Billet de linvestisseur
Les changements structurels favorisent l’inflation
Ce n’est plus la déflation que les marchés financiers redoutent, mais l’inflation. Le débat déborde
maintenant le cadre conjoncturel. Lécart se creuse entre les consommateurs qui travaillent et ceux
qui ne travaillent plus, ouvrant la voie à l’inflation structurelle.
La crainte dune déation a hanté les marchés pendant la crise
nancière. Elle a continué à animer le débat économique même
après les premiers signes de normalisation. Il y a un an, il nétait
question que dun ralentissement en Chine et de son corollaire,
laffaiblissement du renminbi, susceptibles de provoquer une
onde de choc déationniste dans la plupart des économies déve-
loppées. Depuis lélection de Donald Trump à la présidence des
États-Unis, les acteurs économiques ont dautres préoccupations :
ils nexcluent plus un retour de lination, les médias allant
jusquà annoncer une stagation. Est-ce bien réaliste ? Quelques
réexions d’ordres conjoncturel et structurel devraient permettre
de dépassionner le débat. Il faut avant tout garder à l’esprit que
dans le contexte actuel, une hausse des prix est souhaitable. À
notre avis, l’ination ne devient un problème que si les banques
centrales doivent soudainement changer de politique monétaire
parce que le taux d’ination menace de crever l’objectif de 2 % et
de se maintenir durablement au-dessus de ce niveau.
Le rôle de la masse monétaire
La théorie économique classique établit que toute expansion
substantielle de la masse monétaire, telle que nous la vivons, en-
trne inévitablement une forte remontée des prix. Or, cette cor-
rélation ne sest pas vériée ces dernières années. Cela tient au
fait que la monnaie centrale nest que la masse brute sur la base
de laquelle les banques accordent des crédits. Comme le disent
les économistes, lexpansion de la masse monétaire est une condi-
tion indispensable à lination, mais pas sufsante (graphique1).
Inflation des biens, inflation des actifs
On distingue deux types d’ination : lination des biens et lin-
ation des actifs. Au sortir de la crise nancière, la demande glo-
bale na pas évolué comme les marchés l’auraient souhaité et
largent a été investi dans les actifs, échappant ainsi à léconomie
réelle. Les prix des actions, des obligations et de limmobilier ont
donc pris lascenseur (graphique2). Sous cet angle-là, nous avons
bien eu une ination, mais une ination des actifs.
Marchés financiers
28 février 2017
www.bekb.ch I Marchés financiers I 28 février 2017 2
Les matières premières, un inducteur potentiel
Les prix des matières premières peuvent, comme la masse moné-
taire, induire de lination, surtout si leur ascension est durable
ou quils restent élevés, nissant par se répercuter sur léconomie
réelle par des effets de second tour. Prenez le prix du carburant :
sil progresse vite en raison des tensions géopolitiques avant de
reuer à nouveau une fois une issue politique trouvée, il ne va pas
renchérir en Suisse. Imaginons que les tensions subsistent et que
le prix ne redescende pas : à ce moment-là, rouler va coûter plus
cher. En dautres termes, la seule question qui vaille est de savoir
comment va évoluer le prix du pétrole. Notre scénario de base
fait lhypothèse que le resserrement de la production décidé en n
d’année par les pays exportateurs d’or noir ne sera pas appliqué à
la lettre et que le prix du brut connaîtra un nouveau échisse-
ment. Selon nous, linuence des matières premières sur l’ina-
tion restera pour l’heure marginale.
Le risque d’une spirale prix-salaires
La troisième source d’ination à court terme– la plus importante
aussi– est la spirale prix-salaires. C’est une situation dans la-
quelle les salaires versés pour la production de biens et la fourni-
ture de services augmentent plus vite que la productivité
moyenne du travail, contraignant les entreprises à répercuter les
coûts de production plus élevés sur les prix naux, ce qui en-
gendre une progression de lination. Certaines conditions
doivent être réunies pour que la spirale senclenche, à commencer
par un marché du travail asséché. La demande de travail étant
élevée ou loffre insufsante, les salariés peuvent exiger dêtre
mieux rémunérés. La seconde condition est une conjoncture suf-
samment robuste pour que les entreprises puissent majorer leurs
prix. Peut-on craindre une spirale prix-salaire à l’heure actuelle ?
Aux États-Unis, le taux de chômage structurel reste proche de
son niveau incompressible, si bien quon peut parler de marché du
travail asséché. Lécart de production devrait être pratiquement
comblé, voire légèrement positif, si bien que le taux dutilisation
des capacités de production dans lindustrie est nettement infé-
rieur à la moyenne de long terme. On peut donc considérer
qu’une spirale prix-salaires se met lentement en place outre-
Atlantique.
