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Eté 2015 - Numéro 25- La lettre de l'I-tésé
Eclairages
La participation des systèmes hydrogène aux
services système et au mécanisme d’ajustement : des
bénéfices à portée de main
Techniquement, les systèmes hydrogène sont capables de
contribuer à la stabilité du système électrique par leur
participation aux services système et au mécanisme
d’ajustement. Il reste que leur participation ne sera
effective que si elle est assortie d’un bénéfice économique
pour le producteur d’hydrogène.
Le projet REVERSE et le projet VItESSE 2ont examiné ces
questions [1]-[2] et il ressort que la participation au réglage
de fréquence primaire est actuellement encore trop peu
attractive [1]. Cependant l’écart n’est «que» d’un facteur
deux, ce qui ne semble pas insurmontable à terme, étant
donnés les besoins croissants d’équilibrage qui accentuent
la valeur de ce service, associé à la perspective de
réduction des coûts des systèmes hydrogène.
En ce qui concerne le mécanisme d’ajustement, l’intérêt
économique existe déjà : participer à ce mécanisme peut
contribuer à réduire les coûts de production de
l’hydrogène de l’ordre de 10% [2]. Néanmoins il est
indispensable de souligner que dans le cadre d’un
déploiement massif, les systèmes hydrogène seront
confrontés à la concurrence d’autres demandes flexibles
(e.g. stockage, véhicule électrique), ce qui nécessitera de
trouver des complémentarités entre les différentes
solutions.
Les systèmes hydrogène : un vecteur potentiel
d’intégration massive des EnR
Vu du système électrique, un système de production
d’hydrogène par électrolyse est une demande flexible
d’électricité. De telles demandes rendent possible le
développement de mix électriques extrêmement
volontaristes en termes environnementaux, en utilisant
mieux les capacités de production électrique bas carbone :
qu’elles soient programmables comme l’énergie nucléaire,
ou non, comme l’énergie éolienne ou photovoltaïque. En
effet, la flexibilité de la demande permet d’éviter la
réduction du taux de charge des centrales programmables
ainsi que –en partie au moins– l’écrêtement des énergies
renouvelables non programmables. La mise en œuvre
d’interconnexions nombreuses permettrait qui plus est
d’augmenter les synergies entre pays européens.
De premiers résultats ont montré que le développement
de tels mix semble possible, avec un coût de production
d’hydrogène potentiellement compétitif [3]. Il reste que, là
encore, la concurrence avec les autres types de demande
flexible est à examiner en détails pour préciser les
opportunités réelles.
Un usage de l’hydrogène qui devient
économiquement viable pour des applications « site
isolé »
Loin de s’opposer aux batteries, l’hydrogène comme
moyen de stockage pour sécuriser l’approvisionnement
électrique de sites dits «isolés» apparait très
complémentaire. Le stockage via l’hydrogène est plutôt
utilisé avec un rythme saisonnier, quand les batteries
assurent les variations journalières de la demande.
Il apparait que, couplée à une installation photovoltaïque,
la « chaine hydrogène » constituée d’un électrolyseur,
d’un stockage et d’une pile à combustible, ne représente
qu’une part modeste du coût de production de
l’électricité, mais qu’elle réduit très significativement le
dimensionnement du banc de batteries. Ainsi, dans le cas
de l’étude menée par le projet REVERSE, le surcoût de
l’électricité produite par rapport à l’alternative diesel,
pour un coût du diesel à 2€/l, se trouve réduit de moitié,
ne représentant plus que 20% grâce à la complémentarité
des deux types de stockage. De plus, pour un coût de
2,5€/l, la solution hybride hydrogène-batteries devient
compétitive par rapport à l’alternative diesel [4].
A moyen terme : le potentiel de l’électrolyse haute
température
L’électrolyse haute température est un procédé
d’électrolyse de la vapeur d’eau, opérant typiquement à
des températures de 700 à 800°C. Ce procédé permet des
gains en rendement, notamment via l’apport direct sous
forme de chaleur d’une partie de l’énergie. Cette chaleur
est fournie grâce à des systèmes d’échangeurs thermiques
entre flux entrant et sortant de l’électrolyseur, et ne
requiert donc pas de source thermique à très haute
température.
Le stack d’électrolyse haute température présente un
potentiel supplémentaire par rapport aux autres types
d’électrolyse. En effet, il permet de faire de la co-
électrolyse de dioxyde de carbone et d’eau, produisant du
gaz de synthèse valorisable de multiples façons. Par
ailleurs, le même stack d’électrolyse haute température
peut être exploité en mode réversible, permettant avec un
seul objet d’assurer soit un service de production
d’hydrogène (mode électrolyse), soit une production
d’électricité (mode pile). Ceci permet d’imaginer de
nouveaux types de système : un électrolyseur haute
température couplé à une source électrique bas carbone
pourrait devenir un procédé de production d’hydrogène
pour des applications produit chimique ou vecteur
énergétique de l’hydrogène, doublé d’un procédé de
production d’électricité en période de tension du système
électrique. Ainsi, un potentiel technique et économique
pour cette technologie est mis en évidence, mais il reste à
le démontrer en conditions réelles compte tenu de la
moindre maturité de cette technologie aujourd’hui.