Handicap. Le numérique à la rescousse

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15. Lorient. Actus
Jeudi 16 mai 2013 Le Télégramme
Handicap. Le numérique à la rescousse
Ils bricolent des
souris adaptées à
une main
défaillante ou
imaginent une
réalité virtuelle
support de
rééducation.
Au laboratoire
électronique de
Kerpape, la
technologie n’a
qu’un but :
faciliter le
quotidien des
patients à leur
sortie.
Jean-Paul Departe, ingénieur au
laboratoire électronique de Kerpape, interviendra au Camp’Tic
aujourd’hui sur le thème « Handicap et numérique ».
On les présente généralement
comme les Géo Trouvetou de
Kerpape, génies bricoleurs,
capables de trésors d’invention
pour améliorer le quotidien des
personnes souffrant des handicaps les plus variés. Si on aperçoit bien un fer à souder, le
laboratoire électronique, seul
du genre en France à être intégré à un centre de rééducation,
a tout du repaire de maîtres de
la bidouille informatique.
« En 30 ans, la technologie a
énormément progressé et
ouvert de nombreuses portes.
Quand j’ai commencé ici, en
1982, la domotique n’existait
pas. Aujourd’hui, on trouve des
fauteuils électriques qui non
seulement vous permettent de
vous déplacer, mais sont des
centres de pilotage domotique
à distance, d’où vous réglez la
lumière, ouvrez les volets…
On n’a jamais eu autant de possibilités ».
Gagner en autonomie
L’ingénieur Jean-Paul Departe
incarne l’enthousiasme qui
règne dans la petite équipe du
labo. Leur mission : mettre au
point du matériel et des solutions permettant d’augmenter
l’autonomie des personnes en
situation de handicap. Leur
champ d’action : l’adaptation
Camp’TIC :
la journée va faire le plein
La 4e édition du Camp Tic, organisé avec l’association Défi, abordera aujourd’hui l’apport des technologies numériques dans la prise en charge du handicap.
Cette thématique est une véritable réussite, puisqu’hier soir, seule une petite poignée des 180 places ouvertes était encore disponible. « On a de tout : des professionnels du handicap, des associatifs, retraités, même un prof
qui vient avec quatorze de ses
étudiants », se félicitaient hier
les organisateurs.
Le programme du jour
9 h 15 : « numérique et l’inclusion sociale ».
9 h 45 : « un serious game vidéo
pour aborder autrement la question du handicap au travail ».
10 h 15 : « sourds et TIC visuelles : pouvoir d’agir et innovation ».
11 h 15 : les outils adaptés aux
personnes handicapées physiques ; puis les Fablabs (laboratoire de fabrication) et la fabrication numérique.
De 12 h 30 à 16 h 30 : forum
avec Fab Lab dans le hall d’accueil et une dizaine de stands
(ateliers, démos, associations,
tables rondes).
14 h 15 : présentation de l’expérience de l’Espace de mobilisation professionnelle précoce de
Kerpape (lire par ailleurs).
14 h 40 : conférence sur l’insertion des personnes en situation
de handicap mental à travers
l’utilisation d’une tablette tactile,
puis sur l’autisme et Ipad ou comment apprendre autrement.
15 h 40 : conférence sur l’accueil,
l’accessibilité et l’accompagnement des non-voyants, suivie
d’un témoignage non-voyant et
numérique.
16 h 40 : restitution de la journée
par une comédienne Odila Presulme (théâtre des Murmures).
> Pratique
Journée Camp’TIC
aujourd’hui à l’espace
Jean-Vilar à Lanester.
Entrée libre en fonction des
places disponibles.
Vous avez un smartphone ?
Téléchargez l’application
« Le Télégramme »
des commandes de fauteuils
électriques, l’accès à l’ordinateur, la domotique, et la synthèse vocale (parole artificielle).
Un exemple de leurs réalisations ? Sibylle, programme de
synthèse vocale développé en
partenariat avec l’UBS. Une
webcam postée sur un écran
reconnaît le visage de l’utilisateur, et en fonction de ses mouvements, fait bouger la souris
à l’écran, sur un clavier intuitif
et des icônes représentant
diverses
expressions.
