beaulieu.ch Magazine de la Clinique Générale-Beaulieu n°17 | été 2015 >Dossier: les 10 ans du Centre de procréation médicalement assistée EDITO 2 L’émotion et l’enjeu. Parents, enfants, médecins, partenaires et collaborateurs: nous étions tous réunis le 3 juin au Forum Beaulieu pour célébrer, dans l’émotion, les 10 ans du Centre de procréation médicalement assistée. C’est l’occasion pour moi d’exprimer ici toute ma reconnaissance à ces trois acteurs du Centre, ainsi qu’aux collaborateurs concernés de la Clinique pour l’excellence de leur travail. Des remerciements appuyés vont également au Dr Nicole Fournet Irion pour son implication dans la campagne qui a précédé la votation. Hasard du calendrier, cet anniversaire s’est tenu dans un contexte de scrutin populaire. Le 14 juin en effet, le peuple devait se prononcer sur la modification d’une demi-phrase dans un article de la Constitution fédérale. Quelques mots qui pouvaient changer beaucoup de choses pour les couples frappés d’infertilité ou de maladies héréditaires graves et pour les professionnels de la médecine de la reproduction. Face à ce thème pourtant très émotionnel, le peuple a fait preuve, une fois de plus, d’une grande sagesse en votant oui par 61,92%. Une bonne nouvelle également pour la démocratie en Suisse, qui permet d’aborder tous les thèmes dans la dignité. Si le présent numéro consacre une large place au CPMA, il fait également un tour d’horizon du cancer de la prostate et de l’incontinence post-opératoire, deux thèmes développés lors de la 6e journée d’urologie qui s’est tenue le 2 juin au Forum Beaulieu. Points forts de la journée: trois interventions de microchirurgie réalisées en direct ont été proposées aux participants qui pouvaient dialoguer avec les chirurgiens en salle d’opération. Très bonne lecture! Sommaire La Clinique Générale-Beaulieu est fière de proposer pareil Centre dans son offre médicale très vaste. De plus en plus hyperspécialisée, la médecine doit regrouper sous un même toit des compétences complémentaires. Le CPMA est l’exemple réussi d’une équipe pluridisciplinaire et d’un partenariat tripartite: les médecins spécialistes, qu’ils soient gynécologues ou urologues, le Laboratoire Unilabs et la Clinique Générale-Beaulieu. C’est aussi l’assurance de répondre à des exigences élevées en termes de qualité et de sécurité pour les patients. Ce mode d’organisation, qui se généralise peu à peu au sein de notre Clinique, est indispensable pour l’avenir et permet d’adapter l’outil de travail que nous mettons à disposition des médecins et de leurs patients. Philippe Cassegrain Directeur Edito p. 2 Les équipements du CPMA p. 15 Dossier: CPMA: dix années fertiles p. 3 Les équipes du CPMA p.16 Votation du 14 juin p. 6 6e journée d’Urologie p.20 Le point vital du CPMA p. 8 Info brève p.24 L’avis du médecin répondant p. 11 Infertilité: le volet masculin p. 12 DOSSIER 3 10e anniversaire du CPMA Dix années fertiles Le CPMA fête ses dix ans précisément l’année où la modification de la loi sur la PMA est en jeu. Pour dresser un bilan et parler de ce contexte dont l’issue est particulièrement importante, non seulement pour les professionnels de la procréation médicalement assistée, mais surtout pour les couples notamment infertiles, nous avons rencontré l’une des cofondatrices du Centre, la Dre Nicole Fournet Irion. Qu’est-ce que la procréation médicalement assistée et quelles sont les techniques employées au CPMA? Lorsque l’on parle de procréation médicalement assistée, on fait allusion à deux techniques: l’insémination et la fécondation in vitro. Les inséminations que nous pratiquons sont dites homologues, c’est-à-dire avec le sperme du conjoint. Nous ne faisons pas d’inséminations de donneurs car il n’y a plus de banque de sperme à Genève. L’évolution des techniques et en particulier l’apparition de l’ICSI (ndr: Intracytoplasmic Sperm Injection, c’est-à-dire microinjection d’un spermatozoïde directement dans l’ovocyte) a en effet diminué les besoins en donneurs, même dans les cas les plus sévères d’infertilité masculine. Pour l’insémination, le sperme est préparé en laboratoire. La fraction mobile des spermatozoïdes est concentrée dans un petit volume. Puis on introduit cette préparation avec un cathéter fin à l’intérieur de l’utérus de la femme au moment de l’ovulation. Pour la fécondation in vitro, les ovocytes sont prélevés après une stimulation ovarienne. Le but est d’en obtenir plusieurs, car avec un seul ovocyte, les chances que cet ovocyte soit fécondé et aboutisse à une grossesse sont excessivement faibles. En augmentant le nombre d’ovocytes et, par conséquent, d’embryons, on augmente les chances d’obtenir une grossesse. Il faut savoir que dans la procréation humaine, environ 50% d’embryons sont génétiquement «non compétents», c’est-à-dire ne donneront pas de grossesse. On doit donc stimuler les ovaires, prélever des ovocytes et procéder à la fécondation des ovocytes en laboratoire, d’où le terme de fécondation in vitro. Une fois l’ovocyte fécondé, et après les premières étapes du développement embryonnaire, on transfère les embryons dans l’utérus, à un moment que l’on appelle la «fenêtre d’implantation», qui correspond, d’un point de vue hormonal, au moment adéquat où ils ont le plus de chances de s’implanter. Le transfert des embryons a lieu de deux à cinq jours après prélèvement des ovocytes. DOSSIER 4 10e anniversaire du CPMA Quelle était la vision de départ, lors de la création du Centre en 2005? Les Drs Anna-Maria Stalberg, Gabriel de Candolle et moi-même avons eu l’idée de monter une équipe tripartite comprenant la Clinique Générale-Beaulieu, un laboratoire et nous-mêmes. Comme vous le savez, pour la fécondation in vitro, le laboratoire est essentiel à l’obtention de bons résultats. Dès le départ, nous voulions un laboratoire qui soit performant et qui réponde aux normes du début du 21e siècle. La Clinique Générale-Beaulieu nous offrait quant à elle une bonne infrastructure pour la réception des patientes, les actes médicaux, comme les ponctions d’ovocytes qui se pratiquent au bloc opératoire, et les transferts, qui nécessitent des équipements et du personnel infirmier. A l’époque, nous travaillions déjà beaucoup au niveau de l’hormonologie et des spermogrammes avec le laboratoire Unilabs. C’est donc tout naturellement que nous leur avons proposé un partenariat dans le cadre de la création d’un Centre de procréation médicalement assistée. Unilabs a engagé un embryologiste spécialisé en PMA et monté un laboratoire bénéficiant de la meilleure technologie à l’époque. Cette structure tripartite était-elle unique à Genève à l’époque? Dans le secteur privé, la structure tripartite que nous mettions sur pied était absolument unique. Les acteurs du projet étaient-ils déjà reconnus? Ma consœur et mon confrère étaient actifs dans la fécondation in vitro depuis une dizaine d’années, j’en faisais moi-même depuis mon installation en cabinet privé en 1997. Et nous étions tous détenteurs d’une sous-spécialisation en médecine de la reproduction et endocrinologie gynécologique, un critère incontournable de qualité, mais également de sécurité en termes de responsabilité médicale. Dre Nicole Fournet Irion ceinte. Aujourd’hui, en Suisse, on sait que l’âge moyen au premier accouchement tend à augmenter constamment. Et on sait aussi que les femmes qui consultent pour un problème d’infertilité ont en moyenne deux ans de plus que les femmes qui ont accouché. La croyance selon laquelle les progrès de la médecine peuvent pallier le problème de l’âge n’est-elle pas une illusion? Vous avez parfaitement raison mais les gens se trompent en pensant que les techniques de procréation médicalement assistée peuvent compenser le vieillissement des ovocytes. En tant que spécialistes en médecine de la reproduction, nous avons un énorme travail d’information et de prévention à faire en amont. Certaines sociétés faîtières, comme l’American Society for Reproductive Medicine, donnent des conseils précis aux femmes pour les aider à préserver leur fertilité, éviter les maladies sexuellement transmissibles, vivre sainement, avoir un poids normal, ne pas fumer, etc. Et bien entendu songer à ne pas avoir des enfants trop tard, car l’âge est un problème incontournable. Aujourd’hui, même les meilleurs traitements ne permettent pas de traiter l’infertilité liée à l’âge. Plus l’âge avance, plus la qualité des ovocytes se détériore, c’est-à-dire qu’un plus grand nombre d’entre eux n’est pas génétiquement normal et ne permet pas d’obtenir la grossesse souhaitée. Ces campagnes d’information sont-elles efficaces? La situation a-t-elle beaucoup évolué en dix ans? Les consultations pour cause d’infertilité sont en augmentation et, de ce fait, les traitements de fécondation in vitro aussi. Cette augmentation s’explique, d’une part parce que les patients sont mieux informés et font plus facilement appel au médecin pour ce genre de problèmes, et d’autre part par des aspects socioculturels. Actuellement, les femmes font souvent des études et repoussent la maternité de plus en plus tard. Or les chances de grossesses diminuant avec l’âge, elles rencontrent de plus en plus de difficultés à concevoir. Résultat: beaucoup de patientes nous consultent, non pas parce qu’elles souffrent d’une pathologie qui est source d’infertilité, comme une obstruction des trompes, mais simplement parce qu’elles sont arrivées à un âge où il est plus difficile