Solutions MESURES ÉLECTRIQUES Capteurs de courant : à chacun son argument! ▼ Il est aujourd’hui possible de mesurer le courant électrique au moyen d’une quinzaine de conceptions ou technologies différentes, avec isolation galvanique ou non. Dans la plupart des cas, on fait appel à des technologies à isolement galvanique, qui mesurent indirectement le courant en détectant le champ magnétique qui lui est associé. Nous vous présentons ici les différentes technologies de mesure utilisées, avec leurs avantages et inconvénients respectifs. I l est aujourd’hui possible de mesurer le courant électrique au moyen d’une quinzaine de principes ou technologies différents, qui doivent être choisis en fonction des besoins spécifiques de l’application : valeur crête ou valeur efficace, précision ou bande passante demandées, contraintes environnementales à supporter, sans oublier, bien sûr, le prix. Ces capteurs de courant peuvent être répartis en six catégories différentes : - capteurs CA, limités aux mesures de courants alternatifs, comprenant les transformateurs de courant traditionnels, les capteurs sans circuit magnétique basés sur une bobine de Rogowski ou une technologie de capteur sur circuit imprimé, développée récemment, - capteurs de courant à effet Hall, avec les variantes technologiques dites “à boucle ouverte”, “à boucle fermée” et “ETA” - capteurs de courant de type “Fluxgate”,qui se déclinent en six grandes variantes,chacune ayant ses propres caractéristiques -capteurs utilisant d’autres technologies de détection de champ magnétique (les magnétorésistances par exemple) - les shunts MESURES 763 - MARS 2004 - les capteurs faisant appel aux technologies MEMS (Micro ElectroMechanical Systems, systèmes électromécaniques) 1 - Les capteurs de champ magnétique La mesure isolée d’un courant électrique est dans la plupart des cas effectuée avec un capteur inductif, qui détecte le champ créé par le courant à mesurer.Il existe plusieurs techniques de mesure basées sur ce principe : - la cellule Hall : solution classique, disponible dans plusieurs variantes (GaAs,InSb ou silicium), - la magnéto impédance - la résistance magnétique (MR) : anisotropique (AMR), géante (GMR), tunnel (TMR), colossale (CMR) - la technique Fluxgate (“porte de flux”), qui exploite l’effet de saturation de matériaux magnétiques sensibles - la technique magnéto-optique - la résonance magnétique nucléaire (NMR),qui convertit l’induction magnétique en fréquence - la magnétostriction et l’effet piézoélectrique : le courant mesuré crée un champ modifiant la taille d’un élément magnétostrictif. Ce dernier exerce une force sur un élément piézoélectrique qui produit alors une tension de sortie - technologies diverses : effet Meissner paramagnétique, effet Hall quantum (à l’état supraconducteur, ce qui nécessite un refroidissement), effet Zeemann, SQUIDs (à l’état supraconducteur), bobines mobiles permettant de convertir un flux continu en un signal alternatif. Le développement de ces technologies de détection de champ est généralement focalisé sur les performances attendues dans les marchés à fort potentiel de vente, à savoir la mesure de position en général et la lecture/écriture des têtes de lecture des disques durs. En raison de sa taille marginale, le marché de la mesure du courant ne présente qu’un intérêt limité pour les fabricants de ces capteurs L’essentiel inductifs, de sorte que les produits proposés sur le Une quinzaine de types de capteurs de courant se dismarché sont souvent putent le marché inadaptés pour réaliser des En terme de performances, applications de mesure. elles se distinguent par le type de courant mesuré Parmi tous les principes (continu ou alternatif), la de détection inductifs bande passante et la préciconnus, seuls l’effet Hall, sion le Fluxgate, les AMR et L’encombrement et le prix GMR sont actuellement sont aussi des critères de décision utilisés dans des capteurs De nouvelles technologies, de courant fabriqués en miniaturisées, arrivent. grandes séries.Des travaux Mais pour des raisons de très spécifiques, souvent coût de production, il faudans le cas de la recherche dra