Banque africaine de développement et Richard Marles, secrétaire parlementaire pour les îles du Pacifique de l’Australie, ont tous deux invité la COI à bâtir des programmes de coopération dédiés à l’économie bleue. 3 Marlene Moses, Représentante permanente de Nauru auprès des Nations unies, présidente du Groupe des PEID du Pacifique, citée par Jan Steffen, bureau pour l’Océanie de l’Union internationale pour la conservation de la nature (IUCN) 14 Le Secrétariat général de la COI a partagé cette conviction et cette ambition dans les fora internationaux, notamment lors de conférences internationales à Xiamen en Chine (novembre 2013), à Abu Dhabi (janvier 2014) et aux Samoa (septembre 2014). Surtout, les chefs d’Etat et de gouvernement de la COI réunis en Sommet à Moroni le 23 août 2014 ont laissé entendre que la vulnérabilité intrinsèque de l’Indianocéanie aux chocs externes obligent à trouver de nouvelles perspectives de développement en se focalisant sur le potentiel océanique. Dans cet esprit, le président de Madagascar et président en exercice de la COI, M. Hery Rajaonarimampianina, a prévenu que « La taille de nos îles ne doit être un obstacle ni à notre développement économique, ni à notre unité. Au contraire, les aléas de notre géographie constituent une opportunité de tirer parti d’une richesse commune ». Le président de l’Union des Comores et hôte du Sommet de la COI, M. Ikililou Dhoinine, et l’ancien Premier ministre mauricien, Dr. Navinchandra Ramgoolam, ont quant à eux rappeler les menaces climatiques, sécuritaires et économiques qui pèsent sur l’Indianocéanie tout en insistant sur le fait que « l’un des principaux pôles de développement reste l’océan ». En effet, « au-delà des menaces, il y a ce que nous pouvons espérer de l'océan Indien. C'est ce que l'on appelle ‘‘l'économie bleue’’ », a déclaré le président français, M. François Hollande. Et de préciser que « grâce à la COI, nous pouvons mieux valoriser les ressources maritimes […] parce que nous avons besoin de dialogue, de négociation, de coopération pour agir en matière de pêche, de tourisme, d'énergie renouvelable, d'exploitation des hydrocarbures pour porter des projets conjoints. » Le président des Seychelles, M. James Michel, a résumé l’ambition et l’espérance qui anime la communauté indianocéanienne : « Notre océan pourrait être notre nouvel eldorado énergétique, d’opportunités d’emplois, pour peu que nous lui accordions toute l’attention qu’il mérite. C’est pourquoi nous devons conjuguer nos efforts pour en faire un secteur exemplaire de nos économies et de l’économie mondiale. » C’est forte de ces engagements politiques que la COI entend développer une stratégie régionale sur l’économie bleue. L’Indianocéanie : une géographie avant tout océanique Les pays membres de la COI disposent d’une zone économique exclusive globale de plus de 5 millions de km² soit dix fois la superficie des terres émergées dont Madagascar concentre 99%. A ces vastes étendues, il faut ajouter les plateaux continentaux qui recèlent des richesses encore non exploitées, notamment des matières premières fossiles ou des nodules polymétalliques. En 2009, Les gouvernements des Seychelles et de Maurice ont soumis une demande conjointe à la Commission des Nations unies sur l’extension du plateau continental qui a agréé à cette requête en mars 2011. Suite à l’approbation des Nations unies, les Seychelles et Maurice ont signé en 2012 un traité définissant les modalités de cogestion du plateau continental de 396 000 km² qui se situe dans la zone du banc de Saya de Malha. Cette extension ouvre des droits à l’exploitation de ressources issues du plateau continental mais exclue les ressources provenant des eaux. 15 L’économie bleue au cœur des interventions de la COI L’économie bleue est un thème transversal qui recoupe l’ensemble des axes stratégiques de la COI. Axes stratégiques domaines d'intervention (DI) champs d'action en lien avec l'économie bleue projets / actions en lien avec l'économie bleue Connectivité maritime: améliorer la desserte maritime régionale, réduire la dépendance à l'extérieur, diminuer l'empreinte