d’être en- Malheureusement, le message a énormément de difficulté à passer. Différentes études menées en Europe, en Australie et aux Etats-Unis montrent que beaucoup d’étudiantes en milieu universitaire, par exemple, sont convaincues qu’elles peuvent attendre 40 ans pour avoir des enfants. Ce qui est bien sûr totalement faux. Je suis toujours étonnée de constater à quel point des patientes, qui sont pourtant d’un très bon niveau d’éducation, n’ont aucune idée de la réalité de la procréation. La presse people ne nous aide pas lorsqu’elle montre des actrices de 50 ans avec leurs jumeaux dans les bras. Cela contribue à propager l’idée selon laquelle il est possible d’avoir un enfant à n’importe quel âge. S’il est vrai que certaines femmes peuvent maintenir une fertilité relativement tard dans la vie, il s’agit d’exceptions. Les gens ne réalisent pas que DOSSIER 5 la très grande majorité des femmes de cet âge-là ont eu leurs enfants par don d’ovocytes, une technique interdite en Suisse. La rigueur de la loi suisse explique donc le fait que des femmes se rendent à l’étranger… Bien sûr, les femmes pour lesquelles nous ne pouvons plus intervenir parce qu’elles sont trop «âgées» pour tenter une fécondation in vitro avec leurs propres ovocytes se rendent en effet à l’étranger. En cas de grossesse, ces femmes présentent des risques accrus de complications du fait de leur âge, le traitement effectué et parce qu’il s’agit plus souvent de grossesse multiple. Le problème est que nous n’avons absolument aucun contrôle sur cette forme de tourisme médical. Les registres européens indiquent seulement le nombre de cycles de dons d’ovocytes effectués dans tel ou tel pays, pas l’origine des patientes. Dans les pays qui l’interdisent, comme la Suisse, il est impossible de connaître le nombre de femmes qui se rendent à l’étranger pour y effectuer ce traitement. Une fois enceintes, certaines d’entre elles n’informent même pas leur médecin qu’elles ont eu recours au don d’ovocytes. Dans ces cas-là, la prise en charge ne saurait être optimale. On parle de la qualité de l’ovocyte, mais qu’en est-il de celle du sperme? L’ovocyte est une plus grosse cellule et, initialement, le gamète prédominant. Mais le spermatozoïde a aussi bien sûr toute son importance. L’ICSI, technique qui a été développée dans les années 1990, a complètement révolutionné l’infertilité masculine. Grâce à cette méthode, on peut obtenir des taux de grossesses très satisfaisants, même lorsque aucun spermatozoïde n’est excrété et qu’ils sont obtenus par biopsie testiculaire. Dix ans après, quel est le bilan du CPMA? Le bilan est positif à tous égards. La collaboration tripartite a toujours bien fonctionné. En dix ans, nous avons évolué, notamment en termes techniques et de logistique. Fin 2013, une Unité de biologie de la reproduction a vu jour à la Clinique Générale-Beaulieu, puisque nous avons pu réunir dans le mêmes locaux le laboratoire d’andrologie, qui gère les analyses spermiologiques et les préparations en vue d’une insémination, et le laboratoire de fécondation in vitro. D’avoir pu réunir tous les intervenants des démarches diagnostiques et thérapeutiques de la procréation médicalement assistée sous un même toit. Avec le temps et l’augmentation de l’activité, l’équipe du laboratoire s’est étoffée. L’équipe médicale a également doublé depuis 2005. Nous sommes maintenant une équipe de six médecins. Nous sommes particulièrement heureux et fiers que tous les jeunes médecins formés dans la région genevoise ces dernières années aient fait le choix de rejoindre notre centre. Et en termes de traitements? 2005 était une année de transition car le CPMA a ouvert en mai. En 2006, nous avons réalisé environ 250 cycles. Ce chiffre comprend les ponctions d’ovocytes et transferts d’embryons, ainsi que les transfert d’embryons décongelés. Nous avons terminé 2014 avec 420 cycles, un chiffre très appréciable qui positionne notre Centre dans la moyenne supérieure des centres suisses. A Genève, nous avons la chance de bénéficier d’une patientèle locale, frontalière et internationale. L’équipe CPMA presque au complet. Ne manquent que la Dresse Carine Schwarz Blatt et le Dr Sao-Nam Tran. DOSSIER 6 10e anniversaire du CPMA Votation du 14 juin: ce que le OUI va changer. La Suisse présente une situation singulière: une directive essentielle concernant la pratique de la procréation médicalement assistée, un acte médical, est inscrite dans la Constitution fédérale. La révision de la loi sur la procréation médicalement assistée (LPMA) passe obligatoirement par l’approbation d’une modification de la Constitution par le peuple suisse. C’est sur cet objet que le peuple suisse était appelé à voter le 14 juin 2015. L’enjeu était la modification d’une demi-phrase de l’article constitutionnel 119, al. 2, let. c. On proposait en effet de remplacer le texte actuel (marqué en gras ci-après): «Ne peuvent être développés hors du corps de la femme jusqu’au stade d’embryons que le nombre d’ovules humains pouvant être immédiatement implantés» par «nécessaire à la procréation médicalement assistée». Avant le 14 juin, on ne pouvait pas conserver plus de 3 ovules imprégnés (zygotes) en culture, tous les autres devant être immédiatement cryoconservés. L’embryon n’est pas synonyme de vie Avec l’Allemagne, la Suisse était le seul pays au monde à cryoconserver des zygotes. Le zygote est une cellule unique contenant les noyaux (pronuclei) maternel et paternel. Leur présence, observée le lendemain du prélèvement des ovules, confirme la fécondation. A ce stade, il n’est pas possible de dire quel sera leur devenir. Le jour suivant (jour 2), une première division cellulaire a lieu si le développement se poursuit. Dans la LPMA, on parle dès lors d’embryon. La notion que tout embryon est source de vie est erronée. En moyenne, plus de la moitié des embryons s’arrêtent en cours de développement, car ils contiennent une ou plusieurs anomalies chromosomiques. Ce phénomène survient autant dans la nature qu’en fécondation in vitro. Plus la femme est âgée, plus le pourcentage d’embryons génétiquement anormaux est élevé. Il atteint 90% après 43 ans, ce qui explique que la grossesse est plus rare et les fausses-couches sont beaucoup plus fréquentes avec l’âge. Au début, l’embryon survit grâce aux outils cellulaires fournis par l’ovule. Entre le 3e et le 4e jour, il franchit une étape cruciale. Pour que son développement se poursuive, il doit produire ses propres outils. Beaucoup d’embryons n’en sont pas capables. Leur développement s’arrête et ils dégénèrent. De nombreux pays transfèrent les embryons dans l’utérus une fois ce cap franchi, c’est-à-dire au 5e jour, lorsque l’embryon atteint le stade dit de blastocyste. Les chances qu’un blastocyste s’implante et donne une grossesse sont plus élevées que celles des embryons plus jeunes. Dans les pays scandinaves, le transfert d’un seul blastocyste est devenu la règle et a permis une diminution drastique du taux de grossesse multiple tout en maintenant un taux de grossesse satisfaisant. Cette stratégie ne pouvait pas être utilisée en Suisse jusqu’ici. Avec la conservation au stade de zygote, il n’était pas possible de réduire le risque de grossesse multiple sans réduire le taux de grossesse. Le diagnostic préimplantatoire (DPI) La révision de la LPMA autorisant le DPI a été adoptée par le Parlement, mais son entrée en vigueur n’était possible que si la modification de l’art. 119 était acceptée. Là encore, notre pays était une exception, car la Suisse était le seul pays européen, à l’exception de la Lituanie, à interdire le DPI. Le oui du peuple le 14 juin place désormais la Suisse au même niveau que la grande majorité des pays du monde en matière de DPI. Le DPI consiste à analyser une ou plusieurs cellules de l’embryon pour déterminer s’il est affecté d’une maladie héréditaire grave, dont le couple est porteur. DOSSIER 7 Dans le registre international du DPI (ESHRE PGD Consortium), les maladies le plus souvent recherchées sont la mucoviscidose, des maladies neuromusculaires dégénératives, comme la maladie de Duchenne et la chorée de Huntington, et des hémopathies sévères comme l’anémie falciforme. Le DPI est également utilisé quand l’un des parents est porteur d’une translocation balancée, une anomalie structurelle des chromosomes qui est la cause de fausses-couches à répétition. On a vu plus haut que, dans une situation normale, les embryons ont une capacité de développement limitée et un taux élevé d’anomalies chromosomiques. En cas de DPI, il faut en plus écarter les embryons porteurs de la maladie recherchée. Dans ce contexte, les chances de trouver un embryon normal sont quasi nulles si seulement 3 embryons peuvent être testés. C’est pourquoi la révision de la LPMA autorise qu’un maximum de 12 embryons soit gardé en culture. Après de longs débats, il a été accepté que les couples infertiles puissent bénéficier des mêmes conditions. Dans leur cas, cette stratégie permettra d’augmenter les chances de succès du traitement tout en réduisant le risque de grossesse multiple. Tout autre décision aurait été illogique, voire injuste. DPI et diagnostic prénatal Dès la fin du premier trimestre, toutes les femmes de ce pays se voient proposer un test afin de déterminer si leur enfant à venir est porteur d’une trisomie. Lorsque ce test de dépistage est anor- mal ou qu’une maladie héréditaire grave est connue dans la famille, on effectue