Texte sur le chapitre Anticorps - Biotech Lerncenter

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Anticorps
La technique de production des anticorps monoclonaux appartient aux plus
importantes découvertes de la biotechnologie de ces 25 dernières années. Les
anticorps monoclonaux sont instaurés dans le traitement de divers types de
cancer.
Voulez-vous un prix Nobel? Vous l'auriez obtenu si vous aviez découvert la
façon de produire toujours le même anticorps. Mais ce n'est pas aussi simple
qu'il n'y paraît.
1. Anticorps monoclonaux: attaque des anticorps contre le
cancer
En mai 1975, deux chercheurs jusqu'alors peu connus, Georges Köhler et César Milstein,
présentèrent un rapport à la revue scientifique «Nature» qui le publia presque aussitôt.
Les chercheurs y décrivaient la production des anticorps monoclonaux. Ils notèrent en
conclusion que cette nouvelle sorte de cultures cellulaires «pourraient être utiles en
médecine et dans l'industrie». Ils minimisèrent énormément l'impact de leur découverte.
Un grand nombre d'individus sont en vie aujourd'hui grâce aux anticorps monoclonaux.
La technique de production de ces anticorps fait partie des plus importantes découvertes
de la biotechnologie de ces 25 dernières années. Les anticorps monoclonaux sont
appliqués dans le traitement de nombreux cancers, dans celui de maladies auto-immunes
ou du psoriasis. De tels anticorps agissent en se fixant de façon spécifique sur certaines
molécules afin de les bloquer. Köhler, qui a fait ses recherches pendant de nombreuses
années à l'Institut immunologique de Bâle, reçut en 1984, en compagnie de César
Milstein, le prix Nobel pour cette découverte.
Les anticorps sont des protéines en forme de Y et sont des éléments essentiels du
système immunitaire. Ils sont produits par les cellules B. Le corps les produit en réponse
aux intrusions de bactéries, de virus ou d'autres parasites pour les marquer puis les
détruire. Ces anticorps sont composés de deux chaînes d'acides aminés lourdes et de
deux légères reliées les unes aux autres. Köhler entreprit de fusionner des globules
blancs (cellules B) sains avec des cellules tumorales bien définies dans le but de produire
des anticorps monoclonaux. La cellule ainsi produite fabriquera non seulement des
anticorps comme le font les cellules B mais elles se multiplieront à l'infini comme le font
les cellules tumorales. Toutes les cellules-filles sont absolument identiques à la cellulemère (monoclonal contrairement à polyclonal). Il se forme alors une « usine » qui va
produire toujours le même anticorps. Tous les anticorps monoclonaux ont le même effet
souhaité: ils peuvent tels des détectives reconnaître les cellules tumorales, les virus ou
d'autres substances non désirées.
Voici de façon détaillée le mécanisme de production des anticorps monoclonaux
(illustration 6.1). Une souris sera immunisée par un antigène déterminé, autrement dit,
l'antigène va vacciner la souris. Un antigène est de façon générale une substance
étrangère au corps, il va donc déclencher une réaction immunitaire (comme par ex. la
production d'anticorps). De telles réactions peuvent être déclenchées par des cellules
tumorales mais également par du pollen, des bactéries et des virus. Antigène et
anticorps agissent selon le principe de clé à serrure.
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A la suite de l'immunisation, le système immunitaire de la souris va produire des
globules blancs (leucocytes, cellules B) qui eux, vont produire des anticorps contre
l'antigène. Indépendamment de cela, des cellules tumorales ne pouvant plus produire
d'anticorps vont être fabriquées. Puis, les cellules B de la souris vont être fusionnées
avec des cellules B tumorales, et enfin, les cellules ayant réussi leur fusion seront
séparées des autres. Les cellules hybrides en résultant se nomment hybridomes, elles
peuvent théoriquement se diviser à l'infini et produire l'anticorps souhaité (illustration
6.2).
