POUR RAPPEL : LE CADRE GÉNÉRAL
En 1945, la question de l’humanisme a opposé chrétiens, marxistes et existentialistes, cependant
que, de Heidegger à Althusser, on a pu prôner l’antihumanisme. Mais, relevait Maximilien Grubel, en
1968 : « Quoi qu'il en soit, l'expérience des 50 dernières années a montré au-delà de ce qu'on pouvait
craindre que l'évaluation des frais du « progrès » est à revoir dans son principe. Le bilan est négatif
pour tous témoins lucides de ces temps d'Apocalypse » [Rubel 1968]. Depuis lors, pourtant,
emportant ces oppositions, le développement du protocole narratif ultralibéral a suscité une
révolution mentale et culturelle des formes de l’espérance et de la foi.
S’appuyant sur la science économique comme mathématique des besoins, le néo-libéralisme a bâti
un double discrédit. D’une part, le discrédit de l’Homme afin qu’il garantisse sa propre surveillance et
produise sa propre aliénation, conformément à l’analyse de Michel Foucault [Foucault 2004 [1979]].
Et d’autre part, le discrédit de la Société, organisé aux dépens de la rationalité symbolique, en
disqualifiant au titre de la « rentabilité » toute une série de pratiques fondatrices de la condition
humaine : la politique, le droit, la morale, l’art, la religion. Ce discrédit conduit à l’obscurcissement
définitif des fins [Cambier 2011].
De telle sorte que la question de l’humanisme se repose aujourd’hui, et avec elle, la possibilité
même de projets sociaux, économiques, politiques, culturels, tout comme la question des valeurs,
des savoirs et des principes sur lesquelles fonder ces projets et les actions de chacun. Cette
démarche suppose que les savoirs propres aux lettres et sciences humaines et sociales soient
analysés, critiqués, et, lorsque nécessaire ; démystifiés, de même que ceux des sciences de la nature,
qui s’articulent toujours d’une manière ou d’une autre aux sciences de l’homme et aux pratiques
politiques. Et ce dans la mesure où elles contribuent à la manipulation effective des vérités [Ogilvie
2012].
Premières étapes de ce programme de rencontres, des journées ont été organisées à Valpré (Lyon),
sur le thème : «L’évolution de la discipline économique l’amène-t-elle à s’affranchir de tous les
attributs d’une science de l’homme et de la société ?», en juin 2010 ; et, à l'IMEC (Caen), sur le
thème : « Vers une économie humaine. Pensées critiques d’hier pour aujourd’hui », en juin 2012.
Nous nous sommes interrogés sur les conditions auxquelles la science économique doit souscrire
pour réintégrer le corpus des sciences de l’homme et de la société, en reprenant des
questionnements fondamentaux relatifs à son rapport à l’histoire, à l’action collective, à une
anthropologie économique capable de rendre compte de l’enracinement de concepts fondamentaux
(contrat, droit de la faillite, chômage etc..) dans des institutions et cultures différentes.
CE TRAVAIL S’INSCRIT AU SEIN DE L’AXE II DU CIAPHS, CONFORMEMENT A NOTRE PROGRAMME :
LLes chercheurs du CIAPHS ont une tradition de recherche sur les processus de transformation des
inégalités sociales en discriminations ; cette question de l’inclusion sociale nous semble devoir être
traitée au travers de l’impact des transformations sociales contemporaines et des questionnements
des discours contemporains autour du délitement du lien social et de la sociétisation.
Particulièrement au niveau du débat théorique et interdisciplinaire sur Intégration, ségrégation et
solidarité, avec un colloque à échéance. »