des tests spécifiques sur un prélèvement ovulaire (choriocentèse ou amniocentèse) ou par analyse de l’ADN foetal dans le sang maternel. Notre société a depuis longtemps accordé à la femme et au couple le droit à l’autodétermination lorsque l’atteinte foetale est confirmée. Dans cette situation, le couple choisit le plus souvent d’interrompre la grossesse. Comment peut-on justifier qu’un diagnostic prénatal soit effectué et qu’on procède à un avortement au deuxième trimestre de la grossesse s’il s’avère que le foetus est anormal, et qu’un test identique soit interdit sur l’embryon, avant même que la grossesse n’ait commencé? Il y a là une incohérence flagrante. Acceptée le 14 juin, la modification de l’article constitutionnel devrait permettre au CPMA de modifier sa stratégie. Encore fautil que la LPMA entre en vigueur. Le opposants annoncent déjà un referendum en 2016. Donc pas de changements dans l’immédiat, mais l’étape principale a été franchie. Si la LPMA est acceptée, les taux de succès de la FIV augmenteront pour les couple infertiles tout en diminuant le risque de grossesse multiple et ses conséquences pour la santé de la mère et de l’enfant. Grâce à l’autorisation du DPI, les couples porteurs d’une maladie grave et invalidante auront la possibilité d’en faire le diagnostic avant le début de la grossesse. Ils pourront ainsi éviter la douloureuse décision d’une interruption de grossesse et se préparer sereinement à la naissance d’un enfant en bonne santé. DOSSIER 8 10e anniversaire du CPMA Le laboratoire, point vital du CPMA. Christos Karageorgos Tout centre de procréation médicalement assistée gravite autour d’un pôle essentiel: le laboratoire. Le CPMA de la Clinique Générale-Beaulieu n’échappe bien sûr pas à la règle. Entretien avec son homme fort, Christos Karageorgos, biologiste responsable. embryons sont posés sur des plaques de culture et placés dans l’incubateur, qui essaie de recréer les conditions du corps humain, c’est-à-dire une température de 37°C, un taux d’humidité de 95%, ainsi qu’une atmosphère riche en CO2 et pauvre en O2. Le biologiste est l’un des trois acteurs essentiels dans le processus de PMA… Pourquoi de deux à cinq jours? Absolument. La PMA a toujours une structure à trois pôles, l’un d’eux étant le laboratoire. C’est là où s’effectue le travail avec les ovocytes et les spermatozoïdes, et où sont cultivés les embryons. Le rôle du laboratoire est de créer les conditions aussi proches que possible du corps humain - in vivo - pour que les embryons se développent pendant les trois à cinq jours où ils vivent en dehors du corps - in vitro. Nous imitons la nature. Et nous y arrivons très bien car même chez un couple qui n’a aucun problème de fécondité, les chances d’avoir une grossesse chaque mois est de 30%. Comment procédez-vous lors d’une fécondation in vitro? Nous préparons les ovocytes et les spermatozoïdes par un lavage destiné à éliminer tous les éléments non nécessaires, c’est-à-dire les cellules provenant du corps et du sang. Puis nous les isolons, pendant deux jours au minimum et cinq au maximum, dans un milieu de culture spécialisé, un liquide qui sert d’environnement et de nourriture aux embryons. Ce milieu de culture et ces C’est le temps que mettent les embryons pour transiter par les trompes avant de s’implanter dans l’utérus. L’implantation dans l’utérus se passe vers le jour 6 ou 7. Pendant ce temps, les embryons flottent dans le corps. L’incubateur remplace les trompes. Et nous ne sommes pas autorisés à conserver l’embryon plus de cinq jours. C’est une question de législation? Pas seulement. Il y a une «fenêtre d’implantation» dans l’endomètre (ndr: tissu qui tapisse la cavité utérine et dont les couches moyennes et superficielles sont éliminées par la menstruation si l’ovule n’est pas fécondé). Si l’on perd cette fenêtre, l’embryon n’aura pas ce dont il a besoin pour survivre et se dégradera. Pour lui, c’est une question de vie ou de mort. Il doit absolument se trouver au bon endroit au bon moment. Avec l’ICSI, à tous les coups l’on gagne? Pas vraiment. Il faut bien comprendre que les spermatozoïdes fonctionnent comme une armée qui prépare la fertilisation. On peut voir cela comme une bataille. Il faut qu’il y ait un nombre suffisant de spermatozoïdes qui arrivent devant l’ovocyte. Et à un moment donné, un seul d’entre eux pénètre dans l’ovocyte. Puis l’ovocyte se ferme hermétiquement et ne laisse plus personne entrer afin de garder le nombre correct de chromosomes. Avec l’ICSI, on se substitue à cette armée pour introduire un seul spermatozoïde dans l’ovocyte. Les premiers couples qui ont eu recours à cette méthode avaient un problème d’infertilité masculine, pas féminine. Les taux de réussite étaient donc très élevés. Et la question a été posée: pourquoi ne pas essayer d’appliquer cette méthode dans tous les cas? Malheureusement, l’ICSI n’est L’équipe du laboratoire pas la solution la plus performante dans les cas où la qualité ovarienne est faible. Il a fallu des années de pratique et de statistiques pour s’en rendre compte, mais nous savons aujourd’hui que la méthode classique reste toujours la plus performante là où il y a un facteur d’infertilité uniquement féminin. Comment détermine-t-on le potentiel d’un ovule ou d’un spermatozoïde? Pour les ovocytes, c’est très difficile. Comme ce sont des cellules fragiles, on ne peut pas y entrer pour effectuer des mesures. En outre, il n’existe pas vraiment de tests cliniques pour s’assurer de leur potentiel de développement. On utilise donc des critères morphologiques. Pour les spermatozoïdes, c’est plus facile. Comme il s’agit d’une armée, on peut mesurer le nombre approximatif de «soldats», leur forme et leur vitesse. Au final, seuls comptent l’implantation d’un embryon dans l’utérus et un test de grossesse positif. Toutes les évaluations n’ont comme but que de «deviner» lequel des embryons a le plus de chances d’aboutir à une grossesse. Quelles sont chez la femme les causes principales d’infertilité? Il y en a plusieurs. La cause la plus visible, celle avec laquelle la médecine de la reproduction a commencé, ce sont les trompes obstruées qui empêchent la rencontre de l’ovocyte et du spermatozoïde. Puis il y a la cause hormonale, que l’on détermine par des tests sanguins, qui empêche le développement mensuel des ovocytes. Il y a également des problèmes d’endomètre de l’utérus et enfin ce que l’on appelle «l’étiologie idiopathique», c’est-à-dire une infertilité inexpliquée, malgré les tests et les examens. Cela représente 10 à 15% des cas. Une cause psychologique, peut-être? Il est clair que la psychologie joue un rôle très important dans la sécrétion et le niveau des hormones. Par exemple, la prolactine est une hormone de stress. Si une femme se trouve dans une période de stress prolongée, le taux de prolactine augmente et empêche le développement de ses ovocytes. Avez-vous constaté une évolution de la patientèle? Absolument, ce qui a vraiment changé en quelques années, ce sont les patients et leurs besoins, leur façon de vivre beaucoup plus exigeante et leur tendance à penser et à décider de concevoir à un âge plus avancé. Cela revient-il à dire que les patients ne sont pas plus nombreux mais qu’ils sont plus âgés? Oui. L’âge est le facteur le plus important pour les résultats de la PMA. Pour obtenir les mêmes taux de réussite avec des patients plus âgés, il faut devenir plus performant. Cela ne saute pas aux yeux si l’on regarde les statistiques de la PMA en Suisse. Mais DOSSIER 9 DOSSIER 10 10e anniversaire du CPMA quand on sait que ces taux de réussite sont obtenus avec des groupes de patients de plus en plus âgés, cela donne une idée de l’évolution. Vous prônez une approche moins invasive… Oui, dans le cas de la fertilisation, nous choisissons la méthode la plus adaptée aux besoins du couple, celle qui est absolument nécessaire pour obtenir des embryons de bonne qualité provenant d’ovocytes qui n’ont pas fait l’objet de manipulations inutiles. Il faut savoir que chaque manipulation se déroule hors de l’incubateur. Même avec les meilleures conditions, le simple fait que l’on enlève les ovocytes ou les embryons de l’incubateur pour intervenir pose déjà des problèmes au niveau de la biochimie, de la génétique des ovocytes, car on crée un risque d’altération. Donc moins il y a de manipulations, moins les ovocytes et les embryons subissent de stress biochimique. qui ont ce potentiel de développement et les transférer en premier en augmentant les chances d’une grossesse. Qu’arrive-t-il aux autres embryons? Septante pour cent des embryons qui ne s’implantent pas, qu’ils soient générés in vivo ou in vitro, n’ont pas le potentiel pour se développer et aboutir à une grossesse. Ils sont donc éliminés naturellement en se désintégrant dans le corps. C’est un phénomène invisible à l’œil nu. Si la loi nous y autorise, nous pourrons congeler des embryons de bonne qualité et faire ainsi moins de transfert. Si un couple dispose de quatre zygotes congelés, peut-il les utiliser dans l’espoir d’obtenir quatre grossesses? Bien sûr, mais dans une limite légale de cinq ans. La loi nous interdit en effet de continuer la congélation des zygotes au-delà de ce délai. Si la modification de la loi est acceptée, cette limite devrait passer à dix ans. Justement, si le oui passe le 14 juin, qu’est-ce que cela va changer pour le laboratoire? L’objet de la votation est de nous autoriser à cultiver