Question de point de vue Rue de Gembloux, 48 - 5002 Saint-Servais Tél : 081/73.40.86 - Fax : 081/74.28.33 [email protected] La philosophie : pour une construction de soi Cette analyse est téléchargeable sur : www.equipespopulaires.be Avec le soutien de Juillet 2011 Auteur : Raphaël D'Amore, animateur du groupe Philosophie et Société des Equipes Populaires de Mons-La Louvière La philosophie peut-elle nous rendre heureux, consoler, lever nos angoisses, comprendre le monde ? Elle est assimilée à la sagesse comme relation apaisée au monde, aux autres, à soi… Etre épicurien, stoïcien, cynique, ce n’est pas simplement penser mais bien vivre. Les philosophes proposent des façons de travailler sur soi, sur les représentations du monde ou de ses désirs pour "mieux vivre". Elle s’adresse à des gens qui vont bien, c’est-à-dire "normalement mal". Elle est pure spéculation. Elle apporte des remèdes contre le confort des habitudes et des préjugés. En ce sens, la philosophie propose des "remèdes". Mais attention, ces remèdes s’adressent à des hommes en bonne santé psychique, ils ne traitent que les difficultés de l’homme normal : c’est-à-dire les maux de la condition humaine, non les cas de maladies psychiques. La philosophie rappelle à ceux qui souffrent qu’ils ne sont pas seuls, que la souffrance est liée au fait d’être humain. Tandis que la psychanalyse leur dit qu’ils sont seuls à souffrir et que cette souffrance est la leur. Les difficultés que la philosophie aborde sont nombreuses : l’amour du cliché, la passion et la peur de la vie, la bêtise, le fanatisme, le stress… Mais bien souvent elle recherche la vitalité de l’intranquillité et non pas le repos serein… Pas de médecin à consulter, pas d’ordonnance, à chacun de trouver sa posologie, de partir de cet ensemble, ouvert à l’infini, pour trouver ce qui fera du bien. 1 LES REMÈDES Effets secondaires : réveils difficiles, addiction, amollissement dans la luxure. 1. La cure d’Epicure Le plaisir est le principe et la fin de la vie bienheureuse. Mais attention, avant de se précipiter sur un "Mojito"ou une "Caïpirinha", il faut méditer sur les principes de l’ascèse épicurienne (voir glossaire p8). Loin de se vautrer dans l’hédonisme et la débauche, le sage épicurien se contente de peu, privilégiant certains plaisirs : éviter la douleur, manger à sa faim, être en bonne santé, tels sont les principes d’une existence bienheureuse, construite non pas sur une accumulation des richesses, mais sur une simplicité naturelle. La souffrance de l’homme naît de son incapacité à réguler ses désirs vains, inutiles, artificiels… On veut un vélo, une moto, une grosse voiture, et puis un jet. Rien de tel qu’une bonne hygiène de vie. Onfray A lire en priorité : L’invention du plaisir de Michel Onfray; Contre-histoire de la philosophie tome 1 : Les sagesses antiques de Michel Onfray. Mais aussi : Aristippe et les cyrénaïques, les libertins du 18e siècle (Sade, Diderot…) 3. Combattre le fanatisme Si vous êtes un militant politique et que vous sentez monter autour de vous des bouffées d’intolérance, de fanatisme, de dogmatisme, alors il faut lire d’urgence l’appendice du livre 1 de l’Ethique ou la préface du traité théologicopolitique de Spinoza. Spinoza explique que le fanatisme, les préjugés, transforment les hommes rationnels en bêtes brutes et empêchent chacun d’user de son jugement. Il faut chercher les réponses grâce aux sciences et comprendre comment le réel fonctionne. Indications : à prendre quand on a passé sa jeunesse. Effets secondaires : sévérité, à force d'hésiter on passe pour un rabat-joie. A lire en priorité : Lettres, maximes, sentences d’Epicure. Mais aussi : Epicure, un peu de Diogène… Indications : des piqûres de rappel s’imposent régulièrement. Effets secondaires : entraîne un refus des religions traditionnelles (ce qui n’est pas plus mal!! Même bénéfique). Epicure 2. Jouir sans entrave Jouis ! Mot d’ordre des hédonistes. Les hommes vivent dans l’erreur et poursuivent de vaines aspirations religieuses ou sociales qui les dépossèdent d’eux-mêmes. Pour les guérir, ils soutiennent que la vérité ne se trouve pas dans le ciel mais dans les sensations, dans la volupté de tous les sens et de tous les instants. Jouir c’est magnifier le corps en tant qu’il perçoit, mange, fait l’amour, rit… Pour autant l’hédonisme ne prône pas une débauche permanente. Spinoza A lire en priorité : Traité théologico-politique de Spinoza. Mais aussi : Spinoza, Voltaire, les philosophes des lumières, Rosset, Onfray, Schopenhauer, Nietzsche, et éventuellement Darwin, Einstein… 4. Rééducation à la liberté Vous n’avez pas le courage d’être libre, vous êtes persuadé de ne pas avoir les qualités, vous vous dites que ce n’est pas de votre faute, mais celles des circonstances, de votre inconscient, de votre Indications : convient aux ambitieux. 