Appel à contributions Colloque international « L`économie solidaire

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Association pour une Société APC de Yakouren
Agissante Librement par des
Activités Solidaires ASALAS
« Séminaire permanent Belkacem Krim » Edition 2016
Appel à contributions
Colloque international
« L’économie solidaire dans la wilaya de Tizi-Ouzou :
quelles possibilités pour y en faire le grand atout ? »
Yakouren, les 21 et 22 octobre 2016
Colloque organisé par :
L’association ASALAS en partenariat avec l’APC de Yakouren
En Algérie, après plus d’un demi siècle d’efforts d’industrialisation, de modernisation
et de développement basés sur une stratégie de croissance extensive, appuyée par
une politique d’exploitation des ressources de plus en plus excessive, des signaux de
détérioration avancée de l’environnement et des patrimoines et des crises multi
dimensionnelles aiguës n’ont pas manqué de se manifester et de s’aggraver au fil du
temps, qui attestent de l’échec des politiques de développement appliquées jusqu’ici.
Abandonnant les politique à leur égarements et les scientifiques à leurs errements, la
société civile de la wilaya de Tizi-Ouzou semble avoir trouvé la voie salutaire : ici et là
poussent des projets collectifs qui redonnent espoir et qui donnent à voir1.
1 ZORELI M-A. (2015), « Le mouvement associatif et l’économie solidaire en Kabylie: entre l’opportunisme
néantisant et le génie collectif possibilisant », communication au colloque international: «Economie sociale et
solidaire dans un contexte de multiculturalité, diversité et développement territorial», Mendoza (Argentine) les 15,
16 et 17 Avril 2015, pp. 17-26. base.socioeco.org/docs/zoreli_.pdf.
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Ces projets, nous croyons, permettent au regard analytique critique de tirer trois
grandes leçons. Premièrement, l’économie solidaire en tant que grappes d’activités
dans un territoire est le produit d’une culture pratiquée par ses acteurs. En tant que
culture et idéologie, elle est donnée par un territoire plutôt qu’elle ne lui est donnée.
Ensuite, en tant que modèle, l’économie solidaire peut relever le défi de
développement, parce qu’elle seule tient compte à la fois des dimensions politique,
économique, environnementale et sociale du développement sans établir de
séparation entre elles. Enfin, en ce qui concerne les choix des politiques dans le
contexte national algérien, le problème du développement non durable caupar les
modèles dominants jusqu’ici ne peut être réglé par une approche duisant le
développement durable à une simple boite à outils, c’est-à-dire à un ensemble
d’instruments politiques (gouvernance), économiques (taxes environnementales) ou
juridiques (lois persuasives) devant prévoir et corriger les erreurs de l’Etat, de
l’entreprise et du citoyen.
Notre vision est que, loin d’être un nouveau paradis imaginé ou promis, le
développement durable est une possibilité qui ne peut devenir une alité que par un
modèle qui réalise des ruptures au niveaux des façons de penser, de réaliser et de
mesurer le développement, le modèle de développement par l’économie solidaire, à
comprendre comme un idéal réalisable2 d’une société.
Dans ce rendez, ce sont toutes les facettes du territoire de la wilaya de Tizi-Ouzou qui
sont invitées à nous révéler et nous livrer, par le biais d’analystes-spécialistes et
d’auteurs de pratiques en relation dialogique au sens de Morin3, leur potentiel
commun de développement par l’économie solidaire, en expliquant pourquoi plutôt
que cela, c’est ceci, plutôt que autrement, c’est ainsi ; ce qui est vital pour nous qui
voulons comprendre comment s’y prendre pratiquement pour dessiner puis y réaliser
cet idéal réalisable.
2 ZORELI M-A. (2014), « L’économie solidaire en Kabylie, Une économie de l’union et de la fraternité », Revue du
MAUSS permanente, 23 juin 2014 [en ligne].http://www.journaldumauss.net/./?L-economie-solidaire-en-Kabylie,
p. 1.
