Particularités cliniques et classification des troubles de la conduite

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Neuropsychiatrie de l’enfance et de l’adolescence 60 (2012) 419–428
Cas clinique
Particularités cliniques et classification des troubles de la conduite
alimentaire chez les enfants âgés entre huit et 13 ans : où en sommes-nous ?
Clinical features and classification of eating disorders in children between 8 and 13 years of age:
Where are we?
D. Meilleur
Département de psychologie, université de Montréal, CP 6128 succursale centre-ville, Montréal, Québec, H3C 3J7, Canada
Résumé
La présence de troubles de la conduite alimentaire chez les adultes et les adolescent(e)s est reconnue depuis longtemps ; leur identification
chez les enfants de huit à 13 ans est plus récente. L’apparition de problèmes alimentaires chez ce groupe d’âge a été notée par des cliniciens et
chercheurs depuis quelques années [3,5,12–14]. Certains auteurs ont approfondi leurs recherches auprès de ces enfants afin de mieux documenter
leurs présentations cliniques. Ils en sont arrivés à formuler une classification spécifique pour cette tranche d’âge, qui diffère de celles proposées
pour les nourrissons et les jeunes enfants, et pour les adolescentes et les adultes. L’objectif de cet article est de présenter une revue de la littérature
sur les troubles alimentaires chez les enfants de huit à 13 ans et d’exposer la proposition de classification de Bryant-Waugh et Lask [4] pour ce
groupe d’âge, en illustrant chacune des catégories suggérées par une brève vignette clinique. Dans la dernière partie, un point de vue critique est
formulé quant aux catégories proposées, ainsi que des suggestions pour des recherches futures.
© 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
Mots clés : Troubles de la conduite alimentaire ; Anorexie ; Boulimie ; Troubles alimentaires non spécifiés ; Évitement alimentaire ; Enfants ; Pré-pubère ;
Classification
Abstract
The presence of eating disorders in adults and adolescents has long been recognized; their identification in children aged between 8 and 13 years
is more recent. The emergence of eating problems among this age group is noted by clinicians and researchers [3,5,12–14]. Some authors have
deepened their research with those clients to better document the clinical presentation. They have come to formulate a specific classification for this
age group, which differs on some points from those proposed for infants and toddlers, and for adolescents and adults. The aim of this paper is to
present a review of the literature on eating disorders in children aged between 8 and 13 and to expose the proposed classification of Bryant-Waugh
and Lask [4] for this age group. Each of the categories suggested will be illustrated by a brief clinical vignette. In the last part of the article, a
critical point of view is expressed regarding the proposed categories and also suggestions for future research.
© 2012 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
Keywords: Eating disorders; Anorexia; Bulimia; Ednos; Food avoidance; Children; Pre-pubertal; Classification
1. Introduction
La classification des troubles de la conduite alimentaire
du DSM-IV-TR met de l’avant trois catégories fréquemment
rencontrées : l’anorexie mentale, la boulimie et les troubles alimentaires non spécifiés.
Adresse e-mail : [email protected]
0222-9617/$ – see front matter © 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.neurenf.2012.03.005
L’anorexie mentale est caractérisée par une perte de poids ou
une absence de gain de poids qui maintient la personne à un poids
inférieur à ce qui est attendu pour son âge et sa taille ; une peur
de prendre du poids ou de devenir grosse ; une altération dans
la perception de son image corporelle et de son poids ; et la présence d’une aménorrhée depuis trois mois [1]. L’anorexie peut
être de type restrictif (définie par l’absence de boulimie et/ou de
vomissements) ou de type avec crise de boulimie/vomissements
avec ou sans prise de purgatifs. La prévalence de l’anorexie varie
entre 0,3 % et 3,7 % [2].
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La boulimie, quant à elle, se caractérise par la présence
d’épisodes d’ingestion d’une grande quantité d’aliments dans un
temps limité pendant lequel la personne expérimente un sentiment de perte de contrôle sur elle-même. Cette personne présente
des distorsions de son image corporelle et de son poids. Elle
adopte souvent des comportements compensatoires à ses boulimies qui ont pour but de perdre du poids. Ces comportements
peuvent être des vomissements provoqués, des périodes de restrictions alimentaires et/ou d’activités physiques intenses, et/ou
l’utilisation de laxatifs et de diurétiques [1]. La prévalence de la
boulimie oscille entre 1 % et 4,2 % [1], elle est rarement trouvée
chez les enfants de 13 ans et moins [3,4].
Les troubles alimentaires non spécifiés communément appelés « Trouble alimentaire non spécifié » ([TANS] ou EDNOS
en anglais pour Eating Disorder Not Otherwise Specified) [1]
regroupent une diversité de syndromes qui ne rencontrent pas
tous les critères diagnostiques requis pour l’anorexie ou la boulimie. Cette dernière catégorie est largement utilisée auprès
des adolescents et plus particulièrement des enfants chez qui,
fréquemment, les tableaux cliniques ne satisfont pas tous les
critères diagnostiques [5–7]. Les principaux critères qui sont
souvent absents ou moindres chez les enfants sont : l’arrêt
des menstruations, car plusieurs sont pré-pubères ; la perte
de poids ; la fréquence des épisodes de boulimies. Certains
auteurs avancent que les difficultés alimentaires présentées par
les enfants et les préadolescents sont hétérogènes et qu’elles
diffèreraient de celles manifestées par les adolescents, ce qui
expliquerait la fréquence élevée du diagnostic de TANS chez
les plus jeunes : on le retrouve dans 40 à 60 % des cas [7–10].
Toutefoisn cette nouvelle catégorie de trouble non spécifié ne
fait pas l’unanimité parmi les auteurs. Pour certains, la catégorie
TANS permet d’identifier la présence d’un problème alimentaire chez un enfant et de lui offrir une intervention appropriée ;
pour d’autres cette catégorie regroupe un ensemble très vaste
de tableaux cliniques hétérogènes, ce qui nuit en quelque sorte
à son utilité. Des chercheurs ont donc proposé une classification des troubles alimentaires chez les enfants qui suggère de
nouvelles catégories nosographiques permettant de classer une
partie des tableaux cliniques présents dans la catégorie TANS.
On peut s’interroger sur l’utilité d’une telle proposition et des
implications sur la conceptualisation du trouble.
L’objectif de cet article est d’exposer l’état des connaissances concernant les troubles alimentaires chez les enfants âgés
de huit à 13 ans en présentant certaines données sur leur nature
recueillies dans la littérature scientifique sur le sujet. La nouvelle classification nosographique proposée par Bryant-Waugh
et Lask [4] sera présentée accompagnée d’une vignette clinique brève pour chacune des catégories suggérées. Le choix
de présenter cette classification spécifique repose sur la pertinence du groupe d’âge auquel elle fait référence et dont il
est question dans cet article. Par ailleurs, Chatoor [11] a aussi
effectué d’importants travaux sur les troubles de l’alimentation
chez les enfants et proposé de nouvelles catégories. Ces travaux
s’intéressent principalement aux troubles alimentaires chez les
nourrissons et les enfants durant la première et deuxième enfance
(âge inférieur à six ans), c’est pourquoi la classification de cette
auteure ne sera pas présentée.
