De l’éthique du vendeur à sa performance commerciale
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La vente est, quant à elle, traditionnellement associée à une transaction entre un
vendeur et un acheteur et se définit comme « une convention par laquelle l’un s’oblige à
livrer la chose et l’autre à la payer » selon les articles 1582 et 1583 du Code Civil. L’acte
même de la vente est ainsi déclaré lorsque la chose et le prix ont été convenus par le
vendeur et l’acheteur. Vouloir rapprocher les concepts d’éthique et de vente n’est pas chose
simple et évidente tant le processus de vente peut paraître complexe et surtout dénué de
toute éthique. En effet, au-delà des simples définitions, l’éthique se doit d’être mise en place
dans le cadre de la vente. Or, cela semble être quasi-impossible compte tenu de l’aspect
souvent conflictuel entre le vendeur et l’acheteur. Les objectifs des deux parties n’étant
jamais semblables – le vendeur souhaite toujours vendre plus et au prix le plus élevé
possible là où l’acheteur négocie pour atteindre son prix d’équilibre – la vente est plutôt
considérée comme une bataille, un duel où deux clans s’affrontent à armes inégales puisque
le vendeur, représentant de l’entreprise mais séparé physiquement et socialement de ses
supérieurs hiérarchiques lors de ce duel, a libre cours à différentes techniques de persuasion
souvent jugées comme anéthiques.
Partant de cette opposition de l’essence même de l’éthique et de l’acte de vente, il
est intéressant de s’interroger sur la vente faite par un possible vendeur éthique. L’oxymore
entre éthique et vente pourrait-il ainsi s’estomper ?
2. Vendeur éthique : une définition délicate
Parce qu’Hermès est en même temps le Dieu grec des vendeurs et des voleurs, le
terme de vendeur voleur serait plus facile à définir que celui de vendeur éthique, apparu bien
plus tard que la simple image négative du vendeur. Définie précédemment comme
l’interaction entre un client qui a des besoins d’acheter tel ou tel produit et un vendeur qui
cherche à placer le produit de son entreprise et à maximiser ses intérêts propres, la vente, et
a fortiori le vendeur, ne sont pas éthiques par essence.
Lorsque le vendeur se rend en rendez-vous commercial, on assiste à une réelle
interaction verbale et gestuelle avec le potentiel acheteur. Cette pratique de la vente et de la
négociation, souvent apprise théoriquement sur les bancs des écoles de commerce et des
différentes formations commerciales, est bel et bien un savoir-faire qui se développe avec
les expériences professionnelles, voire personnelles pour atteindre l’état suprême de
contrôle de l’esprit du prospect. Le Graal de tout bon vendeur est alors de réussir à vendre le
plus de produits possible au client en le persuadant qu’il a besoin de ce qu’il désire, et qu’il
désire ce dont il a besoin.
La définition du vendeur éthique s’avère donc délicate au vue des nombreux
obstacles de la relation souvent biaisée entre le vendeur et l’acheteur. Des techniques de
vente telles des formules clé en main sont même utilisées par le vendeur pour influencer
favorablement le client vers l’achat. Il s’agit par exemple de la méthode AIDA (Attention,
Intérêt, Désir, Action)
également utilisée en marketing. Attirer l’œil du prospect, susciter son
intérêt par des explications et prouesses techniques du produit pour créer le désir et enfin
amener le client à acheter : cette méthode AIDA, d’une simplicité et d’une efficacité
extrêmes, peut rapidement être connotée négativement par tout individu consommateur. La
fidélité peut même venir fermer cette boucle du vendeur qui n’aura, dans ce cas, même plus
besoin de négocier ou de réitérer les premières étapes de la méthode. Cet aspect de
fidélisation du client, qui devient presque un acheteur aveugle car conquis, est aujourd’hui de
plus en plus présent sur le marché des hautes technologies qui ont su s’épauler d’un
marketing redoutable, remplaçant presque le travail des vendeurs en amont.
La vente correspond finalement à un état d’esprit associé à des outils et à des
pratiques qui dépendent à la fois du comportement du vendeur et des formations acquises
GOLDMAN H.M., L’art de vendre, Delachaux et Niestlé, 1981
STRONG E.K., « Theories of Selling », Journal of Applied Psychology, 1925