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Les premières aides apportées
par des médecins à
la Résistance dans l’Ain
De nombreux membres du corps
médical ont aidé la Résistance,
le maquis, ou se sont engagés dans
des mouvements de résistance
dans l’Ain.
ABourg-en-Bresse, le chirurgien
dentiste Rémond Charvet est respon-
sable du Service de Renseignement
des Mouvements Unis de la Résistance.
Le docteur Poncet est membre du
Comité Départemental de Libération
clandestin et est aussi inspecteur
départemental de la Santé.
Le docteur Gustave Léger, médecin
des prisons, facilite l’évasion de
résistants et accueille à son domicile
des réunions importantes des
Mouvements Unis de la Résistance
où sont présents Jean Moulin et
le général Delestraint.
ANantua, Emile Mercier, médecin,
devient chef de l’Armée Secrète
et s’engage dès 1940 avec son épouse
Paulette, pharmacienne, dans
la Résistance. Fin 1943, il prend
la responsabilité du Service de Santé
des camps des maquis de l’Ain avec
quelques médecins : les docteurs
Noël, Bastian et Caraco de Thoirette.
Dénoncé, il est fusillé lorsde la rafle
du 14 décembre 1943.
Apartir de juin 1944, s’organise un
véritable Service de Santé du maquis.
Les Docteurs Georges, Guillet,
Parker et le Service de Santé
du maquis de l’Ain
Jacques Guttières dit « Docteur
Georges », adhérent du mouvement
« Libération » depuis 1942, est
contraint de quitter son poste de
médecin ORL à Villeneuve-sur-Lot,
suite à son fort engagement dans
la résistance locale.Sur l’ordre d’Henri
Gabrielle, responsable du Comité
Médical de la Résistance auprès de
l’Etat Major régional des Forces
Françaises de l’Intérieur, Jacques
Guttières est affecté au maquis
de l’Ain pour organiser un Service
de Santé en avril 1944. Il est aidé par
le Docteur René Guillet qui le rejoint
le 24 juin 1944, et une douzaine
d’autres médecins.
Sa première tâche consiste à recruter
de jeunes médecins et à les affecter
aux groupements principaux de
combattants. Ainsi par exemple, le
Docteur Valentin (Paulin) est affecté
au camp Rolland, le Docteur Bastien
au camp Jo, le Docteur Leteyssier
dans le secteur de Jujurieux, le Docteur
Weiler au groupement Chabot.
Il se met ensuite en quête de
matériel sanitaire. Il organise par
ailleursdes Postes de Secours disposant
de quelques lits dans des locaux vides
sous la responsabilité de médecins à
Hauteville, Champagne-en-Valromey,
Brénod, Bellegarde-sur-Valserine,
Saint-Germain-de-Joux, Oyonnax,
Chavannes-sur-Suran, Corveissiat…
Des postes de repli sont prévus en
cas d’attaque à Lantenay, au Poizat,
à Charix.
Fin juin 1944, des hôpitaux
complémentaires sont installés à
Oyonnax et dans l’hôtel de France
à Nantua .
Dans la nuit du 7 au 8 juillet,
le chirurgien britannique Geoffray
Edward Parker dit « Parsifal »
débarque d’un avion Dakota avec du
matériel. Le 9 juillet 1944, un centre
chirurgical est organisé sous sa direction
dans l’Ecole Pratique d’Oyonnax.
Début août 1944, sur ordre d’Henri
Petit dit « Romans », chef des maquis
de l’Ain, « Parsifal », spécialiste en
chirurgie de guerre, prend la direction
du Service de Santé et est secondé
par René Guillet.
René Guillet, Coll. René Guillet
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Les persécutions
Dans toute la France, des personnes
sont persécutées pour ce qu’elles sont :
juives, tziganes, étrangères. D’autres
sont pourchassées pour leurs actions
de désobéissance civile, de refus de
l’occupation : communistes, gaullistes,
francs-maçons, réfractaires au STO,
opposants et résistants.
Le nombre total des victimes de ces
répressions est mal connu : plusieurs
milliers de personnes ont été assassi-
nées par les nazis en France même,
dont une partie avec la complicité
directe du gouvernement français et
des collaborateurs.
