le rôle de l`industrialisation dans la croissance économique

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Revista europeană de drept social
LE RÔLE DE L’INDUSTRIALISATION
DANS LA CROISSANCE ÉCONOMIQUE:
UNE ANALYSE COMPARATIVE ENTRE LES PAYS
NORD AFRICAINS ET LES PAYS SUBSAHARIENS
Mohamed BEN AMAR
TIME University, Tunisie
[email protected].
Abstract: The object of this work consists in analyzing economic growth in African
countries. We have three main results that were generated from this work. First, we explain
how industrial development can achieve strong and sustained economic growth in African
countries. Secondly, concerning economic performances, the African countries achieved a
great improvement during the last decade and show very important potential. They should
strengthen reforms in a process of structural transformation focused on the development of
the manufacturing sector. Finally, on using a panel model for two samples of 4 North African
countries and 26 Sub-Saharan African countries covering the period (1982-2009), we
confirmed the positive and statistically significant effect of industrialization on sustained
economic growth.
Keywords: industrialization, structural transformation, panel data, endogenous growth,
African countries.
Introduction
Les théories modernes de la croissance économique insistent que la croissance
est un processus permanent de l'innovation technologique, de la modernisation et
de la diversification de l'industrie qui permet l’amélioration des différents types
d'infrastructures et d’arrangements institutionnels qui constituent le contexte du
développement de l'entreprise et la création qui peuvent être décrites brièvement
comme transformation structurelle de l'économie.
L'industrialisation peut modifier la structure économique aux activités
économiques modernes et peut être considérée comme une source d'externalités
positives pour les autres secteurs. Il augmenterait par conséquent l'augmentation
potentielle de l'économie et par conséquent faciliter le développement économique.
L’industrialisation peut être appréciée comme un outil essentiel dans création
des postes de travail, de réduction de la pauvreté et de la promotion des politiques du
développement régionales. De plus, elle peut stimuler le progrès technologique et
l’innovation qui peuvent être considérés comme des gains de productivité. En effet,
les pays développés ont découvert le rôle crucial de l'industrialisation inclue par la
grande part du secteur industriel dans le PIB et ont soutenu leurs industries à travers
les politiques ciblées et les investissements appropriés dans leurs institutions.
219
Revue europénnee du droit social
Malgré toute sa richesse naturelle et ses ressources minérales, l’Afrique reste
le continent le moins industrialisé dans le monde. Plus qu’un demi-siècle après leur
indépendance, pendant que les autres régions ont augmenté leur part d’exportations
non-pétrolières, le continent est encore exportateur de matières premières aux pays
industrialisés.
Ces derniers ont transformés et ont revendu ces produits en Afrique à des prix
considérablement plus hauts. Après l'indépendance, beaucoup de pays africains ont
choisi l'industrialisation comme élément central de leur agenda du développement.
Il a été supposé de faciliter la transformation de la structure de leurs économies
d'une base agricole à une base industrielle moderne.
Maintenant, divers pays africains appliquent des stratégies d'industrialisation
de production désignée à l’exportation qui exige des produits de qualité pour les
exporter à prix bas.
Concernant les transformations structurelles qui ont émergé dans l'économie
mondiale durent les 25 années, il devient clair que les exigences les plus importantes
à l'industrialisation restent actuellement la qualité de l'éducation et la connaissance
technologique. Le décollage de l'industrialisation exige la disponibilité d'une maind’œuvre éduquée et techniquement qualifiée, le déficit qui affecte le continent dans
ce domaine continu à jouer un rôle significatif dans l’obstacle du processus du
développement en Afrique. Les autres facteurs connus pour contribuer aux
conditions sombres de l'industrialisation sur le continent consistent en les politiques
peu appropriées dans l’investissement industriel, des infrastructures inadéquates, les
questions de la taille du marché aussi bien que l'absence de technologie. Les
contraintes de l’offre ont montré un problème récurrent pour le développement
africain, qui exige une attention sur la création d’un environnement conducteur et
d’une politique cohérente. De même, il est impératif de créer des compétences,
d’accroitre la productivité, d’encourager l'investissement, d’améliorer le
fonctionnement des entreprises et le transfert des technologies, réduire des coûts dans
le climat des affaires et d’introduire des normes appropriés pour permettre aux
produits d’être compétitifs sur les marchés internationaux.
