En hommage à Pierre Boulez, cette soirée
rassemble trois grands moments de la
modernité musicale et chorégraphique, en
réunissant, à ses côtés, deux autres créa-
teurs majeurs du XXesiècle dont il a dirigé
les œuvres: György Ligeti et Igor Stravinsky.
POLYPHONIA
« Romantique avec des rebondissements
comiques » est la description que fait Chris-
topher Wheeldon de son ballet, Polyphonia
(soit "beaucoup de voix"), dansé sur dix
pièces pour piano éclectique de György
Ligeti. Portés aériens, roulades et sauts
contrastent avec les pas de danse de ballet
classique. Le premier des deux duos clés,
dansé par le couple principal, évoque une
nage de créatures marines, tandis que le
second ressemble à une plante étrange
qui pousserait en s’enfermant sur elle-
même. Les derniers portés et le fondu
fi nal concluent le mouvement, l'encadrent,
et le laissent s’estomper comme un fi lm.
Polyphonia a remporté le Laurence Olivier
Award pour la meilleure nouvelle produc-
tion de danse en 2003 et a été le premier
ballet de Christopher Wheeldon à entrer au
répertoire du Ballet Pacifi c Nord-Ouest.
CRÉATION
de Wayne McGregor
Sur la partition Anthèmes II, composée par
Pierre Boulez en 1997, le chorégraphe bri-
tannique Wayne McGregor propose une
nouvelle création, conçue avec l'artiste
plasticien Haroon Mirza, lauréat du Lion
d'argent à la Biennale de Venise en 2011.
Après Genus en 2007, puis L’Anatomie de
la sensation (pour Francis Bacon) en 2011,
c'est le troisième ballet spécialement créé
par Wayne McGregor pour les danseurs de
la compagnie, capables d'allier un solide
vocabulaire classique aux dernières inno-
vations technologiques.
LE SACRE DU PRINTEMPS
Dans l'arène...
Norbert Servos
« Ce sont les hommes et les femmes qui
m'intéressent.
Dans la vie de chaque jour, il y a tant de
choses, tant d'informations, apparemment
infi mes et en réalité fondamentales... »
Pina Bausch
Dans sa version du Sacre du printemps (...),
Pina Bausch reprend l'ordre des scènes du
libretto original sans cependant faire état
de la Russie païenne. Elle la situe dans
une société moderne quelconque. Initiale-
ment, la lutte des sexes ne résulte pas de
l'adoration rituelle de la terre telle qu'elle
se manifeste dans les sociétés primitives.
Ce confl it est originel et constitue le point
de départ de l'action dramatique qui se
concentre sur le sacrifi ce de printemps
symbolisé par une jeune femme. Le seul
décor est le sol du plateau, recouvert d'une
couche de terre qui transforme l'espace en
une arène archaïque, intemporelle, un lieu
de combat entre la vie et la mort. Comme
dans les œuvres suivantes de Pina Bausch,
l'espace scénique est là aussi un champ
d'action très physique. La terre ne relève
pas seulement de la métaphore, mais elle
infl uence directement les mouvements des
danseurs, les investit d'une gravité intense
et recueille les traces du violent sacrifi ce.
Ainsi le corps humain réécrit sa propre his-
toire dans le sol. À la pureté de la surface
plane succède la sauvagerie de l'arène: la
terre s'attache aux légères robes à bre-
telles des femmes, barbouille les visages
et colle aux torses nus des hommes.
Rien dans le théâtre dansé de Pina Bausch
ne se fait « comme si... ». Les danseurs ne
jouent pas la fatigue qui s'empare d'eux: