Chapitre 7 : Acoustique physiologique

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Chapitre 7 : Acoustique physiologique
1 Introduction à l’acoustique physiologique et à la psychoacoustique
Nous disons que nous entendons un son lorsque des vibrations de l'air ambiant, atteignant
notre tympan, le mettent en mouvement dans des conditions d'amplitude et de fréquence
telles que cette stimulation mécanique, qui est transmise par l'oreille moyenne à l'oreille
interne, y provoque un phénomène bio-électrique.
Commence alors le traitement de l'information contenue dans ce phénomène, traitement
qui se poursuit à travers différents relais jusqu'au cortex cérébral et dont le résultat sera la
perception du son.
Puisque c’est par l’intermédiaire de l’oreille que le son est perçu, et que la sensation auditive
est interprétée par le cerveau, l’étude des sons ne relève pas uniquement de la physique,
mais aussi de la physiologie de l’oreille et de la neurophysiologie (acoustique physiologique)
et de la psychologie (psychoacoustique).
Ainsi, de nombreuses contingences physiologiques et psychologiques limitent la perception
du phénomène auditif, par exemple :
Un son intense peut en cacher un autre (effet de masque).
La perception d’un son bref dépend de la durée du stimulus.
La perception auditive varie d’un sujet à l’autre, en fonction de l’âge, du sexe, et de
l’état médical du sujet.
L’oreille a une sensibilité très importante : un déplacement du tympan de 10-9 cm
(inférieur au diamètre de la plus petite molécule de l’air, celle de H2) provoque un effet
sensible.
L’oreille est sensible à des intensités acoustiques très différentes (le rapport extrême des
intensités audibles équivaut à 1013, voire 1014).
L’oreille n’est pas sensible à toutes les fréquences acoustiques (seuils absolus de
fréquence).
Le spectre des fréquences audibles est très étendu ; il va de 16 à 16 000 Hz, et couvre
donc 10 octaves.
L’oreille ne différencie pas deux fréquences trop proches l’une de l’autre (seuil différentiel
de fréquence).
Nous abordons dans ce chapitre la partie acoustique physiologique. La psychoacoustique
fera l’objet d’un autre chapitre.
2 Anatomie et physiologie de l’oreille
On distingue trois parties consécutives dans l'appareil auditif :
l’oreille externe (formée du pavillon et du conduit auditif),
l’oreille moyenne (limitée par le tympan et les fenêtres de la cochlée),
l’oreille interne (renfermant les organes de l’audition, situées dans la cochlée, et les
organes du maintien de l’équilibre, les canaux semi-circulaires).
2.1 L’oreille externe
2.1.1 Description générale et rôles
L’oreille externe est constituée du pavillon
et du conduit auditif externe. La partie
centrale du pavillon, la conque, donne
accès au conduit auditif externe fermé par
le tympan. Chez l'Homme, ce conduit a
une longueur de 25 à 30 mm et un
diamètre moyen de 7 mm.
L’oreille externe est avant tout un capteur
qui va transmettre les sons à l’oreille
moyenne.
Chez l'Homme, contrairement à certains
animaux, le pavillon n'est pas doué de
mobilité.
Dans l’oreille externe, le son se propage dans l’air.
L’oreille externe a trois rôles :
elle contribue à protéger mécaniquement le système auditif
elle joue un rôle dans l’amplification des sons
elle permet la localisation spatiale des sources sonores.
2.1.2 Rôle de protection mécanique : le pavillon
Le pavillon assure une protection mécanique du tympan. De plus, en ne
permettant pas le mouvement de l’air juste devant l’ouverture du conduit
auditif, il empêche la production de sons parasites.
Fossette scaphoïde
2.1.3 Rôle d’amplification : le conduit auditif et le pavillon
L’oreille externe permet une amplification des sons, par un phénomène de résonance.
L’ensemble
pavillonconduit auditif externe se
comporte comme un
tuyau fermé, dont les
fréquences de résonance
se situent, pour le mode
(quart
fondamental
d’onde) dans la bande de
fréquence 2 000-5 000 Hz,
et pour le premier
harmonique (trois quart
d’onde) dans la bande de
fréquence 7 500-10 000
Hz.
Cet ensemble constitue en réalité un résonateur amorti, et la résonance n’est donc pas très
aiguë. On estime que l’amplification dans le mode fondamental n’est que de 10 dB, avec une
bande passante de 2 000 Hz autour de la fréquence de résonance (environ 3 700 Hz).
L’oreille externe permet donc d’abaisser le seuil d’audition pour certaines fréquences (cf.
chapitre de psychoacoutique).
Résonance du conduit auditif, d’après Wiener et Ross
Fonction de transfert de l'oreille externe
L'amplitude et la phase des ondes acoustiques sont modifiées en se propageant du milieu
extérieur jusqu’au tympan. Ces modifications, qui sont particulières à chaque fréquence et à
chaque angle d’incidence des ondes sonores, caractérisent la fonction de transfert de l ’oreille
externe.
Exemple de fonction de transfert de l'oreille externe.
Pour ce son pur, la fonction de transfert entre l'entrée (courbe bleue) et la sortie
(courbe rouge) du signal est de + 6 dB pour l’amplitude (x2) et de - pi/2 pour la phase
(retard de 90° ou 1/4 de période).
Effet du pavillon (p, vert) et du conduit auditif externe (c, bleu) sur l'amplitude de la
vibration sonore (gain acoustique) pour l’azimut 45° dans le plan horizontal.
A 3 kHz, la somme cumulée (t, rouge) de ces gains correspond à 20 dB (= amplitude du
signal d'entrée x10).
2.1.4 Rôle de localisation spatiale : audition binaurale
La localisation spatiale des sources sonores est permise par la présence de deux oreilles
(audition binaurale). C’est Lord Rayleigh (en 1876, puis en 1907) qui donna le premier une
explication théorique de ce phénomène.
Les pavillons facilitent la localisation des sons pour les sons de fréquence supérieure à
5000 Hz, en particulier en permettant de distinguer les sons provenant de l’avant ou de
l’arrière de la tête. Mais contrairement à certains animaux, l’homme doit tourner toute la
tête pour orienter ses pavillons.
2.2 L’oreille moyenne
2.2.1 Description générale
L’oreille moyenne est séparée de l’oreille externe
par une membrane élastique (le tympan) qui
transmet les vibrations acoustiques à l’oreille
interne via la chaîne des osselets à la fenêtre ovale
de la cochlée.
La fenêtre ovale et la fenêtre ronde isolent l’oreille
moyenne du milieu aqueux (la lymphe) qui baigne
l’oreille interne.
L’oreille moyenne est une cavité aérienne (c’est-à-dire remplie d’air) fermée, en
communication avec le milieu extérieur via la trompe d’Eustache (qui permet d’égaliser les
pressions entre la caisse tympanique et l’extérieur).
Dans les conditions normales, la trompe, fermée au repos, s’ouvre pendant une fraction de
seconde lors de la déglutition ou d’un bâillement. Tout ce qui peut perturber le
fonctionnement de la trompe d’eustache va occasionner des troubles de l’oreille moyenne
avec retentissement sur l’audition.
2.2.2 le tympan
Le tympan est un capteur de pression ; comme le diaphragme d’un microphone à pression,
il entre en oscillation mécanique sous l’effet des variations de pression acoustique produites
dans le conduit auditif.
Le tympan se comporte comme un oscillateur mécanique forcé, à très large bande passante
(en raison de sa texture non homogène), forcé par les sons.
La membrane tympanique a la forme d'un cône d'environ 2 mm de hauteur dont la pointe
est dirigée vers l'oreille moyenne et la base ovale est fixée obliquement, au fond du conduit
auditif externe.
Fenêtre
ovale
Trompe d’Eustache
2.2.3 La chaîne ossiculaire
La chaîne des osselets est constituée :
du marteau, (20 g) tenu par des ligaments et dont le manche est solidaire du
tympan ;
de l’enclume, le plus lourd des osselets (25 g) tenu par des ligaments ;
de l’étrier (5 g) qui s’encastre dans la fenêtre ovale de la cochlée où il est
maintenu par un ligament annulaire élastique.
La chaîne ossiculaire se comporte
comme un levier qui transforme les
oscillations du tympan en un
mouvement de piston de la plaque de
l'étrier dans la fenêtre ovale.
L’amplitude de ces mouvements de piston est contrôlée par deux petits muscles striés, le
tenseur du tympan qui s'insère sur le marteau et dont la contraction réduit la mobilité de la
membrane tympanique, et le muscle de l'étrier ou stapedius (stapes = étrier), dont la
contraction réduit la mobilité de la fenêtre ovale.
http://psych.hanover.edu/JavaTest/Media/Chapter10/MedFig.MiddleEar.html
L'oreille moyenne joue dans le fonctionnement auditif un double rôle, de transmission et de
protection.
2.2.4 Rôle de transmission de l’oreille moyenne
L’efficacité de la transmission directe d’une onde de vibration acoustique d’un milieu aérien
(qui serait l’air du conduit auditif) à un milieu liquide (qui serait la lymphe de l’oreille interne)
est très faible.
Par exemple, pour une onde arrivant perpendiculairement à la surface d’un lac, 1/1 000ème
seulement de l’énergie est transmise à l’eau. Ceci est dû au fait que l'air et l'eau diffèrent
par leur densité et leur module de compressibilité, deux paramètres qui déterminent la
résistance au passage de l’onde de vibration, c’est-à-dire l'impédance acoustique du milieu.
La fraction d'énergie transmise d'un milieu à l'autre étant d’autant plus faible que le rapport
des impédances est élevé, le rôle de l'oreille moyenne (et de la chaîne des osselets) est de
diminuer le rapport entre l'impédance élevée de la cochlée (Z=1,5.106 N.s.m-3) et celle
beaucoup plus faible de la membrane tympanique, elle-même plus élevée que celle de l’air
(Z=400 N.s.m-3).
Sans la chaîne ossiculaire, la perte d’intensité acoustique
entre l’oreille externe et l’oreille interne due au
changement de milieu atteindrait 35 dB.
Cette adaptation des impédances fait intervenir plusieurs facteurs dont le plus important est
le rapport entre la surface utile du tympan (solidaire du marteau), qui est d'environ 35 mm2,
et la surface de la plaque de l'étrier, soit 2,5 mm2 c’est-à dire un rapport de surfaces de 17,2.
Intervient également le jeu de leviers de la chaîne des osselets, le bras du marteau étant plus
long que celui de l'enclume (qui multiplie la force par un facteur de 1,31), auquel s'ajoutent,
pendant le mouvement, les variations d'incurvation des parois du cône tympanique, ce qui a
pour effet de multiplier la pression exercée par l’étrier sur la fenêtre ovale par un facteur 2,5
environ (en même temps que de diminuer la vitesse de vibration).
Au total, on aurait une pression, exercée par la plaque de l'étrier sur la fenêtre ovale,
quarante-cinq fois plus élevée que la pression exercée par le son sur le tympan, soit un gain
de 33 dB.
Cette augmentation compense la perte d’énergie acoustique de 30 à 35 dB apparue au
moment du transfert entre l’oreille externe et l’oreille interne (lors de la traversée du
tympan, milieu de grande impédance mécanique par rapport à celle de l’air).