Le but de cet article est, d’une part, de mieux faire connaître
les particularités des diverses présentations cliniques des enfants
afin de favoriser leur dépistage le plus précocement possible et,
d’autre part, d’exposer la proposition de classification qui a fait
l’objet de peu de publications dans les écrits francophones. Nous
terminerons en adoptant un point de vue critique sur la situation
et en suggérant divers axes de recherches pour le futur.
2. Troubles de la conduite alimentaire chez les enfants
Les auteurs sont nombreux à avoir noté la présence de
troubles de la conduite alimentaire chez les enfants [12–15].
La terminologie est variable en ce qui concerne ce groupe
d’âge. Certains parlent de « trouble de l’alimentation à apparition précoce » [16]. D’autres préfèrent l’appellation « trouble
de la conduite alimentaire à début durant l’enfance » marquant
la différence avec les troubles qui apparaissent soit durant la
première enfance, soit à l’adolescence et à l’âge adulte [4]. Un
troisième groupe parle de « trouble alimentaire chez l’enfant
ou l’adolescent pré-pubère » caractérisant ainsi le moment
d’apparition en fonction de l’avènement de la puberté [14].
Aucune de ces appellations ne semble faire l’unanimité parmi les
auteurs, ni éviter les malentendus quant au groupe d’âge ciblé.
Une entente générale semble se dégager autour de la période
d’âge chronologique visée, soit les enfants de sept à 14 ans. Toutefois, le consensus apparaît moins clair quant aux deux bornes
de cette tranche d’âge : certains réfutent la présence de trouble de
la conduite alimentaire chez les moins de huit ans [17] alors que
pour d’autres, à partir de 13 ans, les tableaux cliniques présentés
par les adolescents s’apparentent aux catégories diagnostiques
classiques du DSM-IV-TR [6]. Sans que cela fasse l’unanimité
parmi les auteurs et les cliniciens, on considère généralement un
trouble de la conduite alimentaire d’apparition précoce lorsqu’il
survient chez des enfants de huit à 13 ans. En pratique, les jeunes
de 12 à 13 ans peuvent parfois présenter un tableau clinique
typique de celui observé chez des adolescents.
3. Caractéristiques particulières associées aux tableaux
cliniques des enfants
Des études rapportent des caractéristiques particulières dans
la présentation clinique des troubles de la conduite alimentaire
chez les enfants de huit à 13 ans. Des auteurs notent que le
refus de s’alimenter chez les plus jeunes est souvent accompagné d’un refus de prendre des liquides, peu importe leur
nature [14,18,19]. Ce comportement, peu observé chez les personnes souffrant d’anorexie à l’adolescence ou à l’âge adulte,
peut entraîner une dénutrition et une déshydratation rapide chez
les plus jeunes [15,20]. Le taux de tissus adipeux souvent moins
élevé chez les enfants et adolescents pré-pubères favorise une
perte de poids plus rapide et des conséquences plus graves
pour le corps ce qui occasionnerait des hospitalisations plus fréquentes pour ce groupe d’âge [7,20–22]. L’amaigrissement ou un
apport alimentaire insuffisant pendant une longue période peut
occasionner des conséquences et des complications médicales
importantes, tel un arrêt de croissance transitoire ou permanent [15,20,23–25]. Une autre caractéristique notée chez les
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plus jeunes par plusieurs auteurs est la présence moindre, parfois même l’absence, de distorsion de l’image corporelle. Les
enfants et les préadolescents verbalisent peu de distorsion et
d’insatisfaction par rapport à leur image corporelle. Ils reconnaissent plus facilement leur minceur et la nécessité de prendre
du poids et manifestent souvent une plus grande collaboration,
comparativement aux adolescentes, à modifier leurs habitudes
alimentaires dans le but de prendre du poids [15,20]. Le motif
fréquemment invoqué par les enfants pour expliquer leur perte
de poids est un « désir d’être en santé » ou de « manger sainement » plutôt qu’une préoccupation pour leur poids (désir de
perdre du poids) ou leur image corporelle (peur d’être grosse)
[20]. La question reste ouverte à savoir si les plus jeunes n’ont
vraiment que peu ou pas de distorsion de leur image corporelle
et/ou s’il est possible qu’ils l’expriment moins ou de manière
différente comparativement aux adolescents. D’autres auteurs
ont aussi noté une faible utilisation de vomissements provoqués
et d’abus de laxatifs comme moyen de contrôle de poids chez
les enfants [14,20].
Une troisième caractéristique notée chez les plus jeunes est
la représentation masculine plus élevée comparativement aux
adolescents [14,16,20,23,26]. Les études mentionnent des proportions autour de trois filles pour un garçon chez les enfants
âgés de huit à 13 ans [14,23,27] comparativement à des proportions de dix filles pour un garçon à l’adolescence et à l’âge
adulte [1]. Peu d’auteurs se sont penchés sur cette proportion
plus élevée de garçons chez les plus jeunes.
D’autres caractéristiques ont été rapportées par différents
auteurs. La présence de symptômes dépressifs précoces ou
associés à l’anorexie chez les groupes d’enfants à l’étude a
été mentionnée par Bryant-Waugh, et al. [28], Irwin [21] et
Mouren-Siméoni et Bouvard [14], de même que la présence
de gestes suicidaires [19]. Les symptômes phobiques et obsessionnels sont aussi notés dans quelques études [14,29]. Certains
avancent qu’un plus grand nombre de ces enfants et préadolescents ont présenté un trouble de l’alimentation durant l’enfance
[19,30,31] questionnant ainsi l’étiologie première du trouble.
Et finalement de nombreux écrits [14,19,23,28,32–35] mettent
de l’avant l’identification d’événements déclencheurs au problème alimentaire chez ce groupe d’âge (par exemple : facteur
de stress psychosocial, moqueries provenant de l’entourage sur
leur poids, problème de santé d’un parent), ce qui est moins
souvent noté chez les groupes d’adolescents et d’adultes.
Parmi les autres particularités trouvées chez les enfants et
les préadolescents notons des caractéristiques parentales qui
laissent entrevoir un plus haut taux de problèmes anxiodépressifs
chez ces derniers comparativement aux parents d’adolescents
avec les mêmes difficultés [14,19] ; une présence plus importante
de dysfonctionnement familial [36] et de problèmes alimentaires chez les mères [14]. Quant au devenir de ces enfants et
préadolescents, les études font état de résultats contradictoires.
Pour certains auteurs, l’évolution serait plutôt peu favorable
ou défavorable lorsque l’anorexie survient avant la puberté
[14,23,26,37–39] alors que d’autres avancent que le pronostic
serait meilleur si l’âge d’apparition est précoce [40].
