Chili : la terre a tremblé et la côte s`est soulevée

Chili : la terre a tremblé
et la côte s’est soulevée
Institut de recherche pour le développement - 44, boulevard de Dunkerque, CS 90009
F-13572 Marseille Cedex 02 - France - www.ird.fr
Retrouvez les photos de l'IRD concernant cette che, libres de droit pour la presse,
sur www.ird.fr/indigo
Fiche n°355 - Septembre 2010
Le 27 février 2010, à 3 h 30 du matin, le
centre du Chili a tremblé pendant près de
trois minutes. Cet énorme séisme, d’une
magnitude de 8,8, est l’un des six plus puis-
sants jamais enregistrés. Le tremblement
de terre et le tsunami qui s’ensuivit ont fait
environ 500 morts. Treize millions de
chiliens, soit près de 80 % de la population,
ont été directement touchés. Le séisme a
causé de nombreux dégâts : bâtiments et
ponts effondrés, électricité et téléphone
coupés… Au total, les pertes sont évaluées
entre 15 et 30 milliards de dollars. Son
épicentre est situé dans l’océan Pacique,
à environ 6 km des côtes chiliennes, à
115 km au Nord de la ville de Concepción
et à 325 km au sud-ouest de la capitale,
Santiago de Chili, jusqu’où la secousse a
été fortement ressentie.
La terre s’est soulevée par endroits…
La côte s’est rehaussée. Ce soulèvement,
atteignant 2,5 m, s’est traduit par une
avancée du littoral sur la mer allant jusqu’à
500 m par endroits (voir photos au verso).
Au cours du mois suivant la catastrophe,
des chercheurs chiliens, français et alle-
mands1 ont étudié les déplacements verti-
caux du sol engendrés par le séisme.
Grâce aux marques blanches laissées par
des algues qui tapissent la roche littorale2,
appelées Lithothamnium, ils ont mesuré
directement cette élévation en 24 points
d’observation situés le long de la côte.
… et affaissée à d’autres
En revanche, à 120 km de là, en s’enfoant
vers l’est à l’intérieur du pays, les scientiques
ont constaté que le sol s’était à l’inverse
affais, selon un phénomène appe subsi-
dence. Pontons, troncs d’arbres et tation
immergés sur les berges des cours d’eau
les 9 points de mesure situés dans les vallées
fluviales ont révélé un abaissement du sol
atteignant un tre.
Un trop-plein d’énergie
Comment expliquer ces effets différentiels
du séisme sur la topographie ? Les géophy-
Le séisme du 27 février 2010, dont l’épicentre est sità environ 6 km des tes
chiliennes, a occasion de nombreux déts (bâtiments effonds, électricité
etphone coupés). Les pertes s’élèvent entre 15 et 30 milliards de dollars.
© IRD / Rose-Marie Ojeda
Le 27 février 2010, un
gigantesque séisme, de
magnitude 8,8, a secoué le
Chili. Cinq cent victimes,
treize millions de chiliens
touchés, soit près de 80 %
de la population du
pays… : c’est l’un des six
plus puissants
tremblements de terre
depuis le début du 20e
siècle. Comme l’ont
mesuré des chercheurs
chiliens, français et
allemands1, la côte s’est
soulevée. Cette élévation,
atteignant 2,5 mètres, s’est
traduite par une avancée
du littoral sur la mer allant
jusqu’à 500 mètres par
endroits.
À l’inverse, à l’intérieur des
terres, le sol s’est affaissé
de près d’un mètre.
Depuis 1835, date du
précédent très grand
séisme dans ce secteur,
l’équivalent de 12 mètres
de déformation de la croûte
terrestre, due à la
convergence des blocs
tectoniques, avait été
emmagasiné au niveau de
la zone de contact entre la
plaque Nazca et la plaque
sud-américaine. Le
27 février 2010, la rupture
de la lithosphère3, sur un
segment de faille de
500 kilomètres de long, a
libéré, d’un seul coup, la
majeure partie de cette
énergie mécanique.
Cette étude permet de
mieux comprendre le cycle
sismique, dans le but à
terme de prévoir et
prévenir le risque.