A l'aide de ces hybridomes, les chercheurs peuvent produire la quantité désirée
d'anticorps agissant contre presque toutes les molécules imaginables: hormones,
antigènes bactériens, récepteurs etc. Les avantages des anticorps monoclonaux sont
surtout prédominants dans le traitement du cancer. Tout traitement cancéreux a pour
but de détruire la majeure partie des cellules atteintes par le cancer tout en ayant le
moins d’effets secondaires possibles. Les anticorps monoclonaux peuvent idéalement
remplir ces deux fonctions - mieux en tout cas que les méthodes habituelles telles que
radiothérapie, chimiothérapie ou chirurgie. Lorsqu'une caractéristique particulière se
trouve sur la cellule d'une tumeur, un anticorps monoclonal pourra être développé
exactement contre celle-ci. Les anticorps reconnaissent ainsi de façon idéale les cellules
tumorales et donnent le signal de destruction. Les anticorps ne reconnaissant que la
caractéristique de la cellule tumorale, ils ne pourront guère affecter d'autres cellules. Les
anticorps pourront alors atteindre les colonies de cellules tumorales du corps, les plus
petites comme les invisibles, et les détruire presque sans effets secondaires.
2. Traitement par anticorps tout d'abord problématique
L'utilisation des anticorps monoclonaux au niveau thérapeutique n'eut pas
immédiatement le succès espéré. Les anticorps de souris utilisés agissaient eux-mêmes
comme des antigènes dans l'organisme humain et déclenchaient une réponse
immunitaire. Un important progrès fut réalisé lorsque l'on parvint à développer des
anticorps monoclonaux mieux adaptés au corps humain.
3. Comment fonctionne l'Avastin?
Les tumeurs ont constamment besoin d'oxygène et de substances nutritives pour se
développer. Les tumeurs vont pouvoir s'approvisionner en développant de nouveaux
vaisseaux sanguins. Ce procédé s'appelle angiogenèse.
Des signaux envoyés par la tumeur aux vaisseaux sanguins avoisinants vont initialiser ce
procédé et ce, grâce à la libération du facteur de croissance VEGF. VEGF signifie
«Vascular endothelial growth factor» (facteur de croissance de l’endothélium vasculaire),
il s’agit d’une molécule de signalisation. Le VEGF assure le développement de vaisseaux
sanguins péri-tumoraux.
L'avastine a dès lors une action inhibitrice de l'angiogénèse en se liant aux molécules
VEGF. Celles-ci ne pourront plus se lier au récepteur VEGF et les vaisseaux sanguins ne
pourront plus se diriger vers la tumeur. L'approvisionnement de la tumeur en oxygène et
en substances nutritives va se réduire et sa croissance sera endiguée.
De nos jours, les anticorps monoclonaux sont utilisés dans le traitement de divers
cancers: certaines formes de lymphome non hodgkinien par exemple mais également
dans le traitement du cancer de l'intestin et du sein.
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L'origine du cancer du sein n'est pas encore élucidée de façon précise. On sait pourtant
que certains facteurs génétiques prédisposent à ce cancer. Il s'agit de mutations
spéciales dans les gènes appelés HER2, BRCA1, BRCA2 et p53. Le manque d'exercice
physique ou la consommation excessive d’alcool sont également des facteurs de risque.
Faits et chiffres au sujet du cancer du sein
Plus de 4'000 femmes par année sont atteintes de cancer du sein en Suisse et 1'300 en
meurent. Grâce aux traitements disponibles aujourd'hui, 80% d'entre elles survivent plus
de cinq années - sans traitement, il s'agirait de moins de 25%. La diminution de la
mortalité de ces dernières années doit être attribuée à la combinaison de plusieurs
facteurs: conscience accrue quant au cancer du sein, diagnostic précoce amélioré, vaste
recours au traitement hormonal, progrès dans la chimiothérapie, nouveaux médicaments.
La mortalité diminue; pourtant le nombre de patientes atteintes de cancer du sein est en
progression - due essentiellement au vieillissement de la population (trois quarts des cas
de cancer du sein sont diagnostiqués à 50 ans et plus). A propos, le cancer du sein peut
également toucher les hommes, mais par contre, il se déclare beaucoup moins
fréquemment que chez les femmes.
