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UFR LETTRES et SCIENCES HUMAINES
Département de Géographie
D. MOURALIS - LGO 39B2 : « Outils & méthodes et géographie des environnements »
Session d’examens de janvier 2010
SUJET : (Epreuve de 3 h ) :
Faites le commentaire géomorphologique du secteur du Val du Fier (documents joints), en
répondant aux questions suivantes.
ATTENTION : nous proposons ici une correction complète, afin que les étudiants puissent
comprendre précisément le raisonnement du commentaire géomorphologique (cf. notamment
questions 7 et 8).
Mais un tel niveau de précision et d’analyse n’était pas attendu dans les copies.
Il était cependant important que les étudiants emploient le vocabulaire de la géomorphologie, dont les
principaux termes sont soulignés.
Description topographique (5 points)
-1- Localisez et décrivez le secteur couvert par l’extrait de la carte topographique ci-joint.
Le secteur étudié est situé en Savoie à la confluence du Rhône et d’un des ses petits affluents de rive
droite, le Fiers.
L’essentiel de la carte présente : (1) un chaînon orienté N-S ; (2) traversé en gorge par le Fier et
dominant : (3) un relief collinéen ainsi que (4) la vallée du Rhône.
(1) Le chaînon correspond à une moyenne montagne boisée. Il peut être subdivisé en deux
parties, de part et d’autre des gorges du Fier. Au nord la Montagne des Princes culmine à 942
m à proximité de Moret. Au Sud, la Montagne du Gros Foug culmine à 1053 m au N-O du
Bois de Lornay. Les versants dominent de près de 400 à 500 m les unités décrites ci-dessous.
(2) Le Fier découpe ce chaînon en deux parties. Il s’agit d’un « torrent », au chenal unique et
présentant quelques méandres, orienté d’abord SE-NO, puis E-W dans sa traversée du
chaînon. A l’est de ce dernier, il est encaissé d’une centaine de mètres par rapport aux
sommets des interfluves collinéens (cf. à proximité du chef lieu de Lornay).
La traversé du chaînon se fait par une gorge profondément incisée puisque le Fier coule à
environ 300 m d’altitude, c'est-à-dire plus de 600 m sous les sommets des montagnes des
Princes ou du Gros Foug. Les versants de cette gorge sont escarpés par de nombreuses
corniches.
(3) Le relief collinéen s’étend au nord et l’est du chaînon et s’emble se poursuivre en rive droite
du Rhône (extrémité ouest de la carte), et dont les altitudes des interfluves sont généralement
inférieures à 600 m.
(4) La vallée du Rhône n’apparaît qu’à l’extrémité occidentale de l’extrait proposé ici et montre
une vallée profondément aménagée.
-2- Dégagez le(s) problème(s) soulevé(s) par cette description.
Le problème principal posé par cet extrait est celui de la gorge du Fier : comment expliquer
que ce petit torrent traverse perpendiculairement le chaînon (alors qu’il semblerait possible
que le cours d’eau passe plus au nord, au-delà du chaînon) ?
D’autre part, l’étude qui suit permettra d’expliquer les morphologies présentée dans les unités 1 et 3 :
comment expliquer l’origine du chaînon et du relief collinéen ?
Analyse structurale (7 points)
-3- A partir de l’extrait de la carte géologique et de la légende ci-joints, faites l’analyse
stratigraphique…
L’extrait de la carte géologique et sa légende présente une série sédimentaire essentiellement marine
à la base, à l’exception du Purbeckien –j9p- lacustre, puis lacustre et détritique au sommet, à partir de
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l’Eocène. Cette série montre des roches du Lias (Aalénien) au Miocène (Helvétien-Burdigalien). Elle
est continue de l’Aalénien (l6) à l’Albien (c1). Puis, la légende montre trois lacunes de sédimentation :
(1) lacune de la base du Crétacé supérieur (Cénomanien et Turonien) puisque la sédimentation
reprend au Sénonien (c6-7) ;
(2) lacune du Paléocène ; la sédimentation reprend à l’Eocène ;
(3) lacune de l’Oligocène inférieur et reprise de la sédimentation à l’Oligocène moyen jusqu’au
Miocène inférieur (Aquitanien-Burdigalien, m1b2a).