qu’elles accèdent à des applications de masse pour avancée,ont toutefois pertrouver des débouchés mis l’émergence d’autres dans les mesures de coutechnologies. Les TMR, rant (comme ce fut le cas CMR, NMR et les autres pour les cellules de Hall) effets mentionnés en sont 49 Solutions soit au stade de la pré-étude (au niveau des universités,) soit ils sont utilisés dans les cas où l’on n’a besoin que d’une information binaire,soit ils sont utilisés dans des applications pointues de laboratoire, à cause de leur prix élevé (NMR, effet Hall quantum, SQUID). Les capteurs de courant basés sur des effets magnéto optiques (comme par exemple,l’effet Faraday) ont été développés pour des applications à courants élevés (10-100 kA) et ils présentent de bonnes performances pour les mesures de courants alternatifs. Pour envisager de les utiliser pour les mesures de courant alternatif, il faudra surmonter le problème des dérives du zéro en fonction du temps et de la température. Des travaux sont actuellement en cours dans diverses industries et universités. L’avantage majeur de la résonance magnétique nucléaire NRM est le fait que le signal de mesure est indépendant de la température. Mais elle a des inconvénients : fréquence nulle à champ nul, impossibilité de détecter la polarité du champ et nécessité d’une imagerie par résonance magnétique (MRI) pour l’intégration sur un volume. Les capteurs GMI et Fluxgate requièrent des composants électroniques pour fournir un signal de sortie. Les faibles valeurs de dérive du Fluxgate s’expliquent par le fait que ces capteurs intègrent un principe de compensation (boucle fermée locale) :les harmoniques paires d’un signal de détection sont maintenues proche de zéro en ajustant le champ d’une bobine de compensation intégrée. En terme de complexité, la différence entre un élément GMI et un Fluxgate miniature n’est pas significative. Dans les deux cas, il faut placer au moins une bobine autour d’une petite pièce ferromagnétique de façon à pouvoir détecter la polarité du champ magnétique. Le risque de destruction par un champ extérieur élevé constitue un handicap certain pour les capteurs AMR. Cet inconvénient peut être atténué en appliquant sur la cellule, au moyen d’une bobine auxiliaire, un champ perpendiculaire au champ à mesurer. En appliquant un courant alternatif dans la bobine, le capteur AMR est remis à zéro à chaque cycle de commutation. 2 -Les technologies à effet Hall Il existe trois technologies exploitant l’effet Hall pour la mesure du courant alternatif et continu. Capteurs à effet Hall en boucle ouverte. Les capteurs boucle ouverte à effet Hall disposent d’un élément de détection Hall placé dans l’entrefer. La conception est telle que l’induction magnétique détectée par la cellule Hall est théoriquement proportionnelle au courant primaire à mesurer. Les imprécisions sur la mesure sont principalement dues à la non-linéarité magnétique et électronique ainsi qu’aux décalages créés par la cellule Hall, aux composants électroniques de traitement et enfin à l’hystérésis du circuit magnétique.L’utilisation d’un circuit magnétique offre plusieurs avantages,à savoir la concentration du champ sur la cellule Hall, l’amplification de l’amplitude du champ et la protection contre les perturbations magnétiques externes. Les capteurs à effet Hall en boucle ouverte sont capables de mesurer des formes d’onde de courants continus,alternatifs et complexes tout en assurant une isolation galvanique. Ils se distinguent par leur faible consommation d’énergie, un poids et une taille réduits et ils sont particulièrement intéressants pour les courants élevés. Ils n’introduisent pas de pertes d’insertion dans le circuit à mesurer, ce qui ne les empêche pas de bien résister aux surcharges de courant. Ils sont bon marché et sont bien adaptés aux diverses applications industrielles. Les capteurs à effet Hall en boucle ouverte présentent par contre l’inconvénient d’avoir une bande passante et un temps de réponse relativement modestes et d’une précision de mesure qui varie beaucoup avec la température.Dans certaines applications spécifiques, les pertes de Comparaison