
F. BELLISLE – 46ème JAND  4
Le « goût pour » l’aliment : l’apprentissage alimentaire 
L’enfant dispose donc à la naissance d’un petit répertoire de réponses d’acceptation 
ou de rejet induites par les stimuli gustatifs ou olfactifs. A l’âge adulte, la diversité 
interpersonnelle des goûts et aversions alimentaires est immense. La question est donc de 
savoir comment ce répertoire inné, identique chez tous les nouveau-nés, évolue en une 
extrême diversité. La réponse se trouve évidemment dans l’expérience alimentaire de 
chaque mangeur, dans un contexte culturel, social et économique donné. Par l’ingestion, le 
« goût de » l’aliment (plus exactement la perception de l’ensemble de ses caractéristiques 
organoleptiques) va permettre l’élaboration du « goût pour » l’aliment, autrement dit 
l’appétibilité spécifique de l’aliment pour un mangeur donné. 
  L’expérience des effets métaboliques consécutifs à l’ingestion d’un aliment aux 
caractéristiques sensorielles particulières induit un apprentissage, un conditionnement, qui 
affecte le comportement du mangeur lorsqu’il se trouve de nouveau en contact avec cet 
aliment. Plusieurs types de réponses peuvent ainsi être apprises par ce même mécanisme 
biologique qui associe les caractéristiques sensorielles de l’aliment (le stimulus conditionné 
ou SC) aux conséquences nutritionnelles de l’ingestion de cet aliment (le stimulus non 
conditionné, ou SNC).  
 
L’aversion alimentaire conditionnée est bien documentée (4). Lorsque l’ingestion d’un aliment 
aux caractéristiques sensorielles particulières est suivie d’un malaise digestif, une aversion 
puissante et durable apparaît après une seule association de l’aliment avec ces 
conséquences digestives.  Chez l’homme, ce mécanisme fait partie de l’expérience 
alimentaire de la plupart des gens. Il a été particulièrement étudié chez des patients 
cancéreux exposés à des traitements de chimio ou de radiothérapie susceptibles d’induire 
des nausées ou des vomissements. Cet effet des traitements anticancéreux pourrait 
accentuer la perte d’appétit chez ces patients. Il a donc été proposé, avec un certain succès, 
d’exposer les patients à un aliment inhabituel, qui puisse servir de « bouc émissaire », avant 
leurs séances de thérapie, de telle sorte que, en cas d’apparition de trouble digestif et 
d’aversion alimentaire, cette aversion s’oriente vers l’aliment inhabituel et ne diminue pas 
l’appétit pour les aliments courants (5) . 
 
Le rassasiement conditionné 
  Dès 1972, Booth (6) a établi qu’après quelques jours d’exposition, des rats apprennent 
à boire plus d’une solution de glucides diluée (10%), marquée arbitrairement d’une flaveur A, 
que d’une solution plus concentrée (50%), marquée d’une flaveur B, de telle sorte que leurs 
besoins énergétiques soient couverts. Lorsqu’ils sont ensuite nourris avec une solution de 
concentration intermédiaire (30%), mais de flaveur A ou B, les animaux consomment plus de