clairement définis et ne s’inscrivent pas toujours dans cet ordre « traditionnel » selon lequel nous sommes habitués à
penser.
Un regard d’amour et de tendresse
Le document final du Synode d’octobre dernier nous demande de nous faire l’écho de la propre approche de Jésus
concernant ce que nous pourrions appeler le désordre de la vie familiale dans le monde contemporain. Comme Jésus,
nous devons veiller: « a regardé avec amour et tendresse les femmes et les hommes qu’il a rencontrés, en accompagnant
leurs pas avec vérité, patience et miséricorde, tout en annonçant les exigences du Royaume de Dieu. » ( Relatio Synodi,
12) . Le Synode n’élude pas la vérité de l’Évangile et du Royaume. Il nous exhorte de répondre « aux exigences du(1)
Royaume de Dieu », mais cela doit être accompagné de compassion et d’amour, en voyant tout d’abord des personnes
qui sont aimées de Dieu, et ensuite leur situation. Comme Jean-Paul II l’a écrit il y a presque vingt ans dans
Veritatis
(n. 95) : « (…) la présentation claire et vigoureuse de la vérité morale ne peut jamais faire abstraction du
Splendor
(2)
respect profond et sincère, inspiré par un amour patient et confiant, dont l’homme a toujours besoin au long de son
cheminement moral rendu souvent pénible par des difficultés, des faiblesses et des situations douloureuses. L’Église, qui
ne peut jamais renoncer au principe “de la vérité et de la cohérence, en vertu duquel elle n’accepte pas d’appeler bien ce
qui est mal et mal ce qui est bien”; elle doit toujours être attentive à ne pas briser
le roseau froissé et à ne pas éteindre la
(cf. Is 42, 3). »
mèche qui fume encore
Le pape François nous invite à réfléchir à nos différentes manières d’accompagner les personnes, pour que petit à petit,
elles puissent comprendre l’appel du Christ et la façon dont elles doivent vivre leur vie. Comment allons-nous à la
rencontre des personnes dans leurs situations très diverses?
Le regard de saint Augustin sur l’Église
Saint Augustin, évêque d’Hippone et docteur de la vérité de l’Église, nous propose une manière de regarder l’Église, à
son époque, mais celle-ci reste tout à fait pertinente aujourd’hui. L’Église d’Afrique du Nord a été divisée, au début du IVe
siècle par l’hérésie donatiste. Saint Augustin s’est prononcé contre cette hérésie lors du concile de Carthage en juin 411.
Les donatistes croyaient qu’ils représentaient « l’Église des purs », non contaminée par la dissidence de ceux qui avaient
trahi leur foi chrétienne lors d’une période de persécution. Ils prétendaient que l’Église catholique de l’époque d’Augustin
était souillée par son ancien lien avec ceux qui, lors de la persécution, cent ans plus tôt, avaient livré les livres sacrés aux
flammes, les « traditores ».
Deux paraboles de l’évangile de Matthieu, chapitre 13, occupent une place prépondérante dans tous les écrits de saint
Augustin au cours de cet âpre conflit: Le bon grain et l’ivraie (v. 24-30) et Le filet ramenant des poissons de toutes
espèces (v. 47-50).
Les disciples de Donat refusaient tout contact avec les catholiques qui, pensaient-ils, étaient souillés et ne pouvaient
représenter l’Église du Christ. Ils se considéraient comme les seuls représentants de la véritable Église en raison de leur
fermeté et de leur détermination pendant les persécutions. S’inspirant de la parabole du bon grain et de l’ivraie, Augustin
plaida avec ardeur et insistance en faveur de la patience et de la tolérance, car arracher l’ivraie signifierait aussi abîmer le
bon grain. En cela, Augustin ne faisait que suivre ce que le maître dit lui-même dans la parabole: « Non, en enlevant
l’ivraie, vous risquez d’arracher le blé en même temps » (13, 29). Répondant à l’assertion selon laquelle l’Église
catholique acceptait et consentait à la présence de pécheurs en son sein, Augustin assura que les bons catholiques ne
seraient aucunement affectés par les pécheurs à partir du moment où ils n’imitaient pas le comportement de telles
personnes. De même, le maître de la parabole se contente-t-il d’attendre la fin de la moisson où il sera procédé à la
séparation finale: l’ivraie sera liée en bottes pour la brûler, pendant que le blé sera ramassé et rentré dans le grenier.
Augustin interprétait ce passage de la parabole comme une métaphore du jugement dernier, lorsque le Christ lui-même
séparera une fois pour toutes les bons des méchants.