en laboratoire tous les embryons d’un couple dans le but d’identifier lesquels ont un potentiel d’implantation. Que dit la loi sur le nombre d’embryons à implanter? Le nombre des embryons à transférer dans l’utérus n’est pas limité par la médecine mais par la loi. Plus on transfère d’embryons dans l’utérus, plus on augmente les chances d’une grossesse multiple. Mais les grossesses multiples peuvent être dangereuses pour la femme comme pour les bébés. Par contre, la loi limite le nombre d’embryons que nous pouvons cultiver en laboratoire (3 maximum), et qui ne peut dépasser le nombre d’embryons transférables. Or il faut un certain temps pour que les zygotes, c’est-à-dire le matériel génétique de l’homme et de la femme fusionné mais non encore développé, deviennent des embryons. On sait que seuls 30% des embryons créés dans le corps d’une femme s’implantent. Actuellement, nous transférons jusqu’à trois zygotes, selon la décision du couple. Si la loi est modifiée dès le 14 juin, celui ou ceux que nous identifierons comme ayant le plus de chances de s’implanter sera ou seront transférés à l’utérus en premier. Les embryons restants, qui démontreront un potentiel d’implantation seront conservés pour transfert éventuel ultérieur. Si la loi change, nous pourrons identifier les embryons Si le oui passe, cela impliquera un changement d’ordre technique: nous pourrons cultiver tous les embryons, il nous faudra donc davantage d’incubateurs et davantage d’espace dans les incubateurs pour pouvoir servir le même nombre de couple avec la même qualité de travail. Cela nécessitera des conditions de culture encore plus strictes. Le second changement interviendra au niveau de la performance technique des biologistes et des techniciens du laboratoire. L’identification de l’embryon de bonne qualité se fera à un niveau complètement différent, avec des critères différents des critères morphologiques que nous utilisons actuellement. Nous pourrons nous reposer sur le travail scientifique réalisé par les autres pays où l’identification de l’embryon à transférer se fait le jour du transfert et non le jour de la congélation. Nous pourrons utiliser les protocoles d’identification et les critères de qualité déjà établis ailleurs. Le troisième changement concernera le nombre d’embryons à transférer, la moyenne actuelle, dans les cas les plus difficiles, étant de trois. Bien sûr, les taux de grossesses multiples sont beaucoup plus élevés que la nature. Les critères beaucoup plus performants et l’identification de l’embryon à transférer le jour du transfert (soit au jour 3 ou au jour 5) nous aideront à transférer un seul embryon. Les images techniques de cet article sont des mises en scène réalisées dans un but illustratif et esthétique qui ne reflètent pas toujours la réalité professionnelle. DOSSIER 11 Deux questions au médecin répondant La Dre Anna-Maria Stalberg est gynécologue obstétricienne, spécialiste en médecine de la reproduction. Elle est, depuis le 1er mai et pour un an, la représentante des médecins du CPMA et le médecin répondant du Centre. Dre Anna-Maria Stalberg Quelles sont vos tâches et responsabilités? Durant cette année, je représente les médecins du CPMA auprès nos partenaires: la Clinique Générale-Beaulieu, le laboratoire Unilabs et les autorités, notamment le médecin cantonal. Je dois aussi communiquer avec les médias, les organisations de patients, la Société suisse de médecine de la reproduction, etc. Mon rôle est de suggérer des projets de développement avec nos partenaires et de proposer la mise en place des nouveaux procédés. A ce titre, je suis la représentante des médecins au Comité de pilotage de notre Centre (médecins, laboratoire, Clinique). J’organise, toutes les deux semaines environ, des colloques avec toute l’équipe du centre - gynécologues, urologues et le laboratoire. Les cas difficiles sont discutés et les protocoles de traitement évalués. Au besoin, d’autres professionnels sont invités. Enfin je suis responsable, avec notre biologiste, de l’organisaton de notre réunion scientifique annuelle. Ce colloque, orienté vers un thème important de notre pratique, attire chaque année de nombreux médecins genevois et suisses. Quelle est votre vision pour l’avenir du CPMA? Améliorer la visibilité de notre Centre auprès du public en insistant sur la qualité de la prise en charge clinique des patients, l’excellence du travail du laboratoire et les très bons résultats que nous sommes fiers d’afficher. Bien que les couples soient traités par le médecin de leur choix, nous travaillons en équipe dans un véritable esprit d’unité. Cela explique certainement nos très bons résultats, en constante amélioration ces dernières années. Nous tenons à la poursuite de la collaboration avec nos collègues urologues et gynécologues de la ville. Nous voulons être attrayants auprès des jeunes médecins de la spécialité afin de renforcer notre équipe et d’assurer l’avenir. Plusieurs jeunes confrères nous ont rejoints ces dernières années et nous espérons que cette tendance se poursuivra. DOSSIER 12 10e anniversaire du CPMA Infertilité: le point sur le volet masculin. On ne saurait parler de procréation médicalement assistée sans aborder la partie masculine. Nous avons donc «consulté un urologue», et pas n’importe lequel, puisqu’il s’agit du Dr GeorgesAntoine de Boccard, pionnier de la microchirurgie robot-assistée de la fertilité masculine. L’infertilité masculine touche-t-elle beaucoup de monde? La réponse est oui. Elle concerne une part importante de la population pour plusieurs raisons. La première est l’évolution sociale. Autrefois, seule la femme était stérile, la stérilité masculine était extrêmement rare, car les habitudes morales étaient différentes. La deuxième raison concerne les moyens techniques qui permettent aujourd’hui de mettre les problèmes en évidence. Bien souvent, une infertilité d’origine masculine débouche quand même sur une grossesse, en tout cas dans plus de 50% des cas dans les 10 ans mais les couples consultent bien avant parce qu’ils ne veulent ou ne peuvent pas attendre et que beaucoup d’unions sont plus tardives. Troisième et dernière raison: une atteinte environnementale qui pourrait entraîner une diminution de la qualité des spermatozoïdes, mais qui ne s’exprime pas pour le moment sous la forme d’une diminution du taux de fécondité globale des couples. Quels sont les critères pour juger de la qualité du sperme? Ils sont au nombre de trois: le nombre, la normalité et la mobilité. On peut considérer le dernier comme le plus représentatif de la qualité du spermatozoïde. Un spermatozoïde qui n’est pas mobile n’est pas fécondant spontanément. La morphologie est jugée par des machines ou par des yeux humains mais elle est relative. La mobilité est un critère objectif. Un spermatozoïde très mobile est a priori de bonne qualité. Mieux vaut donc avoir peu de spermatozoïdes bien mobiles que beaucoup de spermatozoïdes immobiles. Même s’il est évidemment préférable d’agir sur les trois paramètres. Dans quel cas un urologue est-il appelé à intervenir dans les problèmes d’infertilité? L’urologue intervient quand, de l’avis du laboratoire ou du gynécologue, le sperme présente un défaut, quel qu’il soit. Ce défaut peut être minime - baisse de la mobilité ou formes normales insuffisantes, par exemple. Un examen se justifie alors pour déceler des problèmes physiques: une varicocèle, c’est-à-dire une veine variqueuse sur un ou deux testicules entraînant un effet de chaleur et diminuant la qualité du sperme, des absences congénitales de canaux ou une absence totale de spermatozoïdes. Dans ce dernier cas, il faut savoir si le problème est d’origine testiculaire avec absence de production ou s’il s’agit d’un blocage avec défaut du transport. En cas d’absence de production, les possibilités de traitement sont limitées. En cas de défaut de transport, on peut réparer les canaux par microchirurgie. A certains hommes potentiellement fertiles mais qui ont souhaité une stérilisation à un moment de leur vie par une vasectomie, nous proposons une reperméabilisation des canaux déférents par microchirurgie ou un prélèvement de spermatozoïdes à l’intérieur même des testicules. Les cas sont variés. Bien que 20% seulement des cas graves puissent être guéris, car on ne peut pas traiter tout le monde, la collaboration entre l’urologue et le gynécologue permet d’obtenir des grossesses par prélèvements, inséminations ou fécondations in vitro. La vasectomie n’est donc pas irréversible… Non, contrairement à l’idée largement répandue, la vasectomie ou la stérilisation masculine n’est pas du tout irréversible puisque le taux de succès de la reperméabilisation dépasse les 90%. Pour autant qu’elle soit effectuée de manière microchirurgicale. Dans ce domaine, la robotique a encore repoussé légèrement les limites. Les hommes consultent-ils plus facilement aujourd’hui? Attendu que l’implication de l’homme dans la fertilité est beaucoup mieux démontrée mais également admise, il est évident que l’homme vient consulter. Mais il le fait à la demande du ou de la gynécologue de sa compagne ou de son épouse pour un bilan, suite au constat d’un problème. Une fois que la fertilité de la femme est établie? Dans certains cas oui, dans d’autres parce que cela fait partie du bilan initial, lorsqu’une femme prend rendez-vous pour un problème de fertilité de couple. Dans ce cas, le gynécologue spécialiste envoie