entre les capteurs basés sur la détection de champ magnétique Si Sensibilité Décalage Dérive du décalage Dérive de la sensibilité 0,06 µΩm 800 A/m typ. 0,6 A/m/K typ 0,035 %/K Hall GaAs 0,29 µΩm 13 600 A/m max 19 A/m/K max -0,05 %/K courant de Foucault à haute fréquence risquent également d’être un facteur restrictif. Les courants nominaux vont de plusieurs ampères à 10 kA, exceptionnellement au-delà de 30 kA. La technologie accepte des impulsions de courant de courte durée nettement supérieures à la valeur mesurable maximale (5 à 10 fois par exemple).Mais cela peut néanmoins créer un grand décalage magnétique, ce qui se traduit par une erreur de mesure additionnelle permanente qui doit être annihilée par une procédure de désaimantation dédiée. Variantes de montage de capteurs à effet Hall On voit ici les trois grandes variantes de montage des capteurs à effet Hall. Dans tous les cas, le circuit magnétique sert à concentrer sur la cellule Hall le champ magnétique créé par le courant traversant le conducteur. Les montages en boucle fermée et ETA ont un circuit de compensation qui permet d’améliorer les performances. Capteur en boucle ouverte Circuit magnétique Cellule Hall Courant à mesurer Capteur en boucle fermée Capteur ETA A résistance magnétique GMI Fluxgate InSb 4 µΩm 1 760 A/m max 32 A/m/K max -1,8 %/K 16 µΩm 94 A/m 0,375 A/m/K -0,4 %/K 1 250 µΩm NC NC NC 25 000 µΩm 0,08 A/m 0,8 x 10–6 A/m/K 0,0002 %/K Pour la sensibilité,l’unité µV/(A/m) choisie correspond au rapport entre le signal de sortie de l’élément de mesure du champ (µV) et le champ magnétique mesuré (A/m):elle correspond donc à des µΩm.Les valeurs des sensibilités sont indiquées sur la base d’une alimentation des capteurs par une tension de 1V,ce qui permet de réaliser des comparaisons crédibles. 50 MESURES 763 - MARS 2004 Solutions La précision globale est de quelques pour-cent, une valeur plutôt modeste qui s’explique par le décalage du zéro pour les mesures de courant continu, les décalages de la cellule Hall et des composants électroniques de traitement, le décalage magnétique en courant continu, l’erreur de gain et de linéarité, l’atténuation de l’amplitude et le déphasage lorsque la limite de la bande passante est atteinte ,et enfin le bruit. Des erreurs supplémentaires apparaissent avec les variations de température,notamment les variations de gain et de dérive du zéro. Capteur à effet Hall en boucle fermée. Comparativement aux capteurs en boucle ouverte, les capteurs à effet Hall en boucle fermée ont un circuit de compensation intégré, qui optimise les performances. La cellule Hall des capteurs en boucle fermée est utilisée comme signal de contre-réaction, régulant le courant IS de la bobine secondaire de manière à ce que le champ magnétique dans l’entrefer soit égal à zéro. L’enroulement secondaire comprend plus de tours (NS) que l’enroulement primaire (NP). Pour une induction nulle dans l’entrefer, les ampères-tours dans les deux bobines sont identiques et par conséquent le rapport de proportionnalité entre les courants secondaires IS et primaires IP est donné par le rapport des nombres de spires : IS = IP Np/NS. La fréquence de mesure maximale est généralement comprise entre 2 et 10 kHz.Cette gamme relativement réduite est due à la bande passante limitée des composants électroniques et à la faible dynamique de tension qui permet de générer le courant Is dans la bobine secondaire.La limitation de la bande passante du cap- teur peut être contournée en utilisant la bobine secondaire comme transformateur de courant standard, convertissant le courant alternatif primaire en courant secondaire. Les capteurs à effet Hall en boucle fermée sont capables de mesurer des formes d’onde de courants continus,alternatifs et complexes tout en assurant une isolation galvanique. Ils se distinguent par d’excellentes précisions et linéarité,une faible dérive de température,un temps de réponse rapide, une bande passante élevée, aucune perte d’insertion dans le circuit primaire et une sortie de courant très résistante aux interférences électromagnétiques. Les principaux inconvénients de la technologie