D’après l’extrait de la carte géologique, seules les lacunes (2) et (3) correspondent à des
discordances :
(2) Au sud-ouest de St-André-Val-de-Fier, à l’entrée de la gorge, on observe une « pastille » de
l’Eocène (e), repose en discordance, à la fois sur l’Hauterivien (n3) et le Valanginien (n2),
alors que dans la gorge du Val-de-Fier, ce même Eocène repose à la fois sur le Portlandien
(j9) et le Kimméridgien supérieur (j8b).
(3) Plus au nord, sur le flanc est de la Montagne des Princes, l’Oligocène supérieur (g3) repose
en discordance à la fois sur l’Eocène (e) et le Barrémien-Aptien (n4-5).
Ces deux lacunes et discordances témoignent de l’émersion probable du chaînon au
Paléocène et à l’Oligocène, en relation avec de premiers mouvements tectoniques.
NB : d’épaisses moraines recouvrent une grande partie de la carte ainsi que les flancs du chaînon.
Cependant, il s’agit de formations superficielles, par nature discordantes sur le substrat sédimentaire.
-4- … lithologique…
La série sédimentaire présente des contrastes de résistance : d’après la notice géologique, on peut
observer 3 binômes de résistance (de la base au sommet) :
(1) De l’Oxfordien supérieur (j6) au Portlandien (j9), plus de 350 de roches « dures »,
essentiellement calcaires reposent sur les marno-calcaires et marnes de l’Oxfordien inférieur
(j4-5) d’environ 80 m d’épaisseur.
(2) Le Valanginien (n2) de 50 à 80 m d’épaisseur est formé de roches « dures », calcaires,
reposant sur des roches moins résistantes du Berriasien (n1b) et du Purbeckien (j9p),
marneuses et argileuses (parfois calcaires cependant).
(3) Les roches du Barrémien-Aptien (n4-5) jusqu’à l’Oligocène supérieur (g3) forme un ensemble
globalement résistant (principalement calcaires, grès conglomérats) de plus de 200 à 300 m
d’épaisseur reposant sur les 50 à 80 m d’argiles de l’Hauterivien (n3).
Au total, la série est faiblement contrastée : les roches « dures » sont beaucoup plus épaisses
que les roches « tendres », expliquant l’aspect massif du chaînon, armé en particulier par les
calcaires massif du Barrémien-Aptien à faciès urgonien.
-5- … et tectonique (en vous aidant de la coupe du doc. 4).
Les coupes géologiques ainsi que la disposition des couches sur l’extrait de la carte géologique
indiquent que :
- La structure est plissée ;
- Le chaînon est un anticlinal.
Les coupes ne sont pas assez étendues pour indiquer le style tectonique à l’ouest et à l’est du
chaînon : tectonique monoclinale ou, plus probablement présence de synclinaux ?
Analyse géomorphologique (8 points)
-6- Définir les morphologies apparaissant sur la coupe
Le chaînon de la Montagne des Princes et du Gros Foug est un anticlinal : le relief est donc conforme
à la structure.
Deux formes principales méritent d’être définies :
- Les deux coupes (doc. 4 et 5) indiquent que le chaînon est un anticlinal : il s’agit donc d’un
mont qui peut être qualifié de dérivé, puisqu’une partie des roches qui le forment a été érodé.
- La gorge du Val-de-Fiers qui entaille ce mont dérivé est donc une cluse.
-7- Discutez le tracé du Fier, proposez des éléments d’explication.
Le tracé du Fiers est inadapté à la structure qu’il recoupe perpendiculairement. Deux explications
peuvent être avancées : (1) antécédence ou (2) surimposition.
(1) A priori, l’antécédence est une hypothèse rarement avancée pour un petit torrent comme le
Fier. Cependant, l’Eocène qui apparaît sur le versant sud de la gorge au niveau du « chemin
des mulets » indique que dès cette époque le secteur de la cluse était déjà fortement entaillé.