4. Comment agit l’Herceptin contre le cancer du sein?
Il existe de nos jours des médicaments efficaces contre les mutations se produisant dans
le gène HER2. HER2 est l'abréviation anglaise de «human epidermal receptor 2», et
signifie facteur de croissance pour l'épiderme humain. La protéine HER2 joue le rôle de
«station d'accostage» du facteur de croissance et participe ainsi à la régulation de la
croissance cellulaire (cf. schéma: comment agit l'Herceptin?). Il n'y a en principe que peu
d'éléments HER2 sur la surface cellulaire des cellules saines. Pourtant, plus d'un quart
des patientes atteintes de cancer du sein produisent cette protéine en grande quantité.
Elles ont un défaut génétique qui conduit à produire à foison des protéines HER2.
Lorsqu'une cellule possède trop de protéines HER2, celle-ci va se diviser fréquemment et
la tumeur va s'accroître rapidement et de façon incontrôlée. Les patientes HER2 positif
vont ainsi souffrir d'une forme particulièrement maligne du cancer du sein.
L'Herceptin, l'anticorps monoclonal agissant contre HER2, reconnait la protéine HER2 à la
surface des cellules tumorales. Elle se fixe sur les cellules cancéreuses et stoppe le
mécanisme nécessaire à leur prolifération. L'avantage de ce traitement est de ne pas
avoir d'effet secondaire important; leur fréquence est plus élevée lors de chimiothérapie
ou de radiothérapie.
Un test effectué avant le début d'un traitement par Herceptin va pouvoir déterminer si la
patiente possède réellement le défaut génétique HER2 ou non. On va s'assurer ainsi que
seules les patientes pouvant effectivement bénéficier du médicament le reçoivent. De
cette manière, on évite des traitements et des coûts inutiles.
5. Aspects éthiques: comment traiter les données
génétiques?
Lorsqu'en 1999 l'Herceptin arriva sur le marché, ce fut l'un des premiers médicaments
d'une médecine nouvelle appelée «médecine personnalisée», ce qui signifie une
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médecine faite sur mesure. Cette notion est cependant quelque peu trompeuse puisque
ces médicaments sont conçus pour un groupe d'individus ayant les mêmes variantes
génétiques et non pour une seule personne.
Ces médicaments faits sur mesure ne seront pas appliqués avant que le médecin se soit
assuré de leur effet (comme par ex. pour l'Herceptin) à l'aide d'un test; ce qui, à l'avenir,
se fera avec de plus en plus de médicaments. Les chercheurs espèrent surtout une
diminution du nombre des effets secondaires grâce à cette médecine personnalisée.
Personne ne réagit de la même manière au principe actif. Certains vont le dégrader trop
rapidement, il agira donc trop peu; d'autres vont le dégrader trop lentement, il agira
donc trop. Ces différences peuvent provoquer de graves effets secondaires. Un grand
espoir réside dans cette médecine personnalisée puisqu'elle va permettre à chaque
patient de recevoir la dose optimale.
La possibilité d'effectuer des recherches et de développer de nouveaux médicaments faits
sur mesure reposent sur les banques biologiques ou biobanques. Il s'agit d'un ensemble
de tests biologiques effectués sur des tissus, du sang, de la salive etc. ainsi que des
données médicales. En Suisse, des millions de tels tests sont conservés à des fins
essentiellement pathologiques mais également politiques, médicales ou autres. Grâce
aux banques biologiques, les chercheurs peuvent reconnaître les différences génétiques
des patients. Toutefois, la manipulation du matériel stocké soulève quelques questions.
Qui a l'accès aux données génétiques d'un individu? Comment s'assurer qu'aucun abus
ne sera fait? Certains redoutent qu'avec cette médecine personnalisée, l'individu ne
devienne trop «transparent». Par ces examens génétiques, l'individu ne va-t-il pas
apprendre quelque chose au sujet de ses gènes et de ses prédispositions à telles
maladies qu'il ne voulait pas savoir?
Pour en savoir plus: biotechlerncenter.interpharma.ch
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