de l`organisation scientifique du travail aux notions de ressources

Trésorerie Générale du Royaume « Management des équipes »
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DE L'ORGANISATION SCIENTIFIQUE
DU TRAVAIL AUX NOTIONS DE RESSOURCES
HUMAINES ET DE MANAGEMENT
Les organisations ont une histoire, l'entreprise actuelle en sera le fruit.
Vers la fin du XIX siècle, lorsqu'il se penche sur le monde industriel
naissant, l'américain F.W. Taylor découvre en fait un univers de tradition et
d'empirisme. Se doute-t-il alors que les études qu'il va mener vont
contribuer au développement de l'industrie moderne et de la production de
masse ?
Au début du machinisme, l'entreprise industrielle est enfermée dans des
contraintes de métiers et de compagnonnage. Il n'est pas question de
formation, mais plutôt de tours de main transmis par les anciens aux plus
jeunes. Il n'est pas question de modes opératoires, mais plutôt d'habileté
des ouvriers chargés de faire fonctionner les machines. Il n'est pas question
de maintenance préventive, mais plutôt de débrouillardise pour réparer les
équipements qui tombent en panne. Il n'est pas question de logique dans
l'organisation des ateliers.
Taylor constate que cette inorganisation, cette fantaisie, est source
d'énormes gaspillages. Au travers d'études qu'il mène sur les gestes mais
aussi sur les temps d'exécution ainsi que sur les facteurs techniques de
production, il en arrive à la conclusion qu'il est possible d'organiser
rationnellement le travail. L'OST ou Organisation Scientifique du Travail
vient de naître.
Du point de vue de Taylor comme de celui de l'ingénieur Français Fayol,
une analyse préalable des tâches doit être menée par des spécialistes
dotés d'un bagage scientifique suffisant. Puis la recomposition par les
mêmes spécialistes produira un organigramme optimal qui mettra chacun
bien à sa place en fonction de ses capacités et aptitudes. La même
démarche s'appliquant à tous les niveaux de l'organisation.
Cette solution semble s'imposer d'elle-même : dès lors que l'analyse est
bien faite, que la recomposition met bien chacun à sa place et que le
règlement ainsi que les nouveaux modes opératoires prévoient tout, les
conflits n'auront plus lieu d'apparaître. Les hommes n'auront plus de raison
de désobéir.
Ainsi l'ingénieur se veut philosophe et postule à son tour que
"l'administration des choses peut remplacer le gouvernement des hommes".
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De nos jours une telle simplification paraît bien naïve de même que la
relégation de l'homme dans le rôle d'une "simple main" qui exécute paraît
bien injuste. Probablement fallait-il en passer par là pour que le travail à la
chaîne, car c'est bien de lui qu'il s'agit, permette le véritable démarrage de
l'ère industrielle moderne et de la production de masse.
Au milieu des années vingt, une étude menée au sein de la Western
Electric révèle l'inexactitude des conceptions strictement Taylorienne : pour
les besoins de l'étude des spécialistes en organisation constituent un petit
"groupe-test" d'ouvrières qu'ils isolent momentanément des autres membres
de l'atelier. Puis ces spécialistes sont amenés à expliquer à ces ouvrières
certaines modifications de leurs conditions de travail. Ainsi de nouvelles
relations s'instaurent et débouchent sur une nette amélioration du moral des
salariées. Rapidement il apparaît que cette amélioration du moral bénéficie
à son tour à la productivité.
On vient de mettre en relief l'importance du facteur humain jusque là
négligé.
Le mouvement des Relations Humaines (RH) vient de naître à son tour :
l'homme au travail n'est plus seulement une main mais aussi "un cœur". La
prise en compte de l'intelligence se fera quelques décennies plus tard.
Le mouvement des relations humaines va alors se développer, à partir des
années trente aux Etats-Unis, un peu plus tard en Europe. Développement
qui s'opère autant en réaction au schéma Taylorien que dans le souci du
patronat d'obtenir un meilleur rendement par le biais de nouveaux rapports
humains. Cette nouvelle approche a permis des progrès importants dans les
relations de travail mais fondamentalement elle se distingue peu de
l'Organisation Scientifique du Travail.