Le but de ce travail consiste à évaluer empiriquement l'effet de
l'industrialisation sur la croissance économique de deux groupes de pays africains
(les pays nord africains et les pays subsahariens). Pour traiter une telle question,
nous organisons notre travail en trois sections.
L'objet de la première section est de rechercher le lien entre l'industrialisation
et les principaux modèles de croissance endogène qui représentent la théorie
moderne de la croissance économique. La deuxième section présente les
performances impressionnantes des pays africains et la transformation structurelle.
La dernière section est consacrée à notre vérification empirique des effets du
développement industriel sur la croissance économique dans le cas des deus
échantillons de pays africains.
220
Revista europeană de drept social
1. L’industrialisation comme source de la croissance endogène
endogène::
Dans un modèle présenté en 1966, Kaldor est considéré comme l'initiateur de
présenter l'industrialisation comme un facteur déterminant du développement
économique. “Fast rates of growth are almost invariably associated with the fast
rate of growth of the secondary sector, mainly manufacturing, and...this is an
attribute of an intermediate stage of development” (Kaldor,1966, 7).
Dans la même ligne de recherche, Chenery et al. (1986) ont étudié la relation
entre l'industrialisation et la croissance économique. “Is industrialization necessary
to continued growth? Our models of the transformation suggest that the answer is
generally yes. (...) We conclude that –on both empirical and theoretical grounds– a
period in which the share of manufacturing rises substantially is a virtually
universal feature of the structural transformation”. (Chenery et al., 1986, 350).
Ainsi, Murphy et al. (1989) supposent qu'une croissance rapide est effectuée
par un développement industriel. “Virtually every country that experienced rapid
growth of productivity and living standards over the last 200 years has done so by
industrializing. Countries that have successfully industrialized –turned to
production of manufactures taking advantage of scale economies– are the ones
that grew rich, be they 18th-century Britain or 20th-century Korea and Japan”.
(Murphy et al., 1989, 1003).
Chenery et al. (1986) ont remarqué que le long du processus d'industrialisation
quelques transformations structurelles doivent avoir lieu comme les changements
dans la demande finale, les changements dans les demandes intermédiaires et les
changements dans le commerce international.
L'investissement en tant que facteur de la croissance endogène a été introduit
par Romer (1986) en se référant au travail d’Arrow (1962). Romer assume que la
croissance d’une nation peut être permanente. Il suggère que les externalités
positives technologiques sont le résultat d'une accumulation du capital physique, ce
qui donne la qualification de «connaissance», même si la référence implicite est
certainement celle du capital physique. De plus, Lucas (1988) a développé un
modèle de croissance endogène centré sur le capital humain, qui peut être
accumulé par le biais de certaines activités dont les plus importantes sont
l'éducation, la formation, la santé et l'innovation. La troisième catégorie des
modèles de croissance endogène est basée sur des explications schumpétériennes,
où l'innovation. Romer (1990) et Aghion et Howitt (1992) ont développé deux
modèles où l'innovation technologique et l'investissement dans la recherche et
développement sont considérés comme déterminants de la croissance à long terme.
Dans cette même lignée, l'industrialisation peut être considérée comme un facteur
de la croissance endogène. En outre, cette relation entre le développement de
l'industrie et la croissance peut être expliquée par le processus schumpétérien de
«la destruction créatrice». Selon Barro (1990), les dépenses du gouvernement dans
221
Revue europénnee du droit social
l'infrastructure sont considérées comme un facteur de croissance de la performance
du secteur privé productif. Par conséquent, les dépenses publiques génèrent des
externalités d’amélioration de la productivité dans le secteur privé, et permettent
une croissance endogène. Grossman et Helpman (1991) ont proposé un modèle où
la croissance économique est dépendante de l’ouverture de l’économie à
l’extérieur. Une ouverture qui ouvre la porte aux transferts technologiques et aux
nouveaux marchés. En 1993, Pagano a également analysé théoriquement le rôle du
développement financier dans l'allocation efficace des ressources financières et
donc à la croissance économique.
