Une monture équatoriale…

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Une monture équatoriale… pour quoi faire ?
Débuter en Astronomie n’est jamais une chose simple. Ainsi, l’amateur désirant
acheter un premier instrument est rapidement confronté à des termes techniques comme
« monture altazimutale » ou « monture équatoriale ». Ce petit article ne prétend pas
révolutionner le monde de l’astronomie amateur, mais simplement éclairer quelque peu nos
nouveaux membres désireux de se lancer dans l’observation du ciel.
On dit souvent, à juste titre, que le meilleur instrument pour débuter en astronomie, ce
sont les jumelles : leur grand champ de vision permet en effet d’embrasser une grande région
du ciel d’un seul regard ; les jumelles sont donc merveilleusement bien adaptées à
l’observation des immenses champs d’étoiles de la Voie Lactée, par exemple, ou encore des
amas d’étoiles très étendus comme les Pléiades. Évidemment, pour pouvoir profiter au mieux
de vos jumelles, il est nécessaire de les placer sur un trépied photo : la stabilité qui en découle
permet un gain en qualité et efficacité plus qu’appréciable. Avec un tel dispositif, vous
pouvez déplacer vos jumelles soit de haut en bas (mouvement en altitude), soit parallèlement
à l’horizon (mouvement en azimut). Une monture de ce type est donc appelée monture
altazimutale, et rend déjà de très bons services en dépit de sa relative simplicité.
Si vous vous orientez vers une petite lunette astronomique de 60 mm de diamètre par
exemple, vous pouvez également utiliser une monture altazimutale. Mais voilà, lorsque vous
voudrez observer la Lune ou Jupiter sous un fort grossissement, vous allez être confronté à un
étrange phénomène : l’astre observé va filer dans votre champ, et ce d’autant plus rapidement
que le grossissement utilisé est important, alors que
votre lunette n’a pas bougé d’un pouce ! C’est la
rotation de la Terre qui est à l’origine de ce
phénomène, qui est amplifié par le grossissement de
l’instrument ! Dès lors, pour pouvoir continuer à
observer votre astre, vous devrez modifier sans cesse
l’orientation de votre lunette afin de garder Jupiter ou
la Lune au centre de votre champ de vision ; vous
disposez pour ce faire de deux réglages, l’un en
azimut, et l’autre en altitude : suivre un objet lors de sa
course nocturne dans le ciel implique donc de jouer
sur les deux axes en même temps, ce qui peut devenir
très fastidieux et délicat à très fort grossissement. Le
Instrument sur monture altazimutale.
champ de vision donné par un oculaire étant d’autant
plus petit que le grossissement est élevé, la moindre erreur de manipulation, et l’objet est
perdu, et il faut recommencer toutes les opérations de pointage !
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Heureusement,
il existe un autre type
de
monture,
qui
facilite grandement la
vie des astronomes
amateurs : la monture
équatoriale. Ce type
de monture équipe
Pour suivre le mouvement apparent d’un astre dans le ciel avec une monture
pratiquement tous les
altazimutale, il est nécessaire d’effectuer des mouvements fins tant
horizontalement (azimut) que verticalement (altitude).
instruments dont le
diamètre
dépasse
100 mm, comme les classiques télescopes 115/900 (c’est-à-dire de 115 mm de diamètre et
900 mm de focale), et souvent les possesseurs de ces instruments ne le savent même pas ! On
peut aussi trouver des montures équatoriales sur des instruments plus petits, mais c’est un peu
plus rare. Alors, qu’ont-elles de si particulier, ces montures ?
Du point de vue du principe de fonctionnement, la monture équatoriale est assez
semblable à la monture altazimutale : elle permet aussi à l’instrument de se mouvoir selon
deux axes perpendiculaires entre eux. La différence réside dans le fait qu’on a fait basculer
l’axe qui permet le mouvement en azimut : il pointe maintenant vers une direction particulière
du ciel, le Pôle nord céleste. En l’orientant de cette manière, on a rendu l’axe du télescope
parallèle à l’axe de rotation de la Terre (on parle d’axe horaire) : en faisant tourner le
télescope autour de cet axe, dans le sens opposé à celui de la Terre, les étoiles ne quitteront
plus le champ de l’oculaire. En termes plus clairs, pour suivre un astre dans le ciel, il n’est
plus nécessaire de jouer sur les deux axes : un seul suffira ! Ainsi, si votre monture est bien
orientée, vous pouvez laisser filer une étoile hors de votre champ de vision : il vous suffit de
faire tourner la seule vis de mouvement fin sur l’axe horaire, et l’étoile répond à nouveau
présente !