3 MORIN Edgar. (2005), « Introduction à la pensée complexe», Editions du Seuil, Paris.
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Axes thématiques du colloque
1. L’économie solidaire : entre le local et l’universel
Dans la wilaya de Tizi-Ouzou, il y a présentement et essentiellement deux segments
de l’économie solidaire qui évoluent parallèlement : l’économie solidaire portée par
les structures traditionnelles (comités de village) et l’économie solidaire portée par les
structures modernes (associations, mutuelles, coopératives)4. La première, malgré
des résultats incontestablement positifs et prometteurs qu’elle fait valoir sur le plan
organisation territoriale et gestion de services collectifs et de biens communs à
l’échelle villageoise (Iguersafen, Zouvegua, Tifilkut)5, il ne reste pas moins qu’elle se
montre, du moins à l’état actuel, incapable de faire clore des activités relevant de la
logique d’entrepreneuriat collectif (entreprises économiques d’offre de biens et
services). La seconde, bien qu’elle ait l’avantage du nombre d’acteurs constitutifs,
semble être incapable de générer des activités référentielles pouvant faire cas d’école,
tant elle fonctionne en contrariant les théoriquement entendus et les pratiquement
attendus. Au-delà de la nécessité de comprendre le pourquoi de cela, ce constat
introduit l’urgence de réinterroger nos méthodes d’approche de l’économie solidaire :
s’agit-il de déviations de la part des acteurs sociaux, et dans ce cas il faut peut être
instruire les acteurs des pratiques des principes et méthodes universels de l’économie
solidaire, ou de biais méthodologiques, et ici se pose la nécessité de forger des
concepts appropriés pour saisir une réalité spécifique ? En même temps, il y a des
questions de fond, en lien avec la thèse durkheimienne6, qui refont surface et
auxquelles on doit faire face : est il nécessaire de rompre avec les solidarités
mécaniques parce qu’archaïques ? Faut-il plutôt faire régénérer les solidarités
traditionnelles parce qu’elles seules peuvent revitaliser les sociétés locales ? Dans les
deux cas, comment faire pour doter ce territoire de l’essentiel manquant : une
reconnaissance politique, un cadre juridique et des monnaies locales spécifiques ?
4 ZORELI M-A. (2015), op. cit., pp. 1-26.
5 ZORELI M-A. (2016), « La régulation solidaire en Kabylie : l’exemple du village de Tifilkout », in RECMA, Revue
internationale de l'économie sociale, numéro 339.
6 DURKHEIM E. (2002), « De la division du travail social », livre 1 et 2, Une édition électronique réalisée à partir du
livre d’Émile Durkheim (1893), De la division du travail social. Paris : Les Presses universitaires de France, 1967,
huitième édition, 416 pp. Collection : Bibliothèque de philosophie contemporaine, Édition complétée le 15 février
2002 par Jean-Marie Tremblay à Chicoutimi, Québec, revue, corrigée avec ajout des mots grecs manquants par
Bertrand Gibier le 28 juin 2008.
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2. Le défi de développement local face l’exigence de territorialité et de
durabilité
Le développement local est nécessairement global. Or dans le contexte de la wilaya
de Tizi-Ouzou, la première déviation développementaliste régnante est cette vision
parcellaire qui est en œuvre aussi bien dans la recherche théorique que dans les
actions de sa mise en œuvre pratique. Cette conception par domaines séparés, en
plus de ses limites révélées par l’approche systémique, ne manque pas de générer
des tensions : conflits de compétences, opposition de regards, dissymétrie de mise en
œuvre. Le développement territorial ne se décrète pas, il se construit pas à pas, il ne
se fait pas à partir de rien, c’est toujours un existant qui devient. Il est donc
important de substituer au concept de territoire, qui renvoie à un état, le concept de
territorialité, à comprendre « comme l’ensemble des rapports existentiels et sociaux
que les individus en groupe entretiennent avec l’espace qu’ils produisent et
reproduisent quotidiennement à travers les figures, les images, les catégories et les
objets qu’ils mobilisent dans un projet de production de la société plus ou moins
intentionnel et explicite »7. Ce qui implique une démarche d’analyse basée sur la
diversité des référentiels acteuriels, l’historicité du processus de transformation social,
l’interactivité des dimensions territoriales et l’utilité des multiples acceptions de
l’espace local. La deuxième déviation est que dans la wilaya de Tizi-Ouzou, on réduit
le développement à la création d’infrastructures, d’emplois ou d’entreprises, alors
que, avertissent les spécialistes, la croissance n’est pas la voie sûr vers le
développement, Gorz signale que « la croissance n'améliore (même) pas
substantiellement la situation »8 des sociétés locales, et le développement n’en est
pas un s’il n’est pas durable, c'est-à-dire s’il n’est pas à la fois économiquement
viable, socialement équitable et écologiquement responsable9. Un changement de
regard en mettant les lunettes de la territorialité et de la durabilité ne serait-il pas
plus fécond dans la perspective de développement local par l’économie solidaire dans
la wilaya de Tizi-Ouzou ?