Les conséquences importantes qui peuvent être transitoires
ou permanentes sur la santé physique appuient la pertinence
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de pouvoir identifier le plus rapidement possible la présence
d’un trouble alimentaire chez les enfants. Malheureusement, les
instruments de dépistage et diagnostic pour ce groupe d’âge sont
peu nombreux et leur validité est contestée étant donné l’absence
de consensus sur les critères diagnostiques et sur la terminologie
à utiliser [25].
4. Défis diagnostiques
Plusieurs variables associées aux enfants participent aux défis
de poser un diagnostic de trouble de la conduite alimentaire chez
ces derniers. D’abord, ce diagnostic est moins fréquemment
soupçonné chez les enfants (de huit à 13 ans) car la présentation clinique est souvent atypique [20]. Elle est fréquemment
accompagnée de plaintes somatiques qui orientent souvent les
intervenants vers des investigations somatiques au départ, occasionnant un délai avant l’identification du problème [19,38].
Un autre facteur contributif à la difficulté d’identifier le problème est lié à la capacité restreinte des enfants à exprimer et
décrire leurs pensées, leurs sentiments et leurs comportements de
manière précise et spontanée [7,20]. Cette particularité est principalement liée à l’étape développementale aux plans cognitif et
affectif des enfants de cet âge. L’évaluation peut ainsi prendre
plus de temps, faire appel à diverses activités médiatrices,
s’effectuer sur une plus longue période et même, dans certains
cas, laisser place à une certaine ambiguïté tant au niveau comportemental (symptômes) que de la compréhension psychique. Pour
cette raison, il est important d’inclure les parents qui peuvent rapporter leurs observations et proposer leur compréhension des
comportements et attitudes de leur enfant afin d’aider à poser
le diagnostic et tenter d’y faire sens [24,41]. La consultation
avec les parents permet aussi d’apprécier les relations au sein
des membres de la famille, ainsi que leurs réactions aux difficultés de l’enfant. Ces éléments sont souvent précieux pour
l’élaboration et la mise en place du projet thérapeutique.
5. Proposition de classification
La question entourant les critères diagnostiques pour les
troubles alimentaires chez les enfants et préadolescents a fait
l’objet de plusieurs écrits particulièrement au cours des dernières années, et ce, souvent par les mêmes auteurs qui ont choisi
d’étudier plus à fond ce sujet [4,10,11,17,42]. Les insatisfactions soulevées par certains cliniciens quant à l’inefficacité des
systèmes de classification reconnus internationalement (DSMIV-TR et CIM-10) pour identifier les problèmes alimentaires
chez les enfants ont incité ces auteurs à proposer une nouvelle
classification [15,24,27]. Partant d’observations et de descriptions de cas cliniques, ces derniers ont ainsi proposé de nouvelles
catégories spécifiquement pour les enfants et les préadolescents
âgés de huit à 13 ans.
Ces catégories, connues par certains sous le nom d’ensemble
de critères du Great Ormond Street Hospital (GOS), sont les
suivantes : l’anorexie nerveuse, la boulimie nerveuse, le trouble
d’évitement alimentaire affectif, l’alimentation sélective, les
peurs ou phobies alimentaires spécifiques menant à l’évitement
alimentaire (incluant la dysphagie fonctionnelle), l’alimentation
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restrictive, le refus alimentaire, le syndrome de refus global et
la perte d’appétit secondaire à la dépression [4,24]. Dans les
prochains paragraphes, les différentes catégories seront présentées accompagnées d’une brève vignette clinique pour illustrer
chacune d’elle.
5.1. L’anorexie
Le tableau clinique d’un enfant qui présente un trouble de
la conduite alimentaire de type anorexique est similaire à celui
que l’on retrouve chez l’adolescente. On observe une perte de
poids ou un arrêt de la prise de poids alors que ce dernier
devrait augmenter avec la croissance. Les stratégies de contrôle
de poids les plus fréquemment observées chez les enfants sont :
les comportements de restriction incluant la présence de manies
alimentaires (trier les aliments, les découper en petits morceaux), l’augmentation des exercices physiques et la présence de
vomissements [2]. On trouve rarement l’utilisation de laxatifs.
L’enfant qui présente un trouble de la conduite alimentaire de
type anorexique peut manifester une distorsion de son image corporelle, ainsi que des préoccupations face à son poids et à son
alimentation. Toutefois, ces dernières peuvent être d’intensité
très variable : chez une majorité, elles resteront discrètes, voire
absentes, alors que chez certaines elles pourront être prédominantes. Les motifs invoqués pour perdre du poids sont parfois
similaires à ceux exprimés par les adolescentes soit : la peur de
prendre du poids, la peur de grossir, la crainte d’avoir mal au
ventre, la perte d’appétit [4], ou encore le désir de manger sainement [23]. Les plaintes somatiques et gastriques sont fréquentes
chez ce groupe de même que l’hyperactivité physique et intellectuelle [30]. Bryant-Waugh et Lask [4] avancent que l’âge le
plus précoce pour poser un diagnostic d’anorexie nerveuse chez
l’enfant est de huit ans.
Vignette : « A. est âgée de dix ans et demi au moment de la
première consultation. Son poids est de 33 kg pour une taille
de 1 m 47. Sa mère l’amène en consultation, car son poids est
inférieur de 2 kg à son poids de l’année dernière alors que sa
taille a augmenté de 10 cm. A. fréquente l’école élémentaire où
elle réussit très bien ; elle consacre tous ses temps libres à ses
devoirs et à son étude. Sa socialisation a diminué depuis le déménagement de sa meilleure amie dans une ville éloignée l’année
dernière. Les parents ont observé une diminution progressive de
la prise de certains aliments chez leur fille au cours des derniers
six mois. Elle aurait commencé par couper les sucres (desserts
et friandises) et les gras, puis les collations et progressivement la
quantité de ses portions aux repas. A. a toujours pratiqué certains
sports (danse, patin artistique) et mentionne un intérêt pour la
saine alimentation. Depuis six mois, elle a augmenté ses activités sportives en suivant un cours de danse supplémentaire et elle
fait quotidiennement des exercices physiques (redressements et
trampoline) chez elle après l’école. A. dit ne pas vouloir prendre
de poids, elle verbalise une distorsion de son image corporelle
(se trouve grosse) et craint de manger normalement. Parmi les
changements survenus dans l’entourage familial, le père mentionne avoir modifié son alimentation il y a un peu moins d’un
an sous les conseils de son médecin. Il s’interroge sur l’influence
possible de cette modification sur sa fille. Par ailleurs, madame
mentionne avoir toujours porté une attention particulière à la
saine alimentation au sein de sa famille ».
