Les indications de la surrénalectomie lors de la

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Progrès en Urologie (2005), 15 1049-1050
Les indications de la surrenalectomie au cours de la nephrectomie
elargie pour cancer
Jean-Dominique DOUBLET
I. INCIDENCE DE L’ATTEINTE DE LA
GLANDE SURRÉNALE DANS LE CANCER
DU REIN
Globalement, l’atteinte surrénale au cours d’un cancer du
rein est un facteur de mauvais pronostic, en grande partie en
raison de son association fréquente avec d’autres métastases
(Niveau III-3).
La glande surrénale peut être atteinte soit par contiguïté, soit par
processus métastatique. La fréquence de l’atteinte synchrone de
la surrénale homolatérale chez un patient porteur d’un cancer du
rein est comprise entre 2,7 et 7,1% des cas dans les grandes
séries (plus de 150 patients) rapportées depuis 2000. Cependant,
les atteintes de la surrénale sont le plus souvent associées à
d’autres métastases. Dans une série de 648 patients opérés par
néphrectomie élargie avec surrénalectomie systématique, Kuczyk et al. [2] rapportent 48 cas de métastases surrénales (7,4%),
mais seulement 13 étaient isolées (2%). Siemer et al. [4] ont
publié des résultats équivalents. Sur 1010 patients, 56 patients
avaient une métastase surrénale (5,5%), mais seulement 18
d’entre eux avaient une métastase surrénale isolée (1,8%).
Le rôle de la surrénalectomie dans le traitement du cancer rénal
avec métastase surrénalienne est discuté. Pourtant dans l’étude
de Kuczyk et al [2], les taux de survie globale des patients porteurs d’une métastase surrénalienne unique réséquée était de
51% à 5 ans et 51% à 10 ans, comparables à ceux des patients
sans atteinte ganglionnaire ni métastase (66% à 5 ans et 50% à
10 ans).
La métastase surrénale isolée est donc un événement rare
(environ 2%) (Niveau III-3)
Dans 2/3 des cas environ, les métastases surrénales sont associées à d’autres localisations (Niveau III-3)
La surrénalectomie en cas de métastase surrénalienne isolée
pourrait améliorer le pronostic (Niveau IV).
III. FACTEURS DE RISQUES ASSOCIÉS AVEC
L’ATTEINTE SURRÉNALE
Les facteurs de risques de l’atteinte surrénale sont :
•
Le stade tumoral : Les tumeurs de stade supérieur à pT2
exposent à un risque plus élevé d’envahissement de la surrénale. Dans la série de Moudouni et al [3], les taux de métastases surrénaliennes dans les tumeurs pT1-2 et dans les
tumeurs pT3-4 étaient respectivement de 0,9% et 13,4%. Ces
données sont également retrouvées dans la série de DeSio et
al [1], dans laquelle les taux respectifs étaient de 1,3% et
6,4%. Dans la série de Yokohama et al, les taux respectifs
étaient de 0,5% et 13%, et dans celle de Siemer et al de 1,8%
et 11% [4].
•
Le site tumoral : Moudouni et al [3] ont rapporté que les
tumeurs du pôle supérieur étaient responsables de 53% des
métastases surrénales observées dans la série. Dans la série
de Yokohama, 3 des 4 tumeurs responsables de métastases
surrénales ipsilatérales étaient des tumeurs du pôle supérieur, toutes de stade pT3-4. Cependant, dans la série de Siemer, la localisation tumorale n’apparaît pas comme un facteur de risque de métastase surrénale. Pour les tumeurs du
pôle supérieur, de la partie moyenne, ou du pôle inférieur, le
risque de métastase respectif est de 4,7%, 3,2% et 3,7%. En
revanche, en cas de tumeur diffuse, le risque est de 10,4%.
II. SIGNIFICATION PRONOSTIQUE DE L’ATTEINTE DE LA SURRÉNALE
L’envahissement de la glande surrénale est un facteur de mauvais pronostic. Dans la classification TNM 2002, l’atteinte de la
glande surrénale amène à classer la tumeur pT3a. Cependant
plusieurs séries récentes ont montré que l’envahissement de la
surrénale était associé à une survie comparable à celles des
patients atteints d’une tumeur pT4, moins bonne que celle observée chez les patients atteints d’une tumeur de stade pT3 par
atteinte de la graisse péri-rénale sans envahissement de la surrénale [5]. Le caractère péjoratif de l’envahissement surrénalien
est cependant lié à son association fréquente avec un envahissement ganglionnaire, pluri-métastatique ou avec la présence
d’une composante sarcomatoide dans la tumeur rénale [5]. Dans
l’étude de Siemer [4], la survie spécifique à 5 ans des patients
porteurs d’une métastase surrénale isolée ou d’une métastase
surrénale associée à d’autres localisations était respectivement
de 61% et 20%.