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(2) L’autre hypothèse, est la surimposition sur une surface (2.1) d’aplanissement ou (2.2)
d’accumulation :
(2.1) comme il n’y a pas de trace d’aplanissement sur la carte, cette hypothèse ne mérite pas
d’être discutée ;
(2.2) en revanche la surimposition sur une surface d’accumulation peut être envisagée :
(2.2.1) – sur une surface d’accumulation formée par la molasse ? Cependant la légende
nous indique qu’ « il n’existe pas de preuve que les anticlinaux aient été recouverts » par
la mollasse miocène.
(2.2.2) – sur une surface d’accumulation formée par les dépôts glaciaires (moraines
quaternaires) ? La figure 5 suggère une telle solution, présentant des dépôts fluvio-
glaciaires (a1gl) au sommet de la Montagne des Princes. Cette disposition suggère qu’un
écoulement aurait eu lieu au sommet de l’anticlinal au cours du Quaternaire.
Cependant cette hypothèse n’est pas reprise sur les documents ultérieurs (coupe du
document 4 ou carte géologique).
Au total c’est donc l’hypothèse (1), antécédence du Fier par rapport aux mouvements tectoniques qui
doit être le plus vraisemblablement retenue.
-8- A partir des éléments dont vous disposez et de vos connaissances, retracez l’histoire
géomorphologique de la région.
Les analyses qui précèdent permettent de reconstituer l’histoire morphologique de la région :
(1) Sédimentation marine au cours du Jurassique avec cependant un début d’émersion à la fin du
Jurassique qui montre une sédimentation lacustre (Purbeckien) avant que la sédimentation
redevienne marine au cours du Crétacé.
(2) La lacune du début du Tertiaire (Paléocène) et la discordance associée de l’Eocène, témoigne
des premiers mouvements tectoniques responsables de la formation de l’anticlinal de la
Montagne des Princes et du Gros Foug.
Dans le même temps, cet anticlinal est érodé par le Fier qui commence à creuser la cluse,
comme l’indique l’affleurement de l’Eocène (cf. ci-dessus discussion de la question 7). Il va
continuer à creuse sa cluse tout au long des phases suivantes.
(3) La lacune de l’Oligocène inférieur et la discordance associée témoigne de nouveaux
mouvements tectoniques qui concernent l’anticlinal de la Montagne des Princes et du Gros
Foug et probablement d’autres anticlinaux dans la région.
Les conglomérats et grès (roches détritiques) de l’Oligocène témoignent, là encore, de
l’érosion de ces anticlinaux.
(4) Les mollasses de l’Aquitanien et de l’Helvétien-Burdigalien qui peuvent atteindre jusqu’à 500
m d’épaisseur totale témoignent de l’érosion des reliefs qui apparaissent dans les Alpes au
cours du début du Tertiaire (phase 2 et 3 ci-dessus).
(5) Enfin, au cours du Quaternaire, les glaciers du Rhône et de ses affluents recouvrent une
grande partie de la région (y compris le sommet de l’anticlinal de la Montagne des Princes et
du Gros Foug ?).
(6) Le relief de collinéen qui apparaît sur une grande partie de la carte, au nord et à l’est du
chaînon est donc un relief de dissection correspondant à l’incision de ces moraines
postérieurement au retrait des glaciers.
NB : Âge de l’anticlinal : on note dans ce qui précède que l’anticlinal a été formé lors de deux phases
tectoniques (au moins) : au cours du Paléocène et à l’Oligocène.
On sait, par ailleurs, que le paroxysme de l’orogénèse alpine est postérieur puisqu’il date du
Messinien-Pontien (fin du Miocène). Ce paroxysme peut-il s’observer ici ?
- Oui, si on se réfère à la coupe n°5 qui montre que la molasse du Miocène est déformée par la
tectonique ; ce qui signifie que des mouvements ont eu lieu après son dépôt…
- En revanche, les études plus récentes (doc. 4) que cette molasse n’est pas déformée : les
derniers mouvements tectoniques responsable de la formation de l’anticlinal sont antérieurs.
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