2 6. Se désensibiliser de la peur de mourir classe sociale…Vous souffrez de ce que Sartre appelle "la mauvaise foi". Vous devez comprendre que vous êtes le néant, mais attention : le néant n’est pas rien puisqu’il peut tout devenir. Vous êtes un champ de possibles ouvert à l’infini. En tant qu’être humain vous êtes liberté, vous n’êtes que ce que vous vous ferez d’être, toujours au-devant de vousmême, vous projetant dans l’avenir par votre action. A vous d’inventer, à partir de votre vie, ce chemin que vous orienterez sans cesse. Vous redoutez de tomber gravement malade, vous avez le vertige… Rien de grave. Vous souffrez d’une affection courante : la peur de mourir. A lire : De la nature des choses de Lucrèce. Ce trouble souvent accompagné de la peur des dieux provoque des souffrances terribles. La philosophie, après Epicure, s’attache à montrer que la mort n’est rien, l’enfer est une invention des hommes, la mort n’est que l’absence de douleurs. A quoi bon s’effrayer alors que vous ne serez plus là pour en souffrir. Profitez du moment présent pour jouir de l’existence. Se libérer de cette angoisse est le premier pas vers le bonheur. Rappelez-vous que la vie ne vous appartient pas et ne dépend pas de vous. Apprêtez-vous à la rendre à tout moment. Posologie : convient aux adolescents et aux jeunes adultes. Effets secondaires : angoisse, inconstance, troubles identitaires. A lire en priorité : L’existentialisme est un humanisme de JeanPaul Sartre. Mais aussi : Sartre, Kiergegaard. Posologie : à appliquer lors d’une attaque de sanglier, lors de son premier jour de retraite. Effets secondaires : témérité, imprudence. Sartre A lire en priorité : Pensées pour moimême de Marc-Aurèle. Mais aussi : Epicure, Lucrèce, Marc-Aurèle… 5. Se détacher Le train en retard, le lave-linge en panne... Adoptez la position stoïcienne : ces événements ne dépendent pas de vous et rien ne sert de vous en préoccuper. C’est ce que prône Epictète. A haute dose ce régime d’autopersuasion vous rendra invincible, jusqu’à vous libérer de tout attachement superflu. Bon antidote à la souffrance, hélas plus efficace dans les transports en commun que pour le décès de vos proches. Marc-Aurèle 7. S’effacer et méditer sur l’autre A force de croire au pouvoir illimité de la conscience sur les êtres, celle-ci peut être gangrenée par l’idée que rien n’existe en dehors d’elle. Le "moi" n'est pas souverain, il s’éprouve dans la rencontre avec autrui or autrui c’est l’autre. Il échappe à l’emprise du moi. Cette extériorité doit être reconnue et certains rapports nous y invitent. Par exemple : dans le rapport sexuel l’autre se dérobe sans cesse à la fusion et c’est l’effacement de soi devant l’altérité de l’autre qui définit sa subjectivité. D’autrui, je suis responsable et c’est lui qui me l’ordonne ; par sa présence, l’autre m’enjoint de répondre à lui et me fait renoncer aux prétentions égoïstes. Indications : recommandé de bien s’en imprégner dès la mort de son premier poisson rouge. Effets secondaires : entraîne une forme d'insensibilité, d’égoïsme. A lire en priorité : De la brièveté de la vie de Sénèque. Mais aussi : Epictète, Marc Aurèle, Sénèque. Sénèque 3 Indications : aux personnes renfermées sur ellesmêmes, ceux qui vivent dans une solitude obsédante. Contre-indications : les sujets trop sensibles à la rencontre de l’autre. Effets secondaires : une prise continue peut conduire à la paranoïa, par le sentiment d’être pris en otage par l’autre. LES PIÈGES L’activité philosophique comporte quelques dangers; de remède elle peut devenir poison… mais un fascinant poison. Fascinant vient du latin "fascinum", qui veut dire charme, maléfice : charme de découvrir que l’on peut penser autrement, maléfice d’en revenir égaré. A lire en priorité : Autrement qu’être ou audelà de l’essence de Lévinas. 