Rien de tel en Europe, où le chômage recule dans la plupart des
pays de lUE, sans que lon puisse pour autant considérer le mar-
ché du travail comme asséché. Les autres facteurs de production
ne sont pas, eux non plus, surutilisés, loin sen faut. Enn, le
désendettement affaiblit la demande, empêchant une ascension
des prix. En Suisse, le taux de chômage structurel est pratique-
ment atteint, mais les entreprises peinent à imposer leurs prix, en
raison notamment du franc fort.
Les composantes structurelles
Mis à part les trois sources conjoncturelles d’ination (à court
terme), il faut tenir compte de plusieurs facteurs structurels. Au
début des années1990, la mondialisation sest accélérée et les
accords commerciaux se sont multipliés. La concurrence accrue
qui en est résulté a fait perdre aux entreprises le pouvoir de xer
leurs prix comme elles l’entendent, ce qui a atténué la pression
inationniste. Le progrès technologique a dopé la productivité du
travail, poussant la société vers le numérique. Cette évolution est
propice à la désination.
Les médias mentionnent souvent l’évolution démographique pour
justier les tendances inationnistes. Ces dernières années, la
part de la population active a augmenté à l’échelle mondiale, et
avec elle les revenus. Les données empiriques montrent que le
Sources : Zürcher Kantonalbank, Thomson Reuters
Graphique 2 : Prix des actifs en Suisse
(indexé, jan. 2009 = 100)
80
100
120
140
160
180
2009 2011 2013 2015 2017
Swiss Market Index (SMI) Swiss Bond Index (AAA-BBB)
Swiss Real Estate Index
Sources : Zürcher Kantonalbank, Thomson Reuters
Graphique 1 : Ination et masses monétaire
de la Suisse
85
90
95
100
105
0
100
200
300
400
500
600
00 02 04 06 08 10 12 14 16
Base monétaire (mia de CHF)
Indice des prix à la consommation (déc. 2015 = 100),
échelle de droite
www.bekb.ch I Marchés financiers I 28 février 2017 3
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taux dépargne a beaucoup crû. Encore faible au début de la vie
active, il progresse avec les années et devient insigniant au
grand âge ; il arrive même quil cède la place à la désépargne
(hypothèse du cycle de vie). Tant que la vie active est prolongée
dans une société vieillissante, la propension à épargner reste éle-
vée. En revanche, si l’État social prend davantage de poids et que
le revenu se maintient même à la sortie de la vie active, cette so-
ciété vieillissante peut être à l’origine dune certaine pression in-
ationniste, et pas seulement sur les biens et les services de santé.
La politique budgétaire à même de relancer
l’inflation ?
La politique monétaire menée ces dernières années nest pas par-
venue à faire passer lination à 2 %, le niveau souhaité par bon
nombre de pays. Des voix se sont donc élevées, en particulier lors
du sommet du G20 en septembre2016, appelant de leurs vœux
une politique budgétaire. Lobjectif est de relancer lination en
agissant sur linvestissement et le marché du travail. Si le nou-
veau président américain met en œuvre le plan d’infrastructures
quil a annoncé pendant sa campagne présidentielle, la politique
budgétaire devrait donner un coup de pouce à lination aux
États-Unis, forçant ainsi la Réserve fédérale à agir. Les choses se
présentent différemment de ce côté-ci de lAtlantique. Même si
les critères de Maastricht ne sont plus sacrosaints, nous pensons
que le potentiel dination généré par une politique budgétaire
reste limité, en raison des nombreux obstacles politiques. En gé-
néral, les plans dinvestissement public ont des effets ination-
nistes quand la demande quils engendrent est nettement supé-
rieure aux gains de productivité. Une telle évolution nest pas
exclue dun point de vue structurel, comme mentionné plus haut.
À supposer que lÉtat social se développe et que ladaptation de
lâge de la retraite soit encore retardée, nous ne sommes plus à
labri dune poussée inationniste. Ce risque peut être évité à
condition d’augmenter la population active par des mesures ci-
blées an que le rapport entre les consommateurs qui travaillent
et ceux qui ne travaillent plus évolue en faveur des premiers.
Conclusion : pas encore mais…
Il était évident que lassouplissement monétaire voulu par les
banques centrales nirait par faire ressurgir la question de lina-
tion. La sous-utilisation des facteurs de production dans la plu-
part des pays industrialisés– surtout en Europe– représente ce-
pendant un obstacle à une relance des prix soutenue par la
conjoncture. Selon nous, lination ne constituera pas un pro-
blème en2017. Il nen demeure pas moins que le rôle toujours
plus important quentendent faire jouer à lÉtat de nombreuses
couches de la population et les bouleversements structurels sont
un terreau favorable à lination. Que les écarts de production des
pays occidentaux se résorbent rapidement jusquà devenir positifs
et lination reviendra à lordre du jour, aussi pour les banques
nationales.
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