Le
patient, à partir des seuls mouvements de son visage, peut
piloter l’ordinateur ; qui formule, via la synthèse vocale, ses
pensées.
Réalité virtuelle
Pour chaque cas, chaque
besoin, une solution personnalisée est conçue en association
avec le patient et l’équipe d’ergothérapeutes. « Le but est de
trouver une solution qui tienne
également compte des évolutions possibles de la pathologie, et donc qui soit pérenne le
plus longtemps possible », précise Jean-Paul Departe.
Parmi ses sujets de recherches
actuels, figure notamment la
réalité virtuelle. « Le projet
s’appelle Agathe, et s’adresse
aux patients victimes de
lésions cérébrales, qui ont du
mal à refaire des activités a
priori faciles ». Le but d’Agathe est de les mettre en scène
pour les faire travailler.
« On plonge le patient dans
une forme de simulation, où il
doit par exemple aller poster
une lettre, avec des possibilités
de difficulté croissante. Le
patient reproduit virtuellement
toutes les étapes, et le programme enregistre toute une suite
de données qui vont permettre
de graduer ses difficultés et ses
progrès. C’est un outil complémentaire au travail réalisé avec
l’ergothérapeute », explique
Jean-Paul Departe.
« Accepter la machine »
Agathe, fruit de trois ans de
travail et de multiples collaborations avec l’Agence nationale de recherche, devrait être
rapidement commercialisée.
Suivra ensuite Robo K, sorte
de harnais supporté par une
machine, qui doit faciliter le
retour à la marche.
Pour chaque appareillage de
ce type, une équipe de psychologues évalue l’« acceptabilité » du dispositif par le
patient. Car ici, science et
conscience doivent rimer harmonieusement.
Pierre Chapin
Réinsertion : se former un nouvel avenir
La formation à
distance pour
préparer le retour à
la vie : tel est le
credo, toujours
novateur, de
l’Espace de
mobilisation
professionnelle
précoce de
Kerpape.
La formation à distance, délivrée au sein de l’Espace de mobilisation professionnelle précoce de Kerpape, permet de
redonner un horizon à des patients souvent lourdement handicapés.
« Comment envisager l’avenir,
quand, à 25 ans et alors qu’on
est en cinquième année d’études,
on apprend qu’on sera handicapé
à vie ? ». Telle est, de manière
un peu brutale, une question qui
se pose régulièrement dans les
couloirs du centre de Kerpape. Et
qui a justifié la création de
l’EMPP (Espace de mobilisation
professionnelle) il y a treize ans.
« Ici, on s’est toujours préoccupé
de l’après Kerpape, et de la sortie », rappelle Hélène Stéphan,
responsable du service de réadaptation et d’insertion professionnelle à Kerpape. « Quand on est
confronté à la nouvelle du handicap, on estime qu’il faut tout de
suite offrir des capacités à se projeter, ouvrir un champ des possibles ». Et le travail, qu’on le
veuille ou non, demeure l’un des
piliers de l’intégration dans nos
sociétés. « La formation permet
de se remobiliser, d’avoir un nouvel horizon professionnel. Et
offrir ces possibilités dès le
départ peut modifier tout le parcours de réadaptation ».
Tutorat synchrone
Pour ce faire, l’EMPP mise sur la
formation à distance, dans des
domaines aussi divers que la
bureautique, l’électricité, certains
métiers du bâtiment, ou encore
la domotique. Certains cours
sont dispensés sur des plateformes internet, ou avec des ressources documentaires disponibles
sur place. D’autres demandent la
mise en place d’un tutorat synchrone, c’est-à-dire un cours particulier, via écran et micro interposés, par un prof du Greta de
Lorient ou de Lannion.
« Chaque formation qu’on propose a été, au départ, mise en place
pour répondre à un besoin précis.
Et on essaie toujours de mettre
en place une solution sur-mesure
pour le patient », assure David
Valy, coordinateur de l’EMPP.
Un nouvel avenir
Chaque année, une grosse cinquantaine de patients bénéficient
de ce dispositif, pour quelque
3.600 heures de formation à distance. Le modèle, unique en France à sa création, a fait des petits
à Rennes et Berck. Et permis à
des dizaines de patients de redonner un sens à leur rééducation,
voire conserver leur emploi ou se
réorienter professionnellement,
avec succès.
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