2. Performances impressionnantes des pays africains et
transformation structurelle
Dans ce paragraphe, nous décrivons les résultats concernant la croissance
économique dans les pays africains.
2.1. Principaux résultats des performances économiques africaines
En ce qui concerne les performances économiques, les pays africains ont
atteint une grande amélioration au cours de la dernière décennie. Ainsi, le PIB de
l'Afrique a enregistré 4,9% de croissance annuelle moyenne sur la période 20002008. Ce taux a plus que doublé par rapport à celui des années 1980 et 1990. Le
PIB africain du a atteint en 2008 les 1600 milliards de dollars ; approximativement
l'équivalent de celui du Brésil et de la Russie.
Cependant, les dépenses de consommation en 2008 sont estimées à 860 billions
de dollars. Enfin, après une baisse constante au cours des années quatre-vingt et
quatre-vingt dix, la productivité du travail en Afrique a retourné à augmenter avec
une forte croissance annuelle moyenne de 3% au cours de la période 2000-2008.
Le boom des prix des matières premières contribue directement à raison de 24%
de la croissance économique des pays africains au cours de la période 2000-2008. Ce
taux peut atteindre 32% si l'on considère également les contributions indirectes.
En réalité, en plus de la hausse des prix des matières premières, il y a eu
d’autres facteurs qui ont joué un grand rôle dans la réalisation de ces performances.
Ces facteurs ont beaucoup amélioré la compétitivité globale des économies des
pays africains.
« The key reasons behind Africa’s growth surge include government moves to
end armed conflicts, improve macroeconomic conditions, and adopt
microeconomic reforms to create a better business climate. In every country where
these shifts occurred, they correlated with faster GDP growth »1.
Ainsi, dans la majorité des pays africains, la stabilité politique est améliorée par la
diminution du niveau de la conflictualité. Plusieurs réformes macroéconomiques et
1
McKinsey & Company (2010).
222
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microéconomiques ont était adoptées ; privatisation des entreprises publiques,
réduction des barrières commerciales, allègements fiscaux au profit des entreprises et
renforcement des systèmes légaux et de régulation. En matière de stabilité
macroéconomique, des années 1990 aux années 2000, le taux d’inflation a passé de
22% à 8%2, la part de la dette publique dans le PIB a passé de 81.9% à 59%3 seulement
et la part du déficit budgétaire dans le PIB a aussi passé de (-4.6%) à (-1,8%)4.
En plus des performances déjà réalisées en matière de croissance économique,
l’Afrique possède un grand potentiel de croissance économique.
« If recent trends continue, Africa will play an increasing important role in the
global economy. By 2040, the continent will be home to one in five of the planet’s
young people, and the size of its labor force will top China’s. Companies already
operating in Africa should consider expanding5 ».
2.2. La transformation structurelle et la qualité de la croissance
économique en Afrique
Dans leurs analyses, les économistes s'accordent sur le fait que: i) l'emploi est le
guide principal à travers lequel la croissance économique peut réduire la pauvreté, ii)
l'emploi6 dépend de la qualité de la croissance économique et iii) la qualité de la
croissance économique dépendante de la composition sectorielle de l'production.
En réalité, le problème de la composition de la structure de la production des
pays africains ne concerne pas à propos la contribution de l'industrie dans l'activité
économique, mais plutôt la contribution de l'activité manufacturière. Ainsi, en
2008, la contribution du secteur industriel au PIB pour les pays en développement
en Afrique est de 40,68%. Cette contribution est supérieure à la moyenne mondiale
qui se situe autour de 30,08%. Alors que la contribution du secteur manufacturier,
elle est de l'ordre de 10,49% en 2008. Cette contribution est inférieure que la
moyenne mondiale qui est de 18,13%7.