Selon Henri Rousso, on estime à
87 000 hommes et femmes (résistants,
civils, condamnés de droit commun,
homosexuels…) le nombre de
déportés dans les camps de
concentration allemands (Dachau,
Buchenwald, Ravensbrück…) dont
40% n’ont pas survécu.
Sur une population estimée à
350 000 avant la guerre, environ
76 000 juifs de France ont été déportés
vers les camps d’extermination de
Pologne ; 2 500 ont survécu. Parmi
ces déportés il y avait 2 000 enfants
de moins de six ans, 8 700 enfants
de 6 à 7 ans et 9 700 personnes de
plus de 60 ans.
Les persécutions recouvrent toutes
les formes de violences possibles,
de la pression psychologique à
la désignation publique comme juif,
àl’arrestation, la torture, la déportation
et l’exécution.
La résistance civile :
le tournant de l’année 1942
Avec l’intensification de la guerre,
les persécutions sont de plus en plus
nombreuses et visibles. Une part
croissante de la population est choquée
et certaines personnes réagissent en
portant secours aux victimes.
Les acteurs de cette résistance civile
viennent de tous les horizons de la
société. Ce sont des individus isolés
ou appartenant à des groupes
sociaux ou politiques, qui interviennent
par sympathie,esprit de solidarité
ou pour des raisons culturelles,
politiques ou juridiques.
Les formes de résistance civile sont
individuelles ou collectives, anonymes,
clandestines ou publiques. Le sauvetage
des juifs en est l’une des formes les
plus fréquentes.
L’opinion publique et les prises de
position de certains responsables
administratifs, juridiques, politiques
ou religieux (représentants des insti-
tutions) encouragent ou provoquent
des initiatives. Ainsi se développent
de multiples formes d’aide :
on (gendarmes, policiers,
fonctionnaires) prévient les victimes
désignées ;on héberge,on cache ;
on ravitaille, on fournit de faux-papiers ;
on fait passer la ligne de démarcation,
les frontières ;on dénonce,on proteste,
on manifeste.
Les journaux et bulletins clandestins
soutiennent ces actions en dénonçant
et défiant la légitimité du pouvoir.
«Avis très important concernant les atterrissages d’aviateurs et parachutages », 6 juillet 1943,
Inv. MHRD 1998.17.30, Coll. Musées des pays de l’Ain
Découpage de la France. Détail de la région de l’Ain
L’AIDE CIVILE AUX RÉSISTANTS
Lasituation géographique du département de l'Ain
(dont les limites sont formées par les vallées de
la Saône et du Rhône et par la frontière suisse à l'est) et
laprésence d'axes de communication européens vers
laSuisse, l'Italie et l'est en font un secteur particulièrement
stratégique durant la Seconde Guerre mondiale.
La présence par ailleurs d'une topographie à la fois de
plaines et collines à l'ouest et de la zone de moyenne
montagne ouverte du Bugey à l'est, ainsi que la mise en
place de la ligne de démarcation, puis de la zone d'occu-
pation italienne dans le Bas Bugey, vont favoriser le refuge
et les passages frontaliers. Les proscrits du régime de
Vichy vont tenter de fuir vers la Suisse, se réfugier dans
les maquis, où se cacher dans cette zone de moyenne
montagne. Les Alliés britanniques, conscients de l’intérêt
de la topographie du département vont établir en Bresse
eten Dombes une véritable base logistique pour
approvisionner la majeure partie des groupes de résistance
dans la région Rhône-Alpes et en Saône-et-Loire.
Les formes d’aides apportées aux personnes persécutées
ou pourchassées ont été multiples. Certains vont cacher
des personnes, d’autres vont confectionner des faux-
papiers, approvisionner les maquis, soigner les résistants
blessés, tenter de faire passer la frontière à des familles
juives… Cette aide est le fait de personnes individuelles
ou de réseaux plus ou moins organisés.
LE SERVICE DE SANTÉ DES MAQUIS DE L’AIN
La documentation sur les formes de secours apportées aux proscrits de la société
entre 1940 et 1944 est bien souvent très parcellaire. C’est pourquoi le musée d’Histoire
de la Résistance et de la Déportation de l’Ain et du Haut-Jura a choisi de présenter pour le dossier
seulement l’exemple du Service de Santé du maquis, pour lequel il dispose d’une documentation
relativement fournie sur le sujet : collections, archives et témoignages oraux.
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