Rôle de transmission et d’amplification de l’oreille moyenne
Plus précisément, on peut estimer que l’effet de levier des
osselets multiplie par un facteur 1,31 la force exercée sur le
tympan (F1) pour obtenir la force exercée sur la fenêtre ovale par
l’étrier (F2) :
F2 = 1,31 F1
La différence de surface entre le tympan (A1=35 mm2) et la fenêtre
ovale (A2=2,5mm2) produit un autre gain :
p2. 2,5 = 1,31.p1.35
c’est-à-dire :
p2=18,34.p1
qu’il faut encore multiplier par un facteur de gain de 2,5 (dû au
changement de forme du tympan) ce qui donne au final :
p2 = 45.p1
L’augmentation totale de niveau de pression est donc de :
20 log 45=33dB
Fonction de transfert de l’oreille moyenne
Les phénomènes décrits ci-dessus sont clairement observables lorsqu’on étudie la fonction de
transfert de l’oreille moyenne, c’est-à-dire le rapport complexe (amplitude et phase) existant
entre la pression acoustique à l’entrée de l’oreille interne (Pv : dans la périlymphe à la base de
la rampe vestibulaire) et la pression acoustique devant le tympan (Pt) : Pv/Pt.
Chez l’homme, l’amplification maximale ne dépasse guère 20 dB... et varie fortement en
fonction de la fréquence : 13 dB à 200 Hz, 20 dB à 1000 Hz, 12 dB à 8000 Hz… .
On remarque d’autre part qu’aux basses fréquences la pression à l’entrée de la cochlée (Pv) est
en avance de phase de 90° par rapport à la pression devant le tympan (Pt).
2.2.5 Rôle de protection de l’oreille moyenne
La fonction de protection réside dans le contrôle des caractéristiques de transmission de
l'oreille moyenne par suite de la contraction du tenseur du tympan et du muscle de l’étrier, le
stapédius.
Ils se contractent par voie réflexe lorsque l’oreille est soumise à un niveau sonore supérieur à
70 dB ; ce réflexe atténue le niveau sonore d’environ 10 dB. En augmentant la rigidité du
système, cette contraction réduit essentiellement la transmission des sons de fréquence
inférieure à 1 000-2 000 Hz.
La protection contre l'effet destructeur de ces sons sur l'oreille interne ne peut intervenir s'ils
s'établissent très brusquement, car le changement d'impédance mécanique produit par la
contraction des muscles, qui débute avec une latence de 20 à 40 ms, n'atteint son maximum
qu'après 90 à 100 ms. De plus, le muscle de l’étrier se relâche par fatigue après quelques
minutes. La protection due au réflexe stapédien est donc inefficace contre les bruits
impulsionnels et les bruits de longue durée.
La contraction du stapédius est également provoquée par la vocalisation, la réponse du
muscle précédant l'émission vocale. Il semble qu'il y ait là un mécanisme assurant la
réduction de l'effet des sons émis sur l'oreille de la personne qui émet ces sons.
D'une manière générale, en atténuant sélectivement les composantes de basse fréquence, la
contraction réflexe des muscles de l'oreille moyenne permet une meilleure perception des
stimuli complexes (comme la parole chez l‘homme) aux intensités élevées.
2.2.6 la conduction osseuse
La conduction osseuse est un processus de transmission des ondes acoustiques vers l’oreille
interne par l’intermédiaire des tissus osseux du corps.
Dans l’audition naturelle des sons en provenance de l’environnement, la conduction des
sons par voie osseuse ne joue pratiquement aucun rôle, car l’énergie arrivant à l’oreille
interne par cette voie est d’environ 50 dB inférieure à celle apportée par la chaîne
tympano-ossiculaire.
Par contre, la conduction osseuse intervient lors de l’audition par chacun de sa propre voix
ou de la perception de sons en provenance de son corps. C’est ce qui explique que la
reconnaissance de sa propre voix est difficile à l’écoute d’un enregistrement de celle-ci.
En fait, on peut considérer qu’il existe trois voies de transmission pour les vibrations
acoustiques :
Voie solidienne de la chaîne des osselets (marteau-enclume-étrier) dont l'étrier
communique avec la fenêtre ovale de l'oreille interne. Bande passante : 0 à 10 000 Hz.
Voie aérienne de la caisse du tympan, directement de la membrane du tympan à la
fenêtre ronde de l'oreille interne. Bande passante : 10 000 Hz et plus.
Voie osseuse de la boîte crânienne. Bande passante: particulièrement les très basses
fréquences (hypothèse).
2.3 L’oreille interne
2.3.1 Anatomie générale de l’oreille interne
L’oreille interne ou labyrinthe renferme les organes de l’audition (la cochlée ou limaçon) et les
organes du maintien de l’équilibre (canaux semi-circulaires). L’ensemble du labyrinthe est
baigné d’un milieu liquide, la périlymphe.
La cochlée se présente comme un tube tronconique de 3 cm de long, enroulé sur lui-même
(en limaçon) autour d'un axe creux, le modiolus (moyeu), sur deux tours trois quarts chez
l‘homme. Ce tube a deux ouvertures vers l’oreille moyenne : les fenêtres ovale et ronde.
Oreille interne ou labyrinthe, schéma général
1. Canal antérieur
2. Ampoule canal antérieur
3. Ampoule canal horizontal
4. Saccule
5. Canal cochléaire
6. Hélicotrème
7. Canal horizontal
8. Canal postérieur
9. Ampoule canal postérieur
10. Fenêtre ovale
11. Fenêtre ronde
12. Rampe vestibulaire
13. Rampe tympanique
14. Utricule
2.3.2 Anatomie de la cochlée
2.3.2.a Description générale de la cochlée
L’intérieur de la cochlée est séparé en trois parties par une fine lamelle osseuse spiralée et
des membranes : la partie supérieure de la cochlée est appelée rampe vestibulaire, tandis
que la partie inférieure de la cochlée est appelée rampe tympanique.
Entre les deux rampes osseuses, isolé par la lamelle spirale osseuse et des membranes, se
trouve le canal cochléaire.
La cochlée est donc constituée d'un ensemble de trois tubes enroulés en spirale et emplis de
liquides : périlymphe pour les rampes tympanique et vestibulaire, endolymphe pour le canal
cochléaire.
La lamelle spirale osseuse séparatrice s’arrête juste avant le sommet du limaçon, de sorte
qu’en cet endroit (appelé l’hélicotrème), il y a communication entre les deux rampes
osseuses de la cochlée (la périlymphe peut donc s’écouler d’une rampe à l’autre).
La fenêtre ovale est fermée par une membrane, en contact permanent avec la plaque de
l’étrier ; elle transmet donc les vibrations mécaniques des osselets au liquide emplissant la
rampe vestibulaire.
La fenêtre ronde terminant la rampe tympanique joue le rôle de membrane d’expansion
pour le liquide de l’oreille interne : son élasticité absorbe les variations de volume induites
par les mouvements de la fenêtre ovale, solidaire de l’étrier.
La lame spirale osseuse ne fait pas toute la largeur du limaçon et sa largeur diminue de
l’entrée du limaçon vers l’hélicotrème. L’espace restant est rempli par une membrane mobile,
plus large au niveau de l’hélicotrème, la membrane basilaire.
Située au-dessus de cette dernière se trouve une fine membrane, la membrane vestibulaire
ou membrane de Reissner, tendue entre le haut du limaçon et le bord de la lame spiralée.
Ces deux membranes délimitent le canal cochléaire, rempli par l’endolymphe. Ce canal
contient, déposé sur la membrane basilaire, l’organe de Corti, qui est recouvert par la
membrane tectoriale ou tectorienne.
Cette section schématise l'enroulement du
canal cochléaire (1) contenant l'endolymphe, et
celui des rampes vestibulaire (2) tympanique
(3) contenant la périlymphe. La flèche rouge
vient de la fenêtre ovale et la bleue aboutit à la
fenêtre ronde. Au centre, (modiolus) le
ganglion spiral (4) et les fibres du nerf
cochléaire (5) apparaissent en jaune.
1 rampe vestibulaire ; 2 rampe tympanique ; 3 canal cochléaire ; 4 membrane
vestibulaire ou de Reissner ; 5 strie vasculaire ; 6 ligament spiral ; 7 lame osseuse spirale ;
8 limbe ou bourrelet spiral ; 12 organe de Corti ; 13 ganglion spiral.
1 rampe vestibulaire ; 2 rampe tympanique ; 3 canal cochléaire ; 4 membrane vestibulaire
ou de Reissner ; 5 strie vasculaire ; 6 ligament spiral ; 7 lame osseuse spirale ; 8 limbe ou
bourrelet spiral ; 11 membrane basilaire ; 12 organe de Corti ; 13 ganglion spiral.
2.3.2.b Organe de l’audition ou organe de Corti
Sur la membrane basilaire repose
l'organe de Corti, ainsi nommé parce
que Alfonso Corti fut l'un des premiers
anatomistes à en faire une description
détaillée.
C’est l'organe sensori-nerveux de la
cochlée. Long de 32mm, il est composé
des cellules sensorielles ou cellules
ciliées, des fibres nerveuses qui leur
sont connectées et des structures
annexes ou de support.
Ce sont les cellules ciliées qui assurent
la transformation de la stimulation
mécanique
en
phénomène
bioélectrique.
On distingue des cellules ciliées internes
et externes, les internes étant situées
plus proches du modiolus (ganglion
spiral).
1-Cellule ciliée interne (CCI)
2-Cellules ciliées externes (CCEs)
3-Tunnel de Corti
4-Membrane basilaire
5-Habenula perforata
6-Membrane tectoriale
7-Cellules de Deiters
8-Espaces de Nuel
9-Cellules de Hensen
10-Sillon spiral interne
Dans cette section transversale de la partie basale d'une cochlée de mammifère, 1 CCI (1)
et 3 CCEs (2) sont représentées de part et d'autre du tunnel de Corti (3), soutenu par les
piliers de Corti. La membrane tectoriale (6), flottant dans l'endolymphe coiffe les stéréocils
des cellules ciliées. La CCI est entourée de cellules de soutien, alors que la CCE solidement
ancrée sur la cellule de Deiters (7) a sa membrane latérale en contact direct avec la
corticolymphe (peu différente de la périlymphe) qui remplit le tunnel de Corti (3) et les
espaces de Nuel (8). La partie apicale des cellules ciliées, celle du pilier interne et des
autres cellules annexes comme les cellules de Hensen (9), forment la lame réticulaire qui
isole le compartiment endolymphatique. Les fibres nerveuses gagnent ou quittent l'organe
de Corti par l'habenula perforata (5) au travers de la membrane basilaire (4).
Obtenue en microscopie électronique à balayage, cette image montre les cellules ciliées
externes constituant un faisceau soutenu à la base par les cellules de Deiters et incliné audessus du tunnel de Corti (que maintiennent les piliers de Corti). L'extrémité ciliée des
cellules sensorielles est visible dans la nappe fibreuse que forme la lame.
