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Jeudi 12 juin 2008 Le Nouvelliste
LE MAG
L’actualité culturelle valaisanne
PLUS
dc - bru
EXPOSITION
Homme de pierre
Le jardin alpin de Champex-Lac expose
une vingtaine de sculptures de Gaspard
Delachaux. Quand les règnes minéral,
végétal et animal se marient...34
EMMANUELLE ES-BORRAT
Quand il parle de musique, on
imagine qu’il l’entend à ce mo-
ment précis dans sa tête. Qu’il
la savoure, la découvre comme
pour la première fois. Il arrive
aussi que ses mains soulignent
la mélodie comme le propos.
Dans l’enthousiasme qui le
porte, le chanoine Marius Pas-
quier raconte, fait des liens, et
toujours il évoque ces belles
notes qui l’ont fait grandir et lui
permettent aujourd’hui de
goûter aux parfums, même si
une mauvaise chute l’a forcé,
comme il le dit, à voir passer le
printemps derrière des fenê-
tres. «Mozart est comme une
fleur, d’une fraîcheur extraordi-
naire. Il est là, présent dans cha-
que phrase.» D’emblée, le musi-
cien trouve les mots pour parler
de l’essentiel. Ses proches évo-
quent d’ailleurs volontiers son
humilité, sa simplicité. Une pa-
renté avec l’abbé Bovet se tisse
parfois aussi. Mais si, comme
son aîné, son origine est fri-
bourgeoise, gruérienne plus
particulièrement, c’est en Va-
lais que le chanoine Marius
Pasquier a marqué des généra-
tions de chanteurs et méloma-
nes. Alors que le compositeur a
fêté son nonantième anniver-
saire en avril dernier, l’Ensem-
ble vocal de Saint-Maurice lui
dédie ses prochains concerts à
Sion, en Agaune et à Bulle. Ren-
contre.
Passer le message
«Je ne l’ai pas fait exprès,
mais j’ai une très bonne mé-
moire», explique Marius Pas-
quier en préambule de son his-
toire, et presque en s’excusant.
C’est sûrement là le point de
départ. «Maman était coutu-
rière. Elle chantait beaucoup. Je
me souviens d’un festival consa-
cré à l’abbé Bovet auquel j’ai as-
sisté à Bulle. Je devais avoir 8 ou
9 ans. En rentrant à la maison,
nous avons reconstitué les
chants que nous interprétions
en famille.» L’exercice se répète
avec son instrument de prédi-
lection. «Très jeune, j’ai possédé
un petit violon. J’essayais de re-
produire tout ce que j’enten-
dais.» Baigné dans la tradition
populaire, Marius Pasquier dé-
couvre un nouveau registre
lorsqu’il entre au collège de
Saint-Maurice pour y faire ses
études. «Imaginez un gamin
venu de la campagne qui, à
douze ans, a l’occasion de chan-
ter des messes.» Et le musicien
de rendre hommage à son tour
à son prédécesseur, le chanoine
Louis Broquet. «Il passait pour
être assez sévère.Pourtant,après
les répétitions, il s’amusait avec
nous. Quelques années plus
tard, j’ai reçu le chœur de
sa main. Il a continué à
me suivre, très discrète-
ment. Je lui dois énor-
mément.» C’est tou-
jours au collège, dans
les rangs de l’orches-
tre, de la fanfare ou à
l’écoute des pre-
miers gramophones
à 78 tours que le
jeune Pasquier
passe d’une
révélation à
l’autre.
Quatuor
de
Haydn,
harmo-
nies de
Wagner, et
toujours,
le génie de Salzbourg: «Je suis
né avec Mozart. Je l’ai beaucoup
joué et je l’ai fait jouer. Pour
cela, un élève ne doit pas seule-
ment effectuer la note correcte-
ment, il doit saisir lui-même la
fine pointe de l’esprit de Mo-
zart.» L’enseignement occu-
pera d’ailleurs une grande part
de l’activité de Marius Pasquier,
devenu entre-temps chanoine
de l’abbaye de Saint-Maurice.