boucle fermée sont la puissance relativement élevée de l’alimentation secondaire, de plus grandes dimensions (spécialement pour les courants élevés) et un coût évidemment supérieur à celui d’un capteur à boucle ouverte (de conception plus simple). Les courants nominaux vont de quelques ampères à plus de 20 kA, certains modèles allant même jusqu’à 500 kA. Pour un modèle donné, le courant maximum mesurable est par conception limité par le niveau de saturation de l’électronique de commande,en général uniquement aux fréquences basses. Les capteurs de courant boucle fermée disposent d’une excellente linéarité sur une vaste plage de mesures avec une précision totale restant généralement inférieure à 1 %. Les facteurs affectant la précision sont les mêmes que pour les capteurs en boucle ouverte mais leur importance est bien moindre en raison du principe à flux nul (réduction des décalages, plus de non-linéarité magnétique, gain moins dépendant de la température).Aux fréquences élevées, la performance de la mesure est déterminée par la performance du transformateur de courant. Les capteurs en boucle fermée peuvent toujours être sensibles aux décalages magnétiques qui subsistent en cas d’utilisation dans des conditions anormales (courant primaire à basse fréquence excédant significativement la valeur maximale spécifiée). La bande passante est en général excellente,dépassant 100 kHz dans la plupart des cas. Elle peut parfois atteindre plus de 300 kHz.Les temps de réponse sont tels que l’on peut mesurer des variations de courant (di/dt) atteignant plusieurs centaines de A/µs. Les capteurs à effet Hall de type ETA. La conception des capteurs ETA à effet Hall ressemble à celle des capteurs boucle fermée,avec le même agencement du circuit magnétique, de la cellule Hall et de l’enroulement secondaire. Les différences résident dans la conception du circuit magnétique et la façon dont les signaux sont traités par l’électronique de sortie. En fait, les capteurs ETA à effet Hall combinent les caractéristiques des technologies boucle ouverte et boucle fermée. Aux faibles fréquences (généralement entre 2 et 10 kHz), ils fonctionnent comme des capteurs en boucle ouverte, la cellule Hall fournissant un signal proportionnel au courant primaire à mesurer. Aux fréquences élevées, ils fonctionnent comme un simple transformateur de courant. Les signaux du transformateur et de la cellule Hall sont électroniquement ajoutés, pour former Comparaison des différents types de capteurs de courant Technologies à effet Hall Boucle fermée Type ETA Boucle ouverte Technologies Fluxgate Technologies sans Type IT à trois noyaux magnétiques Type C A deux noyaux Type à deux noyaux magnétiques standard magnétiques sans transfo circuit magnétique LEM-Flex PRiME Plage de mesure Bande passante Temps de réponse (@ 90 %) Précision typique Linéarité 0-15 000 A 0-200 kHz < 1 ms 25-150 A 0-100 kHz < 1 ms 0-15 000 A 0-25 kHz < 3 – 7 ms 0-600 A 0-100 kHz < 1 ms 0-150 A 0-500 kHz 0.4 ms 0-400 A 0-100 Hz 5 ms 0-500 A 0-200 kHz < 1 ms 0-10 000 A 10 Hz-100 kHz 10-50 ms 0-10 000 A 100 kHz 2-50 ms ± 0.5 % ± 1.5 % (CC) ± 1,5 % ± 0,0002 % ± 0,1 % ± 0,1 % ± 0,2 % ±1% ± 0,5 % ± 0.1 % ± 0.5 % ± 0.0001 % ± 0.05 % ± 0.1 % ± 0.1 % ± 0.2 % ± 0.2 % Points remarquables - Précision - Vitesse ± 0.5 % (CC) ± 0.1 % (CA) - Vitesse - Faible consommation - Basse tension(5 V) - Faible consommation - Petite taille - Bas prix - Très grande résolution - Très grande précision - Vitesse - Grande résolution - Grande précision - Top vitesse - Résolution - Précision - Basse fréquence - Bas prix - Résolution - Précision - Vitesse - Précision - Bande passante - Faible masse - CA - Précision - Bande passante - Faible masse - CA MESURES 763 - MARS 2004 51 Solutions Constitution d’un capteur Fluxgate standard Capteur Fluxgate standard Self saturable Le schéma de principe est assez proche de celui des capteurs à effet Hall en boucle fermée. Mais ici, le champ dans l’entrefer est mesuré à l’aide d’une self saturable au lieu d’une cellule à effet Hall. On mesure les variations de changement de la valeur de l’inductance de la self. Réponse du courant à une