Pour interpréter la littérature, l`analyse des mots 1. Rimbaud, « Le

Première partie
Pour interpréter la littérature, l’analyse des mots
B. PRONOMS ET ADJECTIFS PRONOMINAUX
1. Rimbaud, « Le dormeur du val »
7.
Phonétique
: l’hiatus
8. Le pronom personnel et l’article
2. Ronsard, « Mignonne, allons voir... »
9.
Orthographe
: l’infinitif
10. Possessifs et démonstratifs
3. Voltaire, « De la tolérance universelle »
11.
Vocabulaire
: les synonymes
12. Indéfinis et numéraux
On continuera ici d’apprendre à analyser les mots : à mener l’analyse grammaticale qui conduira à
l’analyse littéraire et à la maîtrise de l’élocution. En outre, on commencera à travailler l’articulation
entre paraphrase et interprétation des textes.
Objets d’étude : la poésie du XIXe siècle ; genres et formes de l’argumentation (XVIIIe siècle)
Perspectives d’étude : connaissance des genres ; réflexion sur la singularité des textes.
LE DORMEUR DU VAL
C’est un trou de verdure où chante une rivière
Accrochant follement aux herbes des haillons
D’argent ; où le soleil, de la montagne fière,
4 Luit ; c’est un petit val qui mousse de rayons.
Un soldat jeune, bouche ouverte, tête nue,
Et la nuque baignant dans le frais cresson bleu,
Dort ; il est étendu dans l’herbe sous la nue,
8 Pâle dans son lit vert où la lumière pleut.
Les pieds dans les glaïeuls, il dort ; souriant comme
Sourirait un enfant malade, il fait un somme ;
11 Nature, berce-le chaudement : il a froid.
Les parfums ne font pas frissonner sa narine :
Il dort dans le soleil, la main sur sa poitrine
14 Tranquille. Il a deux trous rouges au côté droit.
Arthur Rimbaud, 1871
vocabulaire et
vocabulaire et phonétique
phonétique
1. En paraphrasant le poème, définissez « val, haillons, cresson, glaïeul »
2. « Eva a eu un hérisson ahuri et idiot à hurler ! » Qu’est-ce qui est bizarre et gênant dans cette phrase ?
Comment s’appelle ce phénomène ? Comment s’appelle le signe placé entre les deux premiers mots ? À quoi
sert-il ? Quelle lettre peut-il remplacer ? Dans quels mots ? Dans quel sens doit-il être dessiné ?
3. Rimbaud est allé à la ligne après « haillons », à cause du rythme et de la rime ; s’il écrivait en prose,
aurait-il pu aller à la ligne après « d’ » ? Pourquoi ?
4. Dans le 2e vers du 1er tercet, que doit-on prononcer entre « fait » et « un » ? Comment s’appelle ce phé-
nomène ?
5. Prononce-t-on davantage les liaisons lorsqu’on lit de la poésie que dans la conversation courante ?
Quelles sont les liaisons obligatoires dans ce texte ? Lesquelles doivent être prononcées plus légèrement ?
Notez-les après l’avoir recopié1.
6. Récrivez les deux derniers vers sous la forme de deux questions, avec l’inversion du sujet. Que se pas-
se-t-il entre le verbe et le sujet ? Comment appelle-t-on cette lettre ?
7. Dans le vers 2, la lettre « h » représente-t-elle un son ? Quelle est la différence entre les deux « h » de
ce vers ? Comment appelle-t-on l’« h » de « haillons » ?
8. Peut-on élider un « e » avant un « h muet » ? Trouvez un exemple dans le poème de Rimbaud. Et
avant un « h aspiré » ? Donnez un exemple
1. Vous pourrez, par exemple, noter les liaisons obligatoires au stylo, et les autres au crayon. Vous pourrez aussi noter différemment les liai -
sons qui vous paraissent discutables.
leçon 7
7leçon 7 — phonétique
L’hiatus
« Eva a eu un hérisson ahuri et idiot à hurler ! » La langue française n’apprécie guère l’hiatus, qui
est le choc, entre deux mots, de deux voyelles. Voici comment elle l’évite.
1. L’apostrophe1
« ce + est » = « c’est » Lorsque l’« e muet »2 d’un monosyllabe3 est suivi d’une voyelle,
pour éviter l’hiatus, il s’élide4 et on le remplace par une apostrophe.
Pour le lecteur, les deux mots ne sont plus alors qu’un seul mot : on ne peut pas aban-
donner une malheureuse apostrophe seule en fin de ligne, parce qu’une syllabe à l’inté-
rieur d’un mot serait coupée en deux.
« s’il » : on doit élider l’ « i » de « si » devant « il, ils ».
2. La liaison
« C’estun trou » Lorsque la consonne finale muette finale d’un mot rencontre une
voyelle, pour éviter l’hiatus5, elle se réveille et on la prononce.
« ...sourirait un » En poésie, à l’intérieur d’un vers, on tend à la prononcer systémati-
quement, même entre des groupes de mots séparés par le sens, même autour d’un signe de
ponctuation. Dans ce cas, la liaison s’articule plus discrètement.