En plus de sa faible contribution dans l'économie, le secteur manufacturier a
d'autres limites. Tout d'abord, sa part dans l'industrie manufacturière mondiale est
très faible. Elle a diminué de 1,2% en 2000 à 1,1% en 2008. En second lieu,
concernant produits manufacturés à faible technologie et à forte intensité en maind'œuvre, l'Afrique a reculé. Ainsi, la part de ces produits dans la valeur ajoutée
manufacturière a chuté de 23% en 2000 à 20% en 2008. De même, la part de ces
produits dans le total des exportations manufacturières de l’Afrique a aussi baissé,
en passant de 25% en 2000 à 18% en 2008. En Troisième lieu, l'industrie
manufacturière est fortement dépendante des activités manufacturières basées sur
les ressources naturelles. Ainsi, en 2008, la part de ces produits dans les
2
Soit une chute de 64%.
Soit une baisse de 28%.
4
Soit une amélioration de 60%.
5
McKinsey & Company (2010).
6
Niveau et qualité.
7
CNUCED et ONUDU, 2011.
3
223
Revue europénnee du droit social
exportations totales de produits manufacturés en Afrique est de 49%. Enfin, le
secteur manufacturier africain est dominé par les petites entreprises africaines qui
ne créent pas suffisamment d'emplois décents (les CNUCED et ONUDU, 2011).
La principale question qui se pose est: « comment la transformation
structurelle et en particulier le développement du secteur de la fabrication peuvent
améliorer la qualité de la croissance économique? ».
« Ainsi, on peut considérer la transformation structurelle comme étant le
changement intervenant dans la composition sectorielle de la production (ou PIB)
et celle du type sectoriel de l'emploi de la main-d'œuvre, au fur et mesure que le
l'économie se développe (c'est-à-dire en tant qu’accroissement du PIB réel par
habitant) » (CEA et UA, 2011).
Les principaux faits stylisés dégagés des études empiriques qui ont porté sur la
transformation structurelle8, sont au nombre de quatre. Ainsi, au cours d’une
longue période, à mesure que le PIB réel par habitant augmente, la part:i) de
l’agriculture dans le PIB diminuera, ii) de l’industrie dans le PIB augmentera, des
services dans le PIB augmentera et, iv) de la manufacture dans le PIB augmentera.
Sachant que pour chaque baisse et chaque augmentation il y a une limite9, à
l’exception de l’augmentation de la part de la manufacture dans le PIB qui ne
correspond pas nécessairement à un point tournant (CEA et UA, 2010).
En réalité, les économistes supposent que dans l’économie moderne, un
processus d’industrialisation et en particulier le développement de la production
manufacturière sont nécessaires pour la réalisation d’une croissance économique
forte, rapide et durable. Alors que les exportations de produits de base peuvent
procurer une croissance économique forte, mais pas durable.
Sur toute la période (1970-2007), six pays africains (Botswana, Cap-Vert,
l’Egypte, la Guinée équatoriale, le Lesotho et la Tunisie) seulement qui ont réalisé
une croissance économique soutenue. Autrement dit, une croissance annuelle
moyenne supérieure ou égale à 2% du PIB réel par habitant sur toute la période
1960-2007 et les trois sous périodes (1960-1972, 1973-2000 et 2000-2007), avec
une volatilité faible qui correspond à un coefficient de variation des taux de
croissance compris entre 1 et 3.
Parmi ces six pays, seulement la Tunisie qui a réalisé une transformation
structurelle classique au cours de la période 1960-2007. Mais aussi deux autres de
ce groupe de six qui ont réalisé une transformation structurelle incomplète, dans la
mesure où la part du sous-secteur manufacturier a baissé au cours de cette période
(CEA et UA, 2011). Donc, un nombre très limité des pays africains ont assuré une
croissance économique soutenue et une transformation structurelle.
Les principaux mécanismes par lesquels la transformation structurelle, qui est
un développement du secteur manufacturer, améliore la qualité de la croissance
économique sont au nombre de quatre.