Tout cela est bien joli, direz-vous, mais comment orienter correctement votre
monture ? Vouloir pointer le Pôle nord céleste est une chose, le faire en est une autre ! En
première approximation, on peut considérer que le Pôle nord céleste est occupé par l’Étoile
polaire. Dès lors, il faut orienter la monture pour que son axe horaire pointe vers l’Étoile
polaire. Pour ce faire, vous devez d’abord régler l’inclinaison de l’axe horaire, qui dépend de
la latitude de votre site d’observation : ce réglage peut donc être fait une fois pour toutes (sauf
si vous partez observer à des latitudes très différentes !). Ainsi, un observateur situé dans la
région de Mons devra incliner l’axe horaire de son instrument d’environ 50° par rapport à la
verticale ; cette valeur de 50° correspond à la « hauteur » de l’Étoile polaire sur l’horizon,
observée depuis nos contrées. Un amateur situé au Pôle nord serait nettement favorisé pour la
« mise en station » de son instrument : l’étoile polaire se situant pour lui au zénith, l’axe
horaire doit rester vertical (latitude de 0°, donc pas d’inclinaison pour la monture) : dans un
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tel cas de figure, il n’y a aucune différence entre une monture altazimutale et une monture
équatoriale !
Bon, il est clair que peu d’entre nous auront la chance d’observer aux pôles
(quoique…), et dès lors, nous ne pouvons échapper à la mise en station de nos instruments :
après avoir réglé l’inclinaison de l’axe horaire, il faut orienter cet axe vers l’Étoile polaire.
Suite à la rotation de la Terre, les étoiles ne sont pas fixes sur la Sphère céleste. Toutefois, si l’on
considère un instrument dont l’axe horaire est parallèle à l’axe de rotation de la Terre, c’est-à-dire
pointant en première approximation vers l’Étoile polaire, alors un simple mouvement permet de
contrebalancer la rotation. C’est le principe de la monture équatoriale.
Les puristes rétorqueront qu’une telle mise en station n’est en réalité qu’approximative, ce qui
est vrai, mais il n’empêche qu’elle s’avère tout à fait suffisante pour une utilisation
élémentaire de l’instrument : seules les personnes désirant réaliser des photographies à longue
pose, ou partir à la quête d’objets faibles en utilisant les coordonnées équatoriales, devront
affiner leur mise en station, par exemple en utilisant la méthode dite de Bigourdan (nous
reparlerons de tout ceci dans un prochain article).
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Certaines montures possèdent un viseur polaire, c’est-à-dire une petite lunette de visée
située dans l’axe horaire, qui est prévu pour pointer la monture vers le Pôle céleste plus
précisément et surtout plus rapidement.
Mais comment trouvez-vous la Polaire dans le ciel ? Rappelons que cette étoile, si
célèbre, ne brille pas d’un éclat
particulier ; sa seule vertu est de se trouver
dans le prolongement de l’axe de rotation
de notre planète : dès lors, la rotation de la
Terre ne modifie pratiquement pas sa
position dans le ciel, et elle nous donne
donc la direction du Nord, quel que soit le
moment de l’année, du mois, ou de la nuit.
Notez que cette position privilégiée n’est
que momentanée puisque, suite au
mouvement de précession de l’axe de
C’est grâce à la constellation de la Grande Ourse que
rotation de la Terre, l’Étoile polaire ne
l’on peut facilement repérer l’Étoile polaire.
restera pas indéfiniment sur cet axe ; ainsi,
dans environ 12 000 ans, ce sera l’étoile Véga, autrement plus spectaculaire, qui marquera le
Nord céleste.
