Stoïcisme et bouddhisme, questions d'éthique.
Pierre Haese, septembre 2015
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vertueuse est une manière d'être de la partie hégémonique de l'âme et les actions
droites tirent leur valeur de l'harmonie et de la concordance de la nature individuelle
avec la nature universelle. Toute l'éthique stoïcienne se déduit du dogme fondamental
du stoïcisme : seul le bien moral, la vertu, est un bien, seul le mal moral, le vice, est un
mal
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. Ainsi tout dans la vie de l'individu dépend de la manière dont il se représente les
choses, c'est-à-dire dont il se les dit à lui-même intérieurement. Pour se représenter
les choses, il doit en avoir une juste connaissance ; pour ne pas faillir dans son
assentiment, il doit guider ses jugements selon la droite raison. L'éthique, qui est la
science de l'action juste, est donc indissociable de la physique et de la logique.
• Le souverain bien et la vertu
Diogène Laërce donne la définition du souverain bien, la fin ultime, pour les
stoïciens :
C'est pourquoi Zénon le premier, dans son traité « De la Nature de
l'homme », dit que la fin est de « vivre conformément à la nature », c'est-à-dire
selon la vertu. La nature, en effet, nous conduit à la vertu ; se prononcent dans
le même sens Cléanthe (« Du Plaisir »), Posidonius et Hécaton (« Des Fins »).
D'autre part, « vivre selon la vertu » veut dire la même chose que « vivre selon
l'expérience des événements qui arrivent selon la nature », comme dit
Chrysippe au premier livre « Des Fins » ; car notre nature est partie de celle de
l'univers ; c'est pourquoi la fin s'énonce : « vivre en suivant la nature », c'est-à-
dire selon sa propre nature et selon celle de l'univers, ne faisant rien de ce que
défend la loi commune, c'est-à-dire la droite raison qui circule à travers toute
chose et qui est identique à Zeus, le chef du gouvernement de l'univers ; et la
vertu de l'homme heureux et le cours facile de la vie, c'est ceci même d'agir
toujours selon l'accord du démon qui est en chacun de nous avec la volonté du
gouverneur de l'univers
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.
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- « Et quand tu étais à l'école, qu'examinais-tu ? Ne méditais-tu pas sur ce qui est bien, ce qui est mal, et ce qui
n'est ni l'un ni l'autre ? – Je faisais cet examen. – Qu'avez-vous donc pensé alors ? – Que les choses justes et
belles étaient des biens, les choses injustes et laides des maux. – Vivre est-il un bien ? – Non. – Et la prison ? –
Non. – Des paroles viles et malhonnêtes, la trahison d'un ami, la flatterie adressée au tyran, que vous paraissait
alors tout cela ? – Des maux. Alors n'examine pas maintenant ma question, et pourtant tu ne l'as pas davantage
examinée ni résolue », Entretiens, IV, 1, 132-134.
« Où donc est-il (le bonheur) ? Dans les actions qu'exige ta nature d'être humain? Comment les accompliras-
tu ? Si tu as des principes d'où dérivent les inclinations et les actions. Quels principes ? Ceux qui concernent les
biens et les maux, à savoir : rien n'est un bien pour l'homme qui ne le rende juste, tempérant, courageux, libéral,
et rien n'est un mal qui ne produise les effets contraires », Pensées, VIII, 1.
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- DL, VII, 87-88.