1 rampe vestibulaire ; 2 rampe tympanique ; 3 canal cochléaire ; 4 membrane vestibulaire
ou de Reissner ; 5 strie vasculaire ; 6 ligament spiral ; 7 lame osseuse spirale ; 11 membrane
basilaire ; 15 cellules ciliées internes ; 16 cellules ciliées externes ; 17 cellules de Deiters ou
phalangées internes ; 18 piliers internes de Corti ; 19 cellules de Deiters ou phalangées
externes ; 20 membrane tectoriale ou de Corti ; 21 cellules de support internes ; 22 cellules
de support intermédiaires ; 23 cellules de support externes ; 24 piliers externes de Corti ; 25
tunnel de Corti.
2.3.2.c Les liquides de la cochlée
La périlymphe (en bleu) et l'endolymphe (en rouge) diffèrent profondément par leur contenu
ionique.
Alors que la périlymphe riche en sodium et pauvre en
potassium a une composition voisine des autres
liquides extra cellulaires, comme le liquide céphalorachidien ou le plasma sanguin (Na+ et Cl- proches
de l'équilibre électrostatique), l'endolymphe, comme
l'intérieur des cellules, pauvre au contraire en
sodium se caractérise par une surcharge en
potassium (K+).
Cependant, au lieu d'un potentiel de diffusion du K+,
négatif, on mesure, dans l'endolymphe, un potentiel
endolymphatique de +80 mV. Cette positivité a sa source
dans la strie vasculaire dont la fonction est précisément,
grâce à l'activité d'une pompe électrogène, de forcer les
ions K+ à passer du plasma sanguin dans l'endolymphe et
les ions Na+ de l'endolymphe dans le plasma, en dépit de
gradients de concentration défavorables. Pour fonctionner,
cette pompe a besoin d'énergie et l'on vérifie qu'en
bloquant le métabolisme cellulaire par anoxie ou l'activité
ATPasique (qui libère l'énergie en réserve) par l'ouabaïne,
on provoque effectivement une chute, voire une inversion
du potentiel endocochléaire.
En résumé, les 80 mV mesurés pourraient être la somme d'un potentiel de diffusion du K+, de
l'ordre de - 30 mV et d'un potentiel créé par le transport actif de l'ordre de + 110 mV.
Concentrations de Na+ et de K+ (en mmoles par litre) dans les divers
compartiments cochléaires et potentiels permanents mesurés par rapport
au plasma de la strie vasculaire.
Au repos, il n’y a pas d’excès de charges positives dans les cellules ciliées, et le potentiel de
repos d'une cellule ciliée est d’environ - 70 mV (CCE) et -35 mV (CCI).
Ainsi, au repos, il existe une différence de potentiel (ddp) de part et d’autre de la membrane
cellulaire des cellules cilliées qui est de -115 (CCI) à -150 mV (CCE). Cette ddp est à la base des
phénomènes électrophysiologiques de l'audition.
2.3.2.d Les cellules ciliées
Les cellules ciliées sont situées de part et d'autre du tunnel de Corti, dont les parois sont
constituées de deux rangées de cellules rigides, « les piliers de Corti », s'appuyant l'une à
l'autre par leur sommet.
Entre les piliers de Corti, se trouve de la cortilymphe, dont la composition ionique est voisine
de celle de la périlymphe.
Les cellules ciliées sont disposées en rangées parallèles de la base au sommet de la cochlée :
une rangée de cellules ciliées internes (C.C.I.), situées entre le modiulus et le tunnel de Corti,
et trois rangées de cellules ciliées externes (C.C.E.) situées au-delà du tunnel de Corti (ce
dernier nombre varie selon les espèces de 3 à 5 ; chez l’homme, il est de 3).
Les 4 rangées de cellules sont régulièrement espacées, tous les 10 µm, le long de la
membrane basilaire. Dans chaque rangée, on compte environ 100 cellules ciliées par mm,
soit au total 3 500 cellules ciliées internes et 12 000 cellules ciliées externes.
Il y a donc seulement 16 000 cellules ciliées dans la cochlée comparé aux 100 millions de
photorécepteurs dans l'œil. De plus, les cellules ciliées ne se renouvellent pas.
L'organe de Corti est donc très fragile. Toutes les agressions se cumulent au cours du temps,
pouvant déclencher une surdité de perception.
2.3.2.e Structure des cellules ciliées
Les cellules ciliées sont ainsi nommées car leur pôle apical (plaque cuticulaire) en contact avec
l'endolymphe, porte une centaine de stéréocils en 3 rangées de tailles différentes.
Le reste de la cellule ciliée est localisé dans le compartiment périlymphatique.
Schématiquement, les deux types cellulaires, cellules ciliées internes et externes, diffèrent par
la forme de leur corps cellulaire (en poire pour la CCI et parfaitement cylindrique pour la CCE),
ainsi que par l'arrangement des stéréocils (en ligne pour la CCI et en W pour la CCE).
CCE
CCI
1. Noyau
2. Stéréocils
3. Plaque cuticulaire
4. Nerf auditif (neurone de type I)
5. Afférent radial
6. Efférence médiane
7. Nerf auditif (neurone de type II)
Cellules ciliées
Les stéréocils de la CCE ont une organisation typique en « W ».
L'organisation de stéréocils de la CCI est presque linéaire.
Les cellules ciliées internes, longues de 35 µm, ont une forme
d'amphore évasée, ou de poire, en U très ouvert au pôle apical (10
µm).
Elles reposent sur des cellules de soutien, les cellules de Deiters qui
entourent complètement leurs parois latérales.
Implantés au pôle apical de la plaque cuticulaire, une centaine de
stéréocils sont alignés en 3 ou 4 rangées de taille croissante. Ils
plongent en totalité dans l'endolymphe.
Une CCI, dont les parois
latérales sont complètement
entourées par la cellule de
Deiters qui la soutient.
Nous verrons que les cellules ciliées internes sont les cellules assurant la transduction
mécano-électrique.
Les cellules ciliées externes, cylindriques, 6 µm de diamètre, ont une
longueur passant de 25 µm au tour basal de la cochlée à 55 µm au 3ème
tour et 70 µm au tour apical.
Le corps cellulaire des CCE baigne dans la périlymphe.
Elles reposent fermement par leur base sur des cellules de soutien, les cellules de Deiters, qui
forment un siège sans les entourer (elles sont d’autant moins entourées que l’on approche
l’apex).
Les cellules de Deiters sont profondément ancrées dans la membrane basilaire et sont
solidaires des mouvements de celle-ci qu'elles répercutent.
CCE à la base de la
cochlée (donc de petite
taille), « assise » sur
une cellule de Deiters.
Les cils les plus longs de
la CCE sont toujours
enchâssées dans la
membrane tectoriale.
CCE à l’apex (donc
plus
grande,
allongée, >70 µm)
simplement posée sur
la cellule de Deiters.
Même les cils très
longs des CCE ne sont
pas implantés dans la
membrane tectoriale.
De fait, nous verrons que les cellules ciliées externes assurent un couplage mécanique entre la
membrane basilaire et la membrane tectoriale. Ce couplage est particulièrement ferme à la
base. Il est encore renforcé par la présence de microtubules dans les cellules de Deiters.
2.3.3 Rôle de transduction de l’oreille interne
2.4 Discrimination sélective des fréquences par la membrane basilaire : théorie de la tonotopie
La tonotopie ou tuning est la discrimination en fréquence que réalise la cochlée et qui lui
permet de reconnaître la hauteur tonale d'un son.
Les théories les plus anciennes sont celles de Helmholtz et de von Békézy, qui sans être
fausses, sont incomplètes et surtout passives (cela est dû aux observations qui se faisaient à
l’époque sur des animaux morts; il était donc impossible de mettre en évidence le
mécanisme actif des CCEs par exemple).
Les théories plus récentes reposent toutes sur la théorie de Gold.
2.4.1 Tonotopie passive : théorie de Helmholtz
Une première explication de ce mécanisme de filtrage remarquable des fréquences par l’oreille
a été donnée par Helmholtz, via le phénomène de résonance.
Selon Helmholtz, la cochlée se comporte comme une batterie de
résonateurs indépendants, comme les cordes d'une harpe.
Toute l'analyse tonale est faite par la membrane basilaire :
chaque tranche de la membrane basilaire est l’analogue d’une
corde de la harpe.
Ces cordes vibrent de manière indépendante : il n’y a pas de
couplage longitudinal.
Dans cette théorie, les cellules ciliées ne jouent aucun rôle dans
l'analyse tonale : ce sont de simples opérateurs de transduction
et c'est le cerveau qui décode l'information.
L’hypothèse de Helmholtz est fondée sur la géométrie de la membrane basilaire, supposée
tendue.
Alors que le diamètre de la cochlée diminue de la base (2 mm) au sommet (1 mm), la
membrane basilaire présente une variation inverse (puisque la lame osseuse spirale va en
rétrécissant) ; la membrane basilaire est large de 0,1 mm à la base de la cochlée (près de
l’étrier) et de 0,5 mm à l'apex (vers l’hélicotrème), pour une longueur de 34 mm (chez
l'Homme). De plus, son épaisseur moyenne est plus faible au sommet qu'à la base.
Selon Helmholtz, les sons aigus (c’est-à-dire de petites longueurs d’onde) vont produire une
résonance de la membrane basilaire dans les régions de petites dimensions, là où la
membrane est de petite taille (c’est-à-dire près de l’étrier).
A l’inverse, les sons graves vont produire une résonance là où la membrane est de plus
grande dimension, c’est-à-dire vers l’hélicotrème.
Malheureusement pour cette hypothèse, la membrane basilaire n'est pas tendue et von
Bekesy a montré qu'elle ne pouvait vibrer par résonance et que ses mouvements ne
pouvaient être que passifs, provoqués par les mouvements des liquides cochléaires.
2.4.2 Tonotopie passive : théorie de von Bekezy
Cette théorie est due à Georg von Bekesy, dont les travaux sont à l'origine de l'expansion
remarquable que connaît aujourd'hui la physiologie de l'audition.
Cette théorie lui valut le prix Nobel en 1961, pour la description de l’onde propagée
cochléaire, mode particulier de réponse de la membrane basilaire.
D’où vient cette onde ?
Le liquide remplissant la cochlée est incompressible. Lorsque l'étrier transmet à la fenêtre
ovale les vibrations sonores, les variations de pression sont appliquées simultanément sur
toute la longueur de la membrane basilaire.
Un déplacement rapide de la plaque de l'étrier vers la rampe vestibulaire se transmet, par les
liquides, à la membrane de Reissner, à la membrane basilaire puis à la membrane de la
fenêtre ronde, laquelle « sort » dans la caisse du tympan lorsque la plaque de l'étrier
« entre », et inversement.
Une vibration de l'étrier va donc provoquer une vibration de la membrane basilaire
entraînée par les différences de pression et le mouvement des liquides qui en résulte.
Du fait de sa structure, la membrane basilaire est beaucoup plus rigide à la base (l’entrée de
la cochlée, près des fenêtres) qu'au sommet (près de l’hélicotrème). En effet, la compliance
(inverse de la raideur) varie dans un rapport de 1 (base) à 105 (Apex).
Par conséquent, pour une même pression continue, la déformation au sommet de la
membrane est cent fois plus grande qu'à la base.
Or, la direction de propagation d'une onde se fait toujours d'un point de raideur élevée vers
un point de raideur plus faible, et ne dépend pas de la façon dont les ondes arrivent.
