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Un voyage au coeur de la réalité – Daniel Fortier
Introduction
La mécanique quantique est la science la plus mystérieuse, la plus contre-intuitive. Elle
traite d’abord et avant tout du niveau le plus fondamental de la réalité, celui des particules
(électrons, atomes, photons…), que l’on peut désigner métaphoriquement comme
l’échelle de l’infiniment petit. La mécanique quantique a fait entrer dans la physique des
concepts radicalement nouveaux : dualité onde-corpuscule, superposition d’états,
probabilités et hasard, effet de l’observateur, etc.
La mécanique quantique est une théorie scientifique. Son formalisme mathématique est
globalement cohérent ; l’accord entre celui-ci et les résultats de mesures, d’observations
et d’expériences est solidement établi. La théorie quantique est d’ailleurs, avec la théorie
de la relativité restreinte, la théorie scientifique la plus solidement confirmée par les
données, toutes disciplines confondues (physique, chimie, biologie, psychologie et
sciences sociales). Tous les résultats de mesures, d’observations et d’expériences
accumulés à ce jour confirment les prédictions tirées de la théorie quantique et, cela, avec
un degré de précision inégalé en science. À ce jour, aucune prédiction tirée de la théorie
quantique n’a été contredite. (Il en va de même avec la théorie de la relativité restreinte.)
Mais la signification du formalisme mathématique de la mécanique quantique, la
conception de la réalité qu’il implique, demeure une énigme. Dans la communauté des
physiciens, il y a consensus sur la science mais controverse sur son interprétation
philosophique.
Certains physiciens, comme Einstein, pensent que la mécanique quantique n’est pas une
théorie physique fondamentale, qu’elle donne de la réalité une description incomplète. Ce
point de vue est incarné par l’interprétation statistique, aussi nommée interprétation
d’ensemble. Adopter le point de vue contraire nous mène à des conceptions contre-
intuitives de l’échelle quantique de la réalité, radicalement différentes de notre
conception de l’échelle classique, celle que nous percevons directement par nos sens dans
notre quotidien. L’échelle classique est unique ; l’échelle quantique serait multiple.
L’interprétation de Copenhague nous présente une échelle quantique intrinsèquement
incertaine (indéfinie, floue), acausale et aléatoire, où ce sont les actes d’observation,
effectués par l’entremise d’instruments dans des dispositifs expérimentaux, qui donnent
réalité aux phénomènes et déterminent quelles sont les grandeurs dynamiques (position,
vitesse, spin…) qu’ils acquièrent et sous quel aspect (onde ou corpuscule) ils se
manifestent. Les grandeurs dynamiques sont définies au hasard : une seule possibilité
quantique devient, au hasard, une réalité classique. Il existe des paires de propriétés
complémentaires qui ne peuvent pas devenir réelles simultanément au cours d’un même
acte d’observation : ce sont les grandeurs dynamiques position et vitesse et les aspects
onde et corpuscule.
L’interprétation des univers parallèles nous présente une échelle quantique de la réalité
parfaitement définie, causale et déterministe, indépendante d’être observée ou non, mais