1. La folie « L’homme, dans la nature, peut à peine devenir fou » (Kant). Pour Kant, le progrès de la société en sollicitant toujours davantage notre entendement (compréhension) est à l’origine des désordres psychiques. Ce diagnostic sera confirmé par Freud ; selon lui, la civilisation, exigeant de l’homme toujours plus, accroît le nombre de névroses. La philosophie est une activité civilisée, mais comme elle ne cesse de solliciter notre raison, elle incite à rompre avec le réel, ce qui en elle peut promouvoir la folie. Parce que toute réflexion philosophique a quelque chose d’acrobatique, elle nous fait encourir un risque de chute dans l’aberration voire dans la folie. Lévinas 8. Corriger les concepts L’esprit est trop souvent embrouillé, enfoncé dans de faux problèmes. L’origine réside dans une mauvaise formulation de la pensée. La philosophie est une activité de clarification de nos concepts, mais il faut opérer à la racine du mal : le langage. La signification du mot n’est pas idéale, elle tient à l’usage qui en est fait dans des situations concrètes. On obtient ainsi ce qui marche et à l’inverse ce qui ne peut être énoncé ni compris. Pour ce qui est des tourments existentiels, il n’y a pas de leçon et chacun doit les affronter dans… le silence. Sujets à risque : étudiant en 1ère année de philosophie, tous ceux qui commencent à lire de la philosophie. Symptômes : crises de paroles, discours psychédéliques. Posologie : en cas de "prises de tête" ou lors d’une grande consommation de blabla. Effets secondaires : risque d’isolement dans le mutisme et le rigorisme moral. A lire en priorité : Investigations philosophiques de Wittgenstein. Mais attention philosophe exigeant, voire tyrannique. A lire en priorité : L'anti-Œdipe de Gilles Deleuze. Mais aussi : Kant, Freud, Deleuze. Gilles Deleuze Wittgenstein 4 2. Le dogmatisme Symptômes : moments de désespoir et de fous rires. A l’heure où il convient de se dire ouvert aux autres, pragmatique, tolérant, quoi de plus tentant qu’une puissante injection de dogmatisme. Aujourd’hui un engagement dogmatique, philosophique, politique ou religieux peut séduire. On peut être convaincu de détenir la vérité. Un dogmatique qui s’assume a définitivement découvert la vérité, il a moins de chance d’être surpris par un événement, il refuse qu’on lui ouvre les yeux, il risque d’annuler le principe même de la philosophie : la faculté de s’étonner. A lire en priorité : Au-delà du bien et du mal de Nietzsche. Mais aussi : Jaccard, Schopenhauer, Nietzsche, et certains auteurs russes du 19ème siècle. Nietzsche LES VACCINS La lecture des classiques, l’examen des questions complexes, risque d’enfermer le philosophe et le lecteur dans la solitude, la misanthropie. Sujets à risque : croyants et athées, militants des extrêmes. Symptômes : sensation que rien ne vous échappe, ne vous surprend, bouffées de toutepuissance. Par exemple, un peu de sagesse épicurienne nous fait mieux apprécier les plaisirs simples de l’existence, mais à forte dose elle nous éloigne de l’action. Au contraire, le pessimisme de Schopenhauer, qui condamne celui qui en abuse au désespoir, peut minidoser, nous protéger des illusions. Tout est question de dosage. A lire en priorité : Nouveaux essais sur l’entendement humain de Leibniz. Mais aussi : Platon, Kant, Hegel, Leibniz, Badiou… Leibniz 1. La libération par l’angoisse ou assumer notre liberté 3. Le nihilisme On peut considérer le chemin de la vérité comme le chemin du doute. A mesure qu’on affine sa conscience, on peut tomber dans un discours de haine. Impossible de penser la condition humaine sans penser à la mort et au néant. Le nihilisme est attirant pour deux raisons : il est radical, face à lui toute idéologie, pensée, doctrine semble frileuse, hypocrite. D’autre part il procure à celui qui l’adopte la sensation d’appartenir à « une aristocratie de la sensibilité ». Le nihilisme ne convient pas aux pauvres, lesquels sont occupés à survivre. On assimile parfois et à tort le nihiliste au terroriste. Le terroriste a une cause à défendre, le nihiliste : rien. Le nihiliste