Il s'ensuit que les oscillations de pression dans la rampe vestibulaire se traduisent au niveau
de la membrane basilaire par une « onde propagée » progressant de la base (les fenêtres)
vers l'apex (l’hélicotrème) avec une amplitude croissante, puis brusquement décroissante, audelà d'un maximum dont la position est fonction de la fréquence de la stimulation sonore.
L’onde propagée est issue de la base de la cochlée et progresse lentement, par couplages
longitudinaux, le long de la membrane basilaire, par opposition aux ondes de compression
qui avancent rapidement (à la vitesse du son) dans les liquides cochléaires.
Quand les fréquences de stimulation varient des aiguës aux graves, l'amplitude des
déplacements de la membrane basilaire atteint un maximum à une distance de plus en plus
éloignée de la base de la cochlée.
Toute l'analyse tonale est faite par la membrane basilaire, en fonction de ses propriétés
mécaniques, et là encore, les cellules ciliées sont de simples opérateurs.
En revanche, il y a dans la théorie de von Békézy un couplage longitudinal : toute la
membrane basilaire vibre de proche en proche jusqu‘à un point maximum qui dépend de la
fréquence de la stimulation sonore.
Onde propagée sur la membrane basilaire et pouvoir de discrimination des fréquences
En a, sur la cochlée déroulée, effet
d'une vibration de fréquence élevée,
représentée au moment où la plaque
de l'étrier s'enfonce dans la fenêtre
ovale.
En b, figuration très amplifiée, pour
une fréquence moyenne de stimulation
de 200 Hz, de 4 positions successives
(1, 2, 3, 4) de la membrane basilaire.
En pointillé, l'enveloppe de cette onde
propagée.
En c, forme et position de la moitié
supérieure de l'enveloppe pour 4
fréquences, indiquées sur les courbes).
(D'après von Bekesy, 1960).
Mouvement (exagéré) de la membrane
basilaire pour un son de plus basse
fréquence (400 Hz)
Mouvement (exagéré) de la membrane
basilaire pour un son de plus haute
fréquence (4 kHz)
De plus en plus flexible
Distance à partir de la base
Il se forme donc le long de la membrane basilaire une onde propagée de vibration qui
débute à la fenêtre ovale et croît le long de la membrane basilaire.
Pour chaque fréquence sonore, un maximum d’amplitude de la vibration apparaît à une
certaine distance de la fenêtre ovale.
Aux basses fréquences, ce maximum se trouve près de l’hélicotrème, tandis qu’aux hautes
fréquences, celui-ci se trouve près de la fenêtre ovale.
On a pu ainsi établir une carte de la
distribution des maxima sur la membrane
basilaire (tonotopie cochléaire), les fréquences
élevées à la base et les fréquences basses à
l'apex.
Le résultat est donc celui qui était prévu par Helmholtz, mais le mécanisme est différent de
celui qu'il avait imaginé.
Position du maximum de la vibration de la membrane basilaire en fonction de la fréquence
2.4.3 Insuffisance de la tonotopie passive
A l'aube des années 80, la compréhension de la physiologie cochléaire butait devant une
contradiction : d'un côté, les neurophysiologistes décrivaient une sélectivité en fréquences
remarquable au niveau des fibres du nerf auditif, de l'autre, la théorie de l'onde propagée
de Békésy empêchait d'envisager la cochlée autrement que sous la forme d'un filtre passif
incapable de rendre compte de cette sélectivité.
Dès 1948 Gold avait parlé de « processus mécaniques actifs ». Plus précisément, la théorie
de Gold est basée sur l’amplification des sons par des éléments cochléaires capables
d’exercer un rétro-contrôle (feedback) de la résonance.
Deux types de résultats venaient alors ébranler la théorie de la cochlée « passive » et
relancer la théorie de Gold :
la découverte des oto-émissions acoustiques qui sont des émissions sonores de la
cochlée, conséquences de l’électromotilité des cellules ciliées externes ;
des mesures précises de la vibration de l'organe de Corti (membrane basilaire) en
réponse à un son pur qui montraient que l'accord en fréquences se faisait avant le départ
du message sur le nerf auditif. Les vibrations cochléaires, mesurées par des méthodes
optiques de plus en plus sophistiquées, montrent des résonances 1000 fois plus amples
que celles de von Békésy et extrêmement fines.
Remarque : les oto-émissions acoustiques (OEA)
Reflet de l'électromotilité des CCE, ce sont des émissions sonore de la cochlée : en effet, les
mouvements des CCEs le long de la MB n’engendrent rien d’autre que des sons.
Ceux-ci se propagent par voie rétrograde vers la fenêtre ovale, puis à travers l’oreille
moyenne et le conduit auditif externe où on peut les enregistrer aisément au moyen d’un
microphone : on les appelle oto-émissions acoustiques (OEA).
Leur présence témoigne de l’intégrité des CCEs. Si les CCEs sont absentes ou lésées, il n’y a
plus l’amplification de 50 dB environ (d’où une surdité de 50 dB environ, combinée à une
mauvaise sélectivité en fréquences et à l’absence d’OEA).
Les OEA peuvent être mise en évidence
expérimentale avec un embout placé dans le
conduit auditif externe. Un Haut Parleur
(HP) envoie le son stimulant très bref (un
clic…) et un Microphone (MP) recueille les
OEA émises par les CCEs. Les OEA sont
visibles sous forme d’une oscillation
prolongée après une excitation brève. La
recherche d’OEA constitue un test simple,
non invasif, rapide, objectif et spécifique de
l'intégrité des CCEs. Ce test utilisé comme
dépistage chez les nouveaux-nés.
2.4.4 Théorie de la tonotopie active
Dans cette théorie, la cochlée est comparée à un système oscillateur régénératif avec
rétrocontrôle de la résonance : la membrane basilaire est l'oscillateur et les CCEs constituent
la source de l'énergie apportée au système (système régénératif).
Si un système oscillateur n'est pas assez fin, des phénomènes de feedback (boucles) cycle par
cycle permettent de rendre le système de plus en plus fin. Ce sont les CCEs qui amplifient à la
bonne fréquence les mouvements de l'oscillateur (de la membrane basilaire) et permettent
au système de rentrer en résonance.
Une analogie mécanique permet de comprendre le rôle de
chaque partie.
La membrane basilaire est assimilée à un ressort qui s'étire selon
l'importance du stimulus (le poids dans notre analogie). Ce
ressort tout seul absorbe l'énergie et ne peut pas rentrer en
résonance.
Les cellules ciliées externes constituent l'amplificateur, qui
apportent de l'énergie au système (système régénératif) et
amplifient à la bonne fréquence les mouvements de l'oscillateur,
ce qui permet la résonance.
Cette théorie de la tonotopie active, encore appelée théorie de l’amplificateur régénératif ou
théorie d’oscillateur à feedback rend compte :
de la grande sensibilité de l’oreille interne : le gain obtenu par le mécanisme d’amplification
est de 100 à 1 000 en pression, c’est-à-dire de 40 à 60 dB.
de la grande sélectivité fréquentielle de l’oreille : filtre étroit mais à réponse lente entre 2 et
20 ms (correspond au nombre de cycle d'amplification pour créer la résonance).
des oto-émissions (auto-oscillations et effet Larsen).
de la non linéarité de l’oreille, avec une efficacité des CCEs qui baisse quand le niveau
sonore augmente.
2.4.5 Détail de la transformation du son en signal électrique et tonotopie active
Les cellules ciliées internes et externes, connectées différemment au système nerveux, ont
en fait des rôles très différents :
un rôle passif de transmission des informations auditives pour les cellules ciliées internes ;
un rôle actif d’amplification des intensités acoustiques pour les cellules ciliées externes.
2.4.5.a Rôle passif des cellules ciliées internes
Lorsqu’un son arrive à l’oreille, il se traduit par de fortes variations de pression dans la
périlymphe de la rampe vestibulaire et par de faibles variations de pression dans la
périlymphe dans la rampe tympanique.
Les vibrations du liquide sont finalement communiquées à l’endolymphe du canal
cochléaire.
L’endolymphe contient des ions positifs (surtout potassium) et est de ce fait à un potentiel
électrique de +80 mV.
Chaque cellule ciliée (interne ou externe) possède à son sommet des stéréocils rigides,
baignant dans l’endolymphe du canal cochléaire.
Les stéréocils de chaque rangée sont reliés entre eux par des ponts de fibres, les liens
apicaux, qui solidarisent les cils d’une rangée.
Les vibrations de l’endolymphe vont à leur tour mettre en mouvement les chaînes de
stéréocils des cellules ciliées.
L’extrémité des cils est percée d’un orifice, le canal cationique, qui permet en s’ouvrant, le
passage des ions potassium entre l’endolymphe et la cellule ciliée.
Au cours de leurs étirements périodiques, les liens apicaux qui relient les cils ouvrent des
canaux cationiques aux extrémités des cils, ce qui permet le passage des ions potassium,
contenus dans l’endolymphe, vers les cellules ciliées internes, qui sont initialement à un
potentiel électrique négatif d’environ -35 à -70 mV.
De manière schématisée :
Un mouvement vers les cils plus grands laisse entre K+, ce qui dépolarise la CCI
(dépolarisation);
Un mouvement vers les cils plus petits referme les canaux cationiques, et il
s’ensuite une hyperpolarisation de la CCI.
http://psych.hanover.edu/JavaTest/Media/Chapter10/MedFig.HairCell.html
Le recyclage du K+ doit être très rapide cycles par secondes puisque la fréquence auxquelles
les stéréocils vont osciller atteignent 20 000 cycles par seconde chez l 'être humain et même
200 000 chez les baleines.
En fait, la dépolarisation de la CCI active des canaux calciques dépendants dont l’ouverture
dépend du potentiel, ce qui accentue la dépolarisation de la cellule ciliée.
Les ions Ca²⁺ déclenchent la libération d'un neurotransmetteur que l'on pense être du
glutamate (souvent abrégé GLU) qui active les fibres du ganglion spiral.
Le calcium entrant est impliqué dans deux mécanismes : libération d’un neurotransmetteur
(glutamate), vers le nerf auditif, et sortie du K+ vers l’endolymphe (recyclage rapide du K+).
En résumé, les ions potassium dépolarisent et excitent les cellules ciliées internes, qui
transmettent au cerveau un message sensoriel électrique via le système afférent radial du
nerf auditif.
Les cellules ciliées internes ont donc un rôle sensoriel direct : elles reçoivent et transmettent
passivement les informations auditives.
La sensibilité des cellules ciliées est étonnante. Hudspeth (1989) estime que la réponse quasi
maximale (90%) d'une cellule est obtenue pour une déflexion des cils de l'ordre de ± 1°.
Notre seuil d'audibilité serait atteint pour une oscillation sinusoïdale des stéréocils
d'amplitude ± 0,003° à 0,004° (ce qui correspond à un déplacement du sommet de la tour
Eiffel de l'ordre de 1,5 à 2 cm). Le potentiel de récepteur des cellules ciliées est alors d'environ
100 µV.