La taille de la tumeur, son type histologique n’apparaissent pas
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comme des facteurs de risque indépendants (Moudouni, Yokohama).
Le risque de métastase surrénale est augmenté pour les
tumeurs de stade pT3 ou pT4. La taille de la tumeur, son
type histologique, sa localisation dans le rein n’apparaissent
pas comme des facteurs de risque indépendants. (Niveau
III-3)
IV. DIAGNOSTIC PRÉ-OPÉRATOIRE DE
L’ATTEINTE SURRÉNALE
Le diagnostic pré-opératoire de métastase surrénale repose sur
le scanner.
RÉFÉRENCES
1.
DE SIO M, AUTORINO R, DI LORENZO G, DAMIANO R, COSENTINO L, De Placido S, D'Armiento M. Adrenalectomy: defining its role in the
surgical treatment of renal cell carcinoma. Urol Int. 2003;71:361-7.
2.
KUCZYK M, WEGENER G, JONAS U. The therapeutic value of adrenalectomy in case of solitary metastatic spread originating from primary renal
cell cancer. Eur Urol. 2005;48:252-7.
3.
MOUDOUNI SM, EN-NIA I, MANUNTA A, GUILLE F, LOBEL B. Factors influencing adrenal metastasis in renal cell carcinoma. Int Urol
Nephrol. 2003;35:141-7.
4.
SIEMER S, LEHMANN J, KAMRADT J, LOCH T, REMBERGER K,
HUMKE U, ZIEGLER M, STOCKLE M. Adrenal metastases in 1635
patients with renal cell carcinoma: outcome and indication for adrenalectomy. J Urol. 2004;171:2155-9.
5.
THOMPSON RH, CHEVILLE JC, LOHSE CM, WEBSTER WS, ZINCKE H, KWON ED, FRANK I, BLUTE ML, LEIBOVICH BC. Reclassification of patients with pT3 and pT4 renal cell carcinoma improves prognostic accuracy. Cancer. 2005;104:53-60.
Dans la série de Yokohama, les 7 /247 métastases surrénales ont
été diagnostiquées sur le scanner pré-opératoire, et aucun des
240 patients indemnes de métastase n’avait d’anomalie sur le
scanner (VPP : 100% - VPN 100%). Dans le série de Siemer et
al [4], 23% de faux négatifs ont été observés. Dans la série de
Moudouni et al [3], la spécificité du scanner était de 97.7% , la
valeur prédictive négative était de 98.4%, la sensibilité était de
87% et la valeur prédictive positive était de 80%. Dans la série
de 201 néphrectomies avec surrénalectomie publiée par DeSio
et al [1], le taux d’envahissement surrénalien était de 4,4%. La
sensibilité du scanner était de 88,8%, la spécificité de 92,1%, la
valeur prédictive négative de 99,4% et la valeur prédictive positive de 34,7%.
La valeur prédictive négative du scanner pour le diagnostic de
métastase surrénale au cours des cancers du rein est de l’ordre
de 99%. Une surrénale normale au scanner peut être laissée en
place lors de la néphrectomie. (Niveau III-3)
La place du PET scan doit être précisée par des études (SOR
2003Recommandations pour la pratique clinique :Standards,
Options et Recommandations 2003 pour l’utilisation de la
tomographie par émission de positons au [18F]-FDG (TEPFDG) en cancérologie.
Indications de la surrénalectomie lors de la néphrectomie
élargie
L’intérêt de la surrénalectomie est essentiellement pronostique. Elles est recommandée dans les cas suivants :
•
anomalie morphologique de la surrénale sur le scanner
préopératoire ou à l’exploration peropératoire
•
tumeur de stade T3 – T4 quelle que soit sa topographie
Il n’y a pas d’argument pour recommander la surrénalectomie systématique dans les tumeurs T1-2 y compris au niveau
du pôle supérieur du rein.
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