Adaptation : qui paiera le prix ?
Les pays riches doivent seulement payer un montant
équivalent à 0,1 % de leur PIB d’ici à 2020, pour soutenir
l’adaptation des pays en développement et s’acquitter de
leur juste part.
Le prix à payer est ainsi comparé aux avantages de
l’industrialisation dont ils ont bénécié au cours du siècle dernier.
Les nancements climatiques doivent être additionnels à
ceux de l’Aide Publique au Développement (APD), et ne
doivent pas aecter les budgets dédiés à l’APD. L’adaptation
aux changements climatiques permet au développement
de continuer, et idéalement en synergie avec les eorts déjà
mis en œuvre. Mais elle ne se substitue pas aux plans de
développement existants, qui sont tout autant cruciaux pour
la sauvegarde des droits des populations et la justice sociale.
Les annonces récentes de nancements de certains pays
comme le Royaume-Uni ou la France peuvent avoir l’air
de prime abord d’aller dans la bonne direction. Pourtant
le manque de clarté de ces annonces laisse craindre que
les fonds mobilisés ne soient ni nouveaux ni additionnels :
les mêmes fonds seraient comptabilisés à la fois comme
Aide publique au développement et nance climatique, et
ne prendraient peut-être pas tous la forme de subventions
publiques. Le nancement de l’adaptation au changement
climatique ne doit pas se faire sous la forme de prêts,
qui exacerberaient encore davantage la dette et l’exploitation
des pays vulnérables aux changements climatiques, et ne
parviendraient pas à toucher les communautés les plus
pauvres qui sont celles qui ont le plus besoin de soutien.
Ce rapport utilise des chires et des hypothèses que l’on
peut qualier de prudents. Par exemple, nous utilisons la
promesse des pays riches de fournir 100 milliards de dollars
pour le nancement du climat d’ici 2020 pour déterminer un
objectif à atteindre par les fonds dédiés à l’adaptation. Pour
autant, ce chire est une création politique qui ne se base pas
sur une évaluation scientique des besoins actuels, qui serait
vraisemblablement beaucoup plus importante. Pour 2025 et
2030, nous utilisons l’estimation des coûts de l’adaptation issue
du Rapport mondial de l’adaptation du Programme des Nations
Unies pour l’Environnement (PNUE) publié en 2014. Bien qu’il
sous-estime sans doute assez largement les coûts réels, ce
rapport constitue malgré tout la source la plus able disponible
actuellement. Même en se basant sur ces sous-estimations,
nous arrivons à la conclusion que les pays riches ne sont pas du
tout à la hauteur de leurs responsabilités nancières.
Nous soulignons que même si le nancement de l’adaptation
et les eorts d’atténuation sont considérablement revus à
la hausse, l’augmentation globale des températures signie
que les pays vulnérables continueront de subir les impacts
du changement climatique. Plus la température globale sera
haute, plus les coûts de l’adaptation seront importants et les
coûts des pertes et dommages élevés. Le nouveau cadre
global sur le changement climatique doit donc inclure un
Objectif Global d’Adaptation, qui reconnaît que les coûts
nanciers de l’adaptation et la prise en compte des pertes et
dommages ne sont pas gés mais dépendent fortement de
l’ampleur des actions d’atténuation prises à court terme.
Les résultats clés :
• Les investissements dans des stratégies d’adaptation telles que les technologies météorologiques modernes,
les systèmes performants d’alerte, la construction de digues pour protéger les communautés et les exploitations
agricoles de la montée du niveau des mers, la formation des services publics décentralisés et la sensibilisation des
paysans sont autant d’actions qui vont être extrêmement coûteuses et dépasseront les capacités nancières de
beaucoup de pays en développement.
• Les pays riches doivent impérativement augmenter le montant total des subventions qu’ils se disent prêts à
accorder pour l’adaptation dans les pays en développement : ils doivent passer du niveau de 2013, à savoir 3-5
milliards de dollars par an, à 50 milliards de dollars par an d’ici 2020 au minimum, et 150 milliards de dollars par
an d’ici 2025.
• Bien que ces chires semblent considérables, moins de 0,1 % du PIB de la plupart des pays en 2020 et environ
0,2 % en 2025 surait pour les atteindre.
• La France, pays-hôte de la COP21 en 2015, doit rapidement accroître ses nancements pour l’adaptation,
de 0,07 milliards de dollars en 2013, à 2,1 milliards de dollars en 2020.
• Les États-Unis doivent multiplier par 60 les sommes prévues pour le nancement de l’adaptation d’ici 2020.
Traduit de l’anglais vers le français par Maelys Orellana et Audrey Arjoune
Photo : Fatou Sarr constate la salinisation et la perte de fertilité du sol de son champ de riz, Sénégal - Clément Tardif © ActionAid
Maquette : L’Herbe Folle /www.herbe-folle.fr