presque systématiquement l’homme effec- DOSSIER 13 Dr Georges-Antoine de Boccard tuer un examen du sperme. Si les résultats sont normaux et que l’absence de problème est établie, la consultation s’arrête là et l’urologue spécialiste en fertilité masculine ne sera pas consulté. La fertilité masculine, bien qu’elle ne soit pas tout à fait évidente, est démontrée par une analyse normale du sperme. Peut-on catégoriser la patientèle qui vous consulte? Toutes les catégories se présentent. Des hommes jeunes qui, tentant de concevoir, découvrent qu’ils ont une pathologie d’ordre génétique ou post-opératoire. Des hommes qui consultent plus tard dans la vie pour une pathologie moins bien définie car lorsque le sperme est de qualité intermédiaire, il est difficile de juger de son implication dans le problème d’infertilité. Des hommes plus âgés qui n’ont jamais eu d’enfants. Des hommes qui ont déjà eu des enfants mais qui n’arrivent plus à concevoir. Et dans ce cas, le préjugé persiste: l’homme se croit fertile jusqu’à la fin de ses jours. Par conséquent, l’homme qui a eu des enfants jeune imagine qu’il pourra toujours en avoir. Attention aux surprises: la qualité du sperme diminue à mesure que l’âge avance et le pourcentage d’hommes à problème augmente. A partir de la cinquantaine, certains hommes n’ont simplement plus de spermatozoïdes alors qu’ils étaient féconds avant. Depuis combien de temps exercez-vous la microchirurgie? Depuis 1983. J’ai commencé aux Hôpitaux Universitaires où mes collègues pratiquaient la reperméabilisation à l’œil nu avec un très mauvais taux de succès. J’avais moi-même pratiqué des interventions microchirurgicales vasculaires en France à l’occasion d’un stage et j’ai simplement suggéré que l’on utilise le microscope opératoire pour réparer également les canaux du sperme. Les résultats ont bondi du jour au lendemain, avec un taux de succès de 83%. Avec le temps, ce taux est passé à 90%. A présent, avec la robotique, il atteint quasiment les 100%. A ce propos, vous êtes également sous-spécialisé dans la microchirurgie robot-assistée… Oui, cela a toujours été une passion, je me suis donc investi dans ce domaine dès 2003, quand la Clinique Générale-Beaulieu a mis un robot à la disposition des chirurgiens, en plus de la pratique de la chirurgie urologique classique, bien sûr. DOSSIER 14 10e anniversaire du CPMA Comment expliquer qu’il n’y ait pas plus de spécialistes de la microchirurgie robot-assistée aujourd’hui? L’apprentissage est très long et les cas ne sont pas nombreux. La microchirurgie est l’un des aspects de la prise en charge de la fertilité masculine qui comprend plusieurs volets non chirurgicaux: médecine interne, infectiologie, hormonologie, qu’il faut accepter de prendre en charge et bien maîtriser. Cela ne s’apprend pas du jour au lendemain. Parlons justement de la prise en charge. Comment se passe-t-elle et quel type d’investigation menez-vous? Un homme vient me consulter avec une histoire de couple et une analyse de sperme. D’après l’analyse, je me fais une idée du problème. L’entretien que j’ai avec lui, ou avec lui et sa femme si elle est présente, est capital. Il va me permettre de connaître son histoire personnelle: quel est son développement sexuel, quel est son développement génital, quelle est son histoire familiale, a-t-il des frères des sœurs, est-il fils unique, quand a-t-il été conçu, ses parents ont-ils attendu longtemps pour le concevoir… Je procède ensuite à un examen physique classique: son type physique général, sa conformation, est-il masculin, a-t-il des traits féminins, en ce qui concerne ses organes génitaux, sa verge est-elle normalement développée, a-t-il deux testicules, ses testicules ont-ils une consistance normale, quel est leur volume, les canaux de la sortie du testicule sont-ils normalement présents, sont-ils dilatés, sont-ils douloureux, est-ce qu’il manque un canal déférent, est-ce qu’il y a des gonflements veineux ou du liquide autour des testicules? Enfin l’échographie permet de préciser le même examen mais avec une vue intérieure: y a-t-il des vaisseaux sanguins pathologiques, y a-t-il une masse anormale de type tumoral, y at-il une atteinte, par exemple au niveau de la glande prostatique qui est un moteur d’éjaculation, y a-t-il un défaut, des blocages, des calcifications, des kystes? Tout est examiné. Puis, sur la base de l’examen et de la première analyse, je prescris au patient un traitement anti-inflammatoire avant de demander généralement une deuxième analyse du sperme. En cas de blocage, ce traitement va libérer quelque chose, comme un sinus qui serait obstrué. Ce deuxième examen sous traitement anti-inflammatoire donne une réponse sur la capacité de transport. De même, l’analyse des substances chimiques qui accompagnent le sperme révèle s’il y a, outre la présence ou l’absence de spermatozoïdes, une inflammation ou un blocage. Après cette deuxième analyse et éventuellement un bilan hormonal, je revois le patient. Les hormones masculines commandent la fabrication des spermatozoïdes et la fabrication de l’hormone mâle, la testostérone. Ces hormones hypophysaires nous renseignent sur la demande du cerveau mais également, grâce à l’inhibine B, un marqueur testiculaire, sur la réponse du testicule. Ces examens nous apprennent s’il y a blocage et à quel niveau. Une culture du sperme nous renseigne sur la présence éventuelle de bactéries: blocage ou non, production ou non, infection. La nature n’est pas simple: il existe des cas intermédiaires pour lesquels tous les signes indiquent une production qui pourtant ne se fait pas, ou qui commence mais s’interrompt. A ce stade, le traitement anti-inflammatoire déjà prescrit peut être renouvelé s’il y a obstacle sans autre pathologie. Des traitements antibiotiques peuvent être donnés. Chez l’homme qui présente une varicocèle, c’est-à-dire un défaut veineux avec phénomène de chaleur sur le testicule, on peut opérer par microchirurgie, ce qui améliore la qualité du sperme après quelques mois. Les infections se traitent par antibiotiques, parfois avec des doses un peu fortes quand le problème est installé de longue date. On peut réparer des canaux obstrués, soit par une ancienne infection soit parce que l’homme a subi une vasectomie. Enfin, on peut effectuer un prélèvement au niveau testiculaire (ndr: TESE pour Testicular Sperm Extraction) ou au niveau de l’épididyme (ndr: MESA pour Microsurgical Epididymal Sperm Aspiration). Les spermatozoïdes récoltés de cette manière sont congelés pour utilisation par le biologiste lors d’une fécondation in vitro. Les cas que nous arrivons à traiter sont nombreux mais il ne faut jamais perdre de vue que si la fertilité est affaire de couple et qu’un sperme de «mauvaise qualité» pourra malgré tout féconder un ovocyte normal, l’inverse est également vrai. Seul le but doit être pris en compte: une grossesse suivie de la naissance d’un enfant en bonne santé. DOSSIER 15 Les équipements De nouveaux appareils arrivant régulièrement sur le marché sont systématiquement évalués car il est important que les équipements du Centre bénéficient de technologies de toute dernière génération. Les incubateurs à contrôle de CO2 et d’O2 Les incubateurs constituent le cœur du laboratoire. Ils permettent de recréer les conditions du corps humain en termes de chaleur, de ph et d’humidité, afin de maintenir les embryons dans des conditions de culture ad hoc et d’optimiser un développement exempt de stress oxydatif. Le CPMA dispose de plusieurs types d’incubateurs à concentration d’oxygène faible (5% au lieu des 20% contenus dans l’atmosphère). Le congélateur programmable Il sert à congeler les zygotes et les fragments ovariens grâce à l’azote liquide. Les microscopes Outre un microscope classique, pour l’observation des spermatozoïdes, le Centre est équipé de stéréomicroscopes, loupes binoculaires à faible grossissement, qui servent à la manipulation des ovocytes, des zygotes et des embryons sous le flux laminaire. Enfin, le microscope inversé, à fort grossissement, est utilisé pour l’injection des spermatozoïdes en ICSI ou IMSI, grâce à son micro- manipulateur, mais également pour l’observation des ovocytes, des zygotes et des embryons. Les deux flux laminaires ou hottes stériles Ces dispositifs permettent de travailler stérilement au cours des manipulations. Soufflant un flux continu d’air stérilisé pour empêcher l’air du laboratoire d’entrer, ils créent un environnement contrôlé en termes de température en renouvelant l’air propre stérilisé en permanence. L’un sert à la préparation des spermatozoïdes, l’autre à la manipulation des ovocytes, des zygotes et des embryons. Ce dernier est aussi équipé d’une surface chauffante. Les appareils de contrôle Thermomètres digitaux et pH-mètres servent au contrôle de qualité au niveau du micro-environnement des plaques de culture. Le laboratoire est également équipé d’un système de surpression qui contrôle la qualité et la provenance de l’air. De plus, un appareil fonctionnant par photocatalysation décompose toute substance de provenance naturelle ou synthétique pénétrant dans l’air du laboratoire et permet ainsi de le purifier. Le laboratoire du CPMA vise, pour le courant de l’an prochain, l’accréditation selon la norme ISO 15189 pour les laboratoires de biologie médicale. Le processus a déjà commencé dans d’autres laboratoires Unilabs. DOSSIER 16 10e anniversaire du CPMA Les équipes Les médecins gynécologues