Mécanisme d’adaptation
Le canal de transduction laisse passer des ions lorsque l'inclinaison des cellules accolées a
détendu le ressort qui les relie : le courant entrant augmente brusquement mais, l'inclinaison
étant maintenue, le courant diminue et retourne en quelques dizaines de millisecondes à une
valeur proche de sa valeur de repos (les canaux ouverts par la déflexion se referment
spontanément, la fermeture des canaux K+ intervient avant que les cils ne reviennent vers le
modiolus, en position gauche donc). Cette adaptation s’expliquerait par un glissement des
structures canalaires sous l'action du ressort qui refermerait l'orifice du canal (d'après Lenzi et
Roberts). L'extrémité supérieure des liens apicaux glisserait vers le bas du fait d'un mécanisme
actif lié à l'entrée de calcium et à l'activation d'une myosine présente à ce niveau. Ce
mécanisme d'adaptation permet aux cycles de stimulation de se succéder rapidement.
2.4.5.b Rôle actif des cellules ciliées externes
Les cellules ciliées externes (plus nombreuses que les cellules ciliées internes) ne jouent aucun
rôle de transmission de l’information auditive vers le cerveau.
Par contre, elles sont ancrées dans la membrane basilaire, et sont aussi liées à la membrane
tectoriale.
Leurs membranes latérales sont libres d'échange avec la périlymphe et leur structure, unique
dans l'organisme, permet aux CCE de se contracter (électromotilité) avec des fréquences
égales à la fréquence de stimulation.
C'est sur des CCE dissociées que l'électromotilité a été découverte en 1985. Depuis, cette
propriété contractile originale des CCE a été largement étudiée.
Il s'agit d'un mécanisme rapide (pouvant suivre des fréquences élevées au moins jusqu'à 20
kHz), qui ne dépend ni du calcium, ni de l'ATP (il ne consomme donc pas d'énergie). La
contraction des CCE est le résultat de la somme des contractions d'éléments « moteurs »
localisés dans la membrane latérale des CCE.
On considère aujourd'hui que la dépolarisation de la CCE (entrée de K+ au moment de la
stimulation sonore) modifie la conformation d'une protéine transmembranaire, la prestine,
qui joue ainsi le rôle d'élément moteur (voir animation ci-dessous). Ce concept a été
récemment confirmé, de façon très claire par le clonage du gène de la prestine et sa
délétion, annulant l'électromotilité.
La dépolarisation des CCE déplace les anions,
probablement Cl- , de leurs sites de liaison à la prestine
vers l'intérieur du cytoplasme.
Ce déplacement de charges induit un raccourcissement de
la protéine qui se traduit par un raccourcissement de la
CCE.
A l'inverse lorsque la CCE se repolarise, les anions se lient
à la prestine, entraînant un allongement de la CCE.
Elles réalisent ainsi un couplage mécanique qui rapproche les deux membranes en cas
d’excitation. Ce couplage est surtout efficace à la base de la cochlée.
De ce fait, les mouvements des membranes se répercutent en s’accroissant, d’où leur rôle
mécanique actif d’amplification de l’intensité sonore.
On estime le gain apporté par les
propriétés contractiles rapides des
cellules ciliées externes à environ
50 ou 60 décibels.
De plus, chaque cellule ciliée externe amplifie un domaine de fréquence très restreint, et
l’ensemble joue donc un rôle de filtrage des fréquences.
Deux fréquences très proches peuvent donc activer deux zones distinctes de la cochlée
permettant ainsi de les distinguer l'une de l'autre (sélectivité en fréquences).
Pour certaines fréquences, la discrimination est telle qu’une seule cellule ciliée est
finalement excitée.
Cet accord en fréquences (tuning) dépend étroitement des propriétés d'électromotilité des
CCE et se retrouve à l'identique au niveau des fibres du nerf auditif auquel il est fidèlement
transmis par les CCI.
Comme le couplage des deux membranes est réalisé avec un gradient décroissant de la
base à l'apex de la cochlée, il est surtout efficace à la base de la cochlée, ces mécanismes
actifs et cette amplification sélective est importante pour les fréquences aiguës et
moyennes et plus faible pour les fréquences graves : les fréquences graves sont donc
moins bien discriminées.
http://psych.hanover.edu/JavaTest/Media/Chapter10/MedFig.Ear.html
Présentation générale de l’organe de Corti
http://www.youtube.com/watch?v=1JE8WduJKV4&feature=related
Cellules ciliées
http://www.youtube.com/watch?v=1VmwHiRTdVc
Mouvement de la membrane basilaire
http://www.youtube.com/watch?v=dyenMluFaUw
2.4.5.c Conclusion
Le fonctionnement de l'organe de Corti, pour un son de faible intensité (parole par exemple)
peut schématiquement se résumer en 5 phases :
(1) Les vibrations sonores transmises à la périlymphe font onduler la membrane basilaire
vers le haut et le bas. La tonotopie passive (onde propagée ?) mobilise la membrane
basilaire de la base (sons aigus) à l'apex (sons graves) de la cochlée.
(2) Les stéréocils des CCE, implantés dans la membrane tectoriale sont déplacés
horizontalement : lorsque la membrane basilaire s'élève, les cils sont basculés vers l'extérieur
et la CCE est dépolarisée (entrée des ions K+) .
(3) Les CCE excitées (dépolarisées) se contractent (électromotilité). Du fait du couplage étroit
entre CCE, membrane basilaire et lame réticulaire, ce mécanisme actif fournit de l'énergie
amplifiant la vibration initiale ; en même temps il joue un rôle de filtre sélectif (tonotopie
active).
(4) La CCI est excitée, probablement par un contact direct avec la bande de Hensen de la
membrane tectoriale.
(5) La synapse entre CCI et fibre du nerf auditif est activée et un message est envoyé au
cerveau.
Tableau récapitulatif des principales caractéristiques physiologiques de l’audition
humaine
3 Elaboration du message nerveux
3.1 Innervation des cellules ciliées
Les cellules ciliées internes sont reliées au
cerveau par le système afférent radial ;
chaque cellule ciliée interne est reliée à une
dizaine de fibres afférentes radiales.
Il n’y a pratiquement pas de liaison des
cellules ciliées externes vers le système
nerveux central.
Par contre, il y a une liaison du système
nerveux central vers les cellules ciliées
externes par le système efférent médian.
Ce schéma met en place le système afférent radial (=
nerf auditif : bleu) et le système efférent latéral (rose)
pour la CCI; le système afférent spiral (vert) et le système
efférent médian (rouge) pour la CCE.
Connexions entre la CCI et le tronc cérébral
Les CCIs font synapse avec tous les neurones de type I du ganglion spiral, formant le système
afférent radial (= nerf auditif : bleu) qui relie la cochlée aux noyaux cochléaires. C'est par là
que partent tous les messages auditifs vers le cerveau.
Le système efférent latéral (rose), issu de petits neurones de l'olive supérieure homolatérale
(LSO), effectue un rétro-contrôle sur la synapse CCI/fibre afférente : il intervient notamment
pour protéger cette synapse contre un accident excitotoxique (ischémie ou trauma).
Connexions entre la CCE et le tronc cérébral
Les CCE font synapse avec des terminaisons dendritiques de petite taille des neurones
ganglionnaires de type-II, formant le système afférent spiral (vert) ; rien n'est connu à propos
du rôle de ce système : peut être informe-t-il le système nerveux de l'état de contraction des
CCEs?
Ces dernières sont directement innervées par les grosses terminaisons axoniques (rouge) de
neurones situés bilatéralement dans le complexe olivaire supérieur médian (MSO) : c'est le
système efférent médian dont le rôle est de modérer l'électromotilité (mécanisme actif) des
CCEs.
N.B. Pour mieux visualiser les fibres, les cellules de Deiters n'ont pas été dessinées.
Représentation schématique de l'innervation afférente des cellules ciliées
Les neurones afférents du nerf auditif sont séparés en 2
groupes selon leur origine dans la cochlée : les neurones de
type I et de type II.
Les neurones de type I, de grosse taille et myélinisés (95%
des neurones ganglionnaires) ont une branche périphérique
unique connectée aux CCIs (10 type-I par CCI en moyenne).
Les neurones de type II, plus petits et non myélinisés, suivent
une route spirale, vers la base de la cochlée, pour aller
connecter une dizaine de CCEs, généralement de la même
rangée.
3.2 Potentiels électriques cellulaires
Sous l'influence de stimulations sonores, la membrane basilaire imprime son mouvement
oscillatoire aux organes qu'elle supporte. En particulier, les cils des cellules ciliées de l'organe
de Corti subissent des mouvements périodiques d'inclinaison qui sont à l'origine de la création
de potentiels électriques cellulaires, les potentiels microphoniques et les potentiels de
sommation.
3.2.1 Les potentiels microphoniques
Les potentiels microphoniques ont une origine cochléaire.
Si on place sur le nerf auditif d'un animal anesthésié, une électrode de dérivation reliée à un
haut-parleur par l'intermédiaire d'un amplificateur, on constate que le haut parleur reproduit
les sons émis devant l'oreille de l'animal.
Cela fait dire que l'oreille fonctionne comme un microphone... Ce qui est vrai, c'est
que c'est le microphone qui fonctionne comme l'oreille ! On rappellera que le
microphone fut inventé bien après que l'on ait découvert comment fonctionnait
l'oreille.
On parle de potentiel microphonique cochléaire (PMC) car, comme un microphone, la cochlée
transforme un phénomène mécanique en phénomène électrique (bioélectrique).
Le PMC consiste en une variation de potentiel alternative (millième de volt) qui correspond à
l'image analogique du son en tension. Il est à l'origine de la détection des otoémissions.
Le PMC est à l’origine de la libération du glutamate dans la fente synaptique et de la
naissance du potentiel d’action (différent du PMC) dans les fibres du nerf auditif.
Les PMC sont caractérisés par :
l’absence de propagation : ils naissent et restent au niveau des cellules ciliées ;
ils sont modulés par la fréquence et l’intensité du signal sonore et de même morphologie
que ce dernier :
amplitude maximale en rapport avec l’amplitude de vibration de la membrane
basilaire ;
de même fréquence que le signal sonore ; ils se répartissent le long de la membrane
basilaire selon la fréquence des sons.
ce ne sont pas des potentiels d’action mais des potentiels de récepteurs (ce n’est pas le
message sensoriel proprement dit);
pas de seuil (ou seuil très bas) ;
pas de période réfractaire ;
pas de temps de latence (ou une période très courte, 0,1 ms);
ils sont sensibles à la composition ionique du milieu et à l’anoxie.
Les potentiels microphoniques cochléaires sont de 2 types :
des potentiels microphoniques unitaires, intracellulaires directement enregistrés au niveau
d'une cellule sensorielle ou nerveuse,
des potentiels microphoniques globaux, extracellulaires enregistrés à distance reflétant
l'activité de plusieurs cellules.
3.2.1.a Les potentiels cochléaires globaux
Electrocochléographie (ECoG) est le nom
donné à l'enregistrement des potentiels
microphoniques cochléaires globaux.
Cette technique consiste à placer par voie
trans-tympanique sous anesthésie locale,
une macro-électrode sur le promontoire
(près de la fenêtre ronde) ou à placer des
électrodes bipolaires, de part à d'autre
de l'organe de Corti dans les rampes
vestibulaire et tympanique
3.2.1.b Potentiels cochléaires unitaires
En fonction de la fréquence et de l’intensité de la stimulation acoustique, il y a modulation de
la dépolarisation des CCIs et naissance d’un potentiel intracellulaire en réponse à la
dépolarisation : c’est le potentiel de récepteur ou potentiel microphonique cochléaire unitaire.