5.2. Boulimie
La boulimie, lorsqu’elle est présente chez les enfants,
regroupe les principales caractéristiques décrites précédemment
soit des épisodes d’absorption de quantités importantes de nourriture qui peuvent être suivis de vomissements et/ou l’utilisation
de laxatifs. La boulimie est rarement observée chez les enfants et
lorsqu’elle survient, on note que les principaux symptômes qui
lui sont associés sont moindres soit : les épisodes de boulimies
et de vomissements sont moins fréquents de même que la prise
de laxatifs ou de diurétiques comparativement aux adolescents
et le poids est souvent stable [4,43]. La fréquence moindre des
comportements de boulimies et de vomissements, ainsi que le
fait qu’elle est peu souvent soupçonnée chez les enfants jouent
possiblement un rôle sur le faible nombre de cas répertoriés. Certains auteurs avancent que la boulimie se développerait plus tard
durant l’adolescence, ce qui expliquerait le faible taux rapporté
durant l’enfance [4]. De plus, les épisodes de fringales alimentaires transitoires ou récurrents (qui ne rencontrent pas tous les
critères du diagnostic de boulimie) peuvent être assez fréquents
durant l’enfance. Ils pourront soit disparaître à l’adolescence,
soit être précurseurs d’un trouble alimentaire plus chronique.
Ces comportements sont souvent cachés et passent inaperçus
auprès de l’entourage, particulièrement lorsqu’ils sont transitoires.
Vignette : « B. est âgée de dix ans et demi ; elle consulte avec
sa mère pour des difficultés alimentaires. B. expérimente des
épisodes de fringales alimentaires pendant lesquels elle mange
principalement des sucreries (biscuits, crème glacée, gâteaux).
Les épisodes surviennent souvent après l’école, moment où la
jeune se retrouve seule à la maison. B. dit se sentir coupable et
mal à l’aise suite à ces comportements qu’elle tente d’annuler par
la suite en faisant des exercices physiques intensifs. Elle mentionne avoir déjà vomi à trois reprises au cours des deux derniers
mois suite à l’ingestion d’une trop grande quantité d’aliments.
Les épisodes de boulimie semblent survenir approximativement
une fois par semaine. B. affiche un poids qui se situe au 50e
percentile pour son âge et sa taille. Elle verbalise une insatisfaction de son image corporelle et des préoccupations face à
l‘alimentation et son poids. Elle ne souhaite pas prendre de poids.
La mère mentionne que sa fille a toujours eu un léger excès de
poids qu’elle a réussi à contrôler, au cours des années, avec la
mise en place d’habitudes alimentaires familiales régulières ».
5.3. Trouble d’évitement alimentaire émotionnel ou
d’évitement alimentaire affectif
Les enfants qui présentent un trouble d’évitement alimentaire
émotionnel ou d’évitement alimentaire affectif (Food Avoidance
Emotional Disorder [FAED]) manifestent des comportements
de restriction alimentaire, mais à un degré moindre que celui
observé chez les anorexiques. Ils ont une perte de poids, mais
n’expérimentent pas de préoccupation excessive ni de distorsion de leur image corporelle. Ces enfants reconnaissent qu’ils
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sont en dessous de leur poids santé ; souvent ils verbalisent un
désir de prendre du poids, mais sont incapables d’y arriver par
eux-mêmes. Ces caractéristiques les distinguent des enfants qui
présentent un trouble de la conduite alimentaire de type anorexique où la négation du problème est souvent présente, de
même que l’absence du désir et/ou le refus de prendre du poids.
Les motifs invoqués chez les enfants qui évitent d’ingérer certains aliments sont soit : la crainte « d’être malade » ou d’avoir
« mal au ventre », ou « l’absence d’appétit » [4,18,24,26]. Pour
Lask et Bryant-Waugh [4], le trouble affectif est central dans le
problème présenté par ces enfants et l’évitement alimentaire en
est une manifestation comportementale. Goëb et al. [18] et Higgs
et al. [26] insistent sur la mixité du tableau clinique présenté
par ces enfants, qui regroupe les symptômes alimentaires mentionnés précédemment et des symptômes associés à un trouble
affectif qui peut être de nature variée soit : une anxiété généralisée, des obsessions ou des phobies, ou la présence d’une humeur
dépressive. Le tableau clinique peut être clair à la consultation
initiale et permettre un diagnostic franc avéré, mais il arrive
aussi qu’il faille suivre l’évolution de la jeune pour pouvoir le
préciser.
Vignette : « C. a dix ans au moment de la première consultation. Elle a arrêté de manger normalement suite à un conflit
survenu avec une bonne amie à l’école. C. est enfant unique ; elle
socialise peu hormis les activités parascolaires qu’elle pratique
à l’école. Elle dit apprécier passer du temps seule et ne jamais
s’ennuyer. C. ne veut pas manger certains aliments, car elle dit
avoir peur d’être « malade » ou de « vomir ». Elle a quelques
manies alimentaires (manger ses aliments dans un ordre précis,
disposition particulière des aliments dans l’assiette) et d’autres
non-alimentaires (se gratte certaines parties du corps jusqu’à
avoir des plaies, se ronge les ongles, a des rituels au lever et le
soir au coucher). Elle a perdu 4 kg en six mois ; son poids actuel
se situe au 30e percentile pour son âge et sa taille. Elle reconnaît
qu’il lui faut prendre du poids, mais se dit incapable de le faire par
elle-même. Elle rapporte avoir essayé d’augmenter ses apports
au cours des derniers mois, sans succès. Son alimentation est
variée et régulière, mais les quantités ingérées sont restreintes. À
chaque fois qu’elle a tenté d’augmenter ses apports avec l’aide de
ses parents, des maux de ventre sont apparus, occasionnant une
augmentation de ses peurs face à l’alimentation. C. exprime sa
tristesse devant l’inquiétude qu’elle cause à ses parents et face à
son incapacité de réussir à prendre du poids seule. À l’anamnèse,
les parents rapportent la présence de comportements anxieux
chez leur fille pendant la petite enfance. Parmi les antécédents
familiaux, on note un trouble de l’humeur chez un des parents,
ainsi que des conflits conjugaux importants et récurrents depuis
plusieurs années ».
à cause de leur choix alimentaire restreint. Il n’est pas rare, que
cette situation soit présente depuis plusieurs années, voire depuis
la petite enfance chez certains. Ces enfants manifestent souvent
de grandes résistances à essayer de nouveaux aliments, et cela,
malgré plusieurs tentatives de la part de leurs parents. Ces résistances peuvent s’exprimer par des nausées, la peur de vomir ou
de s’étouffer [24]. Plusieurs d’entre eux expriment aussi une
préférence pour les aliments mous, sans texture. Malgré cette
alimentation sélective, la plupart de ces enfants n’affichent pas
de perte de poids ni de problème de croissance, laissant supposé qu’ils ont suffisamment d’apports alimentaires (à l’heure
des repas ou au moment des collations) pour maintenir leur
croissance staturopondérale. Cette restriction quant au choix
des aliments occasionne chez plusieurs un évitement des situations sociales où ils ne peuvent contrôler leur repas ; autrement
dit, ils mangent rarement à l’extérieur de la maison. La relation parent–enfant peut s’en trouver teintée négativement dans
plusieurs cas [24].