ne sera jamais un militant puisqu’il ne croit en rien, sinon à la vanité de toute pensée. Le nihiliste philosophe ne prend rien au sérieux, même pas le néant. Sujets à risque : adolescents, quadragénaires, quinquagénaires blasés. Il n’y a d’angoisse que chez l’homme libre : je peux être ceci, prendre telle décision, le choix dépend de moi, les façons dont j’affronterai les conséquences aussi. Voilà qui est angoissant, et peut devenir paralysant dans nos actions. Mais à petite dose l'angoisse peut être salutaire, elle nous rappelle à notre liberté, nous ouvre les champs du possible de l’humain. Immunisation : contre la servitude volontaire, le conformisme. Effets indésirables : crises de panique, tendances suicidaires ou asociales. A lire en priorité : Discours sur la servitude volontaire d’Etienne de La Boétie. Mais aussi : Sartre, La Boétie, les existentialistes... La Boétie 5 A lire en priorité : Anatomie de la mélancolie de Burton. Mais aussi : Les auteurs russes, Baudelaire pour le « spleen », Burton. 2. Douter ou ne pas passer à côté de la vie Le doute peut aider, il peut conduire à déprécier tout ce qui nous entoure, au point de perdre contact avec le monde extérieur. Employé à bon escient, le doute est bénéfique ; en rejetant nos opinions sur ce qui nous entoure, nous pouvons vivre mieux. Aux illusions que sont la gloire, la richesse, les honneurs, on peut opposer la neutralité du scepticisme. Avec un peu d’ironie, on élève le scepticisme en art de vivre. Il peut être un antidote à l’ambition. « Au plus élevé trône du monde nous ne sommes encore assis que sur notre cul. » (Montaigne) Burton 4. Antidote à l’agitation du monde ou l’écriture de soi Vous changez d’opinions souvent, votre « moi » vous échappe, vous ne savez pas réagir aux événements. On peut s’immuniser grâce à « l’écriture de soi ». Il y a un risque de repli sur soi, mais minidosée, cette pratique permet une constitution active de « soi-même » ; par un travail sur la mémoire, on se constitue un passé vers lequel on peut faire un retour. On transcrit ce qu’on a lu, appris, vécu, peu importe la forme : lettre, journal intime, photos… Cela demande un effort, une attention tournée vers l’autocritique et la maîtrise des pensées. Par l’appropriation de « l’écriture de soi », le sujet érige une forteresse contre les assauts de l’existence. Immunisation : contre le fanatisme, le dogmatisme. Effets indésirables : selon les patients, indifférence, désespoir, conformisme ou rébellion. Descartes A lire en priorité : Les essais de Montaigne; Discours de la méthode de Descartes. Mais aussi : Descartes, Montaigne, Spinoza, Pyrrhon, Sextus… Immunisation : contre l’aliénation, la dépersonnalisation. Effets indésirables : isolement, nombrilisme. A lire en priorité : Histoire de la folie à l’âge classique de Michel Foucault. Mais aussi : Foucault, Sénèque 3. La mélancolie ou comment donner de la profondeur à notre existence Vous êtes d’un optimisme béat, alors vous devez libérer la bile noire qui est en vous. La mélancolie, mélange de torpeur et d’emportement, vaccinera votre enthousiasme. Eprouvant votre finitude, vous tirerez de la mélancolie une profondeur d’âme. Mais attention à trop méditer sur sa condition de mortel, on se condamne à l’inaction et s’expose à la dépression. Foucault CONCLUSION La philosophie est une chose abstraite ; c’est ce qui lui donne sa puissance, sa vigueur, sa profondeur. Mais son objet est concret : c’est le monde, la vie, telle qu’elle est, telle qu’elle se passe. C’est pourquoi la philosophie aide à vivre. Immunisation : contre l’optimisme béat, et l’euphorie perpétuelle. Effet indésirables : solitude, dépression, en cas d’excès il y a des antidotes (musique, grand air, sexe…) 6 Mais qu’en est-il de Raphaël D’amore ? Un zeste d'épicurisme, une parcelle d’hédonisme, une once de stoïcisme, quelques brindilles de scepticisme, pas mal de cynisme, beaucoup de Spinoza, de philosophes des lumières (Diderot, Voltaire…), de Schopenhauer, de Camus, quelques gouttes de Marx (juste ce qu’il faut…) de Kiergegaard, un peu de Sartre, assez bien de contemporains : Onfray, Comte-Sponville, Rosset, Badiou, et tous les autres… Parfois quelques bouffées de dogmatisme, de nihilisme, de mélancolie, de