Les premiers enregistrements effectués en 1977 par Russell et Sellick ont constitué une étape
importante dans le développement de la physiologie de l'audition. Les cellules ciliées externes
ayant un diamètre inférieur à celui des cellules ciliées internes, leur pénétration étaient plus
difficile et les informations les concernant sont restées jusqu'en 1990 plus fragmentaires.
La figure ci-contre représente le potentiel de récepteur,
obtenu en réponse à une stimulation de 300 Hz pour
différents niveaux d'intensité, ainsi qu'en réponse à une
stimulation de 3 kHz.
On constate qu'à 300 Hz :
Les variations de potentiel de la cellule suivent la fréquence de stimulation.
Cependant, à mesure que l'intensité du son augmente, la différence d'amplitude entre
la dépolarisation et l'hyperpolarisation est de plus en plus accusée.
Avec l'augmentation de la fréquence de la stimulation, le tracé est de moins en moins
symétrique par rapport à sa ligne de base.
Au-delà de 1 000 Hz, la composante phasique est moins importante que la composante
continue.
On voit qu'à 3 kHz, le potentiel de récepteur est essentiellement une dépolarisation continue
dont la modulation de la crête par le résidu alternatif est de plus en plus réduite.
Ce phénomène se traduit par la courbe jointe qui représente la variation d'amplitude du
potentiel de récepteur en fonction de la variation sinusoïdale au tympan pour un son de 200
Hz à 100 dB.
Pour une variation symétrique de pression, la variation du potentiel de récepteur est plus de
trois fois plus forte pour la dépolarisation que pour l'hyperpolarisation.
Cette tendance au redressement est une propriété observée pour d'autres cellules
sensorielles. Elle se manifeste d'autant plus que la fréquence est plus élevée : au delà de
1000 Hz, la composante phasique devient moins importante que la composante continue.
Potentiel de récepteur intracellulaire d'une cellule ciliée interne du tour basal de la cochlée du
cobaye. A-D : en réponse à un son de 300 Hz à différents niveaux d'intensité (indiqués sur les
tracés). E : en réponse à un son de 3 000 Hz. F : relation entre la pression au tympan (variation
sinusoïdale) et l'amplitude du potentiel de récepteur (une division de l'échelle correspond à 3
mV). Stimulation de 200 Hz à 100 dB. On voit que la fonction n'est pas symétrique, la
dépolarisation étant plus importante que l'hyperpolarisation (d'après Sellick et Russell).
3.2.2 Les potentiels de sommation
Les potentiels de sommation ont aussi une origine cochléaire. Ils apparaissent comme une
variation de potentiel soutenue pendant toute la durée de la stimulation sonore.
Les potentiels microphoniques se superposent à cette variation.
Les potentiels de sommation apparaissent sans latence, ni seuil aux endroits où les vibrations
de la membrane basilaire sont d'amplitude maximale.
3.2.3 Distorsion non linéaire
Pour les signaux de faible puissance sonore (jusqu’à 80 dB), le PMC obtenu reproduit
fidèlement la forme de l’onde sonore.
Cependant, il existe une distorsion non linéaire pour des signaux de forte puissance (à partir
de 80 dB et au-dessus) : la linéarité de la transduction n’est plus assurée (distorsion non
linéaire) et le signal électrique ne reproduit plus fidèlement le signal sonore.
À ce moment, le PMC recueilli peut être considéré comme la somme :
d’un PMC dont l’amplitude n’est plus proportionnelle à l’intensité du stimulus mais dont la
fréquence reste identique ;
d’un potentiel continu appelé potentiel de sommation le plus souvent négatif.
Dans l’exemple ci-contre : a) correspond à
un PMC répondant à un son pur de
puissance acoustique modérée (inférieure
à 80 dB) ; b) correspond à un PMC
répondant à un son pur de forte
puissance, c’est la somme d’un PMC et
d’un potentiel continu ou potentiel de
sommation représenté en c).
3.2.4 Le codage de l'intensité (CCI)
La relation entre l'amplitude du potentiel de récepteur des cellules ciliées internes et
l'intensité de la stimulation est représentée pour une cellule ciliée interne répondant, à des
stimulations d'intensité croissante respectivement de 2 kHz à 17 kHz.
On retrouve la fonction de couplage logarithmique caractéristique des transducteurs
sensoriels :
3.2.5 Le codage de la fréquence (CCI)
Alors que le codage de l'intensité était prévisible (conformité de la courbe en S
caractéristique des transducteurs sensoriels), c'est le mérite de Russell et Sellick en 1977
d'avoir révélé que la sélectivité fréquentielle des cellules ciliées est du même ordre que celles
des fibres du nerf auditif.
Pour une cellule ciliée interne, les courbes d'iso-réponses intensité-fréquence sont obtenues,
en portant en fonction de la fréquence de stimulation, le niveau d'intensité nécessaire pour
obtenir un potentiel de récepteur donné (composante continue) respectivement de 0,4 mV,
0,2 mV, et 0,04 mV. Elles présentent une sélectivité fréquentielle très étroite.
3.3 Potentiels d’action
Ces PMC ne déclenchent que plus loin, au niveau du nerf auditif, la formation de potentiels
d’action, le long des voies nerveuses.
Ces potentiels d’action n’ont alors plus la même forme que les sons qui leur ont donné
naissance, mais ils ont l’aspect typique de potentiels d’action :
ils se présentent sous la forme d’influx rythmés de forme non sinusoïdale appelés « spikes » ;
ils obéissent à la loi du tout ou rien ;
ils ont un temps de latence ;
ils possèdent une période réfractaire.
L’oreille, à la fois capteur et transducteur, fournit un message électrique de type analogique : le
potentiel microphonique cochléaire, reproduisant le message sonore dont elle a effectué
l’analyse spatiale des fréquences.
Les voies nerveuses ne peuvent transmettre le message que de façon impulsionnelle, sous
forme de potentiels d’action, sans que la fréquence des impulsions puisse dépasser 1 000 Hz (à
cause de la période réfractaire des potentiels d’action).
Potentiels unitaires
Enregistrement d'un potentiel d'action unitaire sur une fibre du nerf
auditif (technique expérimentale sur l'animal).
Une micro-électrode de verre (flèche) permet d'enregistrer l'activité unitaire d'une fibre du
nerf auditif. Cette fibre auditive répond à la stimulation sonore (pointe rouge) par l'envoi d'un
potentiel d'action (PA) vers le cerveau. Le délai (latence) entre le stimulus sonore (flèche
rouge) et le potentiel est d'environ 1 ms. L'amplitude des PA unitaires est de l'ordre du
millivolt (mV).
Potentiel cochléaire composite ou global
Enregistrement au niveau de la fenêtre ronde du potentiel cochléaire composite.
Une macro-électrode placée sur le promontoire, près de la fenêtre ronde, permet
d'enregistrer le potentiel d'action composite (CAP) du nerf auditif qui reflète l'activité
synchrone de l'ensemble des potentiels d'action unitaire en réponse à une stimulation sonore
(pointe rouge).
Le potentiel est plus complexe que le potentiel d'action unitaire, mais la première onde (N1)
correspond au potentiel unitaire de la figure précédente. L'amplitude du CAP mesurée entre
N1-P1 est de l'ordre de quelques dizaines de microvolts (µV). Les réponses successives sont
additionnées plusieurs fois grâce à un moyenneur pour éliminer le bruit du fond parasite.
4 Voies nerveuses et cerveau auditif
4.1 Le nerf cochléaire (ou nerf auditif)
Chez l'homme , le nerf auditif est formé par les axones d'environ 30 000 neurones qui ont leur
corps cellulaire situé dans le ganglion spiral. Le nerf cochléaire forme, avec la juxtaposition du
nerf vestibulaire, la huitième paire crânienne.
Il est le vecteur d'informations concernant :
L'intensité de la stimulation codée par la fréquence des potentiels d'action.
La hauteur tonale codée :
d'une part, par la localisation du message sensoriel dans telle population de
fibres,
d'autre part, pour les sons graves par la périodicité de la répartition des
potentiels d'action dans le message.
Le rôle du système nerveux central est d'extraire, du message brut, de relais en relais, de
nouvelles informations, permettant de passer de ces données fondamentales mais
élémentaires, à la richesse de notre univers sonore.
4.2 Les messages du nerf cochléaire
Il est possible avec une microélectrode de recueillir les activités unitaires dans le nerf
cochléaire. On dispose maintenant d'un bon nombre de données sur les réponses individuelles
des fibres du nerf cochléaire à une grande variété de stimuli (chat, cochon d'Inde et singe).
4.2.1 Activité spontanée
En l'absence de toute stimulation sonore, la majorité des fibres présentent une activité
spontanée. Le taux de décharge, généralement faible (5 à 70 spike/s), peut atteindre
spontanément des niveaux plus élevés. La répartition des impulsions semble aléatoire.
Il est intéressant de noter que ce sont les fibres
les plus sensibles (10%) qui pourront atteindre
des niveaux de 800 spike/s.
Par ailleurs 10% de fibres ont un taux de décharge
quasiment nul par l'intermédiaire de synapses
inhibitrices.
4.2.2 Réponse à un stimulus
Une stimulation sonore (bouffée tonale)
entraîne une augmentation du nombre de
potentiels d'action unitaires dans les fibres
du nerf auditif.
Cette augmentation du taux de décharge,
synchronisée avec la stimulation, est
appelée activité évoquée. La présence de
potentiels d'action pendant les périodes de
silence reflète l'activité basale de la fibre,
également appelée activité spontanée.
4.2.3 Réponse d’une fibre du nerf auditif
Les fibres du nerf auditif transmettent les potentiels d'action au système nerveux central.
On savait peu de choses sur la manière dont la vibration des cellules phono-sensibles
engendre des décharges d'influx dans les arborisations dendritiques des cellules du ganglion
de Corti. On pensait que les potentiels microphoniques et sommés excitent ces arborisations
puisque celles-ci pénètrent la base des récepteurs sensoriels.
Pour des sons de fréquence et intensité adéquats, toutes les fibres ont une réponse
caractéristique.
L'excitation dure le temps de la stimulation et débute avec une latence de 1 à 10
msec.
Comme pour tous les autres récepteurs nerveux, le taux de décharge suite à un
stimulus continu s'adapte dans le temps. La diminution est reliée au logarithme de la
durée de la stimulation.
A l'arrêt du stimulus, le taux de décharge chute bien au-dessous du niveau de
l'activité spontanée
4.2.3.1 Codage de la fréquence du stimulus : courbe d’accord d’une fibre
On sait maintenant que chaque fibre du nerf cochléaire sont présente un seuil d'activation qui
est minimal pour une certaine fréquence appelée Fréquence Caractéristique (F.C.) ou
préférentielle. Le seuil d’activation s'élève rapidement dès qu'on s'éloigne de cette
fréquence.
Au plus bas niveau de la stimulation, la fibre ne répond qu'à sa fréquence caractéristique.
A mesure que le niveau s'élève, la fibre est activée par des fréquences de plus en plus
éloignées de sa fréquence caractéristique, principalement vers les basses fréquences.
La figure ci-contre montre les réponses d'une
fibre du nerf cochléaire chez le cobaye.