7 ALDHUY J. (2008), « Au-delà du territoire, la territorialité ? », Géodoc, pp. 35-42, <halshs - 00278669>
8 GORZ A. (1975), « Mutation technique et changement culturel », Théologiques 3/2 (pp. 73-88). P. 75.
9 BILLAUDOT B et DESTAIS G. (2009), « Les analyses de la durabilité en économie. Fondements théoriques et
implications normatives », communication au colloque à HEC Montréal, « Pour la suite du monde. Développement
durable ou décroissance soutenable ?, 18 et 19 mai 2009, pp. 2-3. https://hal.archives-ouvertes.fr/halshs-
00472876/document.
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3. Idéologie territoriale et substrat économique local
Jusqu’aux premières années de la période post-coloniale, la wilaya de Tizi-Ouzou se
distinguait par une quintessence économique qui nourrissait un sentiment
d’appartenance territorial. S’en est suivi les vagues du socialisme et du libéralisme qui
ont provoqué l’étouffement de l’économie locale et l’éclipse progressive de l’idéologie
territoriale. Durant ces dernières années, suite aux désillusions de la société par
rapport au bonheur promis par l’économie de marché et la sécurité promise par la
logique étatique, on voit dans ce territoire l’ancienne idéologie territoriale souffler à
nouveau qui fait renaître avec elle le substrat économique local (festivals
économiques, volontariat pour projets d’utilité collective, renaissance d’activités
artisanales). Saisissant les enjeux et voulant prendre part efficacement au jeu, des
acteurs politiques et scientifiques s’organisent en collectifs s’apparentant à ce que
Bourdieu désigne de « forces de conservation »10 pour aider la société à se revivifier
en « puisant dans les solidarités anciennes, dans les réserves de capital social qui
protègent toute une partie de l’ordre social présent de la chute dans l’anomie.
(Capital qui, s’il n’est pas renouvelé, reproduit, est voué au dépérissement,11, et en
mettant sur pied des « collectifs orientés vers la poursuite rationnelle de fins
collectivement élaborées et approuvées »12, à l’exemple de la fondation AFUD. N’est-il
pas plutôt prioritaire que ces acteurs fassent ce que Bachelard appelle le « repentir
intellectuel »13 et ce que j’appellerai le « repentir actionnel », c’est-à-dire faire
plusieurs retours sur ses compréhensions et ses actions pour voir quelle est leur
véritable valeur, scientifique dans le premier cas et pratique dans le deuxième cas ?
N’est-il pas nécessaire dans cette mondialisation version économie de l’innovation,
que cette société apprenne à bien désapprendre, « Apprendre, c’est toujours
désapprendre, pour rompre avec ce qui nous bloque »14, disait à juste titre Reboul,
cela pour pouvoir mieux apprendre selon les exigences du monde actuel
continuellement en devenir ? Si, en s’inscrivant dans la perspective d’humaniser la
mondialisation, on voudrait que ce concept de mondialisation soit habité par le sens
du concept de glocalisation, qui signifie le développement territorial par la valorisation
10BOURDIEU P. (1998), « L’essence du néolibéralisme. Qu’est-ce que le néolibéralisme ? Un programme de
destruction des structures collectives capables de faire obstacle à la logique du marché pur » le monde
diplomatique, p. 3.
11 Ibid.
12 Ibid.
13 BACHELARD G. (1999), La formation de l'esprit scientifique. Paris, Librairie philosophique Vrin, (1ère édition :
1938).
14 REBOUL O. (1995), Qu’est ce qu’apprendre ? », PUF, Paris.
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