carbone, augmenter la compétitivité, faciliter le commerce maritime régional Programme MASE financé par l’Union européenne Sécurité maritime: sécurisation des couloirs maritimes, lutte contre la piraterie et autres trafics, fluidifier les flux de transport maritime, améliorer le suivi Création d’une Unité antipiraterie en juin 2012 basée aux Seychelles Co-présidence avec le Royaume-Uni du groupe de DI2- Espace économique travail sur le renforcement régional et infrastructures des capacités du Groupe de contact sur la piraterie au large des côtes somaliennes depuis Un espace régional sécurisé septembre 2014 de croissance économique Collaboration avec des intelligente agences des Nations unies, notamment la CNUCED, sur une liste de critères Défense des intérêts des définissant les PEID en vue Etats insulaires: mobilisation de la reconnaissance de ce sur des thématiques groupe spécifique de pays communes, sensibilisation par la communauté des partenaires et de la internationale communauté internationale à la spécificité insulaire Plaidoyer dans les fora internationaux et auprès des partenaires au développement Programme SmartFish financé par l’Union européenne pêche et aquaculture: DI3- Pôle de croissance améliorer la gestion durable Projet Swiofish avec l’appui régionale bleue et verte, des pêches, mutualiser les de la Banque mondiale spécialisations et moyens pour la surveillance valorisation économiques maritime Plan régional de surveillance des pêches (2007-2014) dont les acquis ont été intégrés à la 16 Axes stratégiques domaines d'intervention (DI) champs d'action en lien avec l'économie bleue projets / actions en lien avec l'économie bleue deuxième phase du programme SmartFish Sécurité alimentaire Conférence des bailleurs régionale: pêche, agriculture sur la sécurité alimentaire dont agroécologie (Janvier 2015, Madagascar) Projet ISLANDS (renforcement des capacités institutionnelles, éducation à l’environnement et au Adaptation au changement climatique: amélioration des développement durable, plaidoyer…) connaissances climatiques, renforcement des capacités Programme de Surveillance des services pour l’environnement et la météorologiques, appui à la sécurité en Afrique (MESA) mise en œuvre de la en collaboration avec Stratégie de Maurice l’Institut océanographique Un environnement insulaire et océanique commun résilient et durable DI4 - Environnement durable et changement climatique Biodiversité: gestion des zones côtières, préservation et conservation des écosystèmes Gestion des risques de catastrophes naturelles: aménagement du territoire, amélioration des systèmes d'alerte et de réponses en cas de catastrophes naturelles L'Indianocéanie, son identité et sa promotion DI5 - Identité indianocéanique et valorisation de ses ressources humaines et naturelles Culture et médias: valorisation de l'identité indianocéanienne, une identité résolument insulaire partagée par une communauté de destin Tourisme: appui à la stratégie "Iles Vanille", tourisme durable Energies renouvelable et efficience énergétiques de Maurice pour le volet thématique sur la gestion des ressources marines et côtières Projet Biodiversité financé par l’Union européenne Projet régional de gestion des zones côtières financé par le Fonds français pour l’environnement mondial Projet Risques naturels (clôturé en novembre 2014) financé par l’Agence française de développement (gestion des risques de catastrophes, renforcement des capacités des sécurités civiles…) Projet d’une plateforme multimédia Indocéane TV Projet Energies financé par l’Union européenne 17 L’ambition affichée des pays membres de la COI La Réunion : le Livre Bleu balise les ambitions maritimes En 2009, dans la foulée du Grenelle de la mer, l’Etat français a adopté une politique maritime volontariste visant à tirer profit des « potentiels de développement économiques et scientifiques liés à la mer » sans négliger pour autant « [la] responsabilité en matière environnementale ». Le livre bleu sud océan Indien publié en décembre 2011 édicte donc la stratégie de l’Etat pour l’outre-mer français dans « cet océan, carrefour stratégique, réserve