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Il est intéressant de noter que les librettistes Meilhac et Halevy se sont
inspiré d’une nouvelle de Prosper Mérimée, auteur qu’ils adapteront
également plus tard avec Carmen. Et en « petite soeur » de Carmen,
Périchole a le même tempérament, fort et indépendant : c’est une
femme de caractère qui tient tête aux hommes et ne se laisse en rien
impressionner par le pouvoir. Mais contrairement à Carmen, Périchole
est la femme d’un seul homme, qu’elle ne trahira pas, malgré certaines
apparences. C’est seulement parce qu’elle meurt de faim qu’elle
« cède » un temps aux avances du Vice-Roi et, plus tard, c’est seule-
ment pour « punir » la jalousie de son Piquillo qu’elle le laissera être
emporté vers le cachot, pour venir l’y délivrer aussitôt …
Périchole et Piquillo sont chanteurs de rue : il nous semblait donc légi-
time de quitter les dorures de l’opéra pour emporter nos personnages
« à l’air libre », tentant de retrouver les atmosphères si poétiques et
magiques des grands films de « saltimbanques » qui ont nourri notre
imaginaire : La Strada de Fellini, Lola Montès de Max Ophüls, Les
Enfants du Paradis de Marcel Carné, Le Cirque de Chaplin … et tant
d’autres…
Pour porter cette histoire, qui promène sans cesse le spectateur entre
scènes festives et délirantes et moments touchants, tendres, mélanco-
liques, Jacques Offenbach a créé une musique formidablement
contrastée, où une mélodie toute mozartienne peut amener un can-can
des plus débridés. Il nous fallait donc trouver cet équilibre, tant pour
la direction d’acteurs, qui ne devait pas seulement célébrer
le « bouffe », que dans les choix de scénographie, devant alterner lieux
intimistes ou très ouverts.
Trouver le tourbillon d’un mouvement de foule, puis s’arrêter sur le
simple regard attendri d’une femme pour son homme endormi.
Hors des murs du théâtre, il devient plus facile de jouer, non seulement
« pour » , mais « avec » le public.
Empruntant aux codes des arts de la rue (marionnettes géantes, chan-
teurs sur échasses, cracheurs de feu, bonimenteurs, puppets, instru-
ments « gouailleurs » ou musique « flon-flon » enregistrée, etc.) , nous
invitons les spectateurs à sans cesse changer de place, les intégrant
dans le jeu des chanteurs et partageant avec eux notre histoire, les
transformant en « peuple de Lima », les encourageant à suivre réelle-
ment, physiquement, les personnages. Et pour nous c'est aussi le plai-