Partie 1 : Du sauvage au primitif, la genèse de la
pensée
anthropologique sur "les peuples de la nature"
Le but de ce cours est de revoir l'histoire de l'anthropologie dans son rapport à la nature.
I La vision de l'autre du XVIème au XVIIIème, un débat autour de la
nature pour
parler de la société
François Laplantine
, Clefs pour l'anthropologie
Le XVIème est le siècle des voyages et de la découverte du Nouveau Monde. C'est la confrontation à
l'altérité absolue, ce qui marque une révolution de la pensée. Quand on découvre les Indiens d'Amérique ou
les noirs d'Afrique, on se demande simplement si ces individus relèvent de l'humanité. Les différences
physiques ou culturelles (langues, parfois tonales) sont frappantes. De l'autre côté, comme l'explique
Lévi-
Strauss
dans Race et histoire
la démarche est la même : « Dans les Grandes Antilles, quelques années après
la découverte de l’Amérique, pendant que les Espagnols envoyaient des commissions d’enquête pour
rechercher si les indigènes avaient ou non une âme, ces derniers s’employaient à immerger des Blancs
prisonniers, afin de vérifier, par une surveillance prolongée, si leur cadavre était ou non sujet à la
putréfaction. »
La Controverse de Valladolid
(voir le film de de Jean-Daniel Verhaeghe)
C'est un débat qui a eu lieu en 1550 à la demande de Charlequin et opposa principalement le dominicain
Bartolomé de Las Casas
au théologien
Juan Ginés de Sepúlveda
.
Sepúlveda
prône la loi naturelle ou divine. Il justifie la conquête par la thèse aristotélicienne de
l'esclavage. Les peuples barbares doivent être esclaves des peuples civilisés.
Las Casas
constate que certaines traditions sont aussi développées voire plus que les nôtres, il sont
plus civilisés que nos sociétés (exemple de la Saint Barthélémy).
Cette événement marque la naissance des figures du mauvais sauvage et du bon civilisé, et inversement.
Le mauvais sauvage mange de la viande crue, parfois humaine, il est nue, au langage inarticulé, il est
rapproché de l'animal dans le sens du manque. « être vivant dénué de langage et de faculté de raisonner »
Le bon sauvage est utilisé pour stigmatiser la société occidentale :
Amerigo Vespuci
dit « les gens
sont nus, beau, foncés de peau »,
Christophe Colomb
aussi insiste sur la simplicité des sauvages, dans leurs
rapports familiaux, de gouvernent…
dans une pièce : L'arlequin Sauvage, de
Louis-François Delisle de La Drevetière
un Indien en
Europe
« vous êtes fou, vous vous attelez avec beaucoup de précision à chercher des choses inutiles »
Sauvage vient du latin
silva
: la forêt. Le sauvage est celui qui vient de la forêt.
Il y a 18 000 ans, la forêt couvrait 50% de la surface (23% aujourd'hui), la Culture s'est construite en
empiétant sur la forêt, la nature. Le sauvage fait partie de la nature et s'oppose au social, au civilisé.
Cornelius de Pauw
(1739 - 1799), dont parle
M. Duchet
dans Anthropologie et histoire du siècle des
Lumières montre que le climat a abrutit ces personnes. Cette vision se retrouve dans les deux visions du
sauvage. La proximité à la nature n'est pas remise en cause, mais seulement ces conséquences. La nature a
soit
un effet abrutissant et rend ces peuples misérables, de l'autre, cette proximité permet la simplicité, la
légèreté
de l'existence.
La nature est ce qu'il y a de plus éloigné du social, mais permet d'engager une réflexion sur le social.