augmentation de la tension Comportement du courant dans la self saturable dans le cas simple d’une soudaine augmentation de la tension à ses bornes (échelon unité) : la courbe “inductance constante” montre la réponse classique du courant, de forme exponentielle la courbe “Bext = I1 = 0” correspond à un courant primaire du capteur nul, ne créant aucun champ dans l’entrefer et donc aucun champ externe sur l’élément saturable (Bext = 0). La réponse du courant ISi dans l’élément saturable comprend trois sections bien distinctes. Pour les faibles valeurs du courant ISI (zone 1), la variation du courant est lente puisque l’élément saturable a été conçu pour avoir une inductance élevée à faible niveau de saturation. Lorsque le courant dépasse un certain niveau (zone 2), le niveau de saturation de l’inductance est atteint et la valeur de cette dernière chute, conduisant à une forte variation du courant. Cette chute d’inductance, soudaine et marquée, est obtenue par conception de l’élément saturable. Dans la zone 3 enfin, le courant atteint le niveau asymptotique fixé par la tension du courant disponible (U/R) ; la courbe “I1≠ 0”. Lorsque le courant primaire n’est pas égal à zéro, un champ externe est appliqué à la bobine inductrice saturable et la réponse du courant est modifiée. Réponse du courant à l’application d’un signal carré pour un courant primaire I1 nul pour un courant primaire I1 non nul 52 La bobine de l’élément saturable est alimentée par une tension carrée u(t), ce qui se traduit par un courant Isi(t) alternatif. En mesurant les différences d’allure de ce courant, on peut en déduire la valeur du courant primaire I1. Il existe plusieurs méthodes pour détecter ces différences : mesure de la composante continue du courant de l’élément saturable ISI, analyse spectrale du courant ISI et mesure de l’amplitude d’une harmonique remarquable (généralement celle de rang 2 ou 3) et enfin mesure du rapport cyclique de la tension u(t). Le paramètre détecté est ensuite utilisé comme signal de retour pour la boucle fermée. un signal commun de sortie. Les capteurs ETA sont capables de mesurer des formes d’onde de courant continue, alternative et complexe, tout en assurant une isolation galvanique. L’ETA est recommandé lorsque l’on recherche une bande passante élevée,un temps de réponse rapide, une faible consommation d’énergie (en raison de la bobine secondaire qui n’est jamais activement sous tension) et une tension d’alimentation à faible tension du secondaire (par exemple, +5 V). Au-dessus de 210 kHz,la précision et les dérives de température sont bonnes (semblables à celles obtenues en boucle fermée). Les capteurs ETA ne créent pas de pertes d’insertion dans le circuit à mesurer et résistent parfaitement aux surcharges de courant. L’inconvénient majeur se situe dans la taille et le poids du circuit magnétique,dus au fait qu’il faut avoir à la fois une bobine secondaire encombrante (comme pour les capteurs boucle fermée) et un noyau magnétique de forte section (comme pour les capteurs boucle ouverte).Aux basses fréquences, la précision de mesure de la technologie ETA est plus sensible aux variations de températures (comme pour les capteurs boucle ouverte). Le coût d’un produit ETA est supérieur à celui des modèles plus simples en boucle ouverte et proche de celui des solutions en boucle fermée. Les courants nominaux sont généralement compris entre 25 A et 150 A. Cette plage de travail, particulièrement étroite,n’est pas limitée par des aspects technologiques mais plutôt par des facteurs de coût et de marché : pour les courants inférieurs à 25A,il est possible de travailler dans des conditions semblables avec la technologie boucle fermée,plus performante,alors que pour des courants supérieurs à 150A une tension d’alimentation secondaire plus élevée (par exemple ±15 V) est généralement disponible, ce qui conduit à privilégier la technologie en boucle fermée, mieux adaptée. En effet, la faible consommation du secondaire obtenue avec la technologie ETA ne présente en général pas un grand intérêt lorsque l’on mesure des courants élevés. La précision des capteurs ETA dépend