« Dormira-t-il ? » — De même, entre verbe conjugué à la troisième personne qui se termine
par une voyelle et un pronom sujet inversé, on ajoute un « t euphonique6 » entre deux
traits d’union.
« Vas-y » C’est le même phénomène qui fait ajouter un « -s » à la 2e personne du singu-
lier de l’impératif d’ « aller, aimer, » etc.
3. L’« h aspiré »
« Des
x
haillons, le
x
haillon » L’ « h », normalement, empêche l’élision et la liaison : il
impose l’hiatus. On dit alors que c’est un « h aspiré ».
« aux herbes, l’herbe » Toutefois, beaucoup d’ « h », en français, et n’ont aucune signi-
fication phonétique : ils autorisent en effet aussi bien la liaison que l’élision.
On sait si un « h » est aspiré ou non en consultant le dictionnaire, qui indique la pro-
nonciation entre crochets ou entre barres obliques, en phonétique : haillon, / ‘ajõ / ;
herbe, / ɛrb(ə) /.
l’hiatus... exercices...l’hiatus... exercices...l’hiatus... exercices...l’hiatus... exercices...
orthographe
1. Restituez les mots dont la voyelle finale a été remplacée par une apostrophe, dans « Après trois
ans », « L’invitation au voyage », et « L’Albatros ».
2. Syllabes et coupe : copiez « L’Albatros » en indiquant par une barre l’on peut couper les
mots des poèmes suivants, si l’on se trouve en fin de ligne.
3. Copiez « Le dormeur du val » en lui donnant l’apparence d’un texte en prose (en un seul §).
1. Attention à l’écrire dans le bon sens, comme un accent aigu.
2. Il faut ajouter l’ « a » de « la » : « la+orange » = « l’orange ». Noter aussi que l’élision familière de « tu » (« °T’es là ? ») ou de « qui »
(« °l’homme qu’est là... »)
3. « Ce, le, je, te, se, me, ne, que », auxquels il faut ajouter les composés de « que » : « lorsque, puisque », ainsi que, « jusqu’à » et, parfois,
« quoique »
4. Il s’efface.
5. Ainsi, lorsque la consonne muette suit une autre consonne, la liaison ne se fait pas, en général : « une mort
x
effrayante »
6. Du grec εὐ (« bien ») et φωνή (« voix »).
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leçon 7
4. Recherchez les hiatus dans « Après trois ans », « L’invitation au voyage » et « L’albatros ».
5. Copiez, en indiquant les liaisons :
a) « L’invitation au voyage » ou « Après trois ans »
b) Les quatre premiers quatrains du « Bateau Ivre » (Rimbaud, Poésies) : « Comme je descen-
dais des Fleuves impassibles, / Je ne me sentis plus guidé par les haleurs ; / Des peaux-
rouges criards les avaient pris pour cibles, / Les ayant cloués nus aux poteaux de couleurs.//
J’étais insoucieux de tous les équipages,/ porteur de blés flamands ou de cotons anglais ;/
Quand avec mes haleurs ont fini ces tapages,/ Les Fleuves m’ont laissé descendre où je vou-
lais.// Dans les clapotement furieux des marées,/ Moi, l’autre hiver plus sourd que les cer-
veaux d’enfants,/ Je courus ! Et les péninsules démarrées/ N’ont pas connu tohu-bohus plus
triomphants.// La tempête a béni mes éveils maritimes ;/ Plus léger qu’un bouchon, j’ai
dansé sur les flots/ Qu’on appelle rouleurs éternels de victimes/ Dix nuits, sans regretter
l’œil niais des falots. [...] »
6. Copiez, en indiquant les liaisons et les hiatus, « La vie antérieure » (Baudelaire, Les Fleurs du
Mal, « Spleen et Idéal », XII)
7. « APRÈS LA BATAILLE Mon père, ce héros au sourire si doux, / Suivi d’un seul housard7 qu’il
aimait entre tous / Pour sa grande bravoure et pour sa haute taille, / Parcourait à cheval, le soir
d’une bataille, / Le champ couvert de morts sur qui tombait la nuit. / Il lui sembla dans l’ombre
entendre un faible bruit. / C’était un Espagnol de l’armée en déroute / Qui se traînait sanglant
sur le bord de la route, / Râlant, brisé, livide, et mort plus qu’à moitié, / Et qui disait : « À
boire ! à boire, par pitié ! » / Mon père, ému, tendit à son housard fidèle / Une gourde de rhum
qui pendait à sa selle, / Et dit : « Tiens, donne à boire à ce pauvre blessé. » / Tout à coup, au
moment le housard baissé / Se penchait vers lui, l’homme, une espèce de Maure, / Saisit un
pistolet qu’il étreignait encore, / Et vise au front mon père en criant : « Caramba ! » / Le coup
passa si près que le chapeau tomba, / Et que le cheval fit un écart en arrière. / « Donne-lui tout
de même à boire, »dit mon père. »
a) Copiez le poème et définissez en contexte les mots soulignés
b) Faites-en l’analyse grammaticale8.
c) Restituez les huit mots tronqués par une apostrophe.
d) Indiquez par une marque les cinq hiatus9 et les dix liaisons présentes dans le poème.
e) Repérez un hiatus dans le deuxième vers de la deuxième strophe ; l’ « e muet » doit-il être
prononcé ?