8
En termes des parts des trois secteurs traditionnels de la production et du sous-secteur manufacturier.
Qui correspond à un niveau du revenu par tête bien déterminé.
9
224
Revista europeană de drept social
Premièrement, le secteur manufacturier comme une transformation physique
ou chimique de matériaux en nouveaux produits ou composants de subsistance, il
augmente la valeur de ces produits et crée de la richesse. Deuxièmement, la
fabrication est une source d'innovation et donc un moyen de développer l'activité
de recherche et développement et à la diffusion des nouvelles technologies dans
d'autres secteurs de l'économie. Troisièmement, le secteur manufacturier a des
effets importants sur le reste de l'économie, notamment l'agriculture, les transports,
la banque, l'assurance, la communication et d'autres. Par le biais de ces effets
d'entraînement, l'activité manufacturière contribue au développement de
l'investissement intérieur et d’où la création de l’emploi. Quatrièmement, la
transformation structurelle et le développement du secteur manufacturier
améliorent la qualité des échanges internationaux du pays en renforçant sa capacité
d'exportation de produits manufacturiers.
Enfin, contrairement au secteur agricole, qui est limitée par les rendements
d'échelle10 décroissants et d'autres secteurs traditionnels, le secteur manufacturier a
un grand potentiel en matière de création d'emplois. Par conséquent, pour satisfaire
les besoins de l'emploi d'une population croissante et de mouvement d'urbanisme, il
faut développer le secteur manufacturier.
Dans l’ensemble, la réalisation d’une croissance économique forte et soutenue
par les pays africains exige l’implication de ces pays dans un processus de
transformation structurelle axée sur le développement du secteur manufacturier.
Pour expliquer la relation entre l'industrialisation et le PIB par habitant, nous
utilisons une estimation longitudinale des pays africains pour l’année 2009
(graphique ci-dessous).
Figure 1. Relation entre le PIB par habitant et l'industrialisation
10
Une décroissance est expliquée par la constance de certains facteurs comme la terre.
225
Revue europénnee du droit social
Le graphique suivant met en évidence la relation positive qui existe entre les
deux variables étudiées ; le PIBT et l’IND. Pour l’année de notre étude (2009)11, il
paraît que les résultats obtenus présentent l’intérêt de reposer sur un échantillon
étendu de pays à différents niveaux de développement du continent africain. Les
pays en haut et à droite du graphique sont les plus développés et font l’expérience
de niveaux de d’industrialisation élevés. En revanche, les pays en bas et à gauche
sont les moins développés et connaissent les niveaux d’industrialisation les plus
faibles. Ces résultats attestent donc une relation positive entre le développement
industriel et le niveau de développement économique qui va faire l’objet d’une
vérification empirique dans la section suivante.
Nous remarquons que les pays nord africains appartiennent à la première zone
des pays les plus développés du continent sauf pour la Mauritanie. Alors que la
majorité des pays subsahariens appartiennent à la zone des pays les moins
développés sauf pour le Gabon, l’Afrique du Sud, le Congo, le Botswana et les Iles
de Maurice. C’est pour cette raison, qu’on va faire une analyse comparative entre
ces deux groupes de pays dans la prochaine section.
3. Vérification empirique de la relation entre le niveau
d’industrialisation et la croissance économique pour deux
échantillons de pays africains
3.1. Présentation du modèle et méthodologie des estimations
Dans cette section, nous allons étudier empiriquement les effets de la compétitivité
globale sur la croissance économique pour deux échantillons de pays africains12.
a. Présentation du modèle
Pour atteindre tel objectif, on suivra l’approche de Mankiw, Romer & Weil
(1992) et Demetriades & Law (2004).