«J’ai tenté de faire passer le mes-
sage, sans lourdeur, en essayant
d’éveiller plutôt que d’imposer.»
Du latin au français
Musiciens et musiciennes,
chanteurs et chanteuses, ils
sont nombreux aujourd’hui à
avoir accueilli l’invitation.
Grand amateur de grégorien,
qu’il maintient autant que pos-
sible après le Concile Vatican II,
le chanoine Marius Pasquier
participe aussi au renouvelle-
ment de la liturgie en français,
écrivant lui-même pour ses
confrères. Convaincu qu’il est
possible de participer à une
messe tant comme auditeur
d’une œuvre en latin qu’en y
mêlant sa voix, il s’engage au
sein de la Commission ro-
mande de musique liturgique
avec exigence. «Face au débor-
dement, parfois de mauvais
goût, des nouveaux chants qui
nous étaient proposés, des cho-
ses remarquables ont été écrites.
Certains auteurs ont trouvé une
façon poétique de dire les hym-
nes et les psaumes. C’est le cas
notamment de mon confrère le
chanoine Georges Athanasia-
des, reconnu en tant qu’orga-
niste, mais aussi très calé dans
les écritures.»
Ecouter, jouer, chanter, et
transmettre. Quatre verbes
pour quitter l’histoire qui che-
mine du chanoine Marius Pas-
quier, traqueur de beauté et de
grâce. Au moment de prendre
congé, le musicien évoque en-
core Bernanos, commente un
tableau avant que, déjà debout,
on aperçoive le lecteur de CD
portable posé sur la table. «Des
poèmes d’Eluard mis en musi-
que par Poulenc…»
A l’occasion du 90
e
anniversaire
du
chanoine Marius Pasquier, l’Ensemble
vocal de Saint-Maurice donne un
concert vendredi 13 juin à 20 h 30 à la
basilique de Valère à Sion, le samedi 14
juin à 20h30 à l’église Saint-Sigismond
de Saint-Maurice et le vendredi 20 juin à
20h 30 à l’église Saint-Pierre-aux-Liens
de Bulle.Au programme, sous la direc-
tion de Pascal Crittin, musique sacrée
du XXe avec Poulenc, Duruflé, Pasquier,
Daniel-Lesur, Nystedt et Pärt.
www.evsm.ch
«Je suis né avec
Mozart »
RENCONTRE Compositeur, directeur
de chœurs, enseignant, le chanoine
Marius Pasquier a passé son amour
des notes à des générations
de chanteurs et musiciens.
Qui lui rendent hommage
à l’occasion de son 90
e
anniversaire.
!Marius Pasquier est né le 4 avril
1918 au village du Pâquier en
Gruyère.
!A l’âge de 12 ans, il entre au Col-
lège de l’abbaye de Saint-Maurice
pour y poursuivre ses études puis
commence son noviciat en 1938.
!En 1943, il est ordonné prêtre.
!A l’institut de Ribeaupierre de
Lausanne, le chanoine Pasquier
achève sa formation musicale, no-
tamment de direction d’orchestre
et de violon, instrument qu’il en-
seignera de nombreuses années.
!Maître de chapelle dès 1944, il
redonne vie à l’Orchestre du col-
lège.
!Très engagé dans l’art choral sa-
cré et profane, il dirige le chœur du
collège, les chœurs mixtes de Ver-
nayaz et Saint-Maurice, ainsi que
l’Ensemble vocal qu’il crée en 1963
pour chanter les messes radiodif-
fusées du dimanche. Son nom est
encore lié aux Jeunesses musica-
les ainsi qu’à la Fédération des so-
ciétés de chants du Valais.
!Le chanoine Marius Pasquier a
composé plus d’une centaine de
pièces chorales diverses, messes
en latin et en français, motets.