obstétriciens Dre Nicole Fournet Irion Dre Anna-Maria Stalberg Gynécologie - Obstétrique FMH Spécialiste en médecine de la reproduction et endocrinologie gynécologique Gynécologie - Obstétrique FMH Spécialiste en médecine de la reproduction et endocrinologie gynécologique Son diplôme de médecin obtenu à l’Université de Genève, la Dre Fournet Irion effectue l’essentiel de sa formation aux Etats-Unis. Au bénéfice d’une bourse de jeune chercheur du Fonds National Suisse, elle s’initie pendant deux ans à la recherche fondamentale en neuroendocrinologie aux universités de Floride, puis de Yale. Elle se forme à la gynécologie et l’obstétrique à l’Université Johns Hopkins (Baltimore), puis se sous-spécialise en endocrinologie gynécologique et infertilité à UCLA. Elle revient à Genève en 1992 en qualité de Cheffe de clinique à la maternité des Hôpitaux Universitaires de Genève (HUG). Elle y travaillera 5 ans. Installée en cabinet privé en 1997, elle collabore avec le centre de fécondation in vitro de la Clinique Champel-Elysée. En 2005, elle cofonde le Centre de Procréation Médicalement Assistée avec les Drs Anna-Maria Stalberg, Gabriel de Candolle et Georges-Antoine de Boccard. La Dre Fournet Irion est membre de plusieurs sociétés scientifiques en Suisse, en Europe (ESHRE) et aux Etats-Unis (ASRM). Au-delà de son activité de praticienne, elle a gardé une activité d’enseignement à Genève (Faculté de Médecine). Elle est également médecin-consultante à l’Unité de Médecine de la Reproduction aux HUG. Née en Allemagne, la Dre Stalberg obtient le diplôme de médecin à la Freie Universität de Berlin en 1982, puis se rend à Genève pour suivre une formation post-graduée et une spécialisation en gynécologie et obstétrique. Entre 1989 et 1995, elle est Cheffe de clinique à la Clinique de Stérilité et d’Endocrinologie de la maternité des HUG (Hôpitaux universitaires de Genève) et dirige en parallèle la consultation des adolescentes. Elle s’installe en privé en 1995 et collabore pendant plusieurs années avec le Centre de fertilisation in vitro de la Clinique Champel-Elysée puis avec le laboratoire des gamètes de la maternité des HUG. Avec les Drs Fournet Irion, De Candolle et de Boccard, elle fonde le Centre de Procréation Médicalement Assistée de la Clinique Générale-Beaulieu en 2005. La Dre Stalberg est membre de plusieurs sociétés scientifiques en Suisse et en Europe (ESHRE). Elle siège également au comité de la Société Suisse de Médecine de la Reproduction. Dr Gabriel de Candolle Gynécologie – Obstétrique FMH Spécialiste en médecine de la reproduction et endocrinologie gynécologique Le Dr Gabriel de Candolle obtient son diplôme fédéral de médecin puis son doctorat de la Faculté de médecine de Genève en 1984. Il commence sa formation en chirurgie générale puis se spécialise en gynécologie-obstétrique, tout d’abord à la maternité de Genève, puis à l’hôpital de Morges et enfin à l’hôpital Hammersmith, à Londres. C’est là qu’il acquiert DOSSIER 17 Dre Victoria Uluaku Ibecheole les bases de la microchirurgie des trompes et de la fécondation in vitro (FIV). Il revient à la maternité des HUG où il devient Chef de clinique puis médecin-adjoint. Il y développe la chirurgie endoscopique (hystéroscopie et laparoscopie) notamment la chirurgie réparatrice des trompes. Il ouvre son cabinet de consultation en 1992. Il pratique actuellement l’essentiel de son activité hospitalière à la Clinique Générale-Beaulieu où il a réalisé la première reperméabilisation tubaire à l’aide du robot Da Vinci®. Il s’agit de la première intervention gynécologique robot-assistée réalisée à la Clinique. Avec les Drs Fournet Irion, Stalberg et de Boccard, il fonde le Centre de Procréation Médicalement Assistée de la Clinique GénéraleBeaulieu en 2005. Le Dr de Candolle est actif dans de nombreuses sociétés dans le domaine de la médecine de la reproduction et de la chirurgie endoscopique. Il a été Président de la SSMR (Société Suisse de Médecine de la Reproduction) de 2010 à 2013. Depuis octobre 2013, il est Secrétaire Général de l’IFFS (International Federation of Fertility Societies). Il est membre du Cercle Daniel Dargent (chirurgie oncologique et pelvienne). Dre Carine Schwarz Blatt Gynécologie - Obstétrique FMH Spécialiste en médecine de la reproduction et endocrinologie gynécologique Après l’obtention de son diplôme de médecine à la Faculté de Médecine de Genève, la Dre Carine Schwarz Blatt se spécialise en gynécologie et obstétrique, spécialité pour laquelle elle décroche son diplôme en 1999, selon les nouvelles directives de formation post-grade émises par la FMH. Elle est nommée Cheffe de clinique aux Hôpitaux Universitaires de Genève en 2001. Passionnée d’hormonologie féminine, notamment des questions que pose la fertilité, elle entreprend une seconde formation de cinq ans en médecine de la reproduction et en gynécologie endocrinologique. Ayant réussi l’examen correspondant aux nouvelles exigences fédérales de la société de gynécologie, elle s’installe à Genève en 2006. Gynécologie - Obstétrique FMH Spécialiste en médecine de la reproduction et endocrinologie gynécologique Sous-spécialiste en gynécologie opératoire Suisse et Nigérienne, la D Ibecheole suit ses études de médecine et obtient son diplôme (MBBS) à l’Université de Lagos en 1991 (équivalent FMH en 2002). De retour en Suisse pour sa formation post-graduée, elle travaille en médecine interne avec le Prof. A.-F. Junod, puis s’oriente vers la gynécologie et l’obstétrique, discipline pour laquelle elle décroche le titre de spécialiste FMH en 2002. re Cheffe de clinique, elle se sous-spécialise en médecine de la reproduction et endocrinologie gynécologique aux Hôpitaux Universitaires de Genève (HUG) et à l’Hôpital Cochin à Paris (Prof. D. de Ziegler et Prof. J.-B. Dubuisson). Après son départ des HUG, elle conserve un poste de médecin agréé jusqu’en 2013, puis de consultante chargée de l’enseignement chirurgical en infertilité à l’Unité de Médecine de la Reproduction. En 2010, elle s’installe en privé et collabore avec Medixy pendant deux ans avant de rejoindre le Centre de Procréation Médicalement Assistée de la Clinique Générale-Beaulieu (2012). Elle s’intéresse à la chirurgie de l’infertilité ainsi qu’à la conservation de la fertilité dans les situations oncologiques, et a participé au développement du Réseau Romand de Cancer et Fertilité sous la direction de son fondateur, le Prof. Dominique de Ziegler. La Dre Ibecheole est membre de l’Association des Médecins du canton de Genève (AMGe), de la Fédération des Médecins Suisses (FMH), de la Société Suisse de Médecine de la Reproduction (SSMR) ainsi que de la European Society of Human Reproduction and Embryology (ESHRE). Dre Alexandra Ambrosetti Gynécologie - Obstétrique FMH Spécialiste en médecine de la reproduction et endocrinologie gynécologique Elle se forme ensuite en gynécologie psychosomatique à Paris auprès du Dr Sylvain Mimoun et prend en charge les cas viraux (hépatite B chronique, C et HIV+) de couples désirant une grossesse. La Dre Ambrosetti obtient son diplôme fédéral de médecin à l’Université de Genève en 1996 et le titre de spécialiste FMH en Gynécologie et Obstétrique en 2005. La Dre Schwarz Blatt fait partie de l’équipe médicale du Centre de PMA de la Clinique Générale-Beaulieu depuis 2007. Dès lors, et pendant quatre ans, elle travaille comme Cheffe de Clinique en gynécologie opératoire, puis en onco-gynécologie et séno- DOSSIER 18 10e anniversaire du CPMA logie, au CHUV (Centre Hospitalier Universitaire de Lausanne) puis aux HUG (Hôpitaux Universitaires de Genève). Parallèlement, dès 2006, elle participe au développement du Réseau Romand de Cancer et Fertilité en tant que coordinatrice. Son intérêt pour la médecine de la reproduction et la gynécologie opératoire ainsi que sa curiosité scientifique la motivent à poursuivre une spécialisation en médecine de la reproduction et gynécologie endocrinologique au CHUV en qualité de Cheffe de Clinique, puis à l’Hôpital Cochin à Paris en tant que médecin agréé. Elle obtient ensuite un titre FMH de spécialisation approfondie dans ce domaine. Depuis son installation en cabinet médical, la Dre Ambrosetti garde un poste de médecin consultant auprès des HUG. Elle collabore également de manière active avec le Centre de Procréation Médicalement Assistée (CPMA) de la Clinique Générale-Beaulieu. La Dre Ambrosetti est membre de la Société Suisse de Médecine de la Reproduction ainsi que de ses pendants européen (ESHRE) et nord-américain (ASRM). Les médecins urologues Dr Georges-Antoine de Boccard Urologie FMH - FEBU Spécialiste en microchirurgie de la fertilité masculine Spécialiste FMH (Suisse) et FEBU (Board européen d’Urologie) en urologie depuis 1992, le Dr de Boccard se spécialise en microchirurgie de la fertilité masculine. Cofondateur de plusieurs centres consacrés à cette discipline, il développe la microchirurgie assistée par le robot chirurgical Da Vinci®, avec lequel il pratique couramment, depuis 2003, les reperméabilisations après vasectomie (vaso-vasostomie) et la microchirurgie de l’épididyme. Il a été l’un des précurseurs des prélèvements de spermatozoïdes testiculaires par microchirurgie (technique de Schlegel): TESE, MESA pour ICSI, en cas de fécondation in vitro (FIV) pour cause de stérilité masculine. De même, il a développé et pratique la technique de microchirurgie robot-assistée de la varicocèle par abord inguinal. En 