1
Majeure Entrepreneuriat
Année 2009-2010
Business Model et Entrepreneuriat social
Le défi de l’entrepreneuriat social : comment construire
un business model à la fois pérenne et créateur de
valeur sociale ?
Mémoire de fin d’études, Rouen Business School
Non confidentiel
Auteur : Juliette BROSSARD
Directrice de mémoire : Rita KLAPPER
2
Executive Summary
L’entrepreneuriat social connait depuis une vingtaine d’années un essor mondial et suscite un
véritable engouement. Le phénomène, qui emprunte à la fois au secteur « non profit » traditionnel et
aux pratiques du « business » ancrées sur le marché, apporte en effet des solutions nouvelles,
innovantes et durables, comme par exemple la micro-finance, à des problèmes sociaux ou
environnementaux majeurs. Dans un contexte de chômage chronique et de persistance de grandes
inégalités sociales, le mouvement mérite que l’on s’y intéresse ! De prime abord, « entrepreneuriat »
et « social » ne font pourtant pas bon ménage. Il semblerait que les entrepreneurs sociaux soient
confrontés au défi principal de concilier la logique économique et la logique sociale dans la mise en
œuvre de ce business model d’un nouveau genre. En partant de cette hypothèse, qui est discutée
dans ce mémoire, la question que l’on se pose est donc la suivante : comment répondre à ce défi et
créer des business models à la fois pérennes et créateurs de valeur sociale ? Quels sont les leviers
de succès dans la démarche des entrepreneurs sociaux ?
Après avoir tenté d’identifier les grands traits du phénomène, très hétéroclite, de l’entrepreneuriat
social, nous avons pu revisiter le concept de business model à l’aune de ce nouveau modèle. Ces
mises au point théoriques nous ont permis ensuite d’étudier dans de bonnes conditions les business
models de trois entreprises sociales françaises. Pour répondre à notre problématique, nous avons tiré
les enseignements de leurs expériences respectives et avons pu identifier six points communs, que
l’on pourrait considérer comme des facteurs de réussite : la faculté de « sortir des schémas de pensée
habituels », à la fois à l’origine et dans la mise en œuvre du business model, une habileté dans la
gestion des parties prenantes, notamment par l’utilisation des réseaux, la qualité de l’équipe, et la
focalisation sur le bénéficiaire, et enfin la tendance à sans cesse aller au-delà des limites de son
action. Ces résultats, issus de l’étude qualitative de trois cas, ne prétendent pas être généralisables à
l’ensemble des entreprises sociales, mais peuvent être considérés comme des pistes de réflexion
pour d’éventuelles futures études ou pour inspirer de potentiels entrepreneurs sociaux.
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SOMMAIRE
EXECUTIVE SUMMARY 2
INTRODUCTION 5
METHODOLOGIE 8
CHAPITRE 1 : L’ENTREPRENEURIAT SOCIAL : L’EFFICACITE ECONOMIQUE AU
SERVICE DU PROGRES SOCIAL 9
I. Qu’est ce que l’entrepreneuriat ? 9
II. Revue de la littérature et mise en perspective historique des différents termes
liés à l’entrepreneuriat social 11
1) L’économie sociale et solidaire : le secteur dans lequel se déploie l’entrepreneuriat
social 12
2) L’entrepreneur social : celui qui veut changer le monde 14
3) L’entreprise sociale 15
4) Le « social business » 17
5) L’entrepreneuriat social 19
III. Vers une définition de l’entrepreneuriat social 20
1) Une réalité plurielle 20
2) Les grands traits de l’entrepreneuriat social 22
3) Comparaison récapitulative de l’entrepreneuriat classique et de l’entrepreneuriat
social 25
CHAPITRE 2 : LE BUSINESS MODEL DE L’ENTREPRENEURIAT SOCIAL : UN MODELE
COMPLEXE QUI CHERCHE A CONCILIER CREATION DE VALEUR SOCIALE ET
PERENNITE 28
I. Qu’est-ce que le business model? 28
1) Une diversité conceptuelle mais des points de convergence 29
2) Une approche entrepreneuriale : le business model comme conceptualisation au
service de la création entrepreneuriale 31
II. L’entrepreneuriat social : des business models d’un nouveau genre 32
1) Comment modéliser le « business model social » ? 32
2) Typologies au sein des business models de l’entrepreneuriat social 34
a) Une classification liée au modèle de revenus : trois grands types de « social business
models » 34
b) Une classification liée au degré de relation entre la mission de l’entreprise et l’activité
génératrice de revenus 36
3) Entrepreneuriat social : un business model souvent complexe 37
4
CHAPITRE 3 : REUSSIR LE PARI DU « BUSINESS MODEL SOCIAL » : LES LEÇONS
TIREES DE TROIS INITIATIVES FRANÇAISES 43