de la fréquence.Pour des basses fréquences (typiquement de 2 à 10kHz),la précision globale est de quelques pour-cents, comme pour les modèles en boucle ouverte.Pour les fréquences supérieures,la précision globale est généralement inférieure à 1 %. Après une surcharge de courant excédant les valeurs spécifiées, le risque d’avoir un décalage résiduel dû à une rémanence du circuit magnétique est à basse fréquence le même que pour les capteurs en boucle ouverte. La bande passante, le temps de réponse et le comportement di/dt des capteurs ETA sont très proches de ceux de la technologie en boucle fermée,avec néanmoins une petite réduction de performance.La limite supérieure en fréquenMESURES 763 - MARS 2004 Solutions ce est généralement de 100 kHz. Le temps de réaction est rapide, inférieur à 1 µs. La technologie Fluxgate (“porte de flux”) peut être déployée de différentes manières, en utilisant toujours sur le même principe mais donnant des performances diverses suivant la complexité de la conception. Principales configurations de capteurs Fluxgate 3-Les technologies fluxgate Le capteur Fluxgate “standard”. Un capteur Fluxgate isolé peut être conçu comme un capteur à cellule Hall en boucle fermée, avec le même agencement du circuit magnétique,comprenant un entrefer et un enroulement secondaire.C’est au niveau de la détection du champ dans l’entrefer que réside la principale différence entre les deux technologies :dans le cas du Fluxgate,elle est réalisée au moyen d’un élément saturable et non d’une cellule Hall, ce qui implique d’importantes modifications au niveau de l’électronique de contrôle,tant au niveau de l’alimentation que du traitement du signal de sortie. L’“inducteur saturable”, qui est au cœur de cette technologie, est composé d’un petit noyau magnétique mince sur lequel est placé le bobinage. Il est généralement fabriqué avec des éléments discrets (noyau et fil en cuivre) mais différentes conceptions sont envisageables,y compris les concepts évolués basés sur les technologies MEMS (microstructures électromécaniques). La valeur de l’inductance de l’élément saturable dépend des propriétés magnétiques du noyau (perméabilité).Lorsque la densité du flux est élevée, le noyau est saturé, sa perméabilité est basse et la valeur de l’inductance est faible.Par contre, dans le cas d’une faible densité de flux,la valeur de l’inductance est élevée.La conception du capteur de courant doit être telle que l’inductance de l’élément saturable soit affectée à la fois par le courant primaire et par un courant injecté dans la bobine de l’élément saturable : - le fait que l’inductance soit affectée par le courant primaire est utilisée comme un signal de retour pour le principe de boucle fermée - la forme d’onde du courant de l’inducteur saturable est utilisée pour la détection du changement d’inductance Comme pour les capteurs à effet Hall en boucle fermée, la bobine secondaire est souvent utilisée comme un transformateur de courant classique, pour mesurer les composantes hautes fréquences du courant.Selon le modèle de capteur Fluxgate considéré,cet effet transformateur à haute fréquence n’est pas toujours disponible et entraîne des limites de la bande passante ou du temps de réponse. Types principaux de capteurs Fluxgate. On en distingue quatre grandes variantes : - le Fluxgate standard - le Fluxgate à deux noyaux magnétiques,dont MESURES 763 - MARS 2004 Fluxgate standard Fluxgate à 2 noyaux magnétiques les performances sont nettement améliorées en utilisant un des deux tores magnétiques comme élément saturable, sans espace d’air entre les deux.Pour ce qui est du comportement aux hautes fréquences, un second tore bobiné est utilisé comme transformateur de courant, ici non plus, il n’y a pas d’entrefer. - les Fluxgate à trois noyaux magnétiques apportent une amélioration supplémentaire de performances en dédoublant la tête de détection du champ,en utilisant deux tores bobinés séparément.La bobine d’excitation est enroulée autour de chaque tore. Pour les hautes fréquences, l’amélioration est apportée en optimisant la conception du transformateur de courant et en combinant