doute, d’angoisse, de retour sur soi… voilà ce qui fait de moi un homme complet. Dernier conseil : ne pas se contenter d’arpenter un seul chemin philosophique, mais en emprunter un peu de tous. PS : la philosophie n’est pas une théorie mais une activité. (Wittgenstein) Raphaël D'Amore (groupe Philosophie et Société) [email protected] Ecrit en écoutant « Best of» de Paolo Conte Présentation du groupe Philosophie et Société Le groupe Philosophie et Société a été créé en 1988 et fait partie des Equipes Populaires de la région montoise. C’est avant tout un groupe de réflexion, de débat, branché philosophie, littérature, théâtre. Les membres du groupe se connaissent depuis quarante ans, ce sont tous d’anciens militants de la jeunesse ouvrière chrétienne de la génération des années septante. Pourquoi la philosophie ? Il était de tradition dans le groupe de débuter la réunion par une demiheure de discussion philosophique basée sur le livre « le monde de Sophie » (Jostein Gaarder). L’animateur présentait une synthèse d’un chapitre et, ensuite, un débat se poursuivait avec le souci de faire référence à ce qui se passe dans la société et le monde ; puis l’engouement a fait qu'aujourd’hui nous alimentons notre réflexion et nos débats de références philosophiques. Le groupe, en collaboration avec le théâtre des rues, a produit quatre spectacles de théâtre-action. - « Pecorino, charbon et Rita Hayworth » version 1 et 2 (celle-ci entièrement en italien), traitant de l’émigration italienne en Belgique mais également de ce qui se passe aujourd’hui aux frontières de l’Europe. - « Bon carnaval citoyens », traitant de la démocratie, du pouvoir, des élections. - « Travail décent et salaire décent » version 1 et 2, dans le cadre de la campagne de solidarité mondiale. Le groupe a mis sur pied des cafés-citoyens sur la consommation, les religions, et actuellement il est occupé à l’organisation de plusieurs cafés-citoyens consacrés aux alternatives du système capitaliste. C’est un groupe ingérable, indiscipliné, parfois… non, souvent… en désaccord entre nous mais c’est ce qui fait notre force, notre richesse : « de la discussion jaillit la lumière » (Plutarque, philosophe du 2e siècle après J-C). Déroulement de la réunion : repas (à chaque réunion) avec de bonnes bouteilles de vin (et de spiritueux), parfois quelques cigares, discussion, conclusion et jeux de cartes. Tant que nous aurons du plaisir à être ensemble, eh bien ! Nous continuerons sur la route empruntée voici quarante ans. Un petit regret cependant : il nous manque quelques femmes (il y en a une, qui est parfois notre souffre-douleur et je lui demande pardon…) pour agrémenter nos réunions. 7 Glossaire Ascèse : état volontaire d’austérité ayant pour but l’élévation morale de l’âme (définition classique). Aujourd’hui on considère comme épicurien quelqu’un qui fait l’assaut de bonne chère et ne s’épanouit que dans un libertinage débridé, aimant les plaisirs de la vie, assouvissant ses désirs. Or l’ascèse épicurienne est bien plus subtile. Le point commun de tous les philosophes gréco-latins est la mort, il faut s’y préparer donc il faut bien vivre. Après la mort il n’y a rien, on est mort un point c’est tout. Elle n’est que la disparition de l’affectivité. Pour être heureux il faut distinguer les désirs qui nous assaillent et nous perturbent. Certains sont naturels et nécessaires (boire, manger s’accoupler…) et doivent être satisfaits, d’autres sont naturels mais non nécessaires (les fantaisies culinaires et sexuelles), d’autres encore sont totalement vains, inutiles (honneurs, richesses, gloire, fortune, pouvoir…). Être épicurien, c’est : Rechercher le bonheur conçu comme élimination de ce qui nous fait souffrir; Ne pas craindre la mort; Vivre au présent; Refuser de croire aux dieux; Adopter une hygiène de vie qui repose sur l’équilibre naturel. Philosopher, penser est la seule activité qui peut rassurer l’homme, dissiper les ténèbres de l’âme et lui permettre d’atteindre la tranquillité. Hédonisme : doctrine philosophique qui fait du plaisir le but de la vie. Nihilisme : point de vue philosophique d’après lequel le monde, les idées, l’existence humaine est dénuée de toute signification, de tout but, de toute vérité ou de toute valeur. 8