Vignette : « D. est âgée de neuf ans et neuf mois. Ses parents
l’amènent en consultation, car elle n’a pas pris de poids depuis
un an malgré un accroissement de sa taille. Son poids se situe
autour du 45e percentile pour son âge et sa taille. D. est décrite
par ses parents comme une enfant capricieuse au plan alimentaire, et ce, depuis qu’elle est toute petite. La mère dit avoir
tenté d’introduire de nouveaux aliments dans l’alimentation de
sa fille à différentes périodes depuis sa naissance, mais sans
grand succès. Les réactions de cette dernière ont été soit de
refuser l’assiette, soit de recracher la nourriture ou de se retirer
dans sa chambre en pleurant. Les parents disent s’être adaptés aux caprices de D., en lui apprêtant toujours les mêmes
aliments, qui sont au nombre d’environ une douzaine. Depuis
environ un an, la mère rapporte une diminution progressive
des aliments acceptés par sa fille, si bien que maintenant le
registre alimentaire n’est plus que d’environ cinq aliments. D. a
deux amies qu’elle fréquente principalement à l’école. Elle n’est
jamais allée chez ces dernières et n’a jamais pris de repas à
l’extérieur de la maison (vient manger à la maison le midi).
Les parents rapportent des conflits récurrents avec leur fille à
l’heure des repas, et ce, depuis plusieurs années. Ces conflits
se sont exacerbés au cours des deux dernières années, suite à
l’adoption de caprices alimentaires par leur fille cadette, maintenant âgée de cinq ans. Les parents rapportent des tensions
entre eux quant à l’attitude à adopter envers D. par rapport
à ses comportements alimentaires. Par ailleurs, madame rapporte avoir vécu une période dépressive suite à la naissance de
D. Elle mentionne aussi des difficultés conjugales depuis longtemps, avec une séparation temporaire des parents il y a deux
ans ».
5.4. Alimentation sélective
5.5. Peur ou phobie alimentaire spécifique
L’alimentation sélective se caractérise par une consommation très restreinte d’aliments, environ quatre à cinq seulement,
réduisant le registre alimentaire potentiel pouvant être offert à
l’enfant par ses parents. Les enfants qui présentent ce type de
trouble alimentaire sont souvent qualifiés de « petits mangeurs »
ou de « mangeurs difficiles » (« picky eaters ») par l’entourage
Certains enfants présentent une peur ou une phobie alimentaire spécifique dont la nature peut varier en fonction du stade
développemental où elle survient. Cette catégorie se distingue
particulièrement de l’évitement alimentaire émotionnel par la
présence fréquente d’éléments anxieux à l’avant-plan, ainsi que
d’un événement déclencheur associé. Les phobies peuvent ainsi
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se manifester par une peur de vomir, une peur d’être contaminé ou empoisonné, ou une peur des conséquences associées à
de l’hypercholestérolémie [24]. Cette dernière peur, très spécifique et plus rare, est observée principalement chez des enfants
dont un parent a eu un problème de santé important associé
à son taux de cholestérol, dans les mois ou années qui ont
précédé l’apparition des préoccupations alimentaires. Certains
enfants vont manifester une peur de déglutir ou d’avaler, ou
une peur de s’étouffer, c’est ce qu’on appelle une dysphagie fonctionnelle ou phobie de la déglutition [4]. Les enfants
préfèreront alors des aliments avec certaines textures spécifiques prétextant qu’ils sont plus faciles à avaler. Comme on
peut le constater, ces phobies peuvent être très variées. Elles
surviennent fréquemment de manière concomitante avec un problème d’anxiété généralisée et sont précédées d’événements
déclencheurs identifiables dans plusieurs cas [4,14]. Il est à noter
que dans la majorité des cas, avant l’événement déclencheur,
l’enfant s’alimentait normalement [24]. On observe fréquemment chez l’enfant des craintes reliées à la préparation de la
nourriture qui sont en lien avec les peurs présentes. Dans ces
tableaux cliniques, la composante anxieuse peut apparaître à
des degrés variés ; ces derniers vont influencer l’intensité des
phobies et la réponse de l’enfant aux interventions parentales
ou professionnelles. Les habitudes alimentaires de ces enfants
sont souvent décrites comme rigides, occasionnant des conflits
avec leurs parents au moment des repas. Ces difficultés ont
souvent été associées aux troubles obsessifs-compulsifs et sont
peut-être, chez certaines, une manifestation particulière de ce
trouble.
Vignette : « E. est âgée de 11 ans et fréquente l’école primaire. Elle est la deuxième d’une famille de trois enfants. Elle
consulte accompagnée de ses parents pour une perte de poids de
8 kg survenue au cours des six derniers mois, soit depuis l’été.
E. souffre de maux de ventre depuis qu’elle est petite. Elle se
décrit comme une personne souvent inquiète, perfectionniste et
qui n’aime pas les imprévus. E. souligne que ses maux de ventre
sont plus présents depuis trois ans occasionnant des visites chez
le gastroentérologue, ainsi que de nombreux examens et tests
médicaux qui se sont tous avérés négatifs. L’été dernier E. a
vécu un épisode de fringale alimentaire qui lui a occasionné
un violent mal de ventre et des vomissements ; elle a progressivement diminué ses apports alimentaires depuis ce temps par
crainte que les maux de ventre réapparaissent. Depuis, elle a
développé une phobie face à certains aliments qu’elle refuse de
manger par crainte de vomir ou d’avoir mal au ventre. Elle verbalise aussi une crainte d’attraper des microbes qui pourraient la
rendre malade. C’est pourquoi elle se lave les mains et la bouche
plusieurs fois par jour, surveille étroitement la préparation des
aliments lors des repas et refuse de manger de la nourriture qui
n’est pas préparée par ses parents. Elle ne rapporte aucun désir
de minceur ou de perte de poids, ni de distorsion de l’image
corporelle dans le passé et dans le présent. Elle se dit d’accord
pour augmenter son poids, mais craint que la reprise d’une alimentation normale n’entraîne chez elle des nausées et des maux
de ventre. Les parents mentionnent la présence d’antécédents
de troubles anxieux et de troubles de dépendances dans la
famille ».
5.6. Alimentation restrictive
L’alimentation restrictive caractérise les enfants qui mangent
peu et qui manifestent peu d’intérêt et de plaisir envers la nourriture et l’activité de s’alimenter [4]. Ces enfants ont souvent des
habitudes alimentaires régulières et une alimentation suffisamment variée, mais elle se distingue par l’ingestion de petites
quantités. Les parents vont souvent dire d’eux qu’ils ont un
« petit appétit ». La croissance se déroule chez la plupart d’entre
eux normalement, bien qu’ils aient tendance à être minces. Ces
enfants ne présentent pas de préoccupations autour de l’image
corporelle, de leur poids ou de la nourriture. Ils connaissent parfois une perte de poids à l’approche de la puberté, période où les
dépenses énergétiques augmentent et leurs apports alimentaires
sont alors insuffisants [4] ; ils peuvent ainsi se retrouver en dessous de leur poids santé. Une fois le problème identifié par un
professionnel, la plupart de ces enfants écoutent et appliquent les
recommandations d’augmenter les apports nutritionnels émises,
ce qui généralement corrige la situation. La collaboration des
parents à la mise en place des recommandations participe grandement aux changements de comportements.