Le « truc » pour trouver l’Étoile polaire est très simple : il suffit de repérer la Grande
Ourse, de faire passer une droite par les deux étoiles les plus éloignées du « manche », et de se
déplacer de cinq fois cette distance ; on tombe ainsi sur une étoile de même luminosité que
celles de la Grande Ourse, c’est l’Étoile polaire !
Ainsi, si une monture équatoriale possède bien deux axes qui permettent de se
déplacer vers n’importe quel point de la Sphère céleste, seul l’axe horaire suffit pour
contrebalancer les effets de la rotation de la Terre. Un raffinement consiste à motoriser cet
axe : il suffit alors de brancher l’alimentation du moteur et, pour autant que la mise en station
ait été réalisée avec suffisamment de soin, l’astre observé ne quittera plus le champ de
l’oculaire ! Notez que si la motorisation ajoute un confort d’observation certain, elle ne
constitue absolument pas une nécessité : seules les personnes désireuses de réaliser de la
photographie au foyer ou à l’oculaire de l’instrument doivent impérativement passer à la
motorisation.
Il est aussi possible de motoriser le second axe de la monture (l’axe dit de
déclinaison), mais ici, cela devient vraiment du luxe, sauf si vous projetez de réaliser de très
longues poses photo, sur des nébuleuses par exemple : il faut alors en effet pallier les
imprécisions de la mise en station par de petites corrections régulières sur la déclinaison. Mais
ce genre d’activités demande des montures de très haute qualité, et n’est pas à la portée de
l’amateur débutant ! Chaque chose en son temps !
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Il existe différents types de montures équatoriales ; je ne parlerai ici que des plus
classiques : la monture équatoriale allemande et la monture équatoriale à fourche. Chacune
possède ses avantages et ses défauts, ses défenseurs inconditionnels et ses détracteurs.
La monture allemande
est assez compacte (ce qui est
toujours appréciable, tant pour
la facilité de transport que pour
la faible prise au vent par
exemple), et permet souvent
d’accueillir un viseur polaire.
Ce type de monture requiert
l’utilisation d’un contre poids
pour équilibrer l’instrument.
De plus, si le télescope est de
type Newton (c’est souvent le
cas !), la position du porteoculaire peut changer du tout
au tout selon l’endroit du ciel
Télescope sur monture équatoriale allemande.
qui est visé, ce qui demande
parfois un peu de gymnastique pour s’y retrouver !
La monture à fourche est très commune sur les télescopes compacts comme les
Schmidt-Cassegrain par exemple : cette monture est très simple et très agréable à manipuler ;
mais finalement tout cela n’est qu’affaire de goût et d’habitude ! Malheureusement, la
monture à fourche peut devenir
rapidement volumineuse (et très
massive !) pour de gros télescopes,
ce qui nuit à la transportabilité. De
plus, repérer un objet dans la
région du Pôle est une gageure !
Quant aux viseurs polaires, ils ne
sont pas légion sur ce type de
monture.
Télescope sur monture équatoriale à fourche.
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Récemment, l’introduction
de l’électronique sur les montures
a littéralement révolutionné le
monde de l’astronomie amateur.
Ainsi, il est désormais possible de
trouver, pour des prix qui
deviennent
peu
à
peu
« raisonnables », des instruments
sur monture altazimutale pilotés électroniquement, capables de suivre en mode totalement
automatique le mouvement de n’importe quel astre du ciel ! Ce type d’instrument est même
capable de trouver tout seul un objet qui lui est demandé ! Mais si toutes ces avancées peuvent
paraître spectaculaires, l’astrophotographe désireux d’immortaliser une galaxie situé à des
millions d’années-lumière s’en tiendra à la bonne vieille monture équatoriale, pour des raisons
dont nous reparlerons dans un prochain article !
Francesco Lo Bue (UMH)
Lever de la constellation d’Orion (et de son reflet !). La photographie à longue
pose montre clairement qu’un simple mouvement en altitude ou en azimut ne suffit
pas à suivre le mouvement apparent des étoiles.
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