C’est au début des années 1970 que les tous premiers travaux de comptabilité
environnementale apparaissent ; en comptabilité nationale, les Américains Nordhaus et
Tobin avec leur ouvrage « Is growth obsolete ? ( la croissance est-elle obsolete ? » (1971)
marquent le point de départ d’une série de tentatives de réforme des indicateurs du PIB
(Produit intérieur Brut) ; en comptabilité d’entreprise, le Suisse Müller-Wenk avec son
essai « Ökologische Buchhaltung, eine Einführung » (Comptabilité écologique, une
introduction), publié à St Gallen en 1972, peut être considéré comme le pionnier de la
littérature mondiale en ce domaine. Cette période des années 1970 est, on le sait, (déjà)
marquée par une réflexion sur les limites de la croissance (c’est le titre du rapport « dit
Meadows » de 1972 du Club de Rome) et la nécessité d’une meilleure prise en compte du
capital humain dans l’entreprise.
Par la suite, la littérature en comptabilité nationale environnementale restera dominée par
les publications de l’école américaine (voir notamment celles de Cobb and Cobb sur « The
Green National Product (le produit national vert)» et de Cobb, Halstead and Rowe sur le
GPI (Guenuine progress Indicator), malgré certaines percées européennes méconnues
(voir infra). Par contre, la littérature en comptabilité d’entreprise environnementale se
développera plutôt en Europe (et tout particulièrement en Europe continentale) avec,
notamment, les publications des Français Labouze, Christophe, Antheaume, du Suisse
Schaltegger et des Anglais Gray et Bebbington .Il faut toutefois souligner qu’une littérature
très importante a également émergé au Japon et aux Indes mais la barrière de la langue
joue un rôle dissuasif.
En dépit de ces publications, la littérature en ce domaine reste pauvre. Pauvre
quantitativement, mais riche intellectuellement : les rares ouvrages qui traitent de la
question témoignent d’un foisonnement d’idées révélateur d’une matière en pleine
gestation. Il est d’ailleurs parfois difficile de s’y retrouver dans la « jungle » des
comptabilités environnementales ne serait-ce sans doute que parce que le concept
d’environnement n’est pas immédiat ( Prieur , 2004, p. 6) et que le traitement de ce
nouveau champ comptable pose de redoutables problèmes. Pour essayer d’y voir un peu
plus clair, nous proposons une classification- type des comptabilités environnementales
(figure 1-ci après), qui nous servira de trame pour exposer la diversité des solutions
proposées. Elle est basée sur l’utilisation de 7 critères principaux permettant de juger la
nature d’un système d’information environnementale. La présentation de ces critères
constituera la première partie de cet article ; la seconde sera dévolue à l’examen de
quelques comptabilités environnementales particulièrement intéressantes.
I – Critères de classification et typologie des comptabilités environnementales
Les sept critères proposés sont le sens de la relation avec l’environnement (1), la
dimension de l’environnement (2), le mode de conservation du capital (3), la dimension
spatiale de l’information (4), le degré de détail des informations (5), le type de valorisation
des données (6) et le concept de résultat (7).
1.1. Le sens de la relation avec l’environnement
Toute comptabilité est liée à un point de vue d’un acteur dominant qui impose sa vision
propre. On peut, avec Schaltegger (et alii) distinguer deux visions fondamentalement
différentes de cette comptabilité : une vision « Extérieur–Intérieur » et une vision
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