Vignette : « F., âgée de 11 ans, est petite et menue pour son
âge. Elle est décrite par ses parents comme une enfant facile
qui connaît un développement physique et affectif normal. Ils
mentionnent toutefois qu’elle a toujours été une « petite mangeuse ». Son alimentation est variée, mais les quantités ingérées
sont restreintes, et ce, depuis sa naissance. Les parents disent
avoir eu quelques inquiétudes à ce sujet lorsqu’elle était bébé,
mais comme son développement a toujours été régulier, ces
dernières se sont estompées. Au cours des deniers six mois,
la taille de F. a augmenté de 8 cm et son poids est demeuré
stable. F. s’est plainte auprès de ses parents d’être souvent fatiguée. Ses derniers l’ont amené en consultation chez le pédiatre
qui a recommandé une augmentation des apports alimentaires
avec ajouts de suppléments au besoin. F. est d’accord avec ce
nouveau plan alimentaire, pourvu qu’elle puisse répartir les portions sur toute la journée compte tenu de sa difficulté à ingérer
de grandes quantités alimentaires aux repas. Le père est plutôt
retiré et s’implique peu auprès de sa fille ».
5.7. Refus alimentaires
Les refus alimentaires consistent en un comportement de
refus de s’alimenter chez l’enfant qui peut être épisodique, intermittent ou situationnel. L’enfant refuse de prendre son repas soit
de manière partielle ou globale. La nature des aliments refusés
peut être très variable d’un enfant à l’autre, et d’un épisode de
refus à un autre. Les enfants qui présentent ce type de comportement n’expriment pas de distorsion face à leur image corporelle
ou à leur poids au moment où l’épisode survient, ni antérieurement à ce comportement. Le refus alimentaire est souvent
associé à d’autres comportements d’opposition tels que négocier
les aliments servis ou refuser de manger à l’heure des repas, mais
prendre des collations immédiatement après [12,24]. L’impact
sur le poids et la santé peut être très variable dépendamment
de la fréquence et de l’intensité des comportements adoptés
par l’enfant. Dans une forme plus sévère et plus rare, certains
D. Meilleur / Neuropsychiatrie de l’enfance et de l’adolescence 60 (2012) 419–428
enfants et préadolescents peuvent généraliser leur comportement de refus alimentaire au refus de boire, de marcher, de
parler ou de s’occuper d’eux-mêmes ; ce tableau clinique est
alors appelé syndrome de refus global (« pervasive refusal syndrome ») [12,24,44–46]. Lask et al. [44] ont été les premiers à
décrire ce trouble. La conduite radicale de ces enfants entraîne,
bien souvent, des conséquences rapides sur la santé et oblige une
intervention dans un bref délai. Ces jeunes manifestent habituellement beaucoup de résistances face à toute forme d’aide, ce qui
rend l’intervention d’autant plus difficile. La relation avec les
parents et avec les pairs s’en trouve souvent influencée négativement. La conduite massive et radicale suggère, dans bien des
cas, la présence ou l’implication soit d’éléments de personnalité
ou relationnels.
Vignette : « G. est âgée de dix ans. Elle vient à la consultation
accompagnée de sa mère. G. ne s’alimente presque plus depuis
trois semaines. Ses apports alimentaires ont diminué progressivement et rapidement depuis six semaines. Actuellement, la
jeune accepte de prendre quelques fruits et légumes qui constituent ses apports alimentaires quotidiens. Elle ne sourit pas, ne
voit plus ses amies, et a arrêté ses activités musicales qu’elle
appréciait grandement. G. dit ne pas manger, car elle n’a pas
faim ; elle a perdu 2 kg en trois semaines. La mère rapporte
des épisodes de refus alimentaires par le passé chez sa fille et
ce, depuis les quatre dernières années. Actuellement, la jeune
répond brièvement aux questions qui lui sont posées et refuse
d’élaborer ses réponses. Il lui arrive de ne pas répondre ; elle se
tourne alors simplement la tête et fixe le plancher. Elle refuse
de parler d’elle ou de sa famille. G. est décrite par sa mère
comme une enfant plutôt facile, docile, mature, peu démonstrative, n’ayant jamais demandé beaucoup d’attention, à part
pour ses épisodes de refus alimentaires transitoires qui semblent
avoir débuté peu de temps après la naissance de son jeune frère.
Interrogée sur la présence d’événements significatifs importants
survenus au cours des derniers mois, la mère mentionne des
disputes récurrentes avec son mari. Ces dernières se sont intensifiées au cours des derniers mois occasionnant des épisodes
de violence verbale et physique entre eux. Elle décrit son mari
comme une personne colérique et impulsive qui aurait un problème de dépendance à l’alcool. Elle mentionne qu’il a déjà
été violent verbalement envers les enfants. Par ailleurs, madame
mentionne avoir eu par le passé des problèmes de dépendance
aux médicaments et vécu plusieurs épisodes dépressifs ».
5.8. Perte d’appétit secondaire à la dépression
Les auteurs proposent une dernière catégorie qu’ils appellent
perte d’appétit secondaire à la dépression. Ils précisent toutefois
que ce problème n’est pas un trouble alimentaire en soi. C’est
pourquoi nous avons choisi de l’exposer que très brièvement.
Dans cette situation, les symptômes associés à la perte d’appétit
ou d’intérêt pour s’alimenter chez l’enfant sont conséquents à un
affect dépressif. Ces enfants ne présentent pas de distorsions et
de préoccupations pour leur poids, leur image corporelle ni pour
la nourriture [13]. Tout en soulignant l’importance de distinguer
la dépression du trouble alimentaire pour orienter l’intervention,
425
les auteurs rapportent que les deux troubles sont souvent fortement intriqués.
6. Discussion
Cette proposition de classification des troubles alimentaires
illustre bien la pluralité des tableaux cliniques observés chez
les enfants et préadolescents, sans toutefois résoudre toutes les
difficultés rencontrées dans l’identification et la classification
des problèmes alimentaires chez les enfants de huit à 13 ans.
Comme dans toute tentative de conceptualisation de troubles
complexes, on peut y déceler certains avantages et aussi certaines
réserves que nous tenterons de dégager.
Parmi les avantages, il faut reconnaître que la proposition de ces auteurs permet de mettre en relief les similarités
existantes entre certains tableaux cliniques présents chez les
enfants et préadolescents et ceux observés chez les adolescents.