Le Festival Flatus se poursuit. Plusieurs manifestations
se déroulent ce week-end, autour de la flûte. A Martigny,
les professeurs donnent un concert ce soir, avec Andrea
Cohen (forte-piano) et Enrico Casularo (flûtes traver-
sières).
A Sion, samedi, les participants au séminaire internatio-
nal «Chefs-d’œuvre inédits pour piano et accompagne-
ment de flûte ou violon des XVIIIe et XIXe siècles prove-
nant des fonds musicaux suisses» donnent un concert,
avec la participation de Florence Goye (piano) et de Sy-
bille Bonvin (flûte), lauréates du Prix d’encouragement
2008 de la SSPM-Valais (section valaisanne de la So-
ciété suisse de pédagogie musicale).
Dimanche, des hommages, sous forme de concerts et
de conférences, seront rendus aux compositeurs J.S.
Bach et K. Stockhausen. A l’église des Jésuites à Sion,
dimanche, une rencontre-masterclass autour de Bach
est proposée (et ouverte au public) aux classes de flûte
à bec du Conservatoire cantonal.
C
Ce soir à 20 h à l’église protestante de Martigny, concert des profes-
seurs. Forte-piano et flûte.
Samedi 14 juin à 20 h à l’église des Jésuites à Sion, concert des parti-
cipants au séminaire international sur les chefs-d’œuvre inédits pour
piano et accompagnement de flûte ou violon des XVIIIe et XIXe siècles
provenant des fonds musicaux suisses.
Dimanche 15 juin à 14h à l’église des Jésuites, rencontre-master-
class «La musique de Bach pour flûte à bec: œuvres originales et
transcriptions». Elèves du Conservatoire cantonal.
Dimanche 15 juin à 19 h, concert hommage à Bach, à l’église de Mu-
raz (Sierre).
Mardi 17 juin à 20 h 15, conférence-concert en hommage à K. Stock-
hausen, à la grande salle de l’Hôtel de Ville de Sierre.
Programme détaillé sur www.flatus.ch
MUSIQUE
«Une caravane
dans le bitume»,
c’est le titre du
conte musical pré-
senté vendredi à la
Ferme-Asile. La
magie orientale
sera au rendez-
vous, avec la voix
de la chanteuse El
Baze et les histoi-
res contées par
Hamed Bouzine.
Le spectateur est
invité à visiter un
univers féerique
où se mélangent
musique et parole,
entre jazz et
Orient. Sur des ar-
rangements d’An-
toine Auberson, la chanteuse et le conteur seront ac-
compagnés de Claude Buri (guitare), Antoine Auberson
(sax), Jean-Pierre Schaller (basse), Francis Varis (accor-
déon) et Cyril Régamey (percussions).
Le conteur peut commencer le voyage: parler d’étoiles,
de silence et de musique... On part à la quête d’un oi-
seau roi à travers des vallées mystérieuses qui deman-
dent courage et pureté du cœur. El Baze, quant à elle,
usera de sa voix forte et envoûtante pour poursuivre le
voyage. Elle chantera parfois en français pour nous ra-
mener un peu plus près, peut-être dans un bistrot pari-
sien, mais très vite on repartira plus loin...
JJ/C
«Une caravane dans le bitume», vendredi 13 juin à 21h à la Ferme-
Asile à Sion. Réservations: 0272032111, www.ferme-asile.ch
CONCERT
SION - FERME ASILE
Conte et musique
pour une soirée de rêves
Le Festival Flatus
entre flûte et piano
Forte-piano et flûte, ce soir à l’église protestante de
Martigny.
LDD
La chanteuse El Baze.
M. VONLANTHEN
BIO-EXPRESS
Marius Pasquier: «La musique entre dans notre oreille note après note. Elle fait appel à notre
mémoire intérieure, à ce qu’il y a de plus profond en nous.»
LDD
DR