Quel temps auront les coureurs ? Le temps qu’il fera est commandé par plusieurs grands principes physiques, que les images des satellites, le soir, au journal télévisé, nous permettent de mieux comprendre. La terre est recouverte, pour sa majeure partie, d’eau. Sous l’action du soleil, cette eau s’évapore et forme des nuages, puis de la glace quand elle arrive très haut en altitude (il fait -56° à 11 000 mètres), elle devient alors plus lourde et a tendance à retomber sous forme de pluie ou de neige, et finit par rejoindre les océans… D’une façon plus générale, l’air chaud s’élève en se chargeant d’eau dans la région équatoriale, là où les rayons du soleil sont plus ardents, et a tendance à redescendre en se refroidissant vers les pôles, là où la surface du globe est la plus froide. C’est ce que l’on appelle « l’effet cheminée » ; les masses d’air se déplacent à la surface du globe des pôles vers l’équateur et en altitude de l’équateur vers les pôles. aiguilles d’une montre, sens dit antihoraire. Quand il se refroidit, l’air a au contraire tendance à redescendre en formant des « tas d’air », des masses d’air plus lourd appelés anti-cyclones et autour desquelles le vent tourne dans le sens des aiguilles d’une montre, sens dit horaire dans l’hémisphère nord. Tous ces mécanismes sont inversés de l’autre coté de l’Equateur, dans l’hémisphère Sud. Lors de la Transat Jacques Vabre, Joé va rencontrer tous ces phénomènes. Au départ du Havre, il sera confronté aux dépressions qui, à cette saison, naissent sur la côte Est des Etats Unis, traversent l’atlantique, arrivent par l’Irlande et traversent notre région. La partie d’une dépression où le vent est le plus fort est sa partie Sud Ouest et Ouest, elle donne donc de forts vents de Sud Ouest et d’Ouest, souvent accompagnés de pluie. Photo : Denis Theunynck Dessin : M.S Rantzen Mais la terre tourne sur elle – même, ces masses d’air ne se déplacent pas en ligne droite à la surface du globe ; elles sont déviées vers la droite dans l’hémisphère Nord, et vers la gauche dans l’hémisphère sud (force décrite par Coriolis 1792-1843). L’air ne va donc pas s’élever en ligne droite, mais en décrivant des grands cercles, un peu comme dans un escalier en colimaçon qui tournerait dans le sens inverse des aiguilles d’une montre, dans l’hémisphère Nord. Ces zones où l’air s’élève s’appellent les dépressions, car en se réchauffant et en s’élevant, l’air qui s’en va créé en quelque sorte un trou, une dépression. A la base des dépressions et dans l’hémisphère Nord, les vents tournent donc dans le sens inverse des Ce sont les trajets de ces dépressions représentées par des tourbillons où les nuages sont des masses blanches - qui figurent dans les journaux ou sont présentés à la télévision. Joé s’approchera ensuite des Açores ; c’est une zone où stationne de façon quasi permanente un anticyclone. Il se regonfle régulièrement de l’air « revenu » du nord, sa taille variera donc en fonction de ses « approvisionnements ». L’air y circule dans le sens des aiguilles d’une montre, donc plutôt dans l’axe de la course à cette époque. Il devra ensuite franchir ce que l’on appelle « le pot au noir », ou Zone de convergence intertropicale. C’est la zone qui sépare les anticyclones situés au Nord de l’Equateur et dont les vents sont dans le sens « horaire » de ceux situés au Sud de l’Equateur et où les vents circulent dans l’autre sens. Ce « conflit » entre des masses d’air qui vont dans des sens différents, dans une région très chaude et humide, crée un climat très instable, avec des zones totalement sans vent et d’autres où se créent des orages violents avec des coups de vents brutaux mais très brefs. Photo : Joé SEETEN Il est très délicat d’y trouver les zones où le vent est à la fois stable et favorable. La fin de la course, vers le Brésil se déroulera entre les orages qui apparaissent sur les hauteurs de la côte, et l’anticyclone situé sur l’Atlantique Sud (Anticyclone de St Hélène), les vents y seront plutôt portants. Une autre illustration, plus complexe, est « El Nino ». Mais qu’est-ce qu’El Niño sinon une bonne excuse lorsque le « climat » va mal ? El Niño – ou oscillation australe - est un phénomène qui se produit de temps à autre dans l’Océan Pacifique, mais il est si important qu’il affecte le monde entier. En effet, La météorologie dépend en grande partie de la température de l’océan. Dans une zone où l’océan est chaud, il se forme plus de nuages et plus de pluie y tombe. En particulier, dans l’Océan Pacifique, à proximité de l’Équateur, le soleil chauffe beaucoup plus la surface de l’eau. Normalement, les vents forts qui soufflent le long de l’Équateur poussent en direction de l’ouest, vers l’Indonésie, l’eau chaude de surface située à proximité de l’Amérique du Sud. Lorsque cela se produit, l’eau plus froide du dessous remonte vers la surface de l’océan située au niveau de l’Amérique du Sud. Toutefois, au cours de l’automne et de l’hiver 1997-1998, par exemple, ces vents étaient beaucoup plus faibles que d’habitude. Ils ont en fait soufflé dans l’autre direction (vers l’Amérique du Sud au lieu de l’Indonésie) en octobre. Par conséquent, la surface chaude de l’eau située le long de l’Équateur a été entraînée le long des côtes d’Amérique du Sud (aux alentours du Pérou), puis elle s’est dirigée au nord, vers le Mexique et la Californie (Etats-Unis), et au sud, vers le Chili. De nombreux poissons qui vivaient dans les eaux normalement plus froides au large de la côte du Pérou se sont éloignés ou sont morts. Les pêcheurs appellent El Niño, ce qui signifie « l’enfant », ce phénomène caractérisé par des eaux côtières chaudes et une mauvaise pêche. En effet, il se produit généralement vers Noël, fête de la naissance de Jésus. En 1997 et 1998, de nombreux nuages de pluie se sont formés au-dessus de cette partie chaude de l’océan. Ces nuages se sont dirigés vers l’intérieur des terres et ont déversé beaucoup plus de pluie que d’habitude en Amérique du Sud, en Amérique Centrale et aux États-Unis. Entre-temps, d’autres régions du monde ont souffert de sécheresse. Partout dans le monde, le temps était inhabituel, transformant les déserts en lacs et les forêts tropicales en brasiers. Comment pouvons-nous connaître les températures océaniques tout autour de la Terre pour essayer de prévoir ces phénomènes ? La meilleure manière est d’aller dans l’espace ! En effet, là où l’océan est plus chaud, le niveau de l’eau est légèrement plus élevé. Utilisant les données recueillies par les satellites Jason-1 et Topex/Poséidon, les scientifiques ont tracé des cartes topographiques des collines et vallées de la surface de l’océan qui permettent de mieux comprendre et prévoir des phénomènes comme El Nino, mais aussi toutes les variations climatiques de la planète.