plusieurs bobinages sur le même tore avec une électronique adaptée. - les Fluxgate basses fréquences,se servant uniquement de la partie basse fréquence du Fluxgate à deux noyaux magnétiques, et en supprimant la partie transformateur de courant. Performances des technologies Fluxgate.Il est difficile de comparer simplement les diverses conceptions Fluxgate mais on peut néanmoins souligner des tendances générales. Au nombre des avantages, on trouve le faible décalage et la faible dérive du décalage, la précision et la résolution élevées, la grande plage de Fluxgate à 3 noyaux Fluxgate à 2 noyaux magnétiques sans transformateur de courant magnétiques (applications basses fréquences) températures de fonctionnement,la grande dynamique de mesure de courant (rapport maximum/minimum élevé), la bande passante élevée, le temps de réponse très bref, et ce jusqu’à 200 kHz typique, 800 kHz maximum. Au nombre des inconvénients, on peut citer la bande passante limitée pour les modèles les plus simples,le risque d’une injection de bruit (courant/tension) dans le conducteur primaire et enfin la consommation de courant secondaire relativement élevée (mais semblable aux capteurs en boucle fermée basés sur la technologie Hall). 4 - Les transformateurs de courant Dans les cas où il ne faut mesurer que des courants alternatifs ou à impulsions, la solution la plus simple est généralement de considérer un transformateur de courant traditionnel,combinant des bobines primaire et secondaire sur un circuit magnétique, sans qu’il soit nécessaire d’ajouter des composants électroniques.Avec les transformateurs de courant, le courant au secondaire, réduit de quelques ordres de grandeurs par rapport au courant primaire,est mesuré avec un shunt. Les transformateurs de courant sont généralement robustes et ils assurent une isolation galvanique. Il en existe une grande variété sur le marché, pour les courants pri- Comparaison des différents types de capteurs de tension Mesure de Tension Technologies à effet Hall boucle fermée Plage de mesure Bande passante Temps de réponse (@ 90 %) Précision typique Linéarité Commentaires 0 – 9 500 V quelques kHz 10…100 ms ±1% < 0.5 % - Performances moyennes Fluxgate à deux noyaux magnétiques AV100 (effet Hall) OptiLEM 0 – 7 000 V 0 - 2 / 10 / 800 kHz min. 0.4 ms ± 0.2 % ± 0.05 % - Grande précision - Très grande vitesse - Basse fréquence 50 – 1 500 V 0 – 13 kHz < 30 ms ± 1.7 % ± 0.1 % - Faible dimensions - Tension limitée - Faible vitesse 100 – 6 000 V 0 – 13 kHz < 30 ms ± 1.5 % ± 0.1 % - Robuste aux perturbations CEM - Très bonne tenue d’isolation - Faible vitesse 53 Solutions Sonde Rogowski planaire (technologie Prime) Sonde Rogowski filaire 7 - Les MEMS maires allant de quelques mA à quelques kA,et couvrant les tensions d’isolation généralement requises, allant jusqu’à quelques millions de volts dans le secteur des réseaux de distribution électrique. On trouve des transformateurs de courant réservés aux fréquences “techniques”, relativement basses (entre 16,66 Hz et 400 Hz), mais ils peuvent monter beaucoup plus haut, jusqu’à quelques MHz si le nombre de spires est suffisamment faible pour éviter l’introduction d’erreurs capacitives. 5 - Les technologies sans circuit magnétique Les performances des capteurs de tension et de courant sont souvent limitées par les imperfections inhérentes aux matériaux magnétiques (se traduisant par des phénomènes de rémanence, hystérésis, non-linéarité, pertes). De ce fait, on évoque souvent l’idée de concevoir des capteurs sans circuit magnétique (noyau à air). Le défi dans ce cas consiste à obtenir suffisamment de sensibilité de mesure tout en restant insensible aux perturbations magnétiques externes (champ terrestre,conducteurs externes),fonctions généralement réalisées par le circuit magnétique. Il existe plusieurs variantes de conceptions de capteurs sans circuit magnétique : Utilisation d’éléments de détection de champ à forte sensibilité (AMR, GMR, etc., évoqués précédemment).Le recours à une cellule de détection de champ à forte sensibilité confère la sensibilité nécessaire au capteur de courant mais la robustesse aux