BAKBASEL 3
L’analyse au niveau des branches de l’économie met l’accent sur la disponibilité de l’énergie, du CO2 et des
matériaux critiques. Le CO2 est considéré comme un bien dont la disponibilité est limitée, dans la mesure
où des valeurs limites ou indicatives sont fixées dans la loi afin de limiter la fonction de séquestration des
émissions et des déchets jouée par l’environnement. L’économie suisse obtient d’excellents résultats par
rapport à l’échantillon de référence en termes d’intensité énergétique et de rejets de CO2. Dans les condi-
tions actuelles, en cas de problèmes de disponibilité de ressources naturelles, les branches de l’économie
suisse devraient donc tendanciellement mieux résister que les branches des autres pays. La disponibilité
des matériaux critiques (comme les terres rares) pourrait toutefois menacer la compétitivité de la Suisse,
car il s’agit de composants essentiels des technologies modernes utilisées dans certaines branches dont le
poids au sein de l’économie suisse devrait augmenter.
L’examen de la qualité des facteurs de localisation (disponibilité des ressources naturelles, infrastructures,
innovation et efficience, réglementation, qualité de vie et qualité de l’environnement) atteste également de
la très bonne compétitivité de la Suisse en la matière. Cette appréciation est surtout valable pour la situa-
tion actuelle, car si l’on considère l’évolution des différents indicateurs dans le temps, en les comparant
avec la situation dans les autres pays de l’échantillon, il apparaît que la Suisse a moins progressé ces der-
nières années, surtout dans le domaine de l’innovation et de l’efficience. Le tableau se noircit encore si l’on
intègre la consommation de ressources à l’étranger. Des signes montrent en effet que la Suisse pourrait
avoir délocalisé à l’étranger des processus de production particulièrement intensifs en ressources, ce qui
n’apporte rien en termes de productivité des matières premières.
En conclusion, la compétitivité de la Suisse doit être abordée de façon différenciée. D’une part, la Suisse
peut actuellement se targuer d’une excellente compétitivité, qui se reflète dans sa situation économique
très favorable, dans des technologies efficientes en ressources, dans la possibilité de faire du commerce,
dans une diversification économique efficace et dans des facteurs de localisation d’excellente qualité. Dans
ces circonstances, l’économie suisse pourra résister plus longtemps que d’autres en cas de raréfaction des
ressources. Pour maintenir sa compétitivité sur le long terme, elle doit toutefois encore faire des progrès
plus marqués, surtout dans le domaine de l’efficience. La Suisse, en tant que petite économie ouverte, ne
pourra maintenir sa forte compétitivité qu’en collaborant avec les pays d’importation et d’exportation, tout
au long des chaînes de création de valeur, en tenant compte de l’énergie grise ainsi que des émissions
grises. Cela implique une avancée supplémentaire de la Suisse en direction d’une économie verte.
Faire une utilisation efficiente des ressources naturelles est une tâche de longue haleine, qui présente une
très grande dépendance au chemin. La Suisse doit mener une réflexion de fond sur les options qui
s’offrent à elle pour pouvoir relever les enjeux du futur en étant sur les « bons » rails. Ces options se
résument globalement à six scénarios : faire comme si de rien n’était, se retirer du monde, s’engager sur
la voie de l’hypercroissance, assurer ses arrières, refondre l’économie sans attendre et enfin, adopter des
pratiques durables et assumer une responsabilité globale (l’économie verte). Chacun de ces scénarios a
des effets radicaux. Certains peuvent être combinés entre eux, d’autres s’excluent mutuellement. La
Suisse a le choix, le choix d’adopter une politique d’avenir, réaliste, qui lui permette de poursuivre son
chemin dans un monde où les ressources naturelles sont limitées.