Nous retenons la fonction de production Cobb-Douglas suivante:
(1)
avec
et
où, Y: la production, K: le stock du capital physique, H: le stock du capital
humain, L: le travail, A: un facteur reflétant le niveau technologique et l’efficacité
de l’économie, α + β<1, n: le taux de croissance de la force de travail, g: le taux du
progrès technique supposé constant, : le vecteur représentant l’industrialisation
et les autres facteurs affectant le niveau de la technologie et l’efficacité de
l’économie, θ: le vecteur des coefficients qui sont reliés à ces variables, et i et t
sont respectivement les indices pays et temps.
11
L’utilisation de l’année 2009 comme une année de référence pour notre estimation longitudinale se
réfère à l'année de terminaison de notre étude empirique, dans le paragraphe suivant.
12
Les pays nord africains et les pays subsahariens
226
Revista europeană de drept social
L'évolution de l'économie est déterminée par:
et
(2)
avec,
et
sont respectivement le taux d’investissement en capital
physique et le taux d’investissement en capital humain. On suppose que:
et
, avec,
le taux de dépréciation du capital physique.
Considérons que la production par unité de travail, le stock de capital physique
par unité de travail et le stock de capital humain par unité de travail sont donnés
par:
,
Après tous les développements, on obtient:
(3)
(4)
Considérons aussi que le produit intérieur brut par unité de travail effectif
s’écrit comme suit:
(5)
La substitution de (5) dans (3) et dans (4) nous donne:
(6)
(7)
A l’équilibre on a:
Ce résultat nous conduit aux relations suivantes:
(8)
(9)
En divisant (8) par (9), on obtient:
(10)
La substitution de (10) dans (9) et (8), nous ramène à la relation suivante:
(11)
(12)
227
Revue europénnee du droit social
Les relations (11) et (12) révèlent l’état stationnaire de l’économie au sens de Solow.
En tenant compte de la relation (5), on aura:
Cela signifie que:
(13)
La relation (13) représente la production par travailleur à d’équilibre.
A l’équilibre, le progrès technologique est donné par:
(14)
Avec
: les variables qui représentent les facteurs qui peuvent influencer le
progrès technologique. Dans notre travail,
regroupe des variables reflétant le
progrès industriel. La substitution de (11), (12) et (14) dans (13), nous donne:
(15)
Pour que cette relation soit linéaire, on met en œuvre le logarithme:
(16)
Si on ajoute les indices temps et individus, la relation s’écrit:
(17)
avec les taux g et δ sont supposés constants à travers chaque pays et dans le
temps et leur somme est égale à 0.05 (Mankiw et al., 1992). La variable
comporte les facteurs structurels et les facteurs de l’environnement économique
possédant une influence sur la croissance économique.
Donc, notre régression est basée sur la relation suivante:
(18)
avec, i désigne les pays (i = 1, 2,..., N) et t représente le temps (t = 1,…, T),
PIBT: le logarithme du PIB par habitant calculé en dollars constants de 2000, IND:
le logarithme du ratio de la valeur ajouté du secteur industriel en pourcentage du
PIB, CAP: le logarithme de l’accumulation du capital, EDU: le logarithme du taux
de scolarisation au secondaire.
b. Présentation des variables et leurs ressources
Toutes ces variables sont extraites des données annuelles de la base des
données de la Banque Mondiale (WDI) pour un échantillon de 30 pays africain
couvrant la période 1982- 2009. Les variables abordées dans notre étude sont le
PIB par tête comme variable endogène, la valeur ajoutée du secteur industriel en
228
Revista europeană de drept social
pourcentage du PIB, le stock de capital physique par habitant et du taux de
scolarisation en éducation secondaire.
La variable dépendante de notre modèle est donnée par le produit intérieur brut.
Les variables explicatives utilisées dans notre travail sont:
Le niveau de l’industrialisation est donné par le niveau de la valeur ajoutée
du secteur industriel en pourcentage du PIB.
Le stock du capital physique par tête: nous évaluons le volume du stock de
capital physique en recourant à l’étude de Pottelsberghe et Bruno (1997). Le stock
de capital physique "K" de l'année "t" est égal à son stock en "t-1" nivelé d'un taux
de dépréciation en ajoutant le niveau de l'investissement « I » à l’instant « t »:
, avec It: la Formation Brute du Captal Fixe et : le taux
de dépréciation du capital (
).