Ainsi, les catégories anorexie et boulimie sont en grande partie similaires à celles observées chez les adolescents. Les autres
catégories mettent en avant des différences, tantôt légères, tantôt plus importantes entre certains tableaux cliniques observés
chez les enfants, permettant de mieux définir le spectre et la
complexité des difficultés alimentaires présentées par ce groupe
d’âge, souvent diagnostiqués TANS. Ce dernier point suggère,
à notre avis, une pluralité de facteurs étiologiques possibles
aux troubles et l’intérêt d’en suivre l’évolution pour mieux les
documenter.
Ces catégories permettent aussi de distinguer des tableaux
cliniques qui peuvent sembler être similaires dans leurs symptomatologies (perte de poids, refus de manger normalement),
mais qui s’avèrent différents lorsque l’évaluation est plus poussée. Les particularités de certains tableaux cliniques suggèrent
l’importance de prendre en considération d’autres facteurs
tels l’anxiété (dans les cas de phobies alimentaires spécifiques par exemple) ou l’humeur (dans le cas d’un évitement
alimentaire affectif) comme de possibles contributions au
déclenchement du problème et/ou à son maintien. Évidemment
d’autres facteurs tels les variables individuelles, des facteurs
génétiques, les relations familiales et le contexte environnemental peuvent jouer un rôle sur l’intensité de l’anxiété ou la
qualité de l’humeur. Ces apports sont considérables, à notre
avis, dans l’évaluation de chaque situation clinique, car ils
suggèrent l’importance et la pertinence d’aller au-delà des
manifestations strictement comportementales alimentaires et
d’en tenir compte dans l’élaboration des objectifs et stratégies
d’intervention.
Ces catégories plus fines ont aussi comme avantage, de fournir des repères plus précis pouvant permettre une identification
qu’on espère plus précoce des difficultés par les personnes
proches de l’enfant et du préadolescent ou par les professionnels.
Ils pourraient s’avérer utiles au développement d’instruments de
dépistage appropriés. Nombreux sont les écrits qui soulignent
l’importance d’une intervention rapide sur le pronostic. De plus,
les catégories proposées, si elles étaient utilisées et adoptées par
une majorité de cliniciens et de chercheurs, permettraient de
classer communément les présentations cliniques des différents
troubles des enfants et pourraient faciliter les comparaisons des
426
D. Meilleur / Neuropsychiatrie de l’enfance et de l’adolescence 60 (2012) 419–428
données cliniques et de recherche. La classification pourrait permettre de recueillir des informations sur l’évolution de chaque
trouble et ainsi approfondir nos connaissances sur chacun d’eux.
Par ailleurs, certaines critiques peuvent aussi être avancées
concernant cette classification. La première est la présence de
certains recoupements entre les catégories qui peuvent rendre
difficile le diagnostic différentiel. Certains symptômes présents
dans plusieurs catégories suggèrent un dynamisme possible
entre ces dernières ou encore un possible continuum clinique
des présentations cliniques de certains troubles. On peut alors
se demander si on ne « coupe pas les cheveux en quatre » inutilement en définissant trop étroitement des présentations qui varient
(symptômes) dans le temps, alors qu’essentiellement les troubles
demeurent les mêmes. La question demeure à savoir s’il s’agit
de huit troubles distincts ou si certains sont plutôt des manifestations différentes ou fluctuantes d’un même trouble.
Une autre critique concerne l’application exclusive de ces
catégories à la clientèle infantile et préadolescente. Certains
adolescents ou adultes, ou même certains enfants plus jeunes,
pourraient présenter les symptômes associés à certains des
tableaux cliniques proposés ; on peut penser à l’évitement alimentaire affectif ou le refus alimentaire, par exemple. Cela
amène la question de la spécificité réelle et/ou exclusive de ces
catégories aux enfants de huit à 13 ans. On remarque une parenté
entre certaines catégories proposées par Bryant-Waugh et Lask
et certains groupes proposés dans la classification de Chatoor
[11] pour les très jeunes enfants (0 à six ans). Ces similarités
militent en faveur de liens possibles entre les difficultés alimentaires qui surviennent durant la première et deuxième enfance
et ceux qui apparaissent (ou se poursuivent) à l’âge scolaire. On
peut ainsi se questionner sur la présence possible de facteurs
étiologiques communs ou encore une évolution dynamique des
symptômes au fil des années en fonction des étapes de développement des enfants. Des études systématiques et longitudinales
de ces enfants permettraient de mieux documenter l’évolution
de leurs comportements (alimentaires et autres) et leur fonctionnement psychologique au fil des années. Ainsi, l’étude des
trajectoires de ces jeunes pourrait nous instruire sur de possibles
continuités homotypiques (stabilité d’un trouble spécifique au
fil des ans) et/ou hétérotypiques (présence ultérieure d’un autre
trouble) [47].
Aussi, la tranche d’âge identifiée par les auteurs, bien qu’elle
soit courte (huit à 13 ans), regroupe des individus qui se situent
à des périodes très différentes dans leur développement. On ne
peut faire fi des nombreux changements physiologiques, relationnels et sociaux qui surviennent pendant cette période et
qui sont susceptibles de jouer un rôle dans l’étiologie ou le
maintien du problème. En ce sens, le groupe d’âge est plutôt
hétérogène et la classification proposée en tient peu compte.
On peut aussi s’interroger si cette classification ne risque pas
de médicaliser des comportements et attitudes qui chez l’enfant
pourraient être transitoires ou adaptatifs à une situation particulière. Le fait d’attribuer à une conduite normale ou adaptative
une composante pathologique peut être nuisible à l’enfant et à
ses parents.
Par ailleurs, cette classification s’attarde principalement
aux aspects comportementaux, observables du problème
alimentaire. On peut certes se questionner sur l’apport d’une telle
classification à la compréhension ou conceptualisation des problèmes alimentaires ; à l’identification des enjeux sous-jacents
au trouble qui peuvent être d’ordre personnel, relationnel, systémique ou même associés à un autre trouble psychiatrique.
Bien que la classification offre la possibilité d’identifier les problèmes plus précocement, on peut craindre que l’intervention
ne s’oriente uniquement sur l’identification et la modification des comportements, mettant de côté d’autres variables
importantes impliquées soit dans l’étiologie ou le maintien du
trouble. Comme nous avons tenté de l’illustrer dans les vignettes
cliniques, les difficultés alimentaires des enfants surviennent
parfois en réaction à des difficultés situationnelles et relationnelles au sein de la famille ou de l’entourage. Des antécédents
psychiatriques familiaux, des difficultés conjugales ou familiales et des éléments de personnalité propres à l’enfant sont
souvent présents dans les situations cliniques. Il est parfois
difficile de pondérer leur rôle exact en termes de facteur prédisposant, déclencheur ou pérennisant aux difficultés. Toutefois,
tous ces facteurs doivent être identifiés et pris en compte dans
l’élaboration du projet thérapeutique, car ils auront une influence
sur le résultat de l’intervention. La classification proposée offre
très peu d’aide à ce sujet puisqu’elle demeure centrée principalement sur les aspects comportementaux alimentaires observables
de la jeune.