exceptionnelle de biodiversité et lieu d’un incomparable brassage entre les cultures africaines, indiennes, asiatiques et européennes ». Il ne concerne donc pas que La Réunion, membre de la COI. « Le Livre bleu sud océan Indien constitue le socle sur lequel viendront prendre appui les initiatives que les pouvoirs publics développeront à court, moyen et long terme que ce soit dans les domaines de la gouvernance maritime, du développement économique (pêche, énergie), de l’éducation, de la sauvegarde du patrimoine naturel marin, de la recherche et de l’innovation en sciences de la mer ou, enfin, de l’action de l’Etat en mer avec, à la clef, la défense des intérêts souverains de la France dans cette zone. » Cet ouvrage dédié à « la France de l’océan Indien » constitue l’outil privilégié pour la mise en œuvre des orientations de la stratégie française pour la mer et le littoral et des Lois Grenelle (3 août 2009 et 12 juillet 2010). La réflexion conduite s’articule autour de cinq axes : - - - - La gouvernance maritime : création d’un conseil maritime ultramarin du bassin sud océan Indien, l’implication des différents échelons de gouvernance du local au global, participation aux actions et réflexions des institutions et initiatives régionales (COI, Convention de Nairobi, COMESA, Commission des thons de l’océan Indien…) Les opportunités économiques : mise en réseau des ports, transport maritime (notamment « mise en place d’une ligne maritime locale »), gestion durable des ressources halieutiques et développement d’une industrie de la pêche responsable, tourisme (nautisme, préservation des milieux côtiers et marins), sensibilisation aux enjeux liés à la préservation et à l’exploitation des ressources marines et côtières, développement et appui aux secteurs émergents et innovants (énergies renouvelables, ressources marines et fossiles) La préservation d’un patrimoine naturel partagé : préservation des récifs, sauvegarde des espaces animales et végétales, lutte contre la pollution, régulation des usages L’appui à la recherche et à l’innovation « en sciences de la mer » : partage de connaissance, mutualisation des moyens, valorisation des compétences, vers la création d’un « pôle scientifique mer océan Indien » La mise en œuvre de la politique maritime de l’Etat français dans cette région du monde : mission de surveillance et participation aux efforts régionaux de sécurisation des espaces maritimes, lutte contre la pêche illégale, lutte contre la piraterie et autres délits (pollution, trafic…), L’ouvrage se termine sur un ensemble de propositions et d’actions et sur l’identification des acteurs les plus à même de piloter les actions. Ces acteurs sont variés : Etat, collectivités locales, organismes scientifiques, société civile, institutions régionales, notamment la COI. 18 D’ores et déjà, des projets et des recherches ont cours à La Réunion. Ceux-ci s’intéressent notamment au potentiel énergétique de l’océan (énergie marémotrice et houlomotrice). Trois projets utilisant des techniques différentes de production électrique sont actuellement en phase d’expérimentation à La Réunion. D’autres projets en matière de climatisation à l’eau naturellement froide provenant des profondeurs océaniques sont également en cours. L’objectif est de réduire drastiquement la facture énergétique de bâtiments et infrastructures publiques. Un projet pilote conduit par la direction des systèmes énergétiques insulaires d’Electricité de France (EDF) est actuellement en cours au Centre hospitalier universitaire de St Pierre de La Réunion. Maurice : l’économie océanique au cœur d’une stratégie de développement nationale « Le gouvernement s’engage à faire de l’économie océanique une industrie de premier ordre dans une dynamique de diversification économique, de création d’emplois et de richesses. A cet égard, un nouveau ministère dédié a été créé et l’Institut océanographique de Maurice ainsi que toutes les activités liées à l’océan sont à présent réunis sous son égide. [En outre,] le gouvernement fera la promotion des expéditions en mer en quête de ressources fossiles et minérales qui peuvent