Elle ne fait que compléter les ressources qu'offre l'ingénieur par celles
qu'offre un psychologue d'Entreprise qui a pour mission de rechercher des
"profils" ou de former à un profil. Il sera ainsi à nouveau possible d'affirmer
que chacun est bien à sa place. De plus, la démarche Relations Humaines
ignore les structures de l'organisation tout comme elle ne prend en compte
ni ses habitudes ni les règlements en vigueur. On va alors assister au
phénomène du cadre de premier niveau (les programmes de formation aux
Relations Humaines - quelquefois appelés Relations de Travail - se sont
surtout adressés à la maîtrise et à l'encadrement moyen), nouvellement
acquis aux Relations Humaines, qui tente d'appliquer les vertus d'un
commandement plus démocratique, se heurte aux structures en place et
rapidement revient avec encore plus de force aux "bonnes vieilles
méthodes". Dans ces conditions, il est possible d'affirmer que l'approche
Relations Humaines, malgré des apports non négligeables, ne donne que
peu satisfaction. Par ailleurs le patronat y ayant vu un moyen d'adapter les
individus, les organisations représentatives y virent un outil de manipulation
auquel la plupart s'opposèrent.
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Vers le milieu du siècle apparaît l'idée suivant laquelle l'homme au travail n'est
pas seulement un bras plus un cœur mais aussi "une tête". Dès lors l'Analyse
Stratégique (AS) pose comme postulat : l'homme au travail a une stratégie
personnelle et il est utopique d'envisager que cette stratégie personnelle coïncide
parfaitement avec les buts officiels de l'organisation. Certes, il est possible que la
stratégie personnelle s'inclut assez largement dans l'optique générale de
l'organisation (pour ceux qui souhaitent y faire carrière, par exemple). Mais il est
tout autant possible que la stratégie personnelle soit assez éloignée de cette
même optique générale (pour ceux qui recherchent la tranquillité, par exemple).
Comme par ailleurs le règlement et les normes de fonctionnement ne peuvent ni
tout prévoir ni tout régler, il va bien falloir que les deux partenaires trouvent un
compromis.
L'accord bilatéral se fera autour d'un objectif négocié et non imposé, on parlera
alors de Direction Par Objectif (DPO).
Ce nouvel état d'équilibre suppose que les acteurs veuillent bien "jouer le jeu"
pendant que l'organisation voudra bien leur concéder un espace de liberté.
Pris en compte sous toutes ses dimensions l'homme au travail se retrouve solidaire,
quelquefois inconsciemment, du développement de "son" Entreprise. Il le restera tant
que la réalisation de ses objectifs personnels trouvera satisfaction. L'organisation le
conservera en son sein tant qu'elle en retirera ce qu'elle attend de lui.
L'idéal Saint Simonien implicitement repris par Taylor, s'en retrouve renversé : le
gouvernement des hommes prime l'administration des choses.
Dès lors, la théorie "x" et "y" posée par D. Mac Gregor en 1960 dans son ouvrage :
"The human side of enterprise", qui part de l'acceptation du besoin fondamental, chez
les salariés, de réalisation personnelle, de prise de responsabilité, d'autonomie et
d'intégration véritable de chacun dans l'organisation, s'impose. Elle postule une ligne
hiérarchique plus courte, la participation du personnel à la fixation des objectifs, un
management fondé sur la confiance et le développement chaque fois que possible de
l'autocontrôle.
Le contrôle pour sa part étant entendu au sens Anglo-saxon du terme c'est-à-dire de
type "feed-back", "rétroaction", "régulation" et non "policier", "autoritaire", "normatif".
On retiendra alors l'appellation de Management comme étant la mise en œuvre et la
coordination des fonctions et des personnes qui remplissent ces fonctions de
façon à atteindre un but donné.
Au début des années quatre-vingts, toujours dans le cadre de la Direction Par
Objectif, la Démarche Participative (DP) nous est présentée, quelquefois avec
excès, comme "LA" solution. On ne peut plus côtoyer le moindre dirigeant sans
entendre parler de "management participatif", de "projet d'Entreprise", de
"méthodologie de traitement de problèmes", de "groupes d'expression" ou encore de
"mobilisation des ressources humaines".