Le son stimulus est continu. Sa fréquence croît
et décroît alternativement, et après chaque
passage, le niveau est augmenté de 5 dB.
Au seuil, environ 20 dB, la fibre ne répond (un
seul potentiel d'action) qu'à sa fréquence
caractéristique, égale à 10 kHz ;
à mesure que le niveau de stimulation s'élève,
la bande des fréquences efficaces s'élargit.
Au plus haut niveau testé, 90 dB au dessus du
seuil minima, cette fibre répond à des
fréquences comprises entre 1 et 11 kHz.
La limite de l'aire fréquence-intensité, en tirets sur la figure précédente, définit les seuils
d'activation de la fibre pour les différentes fréquences.
C'est la courbe des seuils de réponse de la fibre, en fonction de la fréquence de stimulation.
Elle est plus abrupte du côté des fréquences élevées, ce qui sera accentué par l'utilisation
d'une échelle logarithmique de fréquence.
La courbe ainsi obtenue traduit la sélectivité fréquentielle de la fibre ; on l’appelle aussi «
courbe d'accord »
Les neurones de type I ont une courbe d'accord
typique avec une pointe, qui permet de définir
leur meilleure fréquence et leur seuil de
réponse à cette fréquence, et une queue
étendue vers les basses fréquences :
Courbe d'accord unitaire d'une fibre du nerf
auditif
4.2.3.2 Codage de la fréquence du stimulus : tonotopie des fibres nerveuses
L'exemple montrait une fibre pour laquelle le seuil de réponse d'intensité la plus faible
correspondrait à une fréquence de 10 kHz (FC = 10 kHz). Cette fibre innerve les cellules ciliées
localisées sur la région correspondant au maximum de déplacement de la membrane
basilaire pour cette fréquence.
Kiang a regroupé des courbes analogues. Ces courbes des seuils de réponse, en fonction de la
fréquence, sont déterminées pour 16 fibres du nerf cochléaire du chat.
L'origine de l'échelle des niveaux de stimulation a été fixée approximativement. De ce que
nous savons de la cochlée, nous pouvons conclure que les fibres dont les courbes sont situées
à l'extrême gauche (fréquences basses) proviennent de l'apex où la membrane basilaire est
large, et celles dont les courbes sont situées à l'extrême droite de la base où la membrane
basilaire est étroite.
Cette répartition des fréquences caractéristiques
dans la population des fibres du nerf, en
correspondance avec la tonopie cochléaire,
constitue l'élément essentiel du codage de la
fréquence du stimulus.
Les fibres innervant la partie apicale ont une fréquence caractéristique basse et celles
innervant le tour basal une fréquence élevée.
Cette répartition des fréquences caractéristiques dans la population des fibres du nerf, en
correspondance avec la tonotopie cochléaire, constitue l'élément essentiel du codage de la
fréquence du stimulus.
Ces courbes présentent des résonances très fortes, du fait de la tonotopie de la membrane
basilaire, rehaussée par l'action des CCE.
De plus, on a montré qu'une fibre qui innerve les cellules ciliées localisées sur la région
correspondant au maximum de déplacement de la membrane basilaire pour cette fréquence
présentait un seuil de réponse d'intensité la plus faible pour une fréquence caractéristique de
1000 Hz.
4.2.3.3 Courbes d’accord et audiogramme
Enfin, on a montré que si l'on rejoignait les points correspondant aux seuils de plus grande
sensibilité à une fréquence caractéristique (courbe des seuils minima des fibres cochléaires),
on obtenait une courbe voisine de celle de l'audiogramme de l'espèce étudiée. Cela est vrai
pour le chat, le cochon d'inde et diverses autres espèces de mammifères.
4.2.3.4 Analyse de la sélectivité fréquentielle
Pour les fibres de fréquence caractéristique supérieure à 2 kHz , les courbes de seuils sont
asymétriques et constituent de remarquables filtres.
Du côté des hautes fréquences, la pente quasi verticale traduit l'absence de réponse pour des
fréquences supérieures à la fréquence caractéristique, même à des niveaux d'intensité élevée.
Du côté des basses fréquences, la pente plus faible diminue encore pour des niveaux
d'intensité croissante. A des intensités de 70-100 dB SPL, on obtient une queue d'activité vers
les basses fréquences.
Pour des intensités de 40-60 dB, au dessus du seuil, les fibres cochléaires forment des filtres
étroits, dont les bandes passantes correspondent à 1/2 octave à 0,2 Khz, et à 1/10 d'octave à
20 kHz.
Ces courbes pointues sont superposables à celles d'isoréponse de la membrane basilaire et
des superpositions des réponses
4.2.3.5 Codage de l’intensité
Le niveau de pression sonore est codé par la fréquence des potentiels d'action de la décharge,
et la durée du stimulus par la durée de la décharge.
On représente le nombre de potentiels d'action
par seconde de la fibre du nerf cochléaire (en
ordonnée) en fonction du niveau de pression
sonore en décibel (abscisse). Chaque fibre est
stimulée à sa fréquence préférentielle
indiquée sur les courbes ci-contre.
La relation s'exprime par une courbe en S avec
saturation pour des intensités variant de 20 à
50 dB au dessus du seuil.
Dans cet exemple, les fibres ont une activité spontanée très faible. On notera que les pentes
et les niveaux de saturation sont variables (Travaux de Rose).
Pour une fréquence caractéristique donnée, on trouve des neurones dont le seuil de réponse
est très variable, les uns répondant pour des niveaux très faibles, de l'ordre du seuil subjectif
au son test, alors que d'autres neurones ont des seuils de l'ordre de 40, voire 70 ou 80 dB.
Ceci indique que des neurones issus d'une cellule ciliée interne donnée peuvent avoir des
réponses très différentes selon le niveau du stimulus choisi.
La marge dynamique d'une fibre est donc relativement restreinte.
Cela s'explique par le fait que la fréquence maximale de décharge atteint rarement 300 s-1. De
plus, cette marge se trouve réduite dans certaines fibres par l'existence d'une activité
spontanée importante.
Précisons qu'une augmentation de
l'intensité du stimulus provoque non
seulement une augmentation de la
fréquence de décharge des potentiels
d'action mais également l'activation
de nouvelles fibres de fréquences
caractéristiques voisines (phénomènes
du recrutement).
Nous verrons que la non linéarité de la
réponse, traduite par la saturation de
taux de décharge, pose encore
quelques
problèmes
dans
l'interprétation
périphérique
du
codage de l'intensité.
Lorsqu'un neurone est stimulé à une
fréquence donnée et à une intensité
croissante, la fréquence de décharge des
potentiels d'action (évaluée en nombre de
potentiels
d'actions
par
seconde)
augmente à partir d'une valeur de repos,
dite cadence spontanée.
L'augmentation de la cadence des
potentiels d'action est sensiblement linéaire
au niveau de stimulation en décibels.
Cependant, on observe une saturation de
cette cadence lorsque le niveau de
stimulation dépasse 40 décibels environ audessus du seuil du neurone étudié.
En résumé, dans le message nerveux, la fréquence du son est codé tonopiquement,
l'intensité est codée par la cadence des décharges des fibres nerveuses.
4.2.4 Synchronisation
4.2.4.1 Généralités
En utilisant une fréquence de stimulation assez basse, on peut vérifier :
Que l'apparition des potentiels d'action ne se produit pas au hasard, mais en phase avec
la stimulation.
Qu'il n'apparaît pas un potentiel d'action par période, mais que, lorsqu'il apparaît, c'est
toujours au même moment de la période.
La probabilité d'apparition des potentiels
d'action dans une même demi-période peut
être évaluée par ordinateur.
Pour une fréquence de 1 kHz, les potentiels
d'actions sont groupés dans une 1/2
période, alors que pour une fréquence de 5
kHz, ils sont répartis également dans toute la
période.
Animation : synchronisation
Ce phénomène de « perte de phase » est à rapprocher de ce que nous avons dit du
fonctionnement des cellules ciliées.
A mesure que la fréquence de stimulation s'élève, la composante continue du récepteur
tend à dominer la composante périodique, d'où une libération continue du médiateur
responsable de l'excitation de la fibre.
4.2.4.2 Taux de synchronisation
On appelle taux de synchronisation la différence dans le pourcentage des potentiels observés
entre la demi-période la plus efficace et la demi-période la moins efficace.
Une synchronisation complète de 100% correspond au groupement des potentiels dans une
même demi-période (100 - 0 = 100).
Une absence de synchronisation (0 %) correspond à une répartition identique dans chaque
période (50 - 50 = 0).
Rose a mesuré les taux de synchronisation de l'activité d'une fibre du nerf cochléaire de
fréquence préférentielle de 4 kHz chez le singe écureuil.
Les fréquences successives de stimulation à 1 kHz ; 2,5 khz ; 3 kHz et 5 kHz sont indiquées sur
chaque histogramme.
Les échelles d'abscisse sont ajustées à la
période du stimulus et partagées en10. En
ordonnée, est porté le pourcentage du
nombre de potentiels d'action « tombant »
dans chacun de ces 10 intervalles, en
pourcentage de l'activité totale. Chaque
stimulation a été répétée 5000 fois, et la
hauteur
de
chaque
colonne
des
histogrammes indique le nombre des
potentiels d'action apparus dans chacune
des 10 fractions de la période. Pour chaque
histogramme est noté le taux de
synchronisation.
4.2.4.3 Histogramme de distribution des durées qui séparent deux potentiels d'action successifs
La synchronisation de la réponse avec la fréquence de stimulation peut être mise en évidence
par une autre méthode.
Rose a représenté la distribution périodique des intervalles entre potentiels d'actions pour une
même fibre répondant à un son de fréquence 408 Hz puis à un son de 1 kHz. L'échelle
d'abscisse est divisée en 200 échelons de 0,1 msec et les valeurs en ordonnée correspondent
à l'effectif de chacun des échelons de 0,1 ms à 20 msec.
Si l'on construit ces histogrammes de distribution des durées qui séparent deux potentiels
d'action successifs, on constate que ces durées sont des multiples de 2,45 msec pour le son de
408 Hz et de 1 msec pour le son de 1 kHz, c'est-à-dire un multiple de la période (T = 1/f) du
son.
On remarquera que ce phénomène de mise en phase persiste aux intensités élevées de
saturation comme lors de variation d'intensité à des seuils infraliminaires.
On notera que cette synchronisation s'observe indépendamment de la fréquence
préférentielle de la fibre, voisine de 18 kHz dans ces dernières expériences. Cette fréquence
caractéristique se révèle en revanche, si l'on utilise une stimulation brève formée d'un
ensemble de fréquences diverses, c'est-à-dire, un clic multifréquentiel.
4.2.4.4 Théorie de la volée
La théorie de la volée (volley theory) pour la perception de la hauteur développée par Waver
et Bray s'appuie sur la théorie de la localisation, bien que le temps ait un rôle beaucoup plus
important. La hauteur perçue d'un son est ainsi liée au temps entre les impulsions nerveuses
provoquées par le son.
Les envois nerveux se produisent à une certaine phase par rapport à la forme d'onde du
stimulus. Ainsi, un son de 500Hz a une période de 2ms : les impulsions seront espacées de 2*k
ms, k étant un entier supérieur à 1. Ainsi, les intervalles entre les envois correspondent
approximativement aux multiples entiers, c'est-à-dire les harmoniques, du stimulus.