être exploitée de manière responsable. » Discours-programme du Gouvernement de la République de Maurice prononcé par le président de la République le 27 janvier 2015. Ces dernières années, l’économie océanique présentée comme « le nouveau pilier de l’économie » mauricienne. En 2015, le nouveau gouvernement mauricien, dirigé par le Premier ministre Sir Anerood Jugnauth, a confirmé cette perspective en faisant de l’économie océanique un secteur clé dans le discours programme de janvier 2015 et dans le budget présenté le 23 mars 2015. Dès son installation suite au scrutin législatif de décembre 2014, le nouveau gouvernement a d’ailleurs créé un ministère de l’Economie océanique, des Ressources marines, des Pêches et des Iles éparses qui aura notamment pour tâche d’élaborer un plan directeur pour le développement de l’économie océanique. Un constat nourrit cette ambition : Maurice est un Etat-océan étendant sa juridiction sur un espace océanique infiniment plus vaste que ses terres émergées sans ressources naturelles. L’économie océanique regroupe des activités existantes (tourisme, pêche), émergentes ou nouvelles. La Feuille de route sur l’économie océanique édictée en 2013 présente une vision et une ossature stratégique afin de réaliser des objectifs précis de croissance économique, de création d’emploi et de développement durable. Les objectifs chiffrés quant à la contribution de l’économie océanique à l’économie mauricienne sont présentés dans le tableau ci-après : 2013 année référence 2015 court terme 2020 moyen terme 2025 long terme contribution de l'économie océanique au PIB (%) 11% 14% 17% 20% Nombre d'emplois 18 000 21 000 26 000 35 000 19 A l’heure actuelle, l’économie océanique mauricienne est dominée par trois secteurs : - L’industrie touristique balnéaire (60% des revenus générés par l’économie océanique en 2012) ; Les activités portuaires (18%) ; et, L’industrie de la pêche (14%). L’objectif de Maurice est d’étoffer cette base économique en y créant les conditions nécessaires (investissements, cadre législatif, formation, recherche) à l’émergence de nouveaux secteurs d’activité. En parallèle, l’Etat marque sa volonté d’améliorer la gouvernance des océans ainsi que la préservation des écosystèmes marins et côtiers. C’est une approche intégrée que promeut le gouvernement mauricien. Les actions coordonnées des institutions publiques mauriciennes en partenariat avec le secteur privé et la société civile porteront sur les secteurs suivants: - - Exploration des fonds marins et exploitation des ressources fossiles et minérales (nouveau) ; Industrie de la pêche et aquaculture (existant) ; Exploitation du potentiel des eaux profondes (nouveau) ; Services maritimes dont nautisme, services financiers, biotechnologies, enregistrement des navires… ; Activités portuaires (le gouvernement, comme annoncé par le ministre des Finances dans le budget 2015, ambitionne de faire de Port-Louis un port d’éclatement régional afin qu’il joue un rôle central dans le développement de l’économie océanique. La Mauritius Ports Authority présentera un nouveau plan d’aménagement faisant de Port-Louis un hub portuaire pour l’avitaillement – bunkering, le tourisme de croisière, le transbordement ou encore l’industrie des produits de la mer) ; Energies renouvelables issues du potentiel océanique ; Sciences de la mer. En outre, l’île Maurice dispose de législations entourant l’exploitation des océans, dont le Marine Zones Act amendé en 2011 notamment afin de définir les critères d’évaluation de projets ayant une emprise maritime. De nouvelles mesures visant à moderniser les législations entourant la pêche ou la prévention contre la pollution marine ont également été annoncées dans le discours-programme. Les Seychelles : vers un Horizon bleu « En créant les conditions à l’émergence d’une économie bleue, nous construisons un avenir durable, résilient et responsable pour les Seychelles. L’émergence d’une économie bleue au niveau mondiale consiste à garantir la durabilité de notre planète » James Michel, président de la République des Seychelles, préambule de « The Blue Economy : Seychelles’ vision for a Blue Horizon ». Les Seychelles est le plus petit Etat d’Afrique totalisant une surface de 454 km² réparties en 115 îles. Mais cet Etat-archipel étend sa juridiction sur une surface maritime de 1,4 million de km². 20 Le gouvernement des Seychelles a adopté une ligne politique et stratégique volontariste en faveur de l’exploitation durable du potentiel océanique. L’environnement marin est considéré comme « un pilier naturel de l’économie » du pays. C’est dans cet esprit que le gouvernement seychellois a été le co-organisateur avec les autorités émiraties du Sommet international sur l’économie bleue d’Abu Dhabi en janvier 2013. La vision des Seychelles s’inscrit dans la perspective d’un agenda mondial post-2015 qui devrait fixer des objectifs de développement durable. Cette vision nationale, résolument tournée vers un « horizon bleu », se décline en six axes sectoriels : - - - - - - Pêche et aquaculture : en 2014, le cadre législatif du secteur pêche sera revu afin de correspondre aux principes de l’économie bleue, à savoir la durabilité de la ressource, l’équité et l’efficacité. Les Seychelles s’intéressent à la fois à la pêche artisanale/communautaire et à l’industrie. Il s’agit d’assurer la pérennisation de la filière par la gestion durable de la ressource tout en générant des revenus sur une base équitable. Les Seychelles entendent aussi développer les activités aquacoles. Tourisme : tirer profit de la plus-value océanique. Les Seychelles sont au cœur de la stratégie régionale Iles Vanille qui vise à créer un produit touristique singulier. Il s’agit, au niveau national, de développer le potentiel des activités liées à la mer : nautisme (croisières, marina), pêche sportive et plongée sous-marine. Les énergies renouvelables. Les Seychelles ont inauguré en juin 2013 un parc éolien offshore avec l’appui du Fonds de développement de l’Emirat d’Abu Dhabi. Cette ferme éolienne d’une capacité de de 6 mégawatts alimente en électricité quelques 2000 foyers de Mahé, l’île principale. A terme, l’objectif des Seychelles est d’augmenter la contribution des énergies renouvelables dans la production électrique à hauteur de 5% d’ici 2020 et 15% d’ici 2030. Pour ce faire, il s’agit d’exploiter, en plus de l’énergie éolienne, le potentiel de l’énergie houlomotrice et marémotrice. Transport maritime : le port de Victoria constitue l’un des socles infrastructurels de l’économie bleue seychelloise. Il s’agit de consolider son rôle en tant que port thonier régional tout en l’intégrant dans un réseau régional. Les ressources minérales : les autorités seychelloises entendent exploiter les richesses minérales de leur plateau continental. Les premières études exploratoires ont été conduites en 1973. Les ressources visées sont : le pétrole, les nodules polymétalliques (manganèse) ou encore les sables de quartz. La sécurité maritime. C’est une précondition indispensable à l’émergence d’une économie bleue. Les Seychelles ont été particulièrement affectées, humainement et économiquement, par la piraterie somalienne. Les grandes étendues océaniques seychelloises, poissonneuses, aiguisent aussi la convoitise de navires de pêche qui opèrent illégalement. Pour sécuriser leurs eaux, les Seychelles renforcent leur arsenal juridique et leurs capacités humaines et matérielles pour la surveillance et la sécurité. Les Seychelles, qui abritent l’Unité antipiraterie de la COI à Mahé, sont activement impliquées dans la mobilisation internationale contre l’insécurité maritime au large des côtes somalienne et dans un plan régional de surveillance des pêches conduit par la COI avec l’appui de l’UE. 21 Madagascar et les Comores, une ambition qui se crée « Notant que les PEID en développement disposent de vastes zones maritimes et qu’ils ont pris des initiatives notables en vue de la conservation et de l’exploitation durable de ces zones et de leurs ressources, nous soutenons les efforts qu’ils déploient pour élaborer et appliquer des stratégies en vue de la conservation et de l’exploitation durable de ces zones et de leurs ressources. […] Dans cette perspectives, nous soutenons énergiquement