2005, il cofonde le Centre de Procréation Médicalement assistée (CPMA) de la Clinique Générale-Beaulieu (2005), avec les Drs Nicole Fournet Irion, Anna-Maria Stalberg et Gabriel de Candolle. Il enseigne la microchirurgie robot-assistée de la fertilité masculine à l’IRCAD (Strasbourg) et à la Fondation genevoise pour la formation et la recherche médicales (www.gfmer.ch). Dr Sao-Nam Tran Urologie FMH - FEBU Spécialiste en urologie opératoire Détenteur d’un diplôme fédéral et docteur en médecine de l’Université de Genève, le Dr Sao-Nam Tran obtient le titre de spécialiste FMH en urologie et se sous-spécialise en urologie opératoire dans le Service d’Urologie des Hôpitaux Universitaires de Genève (HUG). Nommé Chef de Clinique puis Médecin-adjoint du Chef de Service, il occupera le poste de Responsable de l’andrologie. Il est également Fellow of European Board of Urology (FEBU). Installé en pratique privée, il conserve un poste de médecinconsultant au Service d’Urologie des HUG et de l’Unité de Médecine de la Reproduction et d’Endocrinologie du Service de Gynécologie et d’Obstétrique des HUG, où il gère la prise en charge des hommes infertiles. Il est chargé d’enseignement à la Faculté de Médecine de Genève dans le cadre du Certificate of Advanced Studies in Clinical Sexology (CAS) et des Apprentissages en milieu clinique (AMC). Il collabore étroitement avec le Centre de Procréation Médicalement Assistée de la Clinique Générale-Beaulieu. DOSSIER 19 Le laboratoire Christos Karageorgos Biologiste, MMedSCi Senior Clinical Embryologist, ESHRE Responsable CPMA Unilabs Christos Karageorgos obtient son diplôme en biologie avec une spécialisation en biologie cellulaire à l’Université d’Athènes. Il poursuit ses études au Royaume-Uni, à l’Ecole de Médicine de l’Université de Nottingham, où il obtient son Masters d’Etudes Médicales en Technologies de Reproduction Assistée (MMedSci in ART). De retour à Athènes en 1997, il travaille en qualité de biologiste de la reproduction dans plusieurs centres de procréation médicalement assistée (PMA). Membre actif de la commission administrative des biologistes de la reproduction de Grèce, il devient responsable de laboratoire PMA en 2004 et consultant biologiste en PMA en 2010. En 2005, il est certifié Senior Clinical Embryologist par la European Society of Human Reproduction and Embryology (ESHRE). Nicole Jaquenoud Responsable technique et organisation Nicole Jaquenoud obtient son diplôme de laborantine médicale en 1986. Elle commence sa carrière dans le domaine de l’immunologie de transplantation et parfait ses connaissances en cultures cellulaires. En 1989, elle est engagée au Centre de stérilité des HUG. En 2006, elle intègre la nouvelle équipe du CPMA à la Clinique Générale-Beaulieu où elle pratique toutes les techniques liées à la procréation médicalement assistée. En 2013, elle est nommée RTO (Responsable Technique et Organisation) afin de seconder le biologiste responsable du CPMA. Catherine Jeannerat Technicienne - Administration En parallèle, il continue sa formation sur la congélation et la vitrification des zygotes et des ovocytes, la biopsie préimplantatoire et l’assurance de qualité. Christos Karageorgos entre au CPMA de la Clinique Générale-Beaulieu en 2013 en qualité de biologiste responsable. Raouf Lakah Biologiste - Responsable de l’andrologie Médecine de la reproduction Diplôme d’études approfondies en embryologie (F) Raouf Lakah obtient son diplôme d’embryologie expérimentale à l’Université de Paris XI en 1976. Il travaille à l’Institut Pasteur sur cultures cellulaires en 1980. Deux ans plus tard, il est chercheur à la Société de microbiologie de la Faculté de Pharmacie de ChâtenayMalabry, au sud de Paris, puis assistant-enseignant à la Faculté des Sciences de Genève. En 1985, il cofonde le Laboratoire d’andrologie de Bioanalytique. Depuis 1999, il est Responsable du laboratoire d’andrologie chez Unilabs. Sylvie Gillet Technicienne en andrologie Sadie Tornay Technicienne en PMA ÉVÉNEMENTS 20 6e journée d’urologie: le point sur le cancer de la prostate et l’incontinence post-opératoire. Cette rencontre annuelle, qui a eu lieu le 2 juin dernier, était cette fois dédiée au cancer de la prostate et au traitement de l’incontinence post-opératoire. Nous avons rencontré le Dr Charles-Henry Rochat, spécialiste FMH en urologie opératoire et pionnier de la chirurgie mini-invasive robot-assistée. Il est également le fondateur, avec les Drs Stefano Regusci et Georges-Antoine De Boccard, du Swiss International Prostate Center (SIPC). Aperçu d’une journée riche d’enseignements. Que peut-on dire sur l’évolution du cancer de la prostate et de ses traitements? Le cancer de la prostate est le deuxième cancer le plus fréquent chez l’homme. A une certaine époque, on opérait des patients qui étaient à un stade trop avancé de la maladie, par manque de stratégie de dépistage. Ensuite, on a introduit le marqueur PSA (ndr: Prostate Specific Antigen) et on a dépisté puis opéré des patients qui étaient à un stade très précoce. Aujourd’hui, on se rend compte qu’il est préférable d’observer certains cancers et de réserver les opérations à des patients présentant des cancers «significatifs». Ces dernières années, nous avons assisté à trois révolutions. Premièrement, le diagnostic est devenu plus précis grâce aux progrès de l’imagerie qui permet de biopsier dans les zones suspectes ciblées sur l’IRM (examen par résonance magnétique). Deuxièmement, l’avènement de la chirurgie robotisée a permis une amélioration significative des résultats fonctionnels. La troisième révolution concerne la thérapie focale. En effet, certains cancers ne justifient pas une opération complète mais ne peuvent pas non plus rester sans traitement. Cette nouvelle approche, la thérapie focale par ultrasons à haute intensité, nous permet d’agir précisément sur la cible. Le Focal One est apparu sur le marché il y a un an à peine, et la Clinique Générale-Beaulieu en a fait l’acquisition fin 2014. Cet appareil n’est utilisé que pour des cancers répondant à des critères bien précis: peu agressifs, bien ciblés et bien localisés. Le Swiss International Prostate Center (SIPC), que vous avez créé avec les Drs Stefano Regusci et Georges-Antoine de Boccard, est à la pointe en termes de diagnostic et de traitement… Focal One L’étape diagnostique est en effet l’un de nos points forts: quand il y a suspicion de cancer de la prostate, sur la base d’examens ou de valeurs sanguines, les zones suspectes que les radiologues ont identifiées par IRM sont ciblées pour réaliser une biopsie avec fusion IRM/échograhie 3D sous anesthésie locale. Une Drs Georges-Antoine De Boccard, Charles-Henry Rochat et Stefano Regusci autre spécificité de notre Centre est d’avoir développé, toujours en collaboration avec la Clinique Générale-Beaulieu, les biopsies périnéales robotisées. Il s’agit de biopsies dont l’axe de ponction est différent de celui des biopsies transrectales. Ainsi, nous parvenons à biopsier la partie antérieure de la prostate qui est très difficile à atteindre par-dessous et qui représente 20% des cancers. L’idée étant aujourd’hui de bien sélectionner les tumeurs à risque, si des tumeurs non dangereuses sont détectées, nous les surveillons ou, dans certains cas, proposons le traitement focal. Par ailleurs notre longue expérience en chirurgie robotisée de la prostate nous a permis d’obtenir cette année le label «Host Center» au niveau européen pour la formation d’urologues établis. Les exigences sont élevées: il faut avoir environ 100 opérations par an à son actif et une reconnaissance scientifique (ndr: le Dr Rochat est membre du board de la section robotique de l’Association européenne d’urologie). Le SIPC s’inscrit-il dans le principe de médecine hautement spécialisée? Absolument. Aujourd’hui, le critère numéro un du patient pour le choix d’un chirurgien est son expérience. A moyen terme, les patients se feront opérer dans des centres d’excellence. En collaboration avec la Clinique Générale-Beaulieu, le SIPC fournit aux patients un environnement très structuré pour le diagnostic, la proposition de traitement et les moyens pour les mettre en œuvre. Dans la proposition de traitement, nous avons intégré une consultation multidisciplinaire séparée du SIPC, par souci de neutralité. Les décisions de traitement y sont discutées en «assemblée», les cas sont exposés et les réponses les plus adaptées sont recherchées en commun. Ce «Tumor board» est une structure ouverte aux médecins de la ville, oncologues et urologues. A noter également que le SIPC est un centre ouvert aux urologues qui peuvent venir y réaliser des biopsies ciblées et bénéficier gratuitement de notre assistance. Le SIPC est-il certifié? Il n’existe pas aujourd’hui de certification suisse. Pour le cancer de la prostate, nous évaluons nos résultats par le système officiel suisse AQC (ndr: Arbeitsgemeinschaft für Qualitätssicherung in der Chirurgie). Tous nos dossiers de cancers de la prostate y sont envoyés. Les patients traités par le robot ou par le Focal One sont répertoriés dans un registre actualisé de façon hebdomadaire. ÉVÉNEMENTS 21 ÉVÉNEMENTS 22 Dr Charles-Henry Rochat et Prof. Jean de Leval La prostatectomie radicale robotisée était l’un des sujets principaux de cette 6e journée… En 1999, nous avons été les pionniers en Suisse de la prostatectomie laparoscopique mini-invasive, avec l’utilisation d’une caméra et d’instruments