UE11 Parcours 3 Génétique -
n°14
22/02/2016
Pr S. Romana
serge.romana@nck.aphp.fr
RT : Julien THOMAS
RL : Arnaud KLOKNER
COURS NON RELU PAR LE PROFESSEUR
MITOSE (partie 2)
Plan :
I Mosaïcisme
A Diagnostic pré-implantatoire
B Instabilité chromosomique dans les blastomères
C Rationalisation
D Application au gène PLK4
II Tumeurs
A Anomalies de nombre de chromosomes
B MVA et cancers
L’objectif de cette partie est d’étudier les applications des checkpoints de la mitose dans deux
phénomènes physiologiques ou pathologiques : le mosaïcisme observé lors des premières
divisions mitotiques (J0-J4) et l’instabilité chromosomiques dans les tumeurs.
I Mosaïcisme
A Diagnostic pré-implantatoire (DPI)
Un couple sur 300 possède un membre porteur d’une translocation chromosomique
équilibrée dont la quasi-totalité ne présente aucun symptôme. Cependant, cette translocation
peut entraîner de graves déséquilibres génétiques lors de la méiose. Après la fécondation, en
fonction de la gravité, elle peut conduire à une stérilité, des avortements spontanés à répétition
ou à la naissance d’un enfant présentant des malformations et un retard mental.
Jusqu’à la fin des années 1990, lors de la suspicion d’une maladie génétique dans un
couple présentant l’un de ces cas de figure, il n’était possible que d’effectuer un diagnostic
prénatal : une ponction de trophoblaste ou de liquide amniotique à 12 semaines indiquait la
présence ou l’absence de l’anomalie génétique, et une interruption médicale de grossesse (IMG)
était proposée le cas échéant. Par la suite a été mise au point la technique de DPI, encadrée par la
loi et ne concernant que les couples susceptibles de transmettre une maladie génétique grave
incurable :
1. Des gamètes sont prélevés chez les deux parents,
2. Une fécondation in vitro est réalisée pour obtenir une dizaine d’embryons,
3. Les divisions se succèdent jusqu’au stade de « morula non compactée » (J3),
4. On effectue une biopsie de blastomères sur chaque embryon,
5. Les blastomères sont analysés par PCR et séquençage (anomalie génique) ou par
hybridation in situ (anomalie chromosomique).
L’image suivante illustre la recherche d’une maladie récessive liée à l’X entraînant l’élimination
des embryons (XY) et l’implantation des (XX) avec des sondes spécifiques des centromères de
chaque gonosome :
Dans le cas d’une translocation t(2 ;8) on peut voir la comparaison entre le sang des parents présentant
2 signaux de chaque couleur (en haut) et de deux embryons (en bas) : l’un monosomique 2q (un seul
signal jaune, à gauche) et l’autre normal droite, la multiplicité des signaux est ici non pertinente et
liée au stade de la mitose observée).
L’une des observations les plus intéressantes liées à la DPI est celle de blastomères issus du même
embryon, mais ne présentant pas les mêmes caractéristiques chromosomiques : c’est le mosaïcisme
des premières divisions !
B Instabilité chromosomique dans les blastomères
Sur les images précédentes, la répartition chromosomique n’est pas bonne, mais celle-ci peut
procéder d’un désordre total et s’avérer « chaotique » lorsqu’elle varie d’un blastomère à l’autre
et ne peut être expliquée par les ségrégations méiotiques classiques :
Des analyses ont alors été menées, prouvant au début des années 2000 qu’à J3, 50% des
embryons étaient mosaïques. Après l’élaboration de la méthode de CGH-array sur une cellule,
l’équipe de Joris Vermeesch à Louvain a montré sur 23 embryons d’un même couple que ce
nombre s’élève en réalité à 90% ! Il s’agissait d’un couple jeune (moins de 35 ans), en bonne
santé, ne présentant pas d’avortements à répétitions ou d’anomalies chromosomiques, mais
consultant en DPI pour une mutation génique de l’X. L’équipe a étudié la totalité des blastomères
de chaque embryon pour les comparer afin de mettre en évidence un éventuel mosaïcisme sur la
structure ou le nombre des chromosomes ; seuls deux embryons avaient un contenu de
blastomères identiques et équilibrés.
Remarque : le pouvoir reproductif de l’espèce humaine est très faible. Cela peut s’expliquer par le
mosaïcisme important lors des premières divisions. Des études ont montré que 30% des embryons
ne s’implantent pas et que 30% meurent après implantation.
La méthode de l’étude n’est pas une CGH-array traditionnelle car il faut amplifier toute la cellule
et certaines zones ne s’amplifient pas bien. À partir d’un set de référence, ils ont effectué des
probabilités d’obtenir une trisomie ou une monosomie pour les différents chromosomes :
Vert : la probabilité est forte d’être en surplus (trisomie) sur toute cette région,
Rouge : la probabilité est forte d’être en défaut (monosomie) sur toute cette région,
Bleu : la probabilité est forte d’être en quantité normale.
Par exemple sur les figures suivantes, on observe un bras long du chromosome 18 normal dans
les deux cas, avec une duplication (à gauche) ou une délétion (à droite) du bras court.
Le résultat final pour chaque embryon se présente sous la forme d’un récapitulatif des différents
chromosomes avec les délétions ou duplications observées dans chaque blastomère (chaque
bande verticale est un blastomère). Dans l’exemple suivant, on remarque que pour le
chromosome 7 certaines bandes présentent une délétion ou une duplication qui se
correspondent, manifestement le type et le contre-type d’une anomalie mitotique. En revanche,
tous les blastomères ont une trisomie 15 : cette anomalie provient, elle, a priori de la méiose.
D’autres études ont repris ces résultats et confirmé que seuls 10 à 20% des embryons de couples
jeunes et « normaux » ne présentent pas de mosaïcisme dans les blastomères à J3. Certains
couples ont des répartitions plus chaotiques des chromosomes que d’autres.
Mais la première question est : pourquoi les embryons des humains sont-ils aussi
déséquilibrés alors que ceux des autres espèces comme la souris ne le sont pas ?
C Rationalisation
La première réponse serait : les protéines des checkpoints (cf. partie 1) ne fonctionnent pas !
Dans le cas contraire, les cellules auraient été réparées ou seraient entrées en apoptose. Les
mécanismes de réparation ne fonctionnent pas non plus. Mais pourquoi ?
Nous sommes à J3, et le génome de l’embryon ne devient fonctionnel qu’à J4. Avant cette date, ce
sont les protéines maternelles de l’ovule qui agissent, et celles qui ont été traduites à partir des
ARN maternels lors de la fécondation. Cependant, il n’y a pas assez de protéines des checkpoints
pour assurer une bonne mitose sur les 4 premiers jours. On peut le mettre en évidence par un
dosage de ces protéines à différents stades entre l’ovocyte et la nidation :
À J4, la production de protéines embryonnaires va permettre la réparation ou l’élimination, mais
si le mosaïcisme est déjà trop important, il n’y aura pas formation du blastocyste et l’embryon
meurt. Chez les souris, le mosaïcisme des premières mitoses de l’œuf n’existe pas en raison de
l’existence d’une protéine, Filia, présente en quantité suffisante pour organiser l’ensemble des
checkpoints. Chez les souris knock-out pour le gène de Filia, on observe les mêmes instabilités
chromosomiques à J3 que chez l’humain.
D Application au gène PLK4
On a vu dans la première partie le rôle de PLK4 dans la régulation de la biogénèse du centriole.
Sa surexpression est associée (chez la drosophile) à une augmentation des aneuploïdies, et une
haplo-insuffisance est associée à des anomalies de cytodiérèse. PLK4 est également liée à des
lignées de cancers chez la souris.
On a observé dans certains pays des couples qui généraient un nombre important d’embryons
déséquilibrés, voire chaotiques. Il a été montré que certains variants du gène PLK4 étaient
associés à cette production d’embryons déséquilibrés. C’est une pathologie maternelle, même si
la mère n’a aucun symptôme : les anomalies s’expriment lors des checkpoints des premières
divisions de l’œuf.
II Tumeurs
A Anomalies de nombre de chromosomes
1 / 8 100%