les mesures visant à promouvoir et appuyer les efforts déployés aux niveaux national, sousrégional et régional […] en encourageant la recherche et la mise en œuvre de stratégies sur la gestion des zones côtières et la gestion écosystémique […] et en renforçant les cadres juridiques et institutionnels nationaux en vue de l’exploration et de l’exploitation durable des ressources biologiques et non biologiques » « La Voie à suivre », Déclaration finale de la troisième Conférence internationale des Nations unies sur les PEID – Samoa, 4 septembre 2014 Madagascar : un potentiel à encadrer A l’ouverture de la conférence sur l’économe bleue du Groupe intergouvernemental d’experts du Bureau pour l’Afrique orientale de l’UNECA, à Antananarivo le 2 mars 2015, Béatrice Attalah, ministre des Affaires étrangères de Madagascar et présidente du Conseil de la COI, a indiqué la volonté du gouvernement de développer une stratégie nationale sur l’économie bleue. L’ambition est d’accompagner l’émergence de nouveaux piliers du développement et de la croissance basés sur le potentiel océanique malgache. Outre la pêche et l’aquaculture, le tourisme et les énergies, les autorités malgaches montrent un intérêt manifeste pour le développement du trafic maritime et des activités d’extraction offshore. 5000 km de côtes comprenant mangroves et récifs coralliens qui produisent un excédent biologique annuel de 300 000 tonnes (crabes, crevettes, holothuries…). Cet excédent biologique représente le volume de ressources biologiques qui peut être prélevé du milieu naturel sans entamer le stock. Pour l’heure, le ministère de l’Environnement et des Forêts met en œuvre des politiques publiques de gestion durable des ressources naturelles, notamment au niveau des zones marines et côtières. C’est ainsi que de nouvelles aires marines protégées ont été créées ou encore que la Convention sur la protection, la gestion et la mise en valeur du milieu marin et côtier de la région de l’océan Indien est mise en œuvre. Il s’agit, pour les autorités, de favoriser une approche durable des secteurs économiques, notamment des pêcheries. Qu’il s’agisse de pêche hauturière, de pêche artisanale ou des filières crevettes et crabes de mangrove, Madagascar dispose d’un potentiel de production conséquent. Toutefois, la pression sur les ressources représentent un risque notable pour la durabilité des filières et donc pour la préservation des emplois. En ce qui concerne les mangroves, véritables puits de carbone dont la préservation est essentielle à la durabilité des stocks halieutiques, plusieurs institutions veillent au côté du ministère de l’Environnement et des Forêts : l’Institut halieutique et des Sciences marines ; le Centre national de recherche sur l’environnement ; le Centre national de recherche océanographique. 22 Sur le plan de l’énergie, des investissements conséquents sont nécessaires pour exploiter davantage les sources d’énergies renouvelables. Des technologies coûteuses et des savoir-faire spécifiques doivent être mobilisés. Cela étant, le potentiel identifié jusque-là par les autorités concerne plutôt l’énergie hydraulique des cours d’eau que l’énergie des océans. Les estimations du ministère de l’Energie font état d’un potentiel d’énergie à partir des ressources en eau de 7800 méga watts. Or, ce potentiel n’est exploité qu’à hauteur de 2,5%. Enfin, le potentiel d’exploitation des matières premières en mer apparaît comme un levier de croissance que les autorités malgaches souhaitent développer. Comores : des opportunités de développement qui s’affirment Les activités basées sur le potentiel des océans restent relativement peu exploitées en Union des Comores. Les zones maritimes et côtières du pays renferment néanmoins de nombreuses opportunités : pêche industrielle, tourisme, transport maritime et surtout gisements d’hydrocarbures offshores. Pour tirer profit du potentiel, les autorités de l’Union des Comores ont mis en œuvre un ensemble de réformes sur plusieurs fronts, comme en témoigne l’élaboration d’un nouveau code pour la marine marchande ou encore le décret n°10-092 d’août 2013 fixant la limite