Le cœur en anesthésie-réanimation 91
Une échocardiographie trans-thoracique a été réalisée chez tous les patients
en préopératoire, avec évaluation de la fraction d’éjection ventriculaire gauche,
de la cinétique segmentaire (exprimée par un index de score segmentaire) et
recherche d’une hypertrophie ventriculaire gauche. Un événement ischémique
postopératoire a été observé chez 3 % des patients, une insuffisance cardiaque
congestive chez 8 % et une tachycardie ventriculaire chez 8 %. En analyse
univariée, une fraction d’éjection ventriculaire gauche inférieure à 40 % était
associée au risque de survenue de toutes les complications cardiovasculaires
combinées, au risque d’insuffisance cardiaque congestive et à la survenue
d’arythmies ventriculaires. En analyse multivariée, une fraction d’éjection
ventriculaire gauche abaissée n’était plus associée qu’à la combinaison des
complications cardiovasculaires avec un Odds ratio de 2,5 (IC 95 % : 1,2-5,0).
L’index de score segmentaire n’était également associé en analyse multivariée
qu’au risque combiné des complications, avec un Odds ratio de 1,3 (IC 95 % :
1,0-1,7). La sensibilité de l’association facteurs cliniques plus fraction d’éjection
inférieure à 40 % pour la survenue du critère combiné des événements cardio-
vasculaires postopératoires (19 % dans ce travail) était de 17 %, la spécificité
de 98 %, la valeur prédictive positive de 73 %, la valeur prédictive négative
de 83 % et la précision diagnostique de 83 %. Ces chiffres ne sont pas signi-
ficativement différents du modèle clinique seul (respectivement : 6 %, 98 %,
50 %, 81 % et 81 %). L’évaluation préopératoire associant facteurs cliniques et
échocardiographie n’apportait pas, ici, de valeur ajoutée significative par rapport
à une évaluation par facteurs cliniques seuls.
Lorsqu’une évaluation cardiologique non invasive préopératoire doit être
réalisée pour la stratification du risque cardiovasculaire, certaines équipes [12]
préconisent l’association d’une échocardiographie trans-thoracique (évaluation
de la fraction d’éjection ventriculaire gauche), à la scintigraphie myocardique au
thallium et dipyridamole (recherche de défects myocardiques réversibles). L’asso-
ciation de l’échocardiographie trans-thoracique améliorerait significativement la
valeur prédictive positive de la scintigraphie myocardique. Cependant, le rapport
coût-efficacité d’une telle prise en charge ne peut être favorable.
A la lumière de ces quelques travaux, l’échocardiographie trans-thoracique
systématique pour l’évaluation du risque cardiovasculaire avant chirurgie non
cardiaque n’apporte pas de valeur ajoutée significative à l’évaluation clinique
seule et n’est de ce fait pas recommandée [13]. Elle peut s’avérer utile chez les
patients suspects de cardiopathie valvulaire, d’insuffisance cardiaque aiguë ou
de cardiomyopathie (dilatée, hypertrophique, autre) par exemple [14].
2.2. ECHOCARDIOGRAPHIE DE STRESS
Si la majorité des patients à faible risque clinique est opérée sans exploration
complémentaire et la majorité des patients à risque clinique élevé avec suspicion
de cardiopathie ischémique est coronarographiée, la prise en charge du groupe à
risque clinique intermédiaire était assez mal codifiée, jusqu’aux travaux récents
sur l’intérêt de l’échocardiographie de stress chez ces patients. Les premiers
travaux ont montré une sensibilisation des scores cliniques par échocardiographie
de stress et fait très important, un travail a clarifié la conduite à tenir en fonction
des résultats du test d’ischémie : traitement bêta-bloquant péri-opératoire ou
coronarographie préopératoire en vue d’une revascularisation coronaire [15].
En échocardiographie de stress, le stress en question peut-être physiologique