Résistance. Une mémoire sacralisée et parfois brutale s’est imposée. La seule vision des affrontements
entre les associations d’anciens résistants est significative a cet égard.
Cependant les valeurs de la Résistance existent encore. Elles ont encore une pertinence dans nos
sociétés. En effet, après une contextualisation des années 1940 et 1950 ou les mots de civisme, de paix
et de dévouement à l’intérêt général étaient différents. Plusieurs valeurs s’imposent également : la
défense des libertés, des droits de l’Homme, de la démocratie et de la justice, l’engagement, le
sacrifice, l’esprit d’initiative, le courage et l’apprentissage de la solidarité et du civisme. L’ensemble se
forge dans la douleur du combat.
Une petite enquête4 auprès de jeunes collégiens et lycéens, menée par l’Association des Etudes sur la
Résistance Intérieure (AERI), définit les valeurs significatives pour les jeunes d’une quinzaine de
classe. Les jeunes interrogés évoquent le respect, la tolérance, la solidarité, la vérité, la paix, la famille.
Mais aussi, la liberté, l’engagement et le pays. Par contre les mots changent de sens. La liberté apparaît
comme l’expression de leur identité et de l’affirmation d’eux-mêmes. La liberté est plus individuelle
que collective. L’engagement est un moyen de sortir de l’impuissance. Tandis que la famille et le pays
sont des repères psychologiques maîtrisables dans un monde au contour flou. Il faut aussi se garder de
confondre car si dans la Résistance, il y avait un ennemi parfaitement identifiable et des valeurs
autocentrées sur le quotidien français. Les jeunes d’aujourd’hui, vivent une réalité différente. Ils
côtoient des jeunes issus de l’émigration, porteur de valeurs et de traditions différentes. Les groupes
d’amis intègrent des religions diversifiées, des valeurs opposées. Ils n’ont pas toujours un regard
négatif sur l’autre et impose une nouvelle liberté de pensée. Le devoir de mémoire n’a pas le même
sens chez les jeunes d’aujourd’hui. Le « savoir-partagé5 » qui forme le ciment d’une société se modifie
sous l’influence des nouvelles technologies de communication et des autres formes de diffusion des
connaissances. Ni l’Ecole, ni les institutions, ni les bibliothèques, ni les familles ne sont les uniques
vecteurs de la connaissance. Il est probable que les générations montantes soient plus conciliantes sur
les questions de laïcité et de droit à la différence. Ce qui, a plus d’un titre peu inquiéter. En tout cas, si
cette assertion se révèle fausse, ils imposeront tout de même une reformulation des valeurs. Enfin, pour
les lycéens, même l’Union soviétique apparaît, souvent, à égalité avec l’Empire romain. C’est
« quelque chose qui s’est passé avant… ! ». La Seconde Guerre mondiale est souvent un film en noir et
blanc et l’idée de service militaire, un vague souvenir et encore. Le quotidien des jeunes est dominé
par d’autres formes de violences, d’incivilités et de perspective de chômage qui modifient leur
perception des valeurs. La formation de la jeunesse sur les valeurs est donc un enjeu de portée
nationale et d’avenir.
Le CNRD est donc un outil pour formuler les valeurs, élaborer une prise de conscience et travailler sur
la mémoire. Au niveau de l’enseignant, c’est une entrée possible. Certes, celle-ci ne va pas de soi. Les
contraintes administratives, de programme pèsent lourdement sur les choix des enseignants. Cependant
il permet de mettre en place une pédagogie plus active, tout en donnant un but quantifiable et concret
au débat d’ECJS.
Le Concours, un lien entre l’étude de l’histoire et l’ECJS
L’histoire est inscrite dans les programmes d’ECJS
« Replacer l'événement dans une chaîne historique. La deuxième tâche consiste à insérer l'événement étudié dans son
contexte spatio-temporel. Cela suppose des recherches indispensables à la compréhension des faits, en mobilisant les
méthodes comparatives des sciences humaines et sociales. On peut ainsi contribuer à relativiser la portée affective ou
passionnelle des événements au profit d'une analyse plus rationnelle. Un des obstacles à l'étude sérieuse de l'actualité tient
4 Guy Creté, « valeurs de la Résistance, valeurs d’aujourd’hui » dans la lettre de la Fondation de la Résistance, n °37, juin
2004. Cette enquête n’a pas une valeur scientifique définitive, mais elle constitue une intéressante prospective.
5 D’après Jean-Pierre Vernant, La traversée des frontières, SEUIL, 2004.