de la mer territoriale. Dans son étude « Vers une politique maritime et océanique maritime au XXIème siècle » (Division des Affaires maritimes et du Droit de la mer du Bureau des affaires juridiques des Nations unies, 2008) remise, Mohamed M’madi Ahamada identifiait les axes sur lesquels les autorités comoriennes doivent agir pour faciliter l’émergence d’une économie océanique : - - Sur le front législatif et juridique : il s’agit de compléter l’arsenal législatif entourant la gestion des ressources halieutiques, l’activité des pêcheries, l’exploitation des gisements d’hydrocarbures, le transport maritime ; Sur le front institutionnel, par le renforcement des capacités des ministères du Transport, de l’Environnement, de la Pêche, du Tourisme et de l’Energie ; Sur le front opérationnel : le développement des activités économiques liées à l’océan demande une amélioration de la fourniture énergétique, du climat des affaires, des infrastructures. L’économie bleue peut contribuer très concrètement au développement de long terme de l’Union des Comores et participer à l’amélioration du niveau de vie des populations. C’est surtout sur le plan énergétique, suite à la découverte de gisements d’hydrocarbures dans le Canal du Mozambique, que l’Union des Comores porte ses ambitions. A cet égard, un nouveau code pour l’encadrement des activités d’exploration et d’exploitation des gisements offshores a été adopté. Soucieuses de tirer profit du potentiel économique de sa zone économique exclusive, les autorités comoriennes poursuivent la modernisation et l’actualisation des textes réglementaires et des structures d’encadrement. 23 La conférence régionale de la COI sur l’économie bleue Intitulé proposé L’économie bleue, levier d’une croissance durable et innovante pour l’Indianocéanie Les secteurs couverts Au niveau de la région, les principaux secteurs d’activité qui relèvent de l’économie bleue / océanique sont : - La pêche et l’aquaculture ; Le tourisme ; La R&D, l’innovation technologique, la biotechnologie marine ; Les énergies renouvelables ; Le transport maritime ; L’exploration et l’exploitation des ressources minérales en mer. La Conférence régionale de la COI sur l’économie bleue s’intéressera à identifier les opportunités et contraintes dans chacun de ces secteurs tout en gardant à l’esprit la notion centrale de durabilité. Il est proposé que la conférence s’organise autour de sessions thématiques en fonction des secteurs d’activité identifiés. Objectifs Faciliter l’élaboration de stratégies et plans d’actions nationaux en matière d’économie bleue par l’échange d’expériences et des meilleures pratiques au niveau international et, le cas échéant, le partage d’expertises de la région et au-delà. Présenter les opportunités économiques de l’économie bleue/océanique dans chacun des pays. Impliquer les acteurs publics et privés de la région dans une dynamique de coopération régionale en faveur d’une économie bleue / océanique indianocéanienne Promouvoir l’amélioration du climat des affaires propice à l’investissement dans les secteurs liés à l’économie bleue Les acteurs à mobiliser Les représentants des pays membres Les ministères en charge des enjeux relatifs à l’économie bleue / océanique Les institutions publiques, de formation, de recherches et de développement liées aux questions océaniques Les représentants des opérateurs privés qui interviennent ou ont le projet d’intervenir dans les secteurs liés à l’économie bleue Les partenaires au développement Les institutions spécialisées aux niveaux national et international 24 Les organisations régionales et internationales montrant un intérêt pour la thématique Aspects logistiques et organisationnels Date et lieu Il est proposé de tenir la réunion au mois d’août 2015. La France (Réunion) a indiqué son intérêt à accueillir la conférence de la COI. Séquençage de la conférence Il est proposé de tenir la conférence sur trois jours afin d’organiser des visites de terrain, en particulier si la conférence se tient à La Réunion. Séquençage Cérémonie d’ouverture Allocutions Note de cadrage Matinée Présentation des actions de la COI