Cependant, les nerfs auditifs ne peuvent émettre plus de 1000 impulsions par seconde, cette
théorie explique donc les phénomènes de perception en deçà de 1000Hz.
Animation : théorie de la volée
Aux basses fréquences, le phénomène de mise en phase pour chacune des fibres, regroupé
sur l'ensemble des fibres issues d'une CCI, explique que la fréquence des potentiels d'action
suivent la fréquence de stimulation.
Ce phénomène est dépassé aux hautes fréquences
Volley Principle
Sound Stimulus
1
0
0
1
-1
Neurons
A
B
C
SUM
Volley Principle
Sound Stimulus
1
1
1
0
0
0
0
0
0
1
1
1
-1
-1
-1
Neurons
A
B
C
SUM
Volley
Principle
A neuron alone
Sound Stimulus
1
1
1
0
0
0
0
0
0
1
1
1
-1
-1
-1
Neurons
A
B
C
SUM
Volley
Principle
B neuron alone
Sound Stimulus
1
1
1
1
0
0
0
0
0
0
0
0
1
1
1
1
-1
-1
-1
-1
Neurons
A
B
C
SUM
Volley
Principle
C neuron alone
Sound Stimulus
1
1
1
1
1
0
0
0
0
0
0
0
0
0
0
1
1
1
1
1
-1
-1
-1
-1
-1
Neurons
A
B
C
SUM
Volley
Principle
All Together
Sound Stimulus
1
1
0
0
0
0
1
1
-1
-1
Neurons
A
B
C
SUM
Volley
Principle
All Together
Sound Stimulus
1
0
0
1
-1
Neurons
A
B
C
SUM
4.3 Potentiel évoqué auditif du tronc cérébral
4.3.1 Méthode de stimulation
4.3.1.1 type de stimulus
Le stimulus employé est un signal électrique de forme carré de 100 à 200 µs appliqué à un
écouteur et produisant dans celui-ci un bruit bref qui donne son nom au stimulus : click. Ce
click a une énergie sonore distribuée dans les fréquences médium aiguës.
4.3.1.2 échelles d'intensité
L'intensité du click peut varier selon une échelle logarithmique (de 5 en 5 décibels : dB). Le
maximum correspond à 110-130 dB SPL (Sound Pressure Level). Le 0 dB correspond donc à la
valeur moyenne du seuil d'audition. L'échelle relative d'intensité par rapport au niveau
normal d'audition (Normal Hearing Level) est en dB HL. Le 0 dB correspond donc à la valeur
moyenne du seuil d'audition. Pour les potentiels évoqués du tronc cérébral on utilise
généralement une intensité de 70 dB HL
La fréquence de répétition des clicks est habituellement de 10 par seconde à 70 par seconde.
Selon que le click provoque un mouvement de la membrane de l'écouteur vers le tympan ou
dans le sens opposé on parle de condensation ou de raréfaction. On peut également utiliser
alternativement les deux polarités de clicks, ce qui diminue l'artefact microphonique
cochléaire. Il est habituel de masquer l'autre oreille en lui délivrant un stimulus sonore, un
bruit blanc, de 20 à 40 dB au dessous de l'intensité à laquelle l'autre oreille est stimulée. La
stimulation est toujours monaurale. On moyenne environ 2000 réponses évoquées afin
d'obtenir une réponse stable et d'amplitude suffisante pour les mesures.
4.3.2 méthode d'enregistrement
L'activité électrique enregistrée sur le scalp à la suite d'une stimulation auditive par un click
est produite à la hauteur du nerf cochléaire, dans le pont, le mésencéphale et le cortex
cérébral. Le montage utilisé le plus couramment est bipolaire : une électrode au vertex, l'autre
fixée au lobe de l'oreille ipsilatérale. Une électrode de terre est placée soit au milieu du front
soit à l'autre oreille.
4.3.3 Description des résultats
Les potentiels évoqués du tronc cérébral se présentent comme une succession de 6 pics
numérotés I à VI et de latence inférieure à 10 msec. Contrairement aux conventions, l'usage
est de représenter une positivité du vertex par rapport à l'électrode de référence par une
déflexion vers le haut.
Le pic V est le plus ample et le plus aisément identifiable. Le pic IV peut être plus ou moins
accolé au V. Le pic I est constant tandis que le pic II l'est moins.
A la suite de différents travaux effectués chez l'animal on s'accorde généralement sur le fait
que les réponses évoquées auditives précoces prennent leur source dans le tronc cérébral.
Cependant certaines composantes d'une même onde peuvent avoir différentes origines. Le
diagnostic topographique d'une anomalie n'est donc pas fiable. L'onde I est engendrée au
niveau du nerf VIII dans la cochlée. Chez le cobaye, l'onde II provient du noyau cochléaire
(bulbe). L'onde III du complexe olivaire supérieur contralatéral (protubérance) pour ce qui est
de la composante P3 et du lemnisque latéral contralatéral pour la composante N3. L'onde N4
proviendrait du lemnisque latéral et P4 de la région latérale du pont. L'onde V serait issue du
colliculus inférieur (partie haute du pont). Les ondes VI et VII correspondraient au corps
genouillé médian (thalamus) et aux radiations auditives. Cependant il peut y avoir une
absence d'ondes avec une audition normale.
4.4 Les voies auditives centrales
L'audition, comme toute autre modalité sensorielle, possède une voie et des centres primaires,
c'est-à-dire totalement dédiés à cette fonction, et des voies dites non primaires où convergent
l'ensemble des modalités.
Après le premier relais (noyaux
cochléaires), qui est commun à toutes les
voies auditives, de petites fibres
rejoignent la voie réticulaire ascendante
commune à toutes les modalités
sensorielles.
Après plusieurs relais dans la formation
réticulée, puis dans le thalamus non
spécifique, cette voie aboutit au cortex
polysensoriel. Le rôle de cette voie, qui
regroupe les différents messages
sensoriels envoyés simultanément au
cerveau, est de permettre une sélection
du type d'information à traiter en priorité
; elle est reliée aux centres des
motivations et d'éveil, ainsi qu'aux
centres de la vie végétative. Par exemple,
lors de la lecture d'un livre pendant
l'écoute d'un disque, ce système permet
à l'attention de se fixer sur la tâche la
plus captivante et/ou la plus importante.
Schématiquement, cette voie
est courte (3 ou 4 relais), rapide
(grosses fibres myélinisées) et
aboutit au cortex auditif
primaire.
Elle
véhicule
l'information
codée par la cochlée, chacun
des relais effectuant un travail
spécifique de décodage et
d'interprétation qui est ensuite
transmis aux relais supérieurs.
Les voies auditives primaires ont une organisation complexe.
Très schématiquement, le message auditif est traité à quatre niveaux :
le tronc cérébral (noyaux cochléaires et
complexe olivaire supérieur),
le mésencéphale (colliculus inférieur),
le diencéphale (corps genouillé médian),
le cortex.
De la périphérie vers le centre, dans les voies auditives primaires, l'influx nerveux émis dans la
cochlée traverse les étages suivants :
les noyaux cochléaires qui réalisent une analyse et un codage des propriétés physiques du
son. On trouve là de nombreuses connexions de type convergente-divergente (un grand
nombre d'afférences et un grand nombre d'efférences) Il y a là des neurones spécialisés,
sensibles soit à une certaine fréquence, soit à une certaine intensité ; d'autres sont sensibles
à des variations de fréquence ou d'intensité, voire à certains sons complexes. On y retrouve
une tonotopie (regroupement géographique des neurones suivant les caractères du son
auxquels ils sont sensibles, par exemple la fréquence).
Après le premier relais dans le noyau cochléaire, la projection est bilatérale, avec cependant
une dominance controlatérale. Ainsi, chaque structure reçoit des informations en
provenance des deux oreilles.
Bien qu'il reste beaucoup à faire dans le domaine de la physiologie des centres auditifs,
l'originalité fonctionnelle des diverses structures peut être esquissée, des noyaux
cochléaires aux diverses aires corticales.
Cette originalité fonctionnelle coexiste avec une stricte cochléotopie, c'est-à-dire une
répartition, dans le volume de chaque structure, des projections des diverses régions de
l'épithélium sensoriel (membrane basilaire et cellules ciliées).
En conséquence, à l'étalement des fréquences audibles sur la longueur de la membrane
basilaire correspond une distribution systématique de ces fréquences dans les structures
centrales.
les noyaux olivaires, qui jouent un rôle dans la localisation. C'est là qu'ont lieu les
premières afférences
binaurales
(homolatérales
activatrices,
controlatérales
inhibitrices) ; certains neurones sont sensibles à des différences interaurales de temps
(latences, phases) ou d'intensité. De ces centres partent des connexions vers d'autres
noyaux nerveux comme le nerf VII qui transmet le réflexe stapédien.
Les centres immédiatement supérieurs sont moins bien connus :
le lemnisque latéral, dans lequel on retrouve toujours une certaine tonotopie,
le colliculus inférieur, où l'on observe des cartes en azimut (direction d'incidence du son),
qui joue donc un rôle important dans la localisation.
dans le corps géniculé médial (immédiatement sous-cortical), on trouve ensuite des étages
répondant exclusivement à différents sons complexes, tels que des voyelles ou des consonnes
pour la compréhension de la parole.
enfin, les aires auditives corticales réalisent un traitement complexe dans lequel on retrouve
de nombreuses connexions de type convergente-divergente. Le traitement y est largement
parallèle, et réparti sur les aires avec une large interconnexion des aires y compris à travers les
hémisphères ; il n'y a pas de spécificité exclusive des aires, et même leurs rôle et
fonctionnement peuvent largement évoluer par plasticité.
Ces éléments sont résumés dans le tableau suivant :
Schéma des principales voies auditives ascendantes. Les jonctions et bifurcations concernent les
voies et non obligatoirement les fibres. On a représenté, grossis, en coupe transversale, avec
leur organisation tonotopique, l'olive latérale supérieure, le colliculus inférieur et le corps
grenouillé médian. b, h, m indiquent les fréquences, respectivement basses, hautes et
moyennes.
5 Développement du système auditif
Chez tous les mammifères, la mise en place du système sensoriel s’effectue toujours dans le
même ordre : toucher, olfaction, gustation, audition, vision.
Autour de 5 à 6 semaines d’âge gestationnel, le système cochléaire et le vestibule se
différencient. C’est autour de la septième semaine que les osselets commencent à croître. La
cochlée humaine entre en fonction autour de la dix-huitième semaine (quatre mois et demi
environ). Mais son développement s’achève à la naissance. Après le cinquième mois de la
grossesse, la mise en place du système auditif est terminée. On peut alors parler de
perception auditive fœtale.
Le cerveau auditif lui se développe après la naissance eu nourrisson et se poursuit pendant 6
ans environ.
Le fœtus se met à réagir à des sons vers la 16ème semaine, alors même que la construction
anatomique de son oreille n’est pas terminée. L’échographie montre que des sons émis à
proximité de l’abdomen de la mère entraînent des mouvements du fœtus et des
modifications de son rythme cardiaque qui représentent une réponse fœtale à un stimulus
sonore.
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