La classification de GOS s’intéresse principalement aux
troubles alimentaires qui s’apparentent à l’anorexie. Un des
objectifs de ses auteurs était de distinguer les problèmes alimentaires atypiques de l’anorexie authentique. Ce faisant, le
spectre des troubles avec une consommation alimentaire excessive (boulimie et hyperphagie avec ou sans perte de contrôle) est
réduit à une seule catégorie soit la boulimie. Un nombre croissant de recherches démontrent la présence de comportements
de consommation alimentaire excessive (avec ou sans perte de
contrôle) chez les jeunes enfants, les enfants et les adolescents
[48,49]. Des études ont mis de l’avant une pluralité de tableaux
cliniques ainsi que des différences importantes entre les enfants
et les adolescents [48,49]. Plus important encore, les résultats de
recherche ont démontré que les comportements de consommation alimentaire excessive ne sont pas toujours accompagnés de
comportements restrictifs [48]. Ainsi, plusieurs des catégories de
la classification proposée seraient plus ou moins pertinentes pour
aider à identifier les problèmes associés à une consommation
alimentaire excessive.
Notre expérience clinique de plusieurs années auprès de cette
clientèle nous a permis de rencontrer de nombreux enfants et
préadolescentes présentant divers tableaux cliniques. Plusieurs
situations cliniques ont mis à défi à la fois les intervenants, pourtant souvent chevronnés, mais aussi les stratégies d’interventions
proposées. Lors de l’évaluation psychologique, nous avons pu
identifier dans la majorité des cas, soit des enjeux importants au
plan relationnel avec l’une ou les deux figures parentales, soit des
enjeux familiaux impliquant la fratrie et les interactions dans le
système familial, soit des enjeux de personnalité présents chez la
jeune. Nous avons tenté d’en dresser un bref portrait à l’intérieur
des vignettes cliniques sans toutefois les approfondir, puisque ce
n’était pas le but de notre propos. Les parcours thérapeutiques
D. Meilleur / Neuropsychiatrie de l’enfance et de l’adolescence 60 (2012) 419–428
se sont avérés souvent plus longs que courts, et les suivis ont
permis de mettre à jour des évolutions favorables dans certains
cas, mais aussi moins favorables dans d’autres. L’expérience
clinique nous a ainsi montré que la complexité psychologique
est souvent présente chez une grande majorité de ces enfants
dont les comportements observables seuls peuvent difficilement
rendre compte. L’intervention doit nécessairement prendre en
considération les enjeux psychiques spécifiques à chacun, qu’ils
soient personnels ou familiaux, pour obtenir des changements
significatifs et persistants. Les auteurs sont d’ailleurs nombreux
à préconiser l’implication de la famille dans le traitement des
troubles alimentaires chez les enfants et les adolescents [50].
7. Conclusion
Les difficultés alimentaires ont un impact important sur la
santé physique et psychologique des enfants et des préadolescents au moment où elles surviennent et souvent sur leur avenir.
Elles touchent aussi leurs familles. Une meilleure connaissance
est souhaitée pour favoriser un diagnostic précoce, de même
qu’une intervention appropriée et efficace à court et moyen
terme.
La première partie de la revue de littérature a montré combien,
dans ce champ, certains paramètres ne font pas encore l’objet
d’un consensus. Ainsi, il serait pertinent que les chercheurs
et cliniciens s’entendent d’abord sur la tranche d’âge qui
compose le groupe des enfants et préadolescents, particulièrement pour la borne supérieure. Ce consensus autour des bornes
d’âge est important puisqu’il permettrait d’assurer une certaine
homogénéité entre les groupes à comparer, et cela tout autant
dans le domaine de la recherche que celui de la clinique. En lien
avec cette remarque, il serait aussi judicieux de s’entendre sur
une terminologie commune pour discuter de ce groupe. Doiton privilégier une différenciation basée sur l’âge chronologique
(enfant/préadolescent) ou sur l’âge pubertaire (pré-pubère) au
moment de l’apparition du problème ? Il s’agit là de questions
fondamentales et urgentes à régler.
Les personnes proches qui sont les plus susceptibles de pouvoir déceler le problème ne sont pas nécessairement les mêmes
pour les enfants que pour les adolescents. Outre les parents, les
professeurs à l’école élémentaire et les intervenants en milieu
de garde qui sont présents au moment des repas à l’heure du
midi sont des personnes qui pourraient bénéficier de connaître
les symptômes associés aux difficultés alimentaires caractéristiques à ce groupe d’âge. Étant donné que chez plusieurs de ces
enfants il ne semble pas y avoir déni de leurs difficultés et peu de
comportements clandestins, ces personnes de l’entourage sont
susceptibles d’observer certains symptômes et de pouvoir en
informer les parents et ainsi favoriser un dépistage précoce.
Pour le moment, il existe peu d’instrument de dépistage et
diagnostic pour identifier les difficultés alimentaires correctement chez les enfants âgés de huit à 13 ans, dont la présence
est encore méconnue de plusieurs. Les tableaux cliniques proposés ont le mérite de proposer des repères pouvant permettre
une meilleure identification des troubles. L’hétérogénéité des
tableaux et descriptions cliniques souligne la pertinence et la
nécessité de poursuivre les travaux de recherche auprès de ce
427
groupe d’âge. Les objectifs devraient s’orienter autour d’une
meilleure identification des troubles et la collecte d’informations
sur leurs profils psychologiques, les facteurs susceptibles d’être
impliqués dans l’apparition et le maintien du problème ainsi
que des informations concernant leur évolution. Cela permettrait d’adapter les cibles thérapeutiques et les stratégies
d’interventions à mettre en place auprès de cette clientèle.
La classification des problèmes alimentaires chez les enfants,
préadolescents et adolescents demeure un défi très actuel. Les
chercheurs et cliniciens sont nombreux à clamer l’inefficacité
des critères diagnostiques actuels du DSM pour les troubles alimentaires chez les personnes âgées de moins de 18 ans. Les
critères diagnostiques proposés pour la prochaine version du
DSM-V font déjà l’objet de critiques quant à leur pertinence
avec les enfants et les adolescents [51,52]. Hedebrand et Bulik
[51] recommandent des modifications importantes aux critères
afin de mieux prendre en considération les aspects liés au développement chez les enfants et les adolescents, à la diversité
des symptômes et à leur évolution dans le temps. Leur proposition suggère des critères plus explicites et diversifiés qui
rendent mieux compte de l’hétérogénéité et de la complexité de
l’anorexie et qui tentent d’en cerner un peu plus la phénoménologie. Les critères devraient offrir la possibilité de mieux suivre
et documenter l’évolution des symptômes au fil des mois et des
années, particulièrement chez les enfants.
Déclaration d’intérêts
L’auteur déclare ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation
avec cet article.
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