en faveur de l’économie bleue Jour 1 Présentation des stratégies / ambitions nationales par les représentants de chacun des pays Objectifs -Présenter les opportunités économiques de l’économie bleue/océanique -Impliquer les acteurs publics et privés -Promouvoir l’amélioration du climat des affaires en faveur de l’économie bleue/océanique -Démontrer la plus-value et la pertinence des activités de la COI donnant une base solide à l’émergence d’une économie bleue/océanique indianocéanienne -Prendre connaissance des stratégies / ambitions nationales Acteurs -Secrétaire général de la COI -Haut(s) officiel(s) -Secrétariat général de la COI (chargé de mission) -Secrétariat général de la COI (chargés de mission) -Représentants des pays membres de la COI -Faciliter l’élaboration de stratégies et plans d’actions nationaux Echanges Après-midi Expériences et meilleures pratiques à l’international Echanges -Faciliter l’échange d’expériences et de meilleures pratiques et, le cas échéant, le partage d’expertises -Institutions spécialisées -Opérateurs privés -Représentants d’organismes régionaux/internationaux 25 Séquençage Sessions thématiques (conduites en parallèle) -La pêche et l’aquaculture ; Objectifs -Présenter les opportunités économiques de l’économie bleue / océanique dans chacun des pays et dans l’Indianocéanie -Le tourisme ; -Impliquer les acteurs publics et privés dans une dynamique de coopération régionale sur une base sectorielle -La R&D, l’innovation technologique, la biotechnologie marine ; -Les énergies renouvelables ; -Le transport maritime ; -L’exploration et l’exploitation sousmarine -Cadre réglementaire et climat des affaires Toute la journée Poursuite des sessions thématiques Jour 2 En parallèle B2B Matinée Visites de terrain (selon possibilité) -Promouvoir l’amélioration du climat des affaires propice à l’investissement dans les secteurs liés à l’économie bleue -Définir un ensemble de recommandations sectorielles ou globales en faveur de l’émergence d’une économie bleue / océanique indianocéanienne et en vue de l’élaboration d’une stratégie régionale sur l’économie bleue -Impliquer les acteurs publics et privés dans une dynamique de coopération régionale en faveur de l’économie bleue/océanique -Faciliter les prises de contact et partenariats -Faciliter l’échange d’expériences et des meilleures pratiques ainsi que le partage d’expertises Après-midi Présentation / validation d’une déclaration commune Cérémonie de clôture -Tous les participants en fonction de l’intérêt. -Inscription aux sessions thématiques au préalable Tous les participants en fonction des demandes/intérêts Tous les participants par groupe d’intérêt en fonction des visites programmées -Présenter les opportunités économiques de l’économie bleue/océanique ainsi que les avancées technologiques dans le secteur Restitution des sessions thématiques Jour 3 Acteurs -Impliquer les acteurs publics et privés dans une dynamique de coopération régionale en faveur de l’économie bleue / océanique -Adopter une vision commune et une feuille de route pour la COI -Rapporteurs des sessions thématiques -Secrétariat général de la COI -Secrétaire général de la COI -Haut(s) officiel(s) 26 Logistique La COI sera en charge du secrétariat de la conférence et de la facilitation des travaux. Le pays hôte facilitera l’hébergement de la conférence. Budget La COI mobilisera ses partenaires, notamment l’Union européenne, en vue de l’organisation de cette conférence dont le sujet suscite l’intérêt marqué de ses pays membres. Le Secrétariat général identifiera des partenariats possibles pour faciliter l’organisation de la conférence et la participation d’experts. 27 La présente publication a été élaborée avec l’appui financier de l’Union européenne. Le contenu de la publication relève de la seule responsabilité de la Commission de l’océan Indien et ne peut aucunement être considéré comme reflétant le point de vue de l’Union européenne Secrétariat général de la Commission de l’océan Indien ème Blue Tower – 3 étage Rue de l’Institut – Ebène – Maurice Tél : (230) 402 61 00 @ : [email protected] www.commissionoceanindien.org