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En fait la démarche participative n'est que la poursuite, au demeurant louable,
de l'évolution historique dont on vient d'avoir un aperçu : l'homme maintenant
pris en compte dans sa totalité va devoir s'ouvrir encore plus vers le groupe. Il
aura alors besoin d'adhérer, dans une mesure suffisante, à un projet commun
pour mieux s'intégrer au groupe, mieux y vivre, mieux y travailler. Adhésion
qui n'a de sens que si les salariés restent à même de prendre des initiatives et
des responsabilités dans le cadre quotidien de leur travail. Qui n'a de sens
que si l'organisation leur permet une marge d'autonomie, tolère qu'ils donnent
leurs avis sur les questions qui les concernent et qu'ils communiquent de
façon aussi authentique que possible. C'est-à-dire : sans avoir besoin de se
composer un rôle. Intégration qui n'a de portée que si une véritable délégation
de pouvoir existe et qu'une réelle participation aux décisions est admise de
tous.
Faut-il préciser que ces conditions minimales n'ont pas toujours été
respectées et qu'en conséquence la réelle adhésion des salariés n'a pas
toujours été obtenue et leur véritable intégration n'a pas toujours été effective
?
Ce qui a eu pour effet de produire des dysfonctionnements qui n'ont pas
manqué de discréditer aux yeux de beaucoup l'évolution que représente le
management participatif.
A l'approche de la fin de siècle dernier et même si les circonstances
économiques font qu'on ne dit plus "pourvu que ça change", en pensant à une
future société, mais : "pourvu que ça dure", tellement la hantise du chômage
est grande; même si de trop nombreux dirigeants, sous la pression des
actionnaires et de leur conseil d'administration, semblent n'avoir plus qu'une
obsession : "reprendre les leviers de commande"; même si certains, après
l'avoir loué des années durant, nous assurent que "la démarche participative,
c'est la dilution de la décision, la perte d'autorité" ou que "la décision de
groupe noie la responsabilité" et que "la perte de temps n'est pas toujours
compensée par la qualité des décisions prises"; même si d'autres nous
affirment "qu'il n'y a plus de place pour elle dans des Entreprises en pleine
restructuration" et semblent ainsi vouloir nous dire que l'autocratie est
devenue une saine vertu, car : "il faut agir vite et en conséquence le cercle
des décideurs doit se trouver plus restreint que jamais".
Même si de leur coté les cadres sont de plus en plus nombreux à ressentir
une forte et très désagréable dissonance entre d'une part le discours officiel
qui continu à prôner la participation et le dialogue et d'autre part ce que l'on
exige de plus en plus souvent d'eux : "obéir !".
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Les cadres, qui ont tout à perdre à se retrouver pris en tenaille entre les
exigences des dirigeants et une base devenue plus autonome, les cadres, qui
ont tout à perdre à basculer dans l'autoritarisme, gagneront à bien mesurer
que le moment est venu d'élargir progressivement les responsabilités de leurs
collaborateurs, accroître graduellement la participation de chacun. Ils
gagneront à admettre que certains adhéreront moins complètement que
d'autres et même que quelques uns hésiteront à accepter ce qu'ils auront
considéré comme un paradoxe de type : "Soyez naturel, vous devez participer
!". Les cadres gagneront aussi à bien s'imprégner de l'idée que nous enseigne
l'histoire et suivant laquelle le temps fini toujours par se rebiffer lorsqu'on ne
le respecte pas.
Ils devront alors s'intéresser à la gestion du changement dans les
organisations notamment comme porteur de la recherche de l'amélioration de
la qualité. Amélioration vers laquelle les Entreprises sont tenues de se tourner
si elles veulent survivre.
Pour cela ils s'attacheront à déléguer, prendre des décisions concertées,
négocier, motiver, savoir conduire une réunion et mener un entretien, savoir,
enfin, prendre la parole en public.
En un mot : Manager une équipe.
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