Les trois Trésors
C’est ce que l’on nomme la vacuité analy-
tique. Cette démarche consiste à analyser
toutes les choses en millionième de parts et
à démontrer que chacune est dénuée de moi.
Lorsque tout a disparu, on parvient alors à
la conclusion que le moi n’existe pas. Ainsi,
la « vision de la vacuité analytique » dé-
montre la vacuité par analyse des exis-
tences. Concrètement, la contemplation de
la souffrance (j. ku – 苦), de la vacuité (j. kû
– 空), de l’impermanence (j. mujô – 無常) et
de l’absence de moi (j. muga – 無 我 ), ré-
duisent à néant les égarements des vues et
des pensées, ainsi que le moi, origine de ces
illusions. Tel est le contenu de l’ascèse dans
les enseignements des corbeilles (Petit véhi-
cule).
Contrairement aux personnes dotées de ca-
pacités obtuses, les personnes dotées, elles,
de capacités aigues, voyant la substance des
choses, s’éveillent au fait que la forme et
l’esprit, autrement dit la vie de telle ou telle
personne, sont telles quelles vides. On ap-
pelle ce principe : « vacuité substantifique »
(j. taikû – 体 空 ). Ainsi, comprendre la va-
cuité du moi après analyse s’appelle la va-
cuité analytique, alors que comprendre que
la substance du moi est, telle quelle, la va-
cuité, s’appelle vacuité substantifique, va-
cuité développée dans les enseignements
communs.
Ces deux vacuités ainsi établies, les bodhi-
sattvas pratiquant la voie en supprimant les
nœuds à l’aide de trente-quatre pensées,
sont tout de même ceux du Petit véhicule.
En fait, les pratiquants du Petit véhicule
sont les auditeurs, les Bouddhas pour soi et
les bodhisattvas. Or, seuls ces derniers de-
viennent Bouddha. En effet, les mauvaises
passions, enfermées dans les souffrances
des illusions des trois mondes et des six
voies, visions empêchant l’éveil, se répar-
tissent en quatre-vingt-huit sbires des égare-
ments des vues et quatre-vingt-un sbires des
égarements des pensées. Les enseignements
du Petit véhicule, autrement dit des trois
corbeilles, bien qu’étant des expédients sal-
vifiques, permettent, par le biais de l’ascèse
supprimant les nœuds à l’aide de trente-
quatre pensées, d’annihiler ces mauvaises
passions et d’ouvrir l’éveil du Bouddha.
L’explication détaillée de ces principes se-
rait longue et pénible. Aussi vais-je me
contenter de les citer. Les égarements des
vues dans les trois voies sont les égare-
ments des quatre vérités : souffrance, cause
de la souffrance, extinction de la souffrance
et la voie. Seize pensées, composées de huit
sagesses et de huit patiences (ou cognitions)
permettent d’annihiler les égarements des
vues. Les huit sagesses sont : la sagesse de
la vérité de la souffrance, la sagesse succé-
dant à la réalisation de la vérité de la souf-
france, la sagesse de la vérité de la cause de
la souffrance, la sagesse succédant à la réa-
lisation de la vérité de la cause de la souf-
france, la sagesse de la vérité de l’extinction
de la souffrance, la sagesse succédant à la
réalisation de la vérité de l’extinction de la
souffrance, la sagesse de la vérité de la voie
et la sagesse succédant à la réalisation de la
vérité de la voie.
Les huit cognitions sont : la cognition de la
vérité de la souffrance, la cognition succé-
dant à la réalisation de la vérité de la souf-
france, la cognition de la vérité de la cause
de la souffrance, la cognition succédant à la
réalisation de la vérité de la cause de la
souffrance, la cognition de la vérité de l’ex-
tinction de la souffrance, la cognition suc-
cédant à la réalisation de la vérité de l’ex-
tinction de la souffrance, la cognition de la
vérité de la voie et la cognition succédant à
la réalisation de la vérité de la voie.
Ensuite, dix-huit pensées permettent d’anni-
hiler les égarements des pensées dans les
trois mondes. Ces dix-huit pensées
s’opèrent par le passage par la voie sans en-
trave et la voie de la libération, chacune à
travers neuf terres : la terre du monde des
désirs, divisée elle-même en neuf catégo-
ries, les quatre terres des quatre méditations
du monde de la forme, divisées elles-
mêmes en neuf catégories et les quatre
terres de la concentration, divisées elles
LE BOUDDHISME DE L’ECOLE FUJI – N° 113 5