I. L’entrepreneuriat social en France : contexte et état des lieux 43
II. Présentation des trois entreprises sociales et de leur business model 45
1) L’Agence du Don en Nature (ADN-Eurogiki) 45
a) Création, mission, et activité de l’Agence du Don en Nature 45
b) Son business model 47
c) L’Agence du Don en Nature et l’entrepreneuriat social 52
2) Puerto Cacao 53
a) Création, mission, et activité de Puerto Cacao / Choc’ethic 53
b) Son business model 54
c) Puerto Cacao et l’entrepreneuriat social 61
3) Mozaïk RH 61
a) Création, mission, et activité de Mozaïk RH 61
b) Son business model 62
c) Mozaïk RH et l’entrepreneuriat social 66
III. Comment construire de tels business models ? 67
1) Sortir du schéma de pensée habituel… 67
a) …comme point de départ du business model 67
b) …pour faire fonctionner le business model 69
2) Une gestion optimale des parties prenantes 70
a) En externe : l’importance des réseaux 70
b) Interne : qualité de l’équipe 71
c) Ne jamais oublier le bénéficiaire final 72
3) Voir plus loin et repousser les limites de son action 72
CONCLUSION 74
BIBLIOGRAPHIE 75
ANNEXES 80
RESUMES 84
5
Introduction
« Les entrepreneurs sociaux ne se contentent pas de donner un poisson, ou
d'enseigner la pêche. Ils n'auront de repos que lorsqu'ils auront réussi à
révolutionner l'industrie de la pêche. » Bill Drayton, Fondateur d’Ashoka
Depuis une vingtaine d’année, se développe partout dans le monde une nouvelle manière
d’entreprendre, qui conjugue efficacité économique et utilité sociale, et qui ouvre des voies
prometteuses dans le combat contre les problèmes majeurs de nos sociétés : l’entrepreneuriat social.
Le phénomène, mondial, semble dessiner un nouveau modèle, hétérogène, qui emprunte à la fois au
secteur « non profit » traditionnel et aux pratiques du « business » ancrées sur le marché, afin
d’apporter des réponses nouvelles et durables aux problèmes sociaux et environnementaux. Celui-ci
suscite aujourd’hui un véritable engouement tant au niveau de la recherche que de la pratique.
Les entreprises sociales se sont développées à un rythme très soutenu dans les deux dernières
décennies : ainsi, selon la deuxième étude réalisée dans le cadre du Global Entrepreneursip Monitor
(GEM) en 2006, environ 3,2% de la population active, soit près d’1,2 millions de personnes, étaient
engagées dans des activités d’entrepreneuriat social au Royaume-Uni
1
. L’émergence, dans le monde,
de nombreux réseaux ou organisations destinées à accompagner et promouvoir l’entrepreneuriat
social témoigne aussi de l’essor du phénomène : le réseau Ashoka, la Fondation Klaus Schwab pour
l’entrepreneuriat social, ou encore la Fondation Skoll en sont les exemples les plus emblématiques.
Dans le milieu académique, cette notoriété grandissante se traduit par le développement de centres
de recherche et de formation en entrepreneuriat social dans l’enseignement supérieur : les initiatives
pionnières de Harvard, Stanford, Columbia ou Oxford ont été suivies, plus récemment, par certaines
des plus grandes écoles de commerce françaises (ESSEC et HEC).
Si l’enthousiasme est tel, c’est que l’entrepreneuriat social apporte des réponses innovantes à des
problèmes que les gouvernements, les institutions publiques ou les organismes de charité échouent à
résoudre depuis bien longtemps. Dans son rapport sur le veloppement dans le monde 2010
2
, la
Banque Mondiale estime qu’un quart de la population mondiale a moins d’1,25 dollar par jour pour
vivre, qu’1,6 milliard de personnes n’a pas l’électricité et qu’un milliard n’a pas accès à l’eau potable.
Les pays développés ne sont pas épargnés : en France, 13,2 % de la population en 2006 vivait en
deçà du seuil de pauvreté (considéré par l’INSEE comme 60% du niveau de vie médian soit 880 euros
par mois en 2006)
3
. A l’heure de la crise financière mondiale, de la montée du chômage et de
l’exclusion, de la persistance de la pauvreté, du changement climatique, des catastrophes naturelles
et humanitaires (Tsunami en Asie du Sud-Est en 2005, séisme d’Haïti en janvier 2010),
l’entrepreneuriat social semble donc plus que jamais d’actualité. Le succès reconnu de formules
1
HARDING, R. (2006), Social Entrepreneurial Monitor, d’après les données de GEM UK 2005, London Business
School
2
BANQUE MONDIALE (2010), Rapport sur le développement dans le monde (Abrégé version préliminaire
destinée à la Presse), Banque Mondiale, p.8.
3
GODEFROY, P. ; PUJOL, J. et al (2009), Inégalités de niveau de vie et mesures de la pauvreté en 2006, INSEE
2009
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