8. « CLAIR DE LUNE Votre âme est un paysage choisi / Que vont charmant masques et berga-
masques / Jouant du luth et dansant et quasi / Tristes sous leurs déguisements fantasques. //
Tout en chantant sur le mode mineur / L’amour vainqueur et la vie opportune / Ils n’ont pas
l’air de croire à leur bonheur / Et leur chanson se mêle au clair de lune, // Au calme clair de
lune triste et beau, / Qui fait rêver les oiseaux dans les arbres / Et sangloter d’extase les jets
d’eau, / Les grands jets d’eau sveltes parmi les marbres. » (Verlaine, Fêtes Galantes)
a) Définissez en contexte les mots soulignés.
b) Faites-en l’analyse grammaticale10.
c) Dictée.
d) Restituez les deux mots tronqués par une apostrophe.
e) Indiquez par une marque les quatre liaisons présentes dans le poème.
f) Repérez un hiatus dans le deuxième vers de la deuxième strophe ; l’ « e muet » doit-il être
prononcé ?
Dans cette situation, même si, phonétiquement, deux voyelles se rencontrent, selon la
7. Hussard
8. « Quasi » est un adverbe, dont la fonction est de modifier le sens de l’adjectif « triste ».
9. Pour « l’armée en », voyez l’exercice suivant, f).
10. « Quasi » est un adverbe, dont la fonction est de modifier le sens de l’adjectif « triste ».
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leçon 7
tradition littéraire, il n’y a pas d’hiatus.
9. « LES CHATS Les amoureux fervents et les savants austères / Aiment également, dans leur
mûre saison, / Les chats puissants et doux, orgueil de la maison, / Qui comme eux sont frileux,
et comme eux sédentaires. // Amis de la science et de la volupté, / Ils cherchent le silence et
l’horreur des ténèbres. / L’Erèbe les eût pris pour ses coursiers funèbres / S’ils pouvaient au ser-
vage incliner leur fierté. // Ils prennent, en songeant, les nobles attitudes / Des grands sphinx
allongés au fond des solitudes / Qui semblent s’endormir dans un rêve sans fin. // Leurs reins
féconds sont pleins d’étincelles magiques. / Et des parcelles d’or, ainsi qu’un sable fin, / Etoilent
vaguement leurs prunelles mystiques. (Baudelaire, Les Fleurs du Mal, « Spleen et Idéal »)
a) Définissez en contexte les mots soulignés.
b) Faites-en l’analyse grammaticale11.
c) Dictée.
d) Restituez les cinq mots tronqués par une apostrophe.
e) Indiquez par une marque les treize liaisons obligatoires ou possibles dans le poème, puis
lisez le poème à haute voix en vous efforçant de « faire les liaisons » convenablement... et
même élégamment !
Vers l’écriture d’invention
10. Composez une phrase avec chacun des quatre mots étudiés dans « Le Dormeur du Val ».
11. Ecrivez un poème une description se terminera par une chute étonnante. Vous veillerez à
éviter les hiatus, sauf devant un « h aspiré ».
Vers le commentaire
a) Résumez le poème ; qu’est-ce qui est surprenant dans la chute de ce sonnet ?
b) Relevez les adjectifs qualificatifs du texte. Que remarquez-vous ? Quel est l’effet produit ?
c) Analysez le mot « rivière ». Que remarquez-vous ? Analysez le mot « accrochant ». A-t-il un
sujet ? Lequel ? Que remarquez-vous ?
d) Sur quel mot l’hiatus du second vers attire-t-il l’attention ? Que signifie-t-il ici ? En quoi est-il
frappant ?
e) Analysez le mot « argent ». Qu’est-ce qui vous étonne ici ?
Rejet, oxymore
f) Analysez le mot « soleil ». Que remarquez-vous ?
g) Analysez le mot « fière ». Que remarquez-vous ? Quel est l’effet produit ?
h) Commentez les sonorités du vers 5.
i) Analysez le nom « lumière ». Qu’est-ce qui est étonnant ? Quel est l’effet produit ?
j) Observez les consonnes du premier vers du dernier tercet. Que remarquez-vous ? Quel est l’effet
produit ?
k) Analysez le mot « tranquille ». Qu’est-ce qui est étonnant ? Quel est l’effet produit ?
l) Observez voyelles et consonnes dans le dernier vers. Qu’est-ce qui est remarquable ?
m) Doit-on prononcer l’ « e muet » de « rouges » ? Pourquoi ? Pour réussir à le prononcer, comment
doit-on prononcer la première syllabe du mot ? Quel est l’effet produit ?
Récitation ou autodictée
Vers la dissertation
D’après vous, la poésie doit-elle être la plus naturelle possible ; peut-elle se passer des artifices ?
11. « Coursiers » est attribut de l’objet « les » ; « servage » est le complément de but ou de lieu ou de direction du verbe « incliner » ; « soli-
tudes » est le complément de lieu du verbe « allonger ».
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