fins. En 2003, nous avons été, après Zurich, le deuxième centre en Suisse à nous équiper du robot da Vinci®. Aujourd’hui, en termes de volume, nous sommes à plus de 800 prostatectomies robotisées. Notre activité nous a permis d’entrer dans le curriculum de la Société européenne d’Urologie (EUA) pour la formation en robotique pour le cancer de la prostate. Quels avantages la robotique a-t-elle apporté? Outre ceux de la chirurgie minimalement invasive - réduction des saignements, des douleurs et des infections, et donc amélioration de la récupération - ils sont au nombre de trois: vision, ergonomie, précision. Si vous deviez vivre votre vie avec un seul œil, vous auriez de gros problèmes de référence. Avec le robot da Vinci® et son système 3D, le chirurgien dispose de l’effet de la profondeur, il sait donc instantanément où l’instrument se place dans l’espace. C’est essentiel pour le cancer de la prostate, car le principe de l’opération est de découper la prostate de la vessie et du canal urinaire puis de recoudre ces deux dernières structures ensemble. Pour la phase du découpage, la caméra permet en outre un fort grossissement et une visualisation de zones difficiles d’accès à l’oeil. Avant la robotique, les opérations étaient particulièrement pénibles à réaliser en laparoscopie car le chirurgien opérait debout à l’aide d’instruments très longs et un bras de levier important. La robotique a supprimé ce bras de levier et le tremblement, ce qui a procuré au chirurgien une position ergonomique et confortable. Outre la 3D et l’ergonomie, le troisième avantage de la robotique est la précision des mouvements. Celle-ci est rendue possible par des instruments dont la conception ingénieuse, articulée à leur extrémité, permet des interventions millimétriques. Vous pouvez couper à angle droit et bénéficier d’une précision horlogère. Le bémol est que ces opérations sont très difficiles à maîtriser. Or, et c’est fondamental, il ne faut pas seulement «savoir faire», il faut également disposer d’un bon volume opératoire afin de maintenir le niveau de cette connaissance. C’est toute la complexité de cette opération, compte tenu des enjeux fonctionnels très importants: contrôle du cancer, contrôle de la continence, maintien d’une activité sexuelle. Justement, quelles sont les complications possibles? La première est de ne pas atteindre l’objectif supposé au niveau oncologique. La vérification est effectuée une fois la prostate envoyée au laboratoire et une fois le marqueur PSA complètement neutralisé sur de nombreuses années. Nous avons aujourd’hui un collectif de 402 patients opérés jusqu’en avril 2010, qui a été suivi et analysé pour la rechute biologique. Avec un recul de 5 ans, nous constatons que près de 80% de ces patients sont en rémission complète. La deuxième complication est l’incontinence, qui ne représente heureusement pas un pourcentage élevé. Toute la philosophie de la chirurgie minimalement invasive est justement d’être très doux dans la dissection entre l’extrémité de la prostate et le sphincter. Nous obtenons de très bons résultats, la robotique permettant un retour à la continence plus rapide qu’avec les autres méthodes opératoires. Les autres complications peuvent être, rarement, des fuites au niveau de l’anastomose (ndr: connexion entre la vessie et l’urètre) ou une lympho- cèle (ndr: poche de lymphe qui peut s’infecter), suite de l’ablation des ganglions. Nous avons à présent une expérience de 1 000 prostatectomies laparoscopiques conventionnelles et robot-assistées, effectuées respectivement depuis 1999 et 2003, et nous n’avons eu ni perforations intestinales ni décès péri-opératoires. Que dire du suivi oncologique? Quand la prostate a été retirée, le marqueur PSA doit être indétectable après plusieurs années. Il devient alors un fantastique marqueur de suivi: il est le seul et il est infaillible. Nous utilisons une base de données que nous avons développée en 2005 et que nous partageons avec l’équipe de la Clinique Saint Augustin de Bordeaux. Ces collègues nous ont beaucoup aidés à démarrer notre programme de chirurgie mini-invasive dès 1999. Nous suivons nos patients de façon extrêmement rigoureuse de façon à affiner la prise en charge en cas de récidive. Si le PSA reste indétectable dans les deux ans et demi après l’opération, les chances qu’il évolue plus tard sont assez faibles. Nous traçons des courbes et nous prenons comme critère de récidive des PSA en-dessus de 0,2 microgrammes/litre. Nous suivons ces patients en observant quels facteurs peuvent les exposer au risque de récidive: le volume de la tumeur, la nature des cellules, le PSA et les marges chirurgicales. Tous ces facteurs de risque sont analysés dans le temps. Le suivi oncologique est primordial parce que nous pouvons le faire de façon plus précise que pour pratiquement aucune autre tumeur et par le biais d’une simple prise de sang. Concernant l’incontinence post-prostatectomie, deux mots sur le traitement classique? Tout d’abord il s’agit aujourd’hui d’une situation rare et plutôt accidentelle qui concerne environ 3% des patients. Le traitement consiste à renforcer le sphincter à l’aide d’une manchette Robot da Vinci® qui enserre l’urètre et d’une petite pompe qui est placée dans le scrotum. Lorsque le patient désire uriner, il actionne la pompe qui dégonfle la manchette. Lorsqu’il a fini, il actionne de nouveau la pompe qui regonfle la manchette, empêchant ainsi les fuites éventuelles. Malheureusement, ce système comporte un taux de complications non négligeables. La bandelette sous-urétrale Tom-Sling présentée au cours de la journée est-elle une bonne alternative au sphincter? Nous avons présenté une série de 27 patients à qui nous avons posé ces bandelettes, d’abord sous forme de prototype, avant d’utiliser, en première suisse, la bandelette Tom-Sling commercialisée. Le principe de la bandelette n’est pas nouveau, des millions de femmes en bénéficient chaque année. Celle-ci présente la particularité de s’adapter vraiment à la morphologie masculine: elle passe à travers le trou obturateur, est ramenée sur ellemême pour être nouée et provoque une tension sur le canal urinaire. Pendant l’opération, on effectue des mesures de pression afin de régler la tension. C’est la manométrie peropératoire? Absolument, elle est effectuée dans notre équipe par le Dr Stefano Regusci. C’est la seule bandelette qui autorise ce genre de test durant l’opération pour bien ajuster la résistance à l’écoulement de l’urine. Avec le temps, elle ne se détend pas car elle est ancrée sur des points fixes. Le taux de succès est d’ailleurs élevé puisque nous avons 30% de patients guéris, 60% nettement améliorés (1-2 protections/jour) et 10% d’échec, que l’on peut réopérer avec une nouvelle bandelette ou proposer l’implantation d’un sphincter. Lors de la journée du 2 juin, trois opérations ont été réalisées en direct. Comment cela s’est-il passé? La première intervention était une prostatectomie radicale que j’ai effectuée avec assistance robotique. Elle a permis de montrer de façon très didactique les différentes étapes de l’opération, du découpage de la prostate avec préservation des nerfs de l’érection jusqu’au rétablissement de la continuité entre la vessie et le canal urinaire. Les deux autres interventions, effectuées avec le Professeur Jean de Leval, inventeur de la bandelette Tom-Sling, ont démontré, pour la première fois en Suisse, son implantation en direct. Je pense que l’assistance a apprécié que l’on effectue ces interventions en direct. L’évolution post-opératoire à six semaines de ces trois patients fera l’objet d’un compte rendu qui sera envoyé à tous les participants. L’équipe technique du bloc opératoire de la Clinique Générale-Beaulieu et la Société Médicale Beaulieu nous ont permis d’avoir une transmission d’excellente qualité. Qu’ils en soient sincèrement remerciés et à l’année prochaine! ÉVÉNEMENTS 23 Une fête bon enfant... Plus de 70 familles ont répondu à l’invitation de la Clinique le 3 juin dernier pour célébrer au Forum Beaulieu - au 1er étage du bâtiment principal de la Clinique - les 10 ans du CPMA. Dès 16h, les invités ont reçu des informations sur l’activité et les nouveaux développements du CPMA, et les enfants ont pu goûter et participer à des animations. A 18h, le Directeur de la Clinique, Monsieur Cassegrain, a souhaité la bienvenue à tous. Puis la Dre Nicole Fournet Irion a évoqué la fécondation in vitro en Suisse, une exception européenne qui reste performante, mais aussi l’espoir suscité par la votation du 14 juin. Le biologiste responsable du laboratoire, Monsieur Karageorgos, a ensuite abordé les résultats optimaux obtenus grâce à des techniques moins invasives. Enfin le Dr Matthias Kaelin, Directeur médical d’Unilabs, a prononcé un mot de conclusion. Et pendant tout ce temps, sous l’œil bienveillant de leurs parents, les enfants jouaient dans un vacarme rafraîchissant… Contact: [email protected] rt i f ied Syst e 90 m Crédits photos Alan Humerose, Elias Amari, Serge Macia, William Grossiord Tirage: 2000 exemplaires 85 Rédaction Pierre Giamarchi 01 34 Conception, direction artistique et graphisme Twist SA Contributeurs Drs Nicole Fournet Irion, Anna-Maria Stalberg, Charles-Henry Rochat et Georges-Antoine de Boccard, Mme Nicole Jaquenoud, MM. Christos Karageorgos et Philippe Cassegrain Ce Ligne éditoriale Philippe Cassegrain Nicolas Brunschwig IS O impressum INFO BRÈVE 24 - IS O 1