SANTIAGO
CHILI
ARGENTINE
PEROU BOLIVIE
PARAGUAY
URUGUAY
BRESIL
Séismede
magnitude8,8
Océan
Atlantique
Océan
Pacifique
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Gaëlle Courcoux, coordinatrice
Délégation à l’information et à la communication
Tél. : +33 (0)4 91 99 94 90 - fax : +33 (0)4 91 99 92 28 - [email protected]
Pour en savoir plus
Fiche n°355 - Septembre 2010
CONTACT :
Sébastien CARRETIER,
chercheur à l’IRD
Tél. : +33 (0)5 61 34 26 39
Laboratoire des mécanismes de
transfert en géologie – LMTG
(UMR IRD / Université Paul
Sabatier - Toulouse 3 / CNRS)
Adresse :
LMTG
14 av. Édouard Belin
31400 Toulouse
RÉFÉRENCES :
M. Farías, G. VarGas, a. Tassara,
K. BaTaille, s. CarreTier, s. Baize,
D. MelniCK. Land-level Changes
Produced by the Mw 8.8 2010
Chilean Earthquake. Science,
2010, 329(5994), p. 916.
doi : 10.1126/science.1192094
OrTlieB luC, BarrienTOs s.,
GuzMan n. Coseismic coastal
uplift and coralline algae record
in Northern Chile : the 1995
Antofagasta earthquake case.
Quaternary Science Reviews,
1996, 15 (8-9), p. 949-960.
doi :10.1016/S0277-3791(96)00056-X
MOTS CLÉS :
Séisme, Chili, sol
RELATIONS AVEC
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siciens ont établi le scénario de la catas-
trophe. La majeure partie Chili est située
au-dessus de la zone de contact entre la
plaque océanique Nazca, qui forme le
Pacique Sud-Est, et la plaque continentale
sud-américaine. La première plonge sous
la seconde, dans ce que l’on appelle un
mouvement de subduction. Elle s’enfonce
ainsi dans le manteau terrestre à une
vitesse de près de 7 cm par an. Cette
convergence rapide des deux plaques
génère une friction entre les deux plaques,
qui se traduit par une intense activité
sismique dans la région, avec en moyenne
un séisme de magnitude 8 tous les dix ans
et de magnitude supérieure à 8,7 une fois
par siècle.
Le précédent grand isme, d’une magnitude
de 8,5, ayant rompu ce même segment de
la subduction chilienne, remonte au
20 février 1835, soit tout juste 175 ans plus
tôt. Comme une règle de bureau sur laquelle
on exercerait une pression aux deux extré-
mités, le sol, sous la poussée des deux
blocs tectoniques, s’est peu à peu souleà
l’intérieur des terres et s’est abaissé vers
l’ouest en s’approchant un peu plus de la
zone de faille, au niveau du littoral. Au
rythme de 7 cm par an pendant plus d’un
siècle et demi, l’équivalent de près de 12 m
de déformation élastique4 de la croûte
terrestre a été emmagasiné par cette seule
et même faille.
Le 27 février 2010, la lithosphère3 s’est
rompue sous la pression sur un segment
de la faille d’environ 500 km. Le relâche-
ment brutal de la contrainte a libéré d’un
seul coup une grande partie de l’énorme
énergie accumulée. D’où la violence du
séisme. Les roches, jusque comprimées,
se sont détendues subitement et sont
entrées en vibration. La surface du sol s’est
alors rééquilibrée : c’est ce que l’on appelle
le rebond élastique4. La côte s’est donc
relevée d’un coup et l’intérieur des terres
s’est affaissé.
Ces travaux montrent que le désastreux
séisme a permis de relâcher une grande
partie de l’énergie stockée depuis 175 ans
au niveau de ce segment de la zone de
subduction chilienne. Ce qui pourrait expli-
quer qu’il n’y ait pas eu à ce jour de grosse
réplique, fait assez rare pour des séismes
d’une telle magnitude. Ces résultats
permettent de mieux comprendre le fonction-
nement des très gros séismes et les cycles
sismiques, dans le but à terme de prévoir et
prévenir le risque.
Rédaction DIC – Gaëlle Courcoux
1. Ces travaux ont été réalisés par des chercheurs
chiliens (université du Chili à Santiago et université
de Concepción), français (IRD, université de
Toulouse, Institut de radioprotection et de sûreté
nucléaire) et allemands (université de Potsdam).
2. Suite à un phénomène de mortalisoudaine, mis en
évidence lors du séisme de 1985 dans le nord du
Chili (Quaternary Science Reviews, 1996, 15 (8-9),
p. 949-960).
3. Littéralement la « sphère de pierre », c’est-à-dire
l’enveloppe terrestre la plus supercielle.
4. Une déformation dite élastique, contrairement à
une déformation plastique, est réversible : lorsque
l’on supprime la contrainte, la croûte terrestre
reprend sa forme initiale.
Le soulèvement de la côte, atteignant 2,5 m, s’est traduit par une avancée du littoral sur la mer, allant jusqu’à
500 m par endroits.
© Université de Concepcn / Simon Muñoz et Andres Tassara
La redistribution des masses liée au séisme du 27 février 2010 au Chili a légèrement diminué le
moment d’inertie de la Terre, c’est-à-dire sa résistance à la rotation, et raccourci ainsi la durée du
jour de 1,26 millionième de seconde.
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