Le stock initial du capital physique « K0 » est égal à l'investissement initial
« I0 » divisé par la somme du taux de croissance annuel de l'investissement It et du
taux de dépréciation δ du capital physique:
. Le stock de capital physique par tête est donné en divisant le
stock de capital physique calculé par la population totale.
Le stock du capital humain est donné par le taux de croissance de
croissance de l’éducation en secondaire.
Toutes ces variables sont extraites des données annuelles de la base des
données de la Banque Mondiale (WDI, 2011).
c. Estimation du modèle et interprétation des résultats
Nous avons estimé économétriquement sur données de panel l’équation (18)
pour un échantillon de 30 pays en développement, divisés en deux groupes13. Notre
étude couvre la période 1982-2009.
L’étude économétrique en données de panel rend compte, à côté de la
dimension individuelle, de la dimension temporelle des observations.
L’augmentation du nombre d’observation permet de tenir compte des différences
individuelles de performances qui sont dues à l’influence d’autres facteurs autres
qui sont considérés dans la régression.
La richesse de l’information dans l’estimation des modèles en données de
panel conduit aux conséquences suivantes: d’une part, le nombre très important
d’individus observés permet une grande précision des estimations. D’autre part, la
variabilité considérable des observations conduit à des R2 relativement faibles.
En estimant un échantillon de données de panel, la première chose qu’il
convient de vérifier est la spécification homogène ou hétérogène du processus
générateur des données. Sur le plan économétrique, cela convient à tester l’égalité
des coefficients du modèle étudié dans la dimension individuelle.
Econométriquement, les tests de spécification reviennent à déterminer si l’on est en
13
Les pays nord africains et les pays subsahariens.
229
Revue europénnee du droit social
droit de supposer que le modèle théorique étudié est parfaitement identique pour
tous les pays, ou au contraire s’il existe des spécificités propres à chaque pays.
La présence d’effets spécifiques pour chaque individu rend les estimateurs des
moindres carrés ordinaires non convergents. Dans ces conditions, nous devons
accéder à l’estimation par la méthode « within » si ces effets sont fixes, ou la
méthode des moindres carrés généralisés si ces effets sont aléatoires.
L’application du test de l’existence des spécificités individuelles dans notre
étude rejette l’hypothèse d’homogénéité des variables.
Une fois l’hétérogénéité des variables détectée, nous devons passer au choix
entre la régression par la méthode « within » ou par la méthode des moindres carrés
généralisés « GLS ». Pour substituer entre ces deux méthodes, nous appliquons le
test de spécification de Hausman (1978). Se référant à la statistique de ce test, les
effets propres sont fixes car nous avons accepté l’hypothèse de corrélation entre les
effets propres aux pays et les variables explicatives. Dans ce cas, la méthode
« within » utilisée pour estimer le modèle avec effets fixes est convergente et
efficace.
A partir de l’équation de base (18), nous allons effectuer différentes
régressions pour chacun des groupes de pays.
Tableau 1: Effets de l’industrialisation sur le PIB par habitant
Pays Nord Africains
Pays de l’Afrique
Subsaharienne
C
2.289*
4.0345*
IND
0.104**
0.051**
CAP
0.474*
0. 26**
EDU
0.177*
0. 044**
2
R
0.98
0.97
N
140
698
16.97*
94.95*
Test
Hausman
*,**, ***: coefficient significatif respectivement à un seuil de 1%, 5% et 10%.
Les résultats de notre estimation confirment nos hypothèses. Ainsi, le niveau
d’industrialisation, mesuré par la valeur ajoutée du secteur industriel en
pourcentage du PIB exerce un effet positif et statistiquement significatif sur le
niveau du PIB par habitant dans nos échantillons constitués d’un ensemble de pays
nord africains et d’un ensemble de pays subsahariens (un accroissement de la
valeur ajoutée du secteur industriel de 1% engendre une hausse du PIB par habitant
230
Revista europeană de drept social
de 0,104% pour le premier groupe de pays et de 0,051% pour le le second groupe
de pays). Un résultat qui peut expliquer et justifier la contribution de l’évolution du
niveau d’investissement de ces deux groupes de pays africains dans leur croissance
économique. L’effet exercé par l’industrialisation des économies, confirmé par
notre régression économétrique, peut aussi contribuer à la transformation du
potentiel du continent en des réalisations concrètes dans les prochaines années. Les
pays africains ont réalisé des grandes performances en matière de croissance
économique, mais le plus important est d’une part la continuité, et d’autre part, le
développement des facteurs endogène de création de la richesse. Des facteurs qui
agissent sur la compétitivité de leurs économies.
Le coefficient de la variable représentant le stock de capital est de signe positif
et statistiquement significatif, ce qui est conforme aux résultats du modèle
néoclassique de croissance, à savoir l’effet positif de l’accumulation du capital
physique sur le développement des nations. Une hausse de 1% du ratio
d’investissement entraînerait une augmentation de 0,474% du PIB par tête pour les
pays nord africains et de 0,26% pour les pays subsahariens.
Le signe de la variable éducation, qui identifie le rôle de la qualité du capital humain,
est positif et statistiquement significatif. Il est identique au signe escompté dans les deux
groupes de pays. Nous pouvons constater que l’indicateur du capital humain influence la
croissance positivement, ce qui confirme le rôle important de l’éducation comme moteur
du développement économique. Une augmentation du taux d’accumulation du capital
humain de 1% se traduit par un accroissement de 0,177% de la production pour le groupe
des pays nord africains et de 0,044% de l’output des pays subsahariens.
Conclusion
Dans le premier paragraphe, nous avons essayé de présenter l’effet de
l’industrialisation pour conduire à une croissance économique durable et robuste.
Dans le deuxième paragraphe, nous remarquons que les grandes performances
économiques réalisées en Afrique ne sont pas transformées en un développement
durable pour essentiellement deux raisons. Premièrement, la forte croissance
économique réalisée au cours de la dernière décennie n’est pas soutenue, car elle est
tirée par l’exportation des produits de base à l’état brut. Deuxièmement, cette
croissance économique est faiblement créatrice d’emplois décents. La transformation
structurelle et particulièrement le développement du secteur manufacturier en
Afrique peuvent représenter un moyen efficace de transformation des grandes
performances économiques en un développement humain durable. Ainsi, cette
transformation structurelle améliore la qualité de la croissance économique en termes
de niveau, de durabilité et de capacité créatrice d’emplois décents.
Dans le dernier paragraphe, nous avons développé un modèle de croissance
économique dans lequel nous avons introduit le proxy de la valeur ajoutée du
secteur industriel comme facteur de la croissance économique. En utilisant un
231
Revue europénnee du droit social
modèle de panel statique pour deux échantillons de 4 pays nord africains et de 26
pays subsahariens au cours de la période (1982-2009), on a vérifié l’effet positif et
statistiquement significatif du niveau d’ industrialisation sur la croissance
économique dans ces deux groupes de pays.
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Annexes: Liste des pays
Algérie (DZA)
Botswana (BWA)
Burundi (BDI)
Cameroun (CMR)
Cote d'Ivoire (CIV)
Egypte (EGY)
Ethiopie (ETH)
Gabon (GAB)
Gambie (GMB)
Ghana (GHA)
Kenya (KEN)
Madagascar (MDG)
Malawi (MWI)
Maroc (MAR)
Maurice (MUS)
Mauritanie (MRT)
Mozambique (MOZ)
République Centre Africaine (CAF)
République du Congo (COG)
République Démocratique du Congo (ZAR)
Rwanda (RWA)
Sénégal (SEN)
Sierra Leone (SLE)
Soudan (SDN)
Sud Afrique (ZAF)
Tchad (TCD)
Togo (TGO)
Tunisie (TUN)
Uganda (UGA)
Zambie (ZMB)
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