champs externes devient problématique :l’installation de quatre éléments de détection dans une configuration en pont atténue cette influence mais ne règle pas totalement le problème. Bobine Rogowski. Pour les mesures de courant alternatif ou à impulsions, une bobine placée dans l’air et magnétiquement couplée avec le conducteur primaire “récolte”une tension induite. Cette bobine est en général réalisée en bobinant des spires autour d’un cylindre 54 flexible en matériaux isolants.Pour assurer l’insensibilité aux perturbations des champs externes,il faut faire attention à la manière dont sont connectés les fils de sortie. Bobine Rogowski planaire. Plusieurs conceptions de bobines Rogowski fabriquées sur carte de circuit imprimé ont été analysées, dans le but de réduire les coûts de fabrication, la taille ou la masse. Pour l’instant, peu de produits basés sur ces technologies sont utilisés industriellement. Une exception est la technologie PRiME (proposée par LEM), qui est capable d’avoir simultanément une excellente robustesse aux perturbations externes et une sensibilité importante. 6 - Les shunts En général, une mesure du courant au moyen d’un shunt classique est une bonne solution si les limitations introduites par le shunt sont acceptables dans l’application : pertes Joules, limitation en bande passante,bruit et mesure non-isolée. En effet, en pratique, la chute de la tension aux bornes du shunt doit être maintenue constante quelle que soit la valeur nominale du courant à mesurer. En conséquence, les pertes Joules augmentent proportionnellement à la valeur du courant, ce qui entraîne des problèmes de refroidissement pour les courants élevés. Les effets magnétiques sont également plus marqués pour les courants forts, ce qui limite la bande passante pour ces courants et entraîne une baisse du rapport signal sur bruit. Ces problèmes résultant d’effets inductifs peuvent être atténués par des conceptions adaptées (shunt coaxial ou planaire). Enfin, des composants supplémentaires sont requis pour assurer l’isolation galvanique, la transmission du signal et son amplification. Cela dit,comparativement au transformateur de courant, le shunt présente l’intérêt de pouvoir mesurer des courants présentant une composante de courant continu. Les MEMS (micro-systèmes électromécaniques) ne représentent en soi pas une nouvelle technologie de mesure de courant mais plutôt une conception et une technologie originales, permettant de produire des éléments ferromagnétiques de très petites dimensions (2x2 mm). Il existe deux principaux types de développement MEMS qui pourraient se révéler dans les années à venir des candidats sérieux pour la mesure du courant.Le premier concerne le développement d’éléments sensibles au champ magnétique (c’est-à-dire des fluxgates),qui pourraient trouver des applications dans la mesure de courant, un peu comme ce qui s’est passé pour les cellules Hall (qui, à l’origine, avaient été développées pour d’autres applications,les claviers d’ordinateur par exemple).Quant au deuxième type de développement des MEMS pour les mesures de courant,il concerne des nouveaux concepts de mesure, très différents de ceux mis en œuvre avec les technologies traditionnelles, mais qui pourraient déboucher grâce aux très faibles dimensions des MEMS. Dans les deux cas, des résultats prometteurs ont été obtenus mais tous les problèmes ne sont pas résolus.Un autre point est les investissements que les acteurs sont prêts à consentir, dans un marché tourmenté. Mais, encore une fois,cela risque de se passer comme pour les cellules à effet Hall : on aura sans doute des capteurs de champ magnétiques MEMS, qui adresseront un marché important (les détections de positions d’éléments mécaniques dans les équipements en tous genres).Les acteurs de la mesure électrique s’approprieront ensuite cette technologie et mettront tout ce qu’il faut autour pour en faire des capteurs de courant. Eric Favre Wolfram Teppan - LEM LEM France La Ferme de Courtaboeuf - 19, avenue des Indes 91969 Courtaboeuf Cedex Tél.: 01 69 18 17 50 - Fax: